Archives de catégorie : Expressions

>La maladie mentale

 

 

L'usage intempestif de la psychologie ressemble de plus en plus visiblement à une gigantesque prise d'otage, parfois même réciproque. Au moindre fait divers, on fait appel immédiatement aux "ex-pères" des cellules psys ! Qui sert à qui et à quoi?


Armés du mythe scientifique, nous avons cru devoir chercher les causes des comportements pour pouvoir, en les supprimant, délivrer ceux à qui ils avaient échappé. On les cherche encore, ces fameuses causes, car elles sont des myriades. Elles appartiennent la plupart du temps au passé révolu et sont emberlificotées en boucles rétroactives. Ce n'est en effet pas parce qu'on dort mal qu'on vit mal, mais parce qu'on vit mal qu'on dort mal ! On a essayé de regrouper toutes les formes de comportements en catégories, appelées "maladies", comme si on avait voulu faire entrer les gens, tous différents, dans trois ou quatre costumes "prêts" à porter. 800 diagnostics psychiatriques pour quatre type de traitements, et 6 milliards d'êtres humains !

 

Le mythe scientifique tend à faire croire que les diagnostics médicaux sont une "réalité", voire "la" réalité, scientifiquement établie. On a oublié depuis longtemps dans toutes les sciences du vivant que la causalité est en sciences exactes une méthode et pas un but. Le but des sciences est de devenir efficace en découvrant les lois de la nature. Le bon usage des sciences est d'ordre moral.

 

La seule vérité observable est celle de la biodiversité, une complexité infinie. Si on peut visiblement ne pas confondre un Congolais d'un suédois, il y a des Suédois noirs de cheveux et des Congolais blancs. Dans l'histoire, il y a eu des individus de tous types psychologiques qui sont, "néanmoins", devenus de grands sages, de grands saints, de grands artistes et de grands scientifiques. Dans les traditions, on relie d'ailleurs le concept de maladie à ce qu'on appelle la conscience morbide, celle d'être malade. Ceux qui ne se sentent pas "malades" ne le sont donc pas ! Que d'autres que les médecins s'en occupent donc !

 

Si on observe les gens comme je le fais depuis 30 ans, aucun d'entre eux ne consulte spontanément pour "maladie" mais pour différents malaises dont ils voudraient être débarrassés.

 

Des schizophrènes patentés ne consultent que sous pression, car eux, ils ne se sentent pas "malades", par définition.

 

À travers le mythe scientifique, la médecine est insensiblement devenue un instrument de pouvoir, du pouvoir, répressive, normalisante ! Mais le but de la vie n'est pas de tout "normaliser".  Le but de la vie est de faire croître la biodiversité dans un processus où chaque élément est appelé à faire de ce qu'il a reçu comme héritage psychique, physique et environnemental une œuvre utile au service de la croissance de l'humanité.

 

Les diagnostics médicaux n'ont donc pas plus ni moins de réalité que les petits drapeaux nationaux que l'on agite frénétiquement lors des victoires d'équipes "nationales" de mercenaires poussés à l'engrais des écoles de sport-élites ! Ce qui caractérise ceux qui se reconnaissent eux-mêmes "malades mentaux" est soit leur naïveté soit leur intérêt. Eux-mêmes spontanément, comme chacun, ne se sentent pas autrement que "normaux", puisque ça leur est "naturel", habituel d'être comme ils le sont !

 

Vue du point de vue proposé par le modèle d'espace-temps en diabolo, la maladie mentale doit donc être considérée comme une fiction scientifique. Cette fiction est nécessaire en tant qu'outil, comme dans toute science même dite exacte. Cela ne signifie en effet rien dans la réalité que les astres s'attirent en fonction de leur masse et se repoussent en fonction du carré de la distance qui les sépare (Loi de Newton). C'est pratique de le considérer comme tel, et nécessaire de le simplifier ainsi pour être efficace. Pour chacun, le présent quel qu'il soit est le moins mauvais compromis entre tout ce qui lui est tombé dessus et la conservation de son potentiel évolutif. Le but de chacun ne peut être que celui d'être efficace, constructif quoi qu'il fasse.

 

En attendant de comprendre les lois qui régissent la nature humaine, les descriptions de la psychologie ont entre-temps comme autres avantages de permettre aux professionnels de s'entendre entre eux avec un minimum de mots à propos de ce dont ils parlent. De là à prétendre qu'il y aurait des "normaux", les "psys" sans doute, et des malades, ceux qui devraient fonctionner comme eux, il y une marge dangereuse à ne pas dépasser. 

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>Psychiatrie: autorisation de "soins" ambulatoires sous contrainte

 

(AFP) – Il y a 6 heures
 
 
PARIS — Il sera désormais possible de contraindre à des "soins psychiatriques" ambulatoires et plus seulement à l'hôpital selon une disposition du projet de loi sur l'hospitalisation sous contrainte votée mercredi par l'Assemblée, une réforme contestée par les professionnels.
 
L'Assemblée a introduit dans le code de la Santé publique la notion de "soins psychiatriques", ce qui a pour conséquence d'autoriser les soins ambulatoires sous contrainte, et non plus seulement l'hospitalisation.
 
A ceux, à droite comme à gauche, qui réclament une réforme globale, la secrétaire d'Etat à la Santé, Nora Berra a promis aux députés qu'un "plan santé mentale" serait annoncé à l'automne.
L'Assemblée a également adopté la disposition instaurant "une période d'observation et de soins" d'une durée de 72 heures, que les opposants au projet ont baptisé "garde à vue psychiatrique".
Les syndicats de psychiatres jugent cette réforme "sécuritaire".
 
Les députés ont également avalisé l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) au-delà de quinze jours d'une hospitalisation sous contrainte, une mesure imposée par le Conseil constitutionnel.
 
Le dispositif de suivi renforcé pour les cas les plus sensibles (personnes déclarées irresponsables pénalement ou ayant séjourné dans une "unité pour malades difficiles") a également été adopté.
Des députés UMP du collectif "Droite Populaire", dont Jean-Paul Garraud et Dominique Tian, ont tenté en vain de revenir sur une disposition introduite en commission et qui instaure "un droit à l'oubli", dont les contours seront définis en Conseil d'Etat. Le "Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire" qui s'oppose vivement à ce projet de loi estime que celui-ci crée "un casier psychiatrique".
 
"Des agressions de fous on en voit tous les jours", a fait valoir Dominique Tian. "Obscurantisme", a rétorqué à gauche Catherine Lemorton (PS).
 
Le projet de loi concerne quelque 70.000 personnes qui, chaque année, sont hospitalisées sous contrainte, soit à la demande d'un tiers (dit "HDT", 60.000 cas) ou d'office en cas d'atteinte "à la sûreté des personnes" ou "à l'ordre public" (dit "HO", 10.000 cas).
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>Réforme de la Psychiatrie : Une déraison d’Etat (Pétition)

 

Nouvel appel des 39 Contre la Nuit Sécuritaire

 

EXIGEONS le retrait de ce projet loi qui va organiser  le retour au "grand renfermement".

Masqué par une appellation toute séduisante : « Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge», il a été adopté au Conseil des Ministres du 26 janvier 2011, et va être débattu au Parlement au printemps.

 

 

Trente mille personnes ont signé avec nous l’Appel contre La Nuit Sécuritaire, lancé en réaction au discours du président de la République le 2 décembre 2008 qui assimilait la maladie mentale à une supposée dangerosité. À nouveau, le Collectif des 39* en appelle à l’ensemble des citoyens.

 

Ce discours promettait un traitement sécuritaire des malades mentaux.

 

Il a depuis largement pris corps dans la pratique quotidienne : les lieux de soins psychiatriques sont désormais truffés de caméras de surveillance et de chambres d’isolement, des grillages ont été disposés, des protocoles de neutralisation physique des patients ont vu le jour, les préfets empêchent les levées d’internements caducs.

 

Un projet de loi propose aujourd’hui un cadre juridique à cette dérive sécuritaire.

Adopté le 26 janvier 2011 en Conseil des Ministres, il sera discuté au Parlement le 15 mars après un simulacre de concertation.

 

– Dans un vocabulaire relevant du code pénal, il cautionne la défiance à l’égard de citoyens souffrants.

 

– Dans ce dispositif, seul le trouble à l’ordre public est pris en compte.

 

Il instaure un changement paradigmatique sans précédent : l’institution des « soins » sans consentement en ambulatoire.

 

En effet, le projet de loi n’identifie plus seulement l'hospitalisation comme contraignante, mais les soins eux-mêmes,à l’hôpital comme à l’extérieur, avec le risque majeur de la mise en place d’une surveillance sociale planifiée.

 

Ainsi, pour répondre à l’inquiétude légitime des patients et de leurs familles, ce projet de loi, sous couvert de déstigmatisation, va instituer une logique de dérive sécuritaire induisant un contrôle inédit de la population. Il s’appuie sur un principe de précaution inapproprié.

 

La mystification est totale :

Il ne s’agit pas d’un projet de soins, mais d’un engrenage portant atteinte aux libertés fondamentales dans un état démocratique.

 

Prétendant améliorer « l’accès aux soins » et leur « continuité », ce projet propose uniquement un accès à la contrainte sans limite de durée.Il détourne la fonction des soignants vers une orientation de dénonciation, de rétention, de « soins » sous contraintes et de surveillance.

 

Il impose aux patients d’accepter des « soins » stéréotypés, protocolisés, identiques pour tous. Ils seront sous surveillance, associée à un contrôle de leur dignité : ainsi se met en place une police de l’intime. Il instaure un fichier national, « un casier psychiatrique ? », de toute personne ayant été soumise ne serait-ce qu’une seule fois aux soins sans consentement.

 

Il institue un mensonge en laissant penser que seuls les médicaments psychotropes administrés sous contrainte suffisent à soigner les patients gravement atteints : enfermés chez eux, malgré eux.

 

Une partie des citoyens a été désignée à la vindicte médiatique. Le mot schizophrène, jeté à tort et à travers, en bafouant le secret médical, n’est plus un diagnostic mais une menace, qui accable les malades et leurs familles, effraie jusqu’à leur voisinage.

 

Penser que ce projet de loi va améliorer cette situation est une déraison d’Etat.

 

Bien plus, il risque de s’opposer frontalement à toute réforme sanitaire digne de ce nom, qui aurait pour principes élémentaires de reposer sur une fonction d’accueil, une logique ouverte et déségrégative, des thérapeutiques diversifiées centrées sur le lien relationnel et la confiance, dans la durée.

 

Ce projet va à l’encontre d’une politique de soins psychiatriques respectueuse des libertés, offrant une hospitalité pour la folie au cœur du lien social, qui allierait sécurité publique et soins à la personne.

 

Il institue la défiance envers les professionnels dans une démarche politique analogue à celle appliquée récemment aux magistrats et à la Justice, comme à d’autres professions.

 

Nous voulons que les budgets subventionnent des soins et non des aménagements carcéraux, la formation des personnels, des effectifs conséquents, pour une conception humaine de l’accueil de la souffrance.

 

Nous rejetons les réponses démagogiques qui amplifient délibérément l’émotion suscitée par des faits-divers dramatiques. Ces réponses ne font qu’accroître et entretenir la peur de l’autre.

 

– Nous voulons résister, nous opposer, avec une élaboration citoyenne de propositions pour une politique de soins psychiatriques au plus proche des réalités de terrain. La psychiatrie est l’affaire de tous.

Nous soignants, patients, familles, citoyens appelons au retrait immédiat de ce projet de loi.

 

SIGNER LA PETITION : https://www.collectifpsychiatrie.fr/phpPetitions/index.php?petition=8

 

* Le Collectif des 39 s'est constitué le 12 décembre 2008, autour de l'Appel contre La Nuit Sécuritaire signé depuis par près de 30.000 citoyens. Il réunit des professionnels de la psychiatrie tous statuts confondus (en grande majorité), et des personnes du monde de la Culture et des citoyens qui nous ont rejoints.

 

 

 

La liberté peut être aussi thérapeutique

 

La justice, les magistrats, les professionnels du monde judiciaire sont attaqués, dénoncés comme coupables des crimes commis, dénigrés, comme jamais. 

 

L’école, les enseignants, les parents tout autant. 

 

La psychiatrie, les fous, les malades mentaux, les professionnels des soins psychiatriques ne sont pas en reste. 

 

Depuis son arrivée au ministère de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse de mettre en œuvre son obsession : assimiler les malades mentaux à des délinquants. En février 2007, sous la pression de la mobilisation des professionnels, des associations de familles et d’usagers de la psychiatrie, il a retiré cette disposition de sa loi de Prévention de la Délinquance. En promettant qu’il y reviendrait ….

Ce fut chose faite avec son discours, prononcé le 2 décembre 2008 à l’hôpital Érasme d’Antony en tant que Président de la République. L’auteur de l’Éloge de la Folie qui a donné son nom à cet établissement psychiatrique a dû se retourner dans sa tombe. « Les malades mentaux sont, selon ce Président, potentiellement dangereux, voire criminels ». 

 

Depuis ce discours, le grand renfermement a commencé. Augmentation des chambres d’isolement, construction de murs, élévation des grillages, installation de caméras dans les hôpitaux et même dans certains services ! Un budget de 70 millions d’euros a été immédiatement débloqué uniquement pour ces équipements sécuritaires. Les moyens, pour les personnels soignants, pour l’amélioration des conditions d’accueil et de soins attendront.

 

Le pacte républicain qui soutient la séparation des pouvoirs, est rompu : les préfets discréditent les avis des psychiatres, décident contre leur avis.  Si l’hospitalisation protège le patient pour des soins, celle-ci devient un enfermement arbitraire quand le préfet refuse la sortie demandée par le psychiatre.

 

C’est dans ce contexte, dans ce climat délétère et morbide que nous est proposée une modification de la loi de 1990, avec un projet de loi qui donne un cadre juridique à cette dérive sécuritaire.

 

Masqué par une appellation toute séduisante :« Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge», il a été adoptée au Conseil des Ministres du 26  janvier 2011, et va être débattu au Parlement au printemps.

 

Ce texte s’inscrit dans le droit fil du projet sécuritaire de Nicolas Sarkozy. Explicitement énoncé dans l’exposé des motifs : 

 

« Divers événements dramatiques survenus ces derniers temps attestent de la nécessité, 

rappelée par le Président de la République, de mieux encadrer les sorties 

des établissements de santé et d’améliorer la surveillance de certains patients ».

 

Au sécuritaire, s’associent l’objectif strictement gestionnaire qui met le contenu des soins à l’arrière plan, et l’idéologie du principe de précaution appliquée en contre-point des risques encourus par tout un chacun.

 

Dans un vocabulaire relevant du code pénal, il cautionne la défiance  à l’égard de citoyens souffrants. Dans ce dispositif, seul le trouble à l’ordre public est pris en compte. 

 

Ce projet de loi s’inscrit dans une stratégie de communication qui s’appuie sur l’amalgame « fou – dangerosité », utilisant le désarroi des familles, et la peur dans l’opinion publique. Le recours désormais facile à la disqualification des professionnels, et notamment de ceux qui ont développé des logiques de soins ouvertes et déségrégatives,  est sous-jacent dans l’esprit de ce texte, organisé autour de la réduction des soins aux seuls traitements médicamenteux.

 

Le changement prévu par le gouvernement est une modification sans précédent, un bouleversement sociétal sous la parure d’une meilleure gestion de l’accès aux soins. 

 

Au cœur de ce dispositif, un changement paradigmatique sans  précédent : l’institution des « soins » sans consentement en ambulatoire

 

Depuis la loi de 1838,  l'hospitalisation seule pouvait faire l'objet d'une contrainte identifiant les soins à un lieu. Ce projet de loi n'identifie plus l'hospitalisation, mais les soins eux-mêmes à la contrainte, les réduisant à une pure surveillance. L'obligation prend le pas sur le contenu même du soin. Cette dérive vers la surveillance, le contrôle des patients penche dangereusement vers des choix totalitaires, des choix « contrôlitaires ». C'est un lourd tribut : le monde de la psychiatrie, la société française sont-ils prêts à s’y soumettre ? à le payer ? 

 

La mystification est totale : 

Il ne s’agit pas d’un projet de soins, mais d’un engrenage portant atteinte aux libertés fondamentales dans un état démocratique. 

 

Prétendant améliorer « l’accès aux soins » et leur « continuité »,  ce projet propose uniquement un accès à la contrainte sans limite de durée.

 

Il détourne la fonction des soignants vers une orientation de dénonciation, de  rétention, de « soins » sous contraintes et de surveillance.

 

Il impose aux patients d’accepter des « soins » stéréotypés, protocolisés, identiques pour tous. Ils seront sous surveillance, associée à un contrôle de leur dignité : ainsi se met en place une police de l’intime. Il instaure un fichier national, « un casier psychiatrique ? », de toute personne ayant été soumise ne serait-ce qu’une seule fois aux soins sans consentement.

 

Ce projet de loi concerne l’ensemble de la société, pas seulement les malades désignés comme dangereux. L’extension du domaine de la norme, – troubles du comportement, désordres psychiques, dangerosité, troubles affectifs -, fait qu’un tiers de la population  est considéré comme atteinte d’un « trouble psy ». Nous entrons dans l’ère de la « Police Sanitaire », avec en toile de fond la perspective du « bien-être mental pour tous », cette idéologie du  santémentalisme promu par quelques apprentis sorciers.

 

Ce projet de loi se soutient d’une vision simpliste, et s’appuie sur la peur dans l’opinion publique. Il détourne l’opinion en utilisant l’illusion, la tromperie, le  mensonge … et les menaces pour les libertés individuelles. 

  • Illusion pour les familles, qui confrontées à des difficultés majeures pour obtenir le soutien nécessaire et l’assurance de la continuité des soins pour leur proche, espèrent que cette loi va atténuer leur désarroi et leur solitude. Alors que seuls une amélioration de la formation, le développement de soins de proximité pourront permettre de tisser des liens, et pousser des équipes plus attentives et en nombre, à prendre en compte les attentes des familles.
  • Tromperie, car ce que laisse entendre ce projet de loi, c’est qu’une contrainte aux soins, une obligation de soins se réduit à des traitements médicamenteux imposés à domicile ou à l’hôpital. Alors que l’expérience nous apprend que ce n’est qu’au prix d’une disponibilité, d’un travail autour de la fonction d’accueil, s’appuyant sur le lien relationnel, l’établissement progressif d’une confiance réciproque, que la peur peut être atténuée et l’efficacité d’une thérapeutique patiente, longue et diversifiée être obtenue.
  • Mensonge car il s’agit de faire croire à l’opinion publique, qu’avec cette loi, le risque zéro sera possible.  Des dispositions sont prévues obligeant les soignants à dénoncer les manquements aux soins, brisant toute confiance thérapeutique possible, et provoquant  l’intervention de la force publique pour ré-interner un malade. Aveuglés par leur idéologie sécuritaire, les responsables de ce projet de loi ignorent que,  délaissés de toute relation soignante de confiance et acculés à la méfiance qui exacerbe leur sentiment de persécution, certains malades pourraient d’autant plus passer à l’acte.
  • Enfin, menaces sur les libertés individuelles des patients mais aussi quiconque potentiellement confronté à un désordre psychique, affectif, moral, généré par le contexte social, le travail, l’entourage. L’orientation de l’obligation de soins passe ainsi dans les mœurs, dans la banalité du ça va de soi. 

A l'encontre de toute démarche sanitaire, cette loi va devenir un abri "légal" pour la déresponsabilisation des soignants auprès des patients les plus en souffrance.

 

Faute d'améliorer  l’accès aux soins et leur continuité en instaurant un budget spécifique pour la psychiatrie, de corriger la pénurie des effectifs soignants, de transformer la formation de tous les personnels, ce projet propose un accès à la contrainte et une continuité de celle-ci. Il est certainement plus « économique » de contraindre que de créer les conditions dignes et humaines pour soigner.

 

Ce projet de loi esquisse une perspective de normalisation, d’uniformisation et de contrôle, par le biais d’un objectif d’une santé mentale plus proche d’une police sanitaire que respectant la singularité de chaque individu.

 

Mais aussi, il institue la défiance envers les professionnels dans une démarche politique analogue à celle appliquée récemment aux magistrats et à la Justice, comme à d’autres professions.

 

La complexité de la question que pose la folie, la maladie mentale dans la société, la nécessité de l’élaboration d’une politique de soins psychiatriques dignes et respectueux des libertés, qui prenne en compte les besoins des malades, les attentes des familles et le soutien aux professionnels de la psychiatrie, justifient la mise en œuvre d’une immense réflexion dans le pays, à l’échelon local, départemental, régional et national. 

 

Aux réponses démagogiques et précipitées à l’émotion suscitée par des faits divers dramatiques, réponses qui ne font qu’accroître et entretenir la peur de l’autre, nous voulons opposer l’élaboration citoyenne de propositions pour une politique de soins psychiatriques du XXIème siècle au plus proche des réalités de terrain. 


La psychiatrie est l’affaire de tous.

 

À la complexité de l’humain dont la folie est partie intégrante, il n’y a pas de réponses simplistes qui s’appuient sur un scientisme en expansion et des marchands d’illusion. 

 

Le poète nous éclaire avec ces quelques vers :

« Il n’y a pas de chemin, 

Le chemin se fait en marchant. » 

Antonio Machado. 

 

Pour construire ce chemin, à l’aune des enjeux fondamentaux de la démocratie, citoyens, usagers, familles, professionnels, nous voulons une toute autre démarche que celle qui nous est proposée.

 

Nous rejetons totalement ce projet de loi. Nous nous engageons à tout mettre en œuvre pour cette seule exigence, son retrait.

 

 

Le collectif des 39, le 20 février 2011.

 

 



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>Semaine de la folie ordinaire à Reims

Après La Locomotive, un Groupe d’Entraide Mutuel de Reims, les “V.I.P. en psy” de Grenoble ( “Voix Iséroises de Patients en psy), et les adhérents, patients et soignants, de la Radio Citron de Paris, voici un nouveau collectif à Reims, une ville où ça bouge décidément, qui se manifeste contre le projet de loi sur les soins sans consentement.

Après l’appel à la grève des quatre syndicats de psychiatres hospitaliers pour le mardi 15 mars, premier jour d’examen du projet de loi à l’Assemblée Nationale, les professionnels ont opposé un refus unanime de participer aux groupes de travail proposés par le ministère de la Santé pour préparer les futurs décrets d’applica- tion de la loi sur les soins sans consentement en psychiatrie, selon une dépêche A.P.M. du 2 mars 2011.

 

Il ne va plus y avoir grand monde pour soutenir ce projet de loi, tant l’opposition s’amplifie, avec l’expression de plus en plus forte et nouvelle des associations de patients eux mêmes.

 

Avec en prime des expos, des initiatives culturelles, des débats, comme par exemple le propose ce Collectif de Reims, du 15 au 19 mars.

 

Mais aussi, nous y reviendrons, avec cet événement inédit, à Paris dans le 20ème, au Lieu-Dit, 6 rue Sorbier : le Festival des “Évadés du Bocal” : un mois du lundi 7 mars au dimanche 3 avril 201, des expos, des films, des débats, des pièces de théâtre, des concerts…. à suivre.

 

Paul Machto

 

 

 

Semaine de la folie ordinaire à Reims

du 15 au 19 mars 2011

 

La réforme de la loi de 1990 relative « aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge » qui sera soumise au vote mi-mars à l’Assemblée nationale, signe un virage sécuritaire qui est délétère vis à vis des soins en psychiatrie.

 

En effet, nous savons d’expérience qu’il n’y a pas de soin possible sans l’adhésion du patient. En instaurant des soins sous contrainte, cette loi anéantirait la relation de confiance, entre soignants et patients, indispensable à la bonne conduite d’une thérapie.

 

Elle transformerait les soignants en police de la pensée et la vie des patients en liberté surveillée. Ce projet établit ainsi un paral- lèle douteux qui assimile patient et criminel. Enfin, il porte at- teinte à un droit fondamental, à savoir que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.

 

La seule thérapeutique proposée est une camisole chimique, n’étant en fait qu’une réduction au silence de la souffrance et entretenant l’illusion du soin. Les médicaments font partie de la thérapie, en aucun cas ils ne représentent la thérapie. L’écoute, la parole, la prise en charge psychologique, la mise en place d’un environnement respectueux du patient sont primordiaux.

 

L’introduction, dans les soins, du juge des libertés et de la détention, comme le propose le projet de loi, assimile l’hospitalisation d’office à la détention et rend la levée de cette mesure aussi difficile qu’une levée d’écrou.

 

Devant toutes ces attaques, à l’initiative de patients, un collectif de soignants et de patients du secteur ZR4 à Reims, propose une réponse.

 

Soudés au sein des différentes associations, club thérapeutique et centre d’accueil, nous exposons durant ce que nous appelons « La semaine de la folie ordinaire » du 15 au 19 mars, le travail effectué dans divers ateliers.

 

Notre désir est d’opposer à la négation de la folie et à son enfermement, l’expression et la chaleur humaine.

 

La mairie de Reims nous soutient en mettant des locaux à notre disposition pendant la semaine de la santé mentale.

 

Pour le collectif, Matthieu, Michèle Exposition A la maison de la vie associative 122 bis, rue du Barbâtre.


Reims Du mardi 15 au samedi 19 mars 2011 De 9h à 22h30 sauf samedi de 9h à20h Vernissage le mardi 15 mars à 15h Soirée débat : « La folie de vivre » Jeudi 17 mars 2011 de 18h à 22h Salle Armonville 7 bis rue Armonville Reims.

 

 

Article publié le dimanche 06 mars 2011 sur Mediapart

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>Contre une réforme rétrograde et inapplicable des soins sans consentement

 

 

Intersyndicale des Psychiatres Publics 

(Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux et Intersyndicale de Défense de la Psychiatrie Publique) 

 

Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public

 

Union Syndicale de la Psychiatrie Comité d’Action Syndical de la psychiatrie Syndicat des Psychiatre Français

 

Syndicat National des Psychiatres Privés

 

Union Syndicale des Magistrats Syndicat de la Magistrature


 

Communiqué du 9 mars 2011


La loi du 27 juin 1990 devait être évaluée et amendée dans les cinq ans après sa promulgation. C’est finalement 20 ans qui ont été laissés à une réflexion qui aurait dû permettre l’élaboration de la loi sur les soins sans consentement qu’attendaient les usagers, les familles, et les professionnels de la santé mentale.

 

Cette loi devait être conforme aux attentes d’un pays moderne, aux pratiques européennes, et à l’évolution des conceptions médicales. Elle devait être une véritable loi sanitaire, garantissant à la fois la qualité des soins et les libertés individuelles.

 

Décevant ces espérances, le projet gouvernemental de mai 2010 maintenait la double voie juridictionnelle administrative et judiciaire, élargissait considérablement les prérogatives du préfet, renforçait la référence à la notion ambiguë d’ordre public, – qui ouvre la porte à toutes les dérives -, durcissait les conditions de sortie et multipliait les catégories de patients concernés au nom d’une supposée dangerosité.

 

C’était ignorer l’esprit et la lettre de la Constitution.

 

Car il aura fallu qu’une patiente soulève pour la première fois une question prioritaire de constitutionnalité pour que le gouvernement soit contraint de revoir sa copie.

 

Deux options s’offraient alors à lui :

– soit il sautait le pas et optait enfin pour l’unification des deux modes d’hospitalisation sans consentement sous le seul contrôle de la justice, abandonnait la référence à l’ordre public, et ne retenait pour la levée des soins sans consentement que les seuls motifs médicaux,

– soit il s’entêtait à maintenir un dispositif obsolète et injuste, pourtant abandonné par la plupart des pays européens en accord avec les recommandations de la communauté.

 

C’est pourtant, cette dernière qu’a choisie le Gouvernement, donnant au projet l’allure d’une véritable machinerie infernale tellement il se complexifie, en durcissant d’un côté la dimension sécuritaire tout en voulant donner de l’autre au moins l’apparence d’une meilleure garantie des libertés. En réalité, il va à l’encontre de l’esprit même de la décision du Conseil Constitutionnel puisque le préfet garde de très larges prérogatives sur l’ensemble du dispositif, allant jusqu’à l’obtention d’un recours suspensif contre la décision du juge !

 

En effet, même après les derniers amendements en commission des affaires sociales, ce nouveau projet de loi n’étend pas les prérogatives du juge ni le recours systématique en cas de désaccords entre les avis médicaux et les décisions préfectorales à toutes les formes des soins sans consentement. Il maintient également un casier psychiatrique basé sur les antécédents médicaux, livrés à l’administration. Il multiplie inutilement les avis médicaux.

 

Pour l’ensemble des organisations professionnelles de psychiatres, alors même qu’une partie d’entre-elles estime que le principe même des soins ambulatoires sans consentement n’est pas acceptable, il va sans dire que sans contrôle direct du juge et telle qu’elle est présentée, imposée par protocole et jusqu’à l’intérieur du domicile, cette forme de soins constitue une extension inadmissible du contrôle étatique des populations par une instrumentalisation de la psychiatrie.

 

La logique sous-jacente est claire : aucune confiance n’est accordée aux juges, pas plus qu’aux médecins. Priorité est donnée au contrôle a priori de l’ordre public face aux garanties des libertés et à l’opportunité des soins. L’équilibre entre le bien-fondé de l’intervention thérapeutique et les droits des personnes est rompu. La thématique de la peur des malades psychiatriques est mise en avant, partant de la situation de quelques malades dangereux pour envahir les situations cliniques les plus banales. Les conditions sont réunies d’une formidable régression des pratiques de soins psychiatriques, des conditions de vie des malades, et d’une aggravation de l’engorgement de l’appareil judiciaire sans aucun bénéfice réel de sécurité pour nos concitoyens.

 

On aurait également pu espérer qu’au pays des libertés, cette loi, qui concerne près de 70 000 situations par an et 3 ministères soit considérée comme essentielle en termes de droits et de santé publique. Or le résultat final est un imbroglio législatif qu’il faudrait adopter en urgence !

 

A moyens constants, il faudrait que psychiatrie et justice gèrent un nombre croissant de situations, dans les incohérences d’un dispositif qui associerait :

des délais décisionnels impossibles à tenir pour des juges, qui seraient en outre privés des possibilités d’engager des moyens d’investigations complémentaires

une absence de contrôle judiciaire des soins ambulatoires sans consentement 

d’énormes difficultés à faire respecter le principe d’égalité des armes et l’application du principe des débats contradictoires dans des conditions acrobatiques

le maintien de contentieux administratifs et judiciaires distincts 

le cumul d’obligations légales propres au domaine hospitalier et aux procédures

juridiques, aux risques de contradictions, comme dans les domaines des modalités d’accès aux informations médicales et des règles de publicité des débats et de communication des pièces juridiques

 

Les organisations syndicales signataires, qui représentent l’ensemble des psychiatres et des magistrats de notre pays, s’insurgent en conséquence contre un projet de loi rétrograde, injuste et inadapté. Elles regrettent vivement que le Gouvernement, les Ministères de la Justice et de la Santé, ne saisissent pas l’occasion d’imposer une modernisation du droit et des pratiques sociales, fassent le lit d’une multiplication des cas de contentieux, et engagent quantité de situations cliniques, du fait d’une loi inapplicable et en contradiction avec l’éthique du soin, dans des impasses douloureuses pour les usagers et les soignants.

 

Elles demandent instamment l’ouverture immédiate de concertations avec l’ensemble des acteurs concernés et que soit enfin programmé le projet d’une grande loi sanitaire « psychiatrie et santé mentale » dont notre pays, la discipline et les usagers ont à l’évidence un besoin criant, et dans laquelle les soins sans consentement trouveraient harmonieusement leur place et leur utilité strictement thérapeutique.


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>Le Syndicat de la Magistrature condamne ‘sans’ appel le projet de loi sur la psychiatrie

Docteur Guy Baillon, Psychiatre des Hôpitaux                                                                   

Le projet gouvernemental est en effet invalidé après une analyse ‘juridique’ attentive des diverses dispositions de la loi.

 

Etant donné que cette loi « porte atteinte aux libertés des citoyens » dans un certain nombre de situations, il était légitime que les magistrats l’examinent. Le camouflet que reçoit l’Etat est cuisant et définitif. Après les protestations de plus en plus vigoureuses des professionnels de la psychiatrie (voir ‘l’appel des 39’ qui réunit déjà plus de 15.000 signatures) les magistrats montrent que cette loi est la porte ouverte à tous les abus contre la liberté des citoyens. Ils soulignent la confusion grave qu’elle établit entre le domaine des soins et celui de la justice. Le résultat le plus patent est la stigmatisation qu’elle étend à l’ensemble du champ du soin psychique, et ses usagers, plus de 2 millions de personnes soignées par an vont pâtir des faits graves commis par quelques dizaines de personnes. Tout patient va se sentir futur criminel, et sera désigné et ‘traité’ comme tel !

 

Dès le début de [leur texte], comme beaucoup de censeurs de l’évolution de la psychiatrie française les magistrats ont fait le constat qui étonne : « comment se fait-il que depuis la fameuse loi de 1990 qui devait ‘toiletter’ la loi de 1838 (toiletter = faire le ménage en enlevant les mots scandaleux, mais sans changer le fond : volonté d’interner certains patients) le nombre d’hospitalisations sous contrainte au lieu de continuer à décroitre comme il l’avait fait depuis la mise en place de la politique de secteur en 1972, n’ait fait que croitre à partir de 1990 jusqu’à ce jour ? ». Ceci avait déjà été dénoncé par le rapport de la Cour des Comptes et du Conseil Constitutionnel dès1999. Une inspection a été déclenchée et a fait son rapport, mais n’a pas su trouver la vraie raison de l’inversion de l’évolution, … parce que celle-ci est trop évidente !

 

Ce qui est intéressant c’est que les magistrats donnent eux-mêmes l’explication, mais en parlant de l’avenir seulement, et sans voir que cela s’applique aussi à cette énigme (nous l’avons dénoncé dans divers articles depuis 2000, et rappelé dans notre dernier ouvrage sur l’état des lieux en 2011.[1] Quand dans des situations complexes comme le sont la plupart des états de ‘crise’ (appelons-les simplement les moments aigus des troubles psychiques graves) les soignants se trouvent devant le dilemme suivant, dans une équipe ‘solide’ (je parlerai des autres après) :

-soit les soignants arrivent d’emblée à établir un lien de confiance avec le patient, nous savons que si nous prenons le temps qu’il faut c’est toujours possible, ils créent un véritable dialogue qui va aboutir à des mesures de soin prises ensemble, et ceci même si d’emblée ‘on’ nous avait dit cette personne était dangereuse, et qu’il ‘fallait’ l’hospitaliser : 

-soit ce lien ne se crée pas, pour x raisons : d’autres urgences autour de lui s’accumulent, le malade se sent abandonné car personne ne le reconnait, de plus en plus inquiet il se pense en milieu hostile et réagit en s’opposant à tout pour la simple raison qu’il « se sent en grand danger », lui ! Dans ces situations (ce sont les plus fréquentes) il faut aux soignants beaucoup de courage, d’expérience, de disponibilité à la fois dans l’immédiat et dans la continuité, une solidité des liens de l’équipe pour résister à « la » solution proposée d’emblée :

 devant toute situation difficile (où est la limite de cette difficulté ?) une hospitalisation sans consentement permet d’être sûr qu’un soin va être installé, et surtout couvre le psychiatre et son équipe pour tout type de risque’ ! La couverture est tirée !

 

Les magistrats prévoient ce qui va se passer dans leur texte pages 2, 3 et 4 ; ils disent que « la tentation sera forte de recourir à une hospitalisation sous contrainte », « d’autant qu’il est évident qu’en 72 h de ‘garde à vue’ la personne n’est pas souvent en mesure de donner son avis ». enfin un commentaire lucide.

 

En réalité ce que les magistrats ne disent pas, car ils l’ignorent n’étant pas acteurs du soin, c’est que ce choix du refus de prendre de risque se fait déjà et trop souvent depuis 1990 (nos Inspecteurs qui ne sont pas ‘soignants’ n’ont pas su dépister cette raison majeure de l’échec de la loi de 1990). En fait la pratique du soin psychique n’est qu’une constante prise de risque !

 

Cette affirmation est d’autant plus importante à donner que l’absence de soutien des équipes de secteur par l’Etat a commencé lui aussi précisément en 1990 avec la fermeture du ‘Bureau de la psychiatrie’ du Ministère de la santé. Depuis ce moment un nombre d’équipes de plus en plus important s’est dégradé, par manque de soutien du ministère. Et il est clair que chaque dégradation a accentué ce mouvement de « facilité » qui depuis 1990 permet de choisir plus ‘facilement’ le recours à l’hospitalisation sous contrainte.

 

Le hasard veut que ces jours derniers un article provenant du Canada nous informe de la dérive actuelle des soins sous contraintes au Québec. [2] Le détour vaut la peine, lisez-le.

A ce point précis il m’apparait indispensable d’éclairer à notre tour les magistrats sur ce qui se passe concrètement dans ces moments de soin des troubles aigus, en nous appuyant sur deux données, l’une concernant les patients, l’autre concernant les soignants.

 

Nous devons d’abord insister sur un fait propre aux troubles psychiques graves : ces personnes sont le plus souvent dans la méconnaissance de la réalité de leurs troubles et refusent la nature psychique de ceux-ci.


Ceci constitue la difficulté la plus importante du traitement psychique. Personne ne peut ‘violer’ l’esprit d’une personne et lui imposer une soit disant vérité. Il doit y accéder en s’appuyant sur sa propre confiance en lui. Tout le travail du soin est fait de l’élaboration des mots, des attitudes qui vont permettre à la personne de quitter cette position ‘bétonnée’, celle de son délire, et de commencer à établir des liens (rien de cela ne peut s’obtenir sous la contrainte).

 

Les conditions pour que ceci évolue vers une ouverture sont nombreuses, parmi elles la connaissance antérieure du patient par tel ou tel membre de l’équipe, ensuite la qualité réelle du travail d’équipe (qui nécessite d’avoir pu écarter les conflits interpersonnels existant dans toute équipe mais qui là sont de vraies ‘barrières au traitement’, ceci nécessite que les psychiatres fassent un travail d’élaboration suffisant et clair pour tous pour comprendre les délires et les troubles), ensuite la disponibilité suffisante, … A ce prix le patient va se sentir en terrain humain, non hostile, enfin accueillant (nous avons beaucoup insisté tout au long de notre carrière sur l’importance d’un accueil suffisamment long, ouvert et déployé avant tout soin, en particulier lors des ‘indications’ d’hospitalisation).[3]

 

Quant aux soignants, je dois ici faire un aveu : dans mes différents écrits depuis 40 ans j’ai toujours évité de décrire la difficulté ‘humaine’ du travail des soignants en psychiatrie. Je croyais que c’était par pudeur et qu’il y avait plus urgent. Je pense avoir commis là une grave erreur, j’ai en réalité laissé dans l’ombre la souffrance de mes collaborateurs. Quand après ma retraite je me suis trouvé proche du président de l’UNAFAM , à chaque fois que j’abordais ce thème, il m’arrêtais en me disant « Docteur assez vous n’allez pas nous faire pleurer », j’avais en effet assez écouté les témoignages des familles pour percevoir leur douleur extrême, accrue par le fait que rares sont celles que les psychiatres acceptent de recevoir  (nous n’avons pas tous encore compris aujourd’hui que le soin psychique ne peut se faire pour une personne que si sa famille est simultanément « accompagnée »).

 

J’arrêtais pour ne pas débattre de qui souffrait le plus. Mais je comprends aujourd’hui que j’aurai dû persister, car ce qui n’est jamais dit avec assez de clarté c’est l’« extrême » difficulté que rencontre un soin humain en psychiatrie, du fait de sa complexité et de ses dimensions non apparentes. Il faut que chaque soignant accepte de vivre une partie de la douleur du patient, qu’il vive cette empathie, qu’il accepte les doutes qui l’envahissent à chaque fois lui-même profondément, qu’il vive son impuissance devant le mur de la toute puissance du délire, qu’il accepte d’être mis à mal publiquement par tel ou tel patient (totalement inconscient de son attitude la plupart du temps, parfois en partie conscient), tout ceci la famille le vit, mais c’est l’un des ‘leurs’, alors que les soignants ne sont pas gratifiés par un attachement familial, ils sont dans la solitude.

 

Ceci toujours, mais quand en plus l’équipe pour une raison ou une autre est déstabilisée (manque d’effectif récent, maladie du chef de service, ou, plus grave, un conflit d’équipe) la vie des soignants peut devenir humainement insupportable parce que chacun se sent atteint au plus profond de lui-même, dévalorisé, blessé ; les psychiatres souffrent certes mais ils sont les plus protégés en raison de leur formation longue, de leur autorité, de leur pouvoir ; par contre leur responsabilité est déterminante pour la vie de l’équipe ; ce sont eux qui construisent la cohésion indispensable à l’origine d’une vraie vie d’équipe; sa défaillance va peser sur l’équipe plus qu’un manque d’effectif ; une équipe de secteur ne tient que par un travail de formation permanente en interne travaillant la rencontre entre théories et pratique, en continuité avec la souffrance singulière de chaque patient et du contexte environnant de chacun d’entre eux; ce travail nécessite aussi l’élaboration de contrats tacites avec toutes les institutions du secteur.

 

Si ce climat n’est pas créé il faut affirmer avec force que les soignants vont vivre un enfer qui est rarement décrit : c’est la solitude du vécu de chaque soignant face à la folie des patients, ce sont tous les dégâts que cette rencontre provoque si les soignants ne sont ni formés, ni protégés par l’équipe : les infirmiers en première ligne ; on pense que les psychologues ont une place plus facile en raison de leur formation, en réalité leur solitude dans une équipe non cohérente, est extrême ; le personnel moins formé souffre aussi mais paradoxalement il peut s’en sortir mieux ayant moins d’impératifs sur le plan du lien relationnel auprès des patients.

 

Cette description peut paraitre loin de la loi actuelle. Il n’en est rien car cette loi fait totalement abstraction de la complexité et de la pénibilité du travail de soin. Nous les psychiatres, qui animons si bien les discours, ne prenons pas assez le temps de montrer qu’aucun travail de soin ne se fait sans un partage profond de la souffrance. Pour cette raison toutes les procédures de management importées d’ailleurs pour la psychiatrie par nos administrations nous feraient sourire s’il n’y avait en arrière plan cette souffrance. L’exercice de l’autorité et la hiérarchie n’ont aucun sens et aucun effet positif en psychiatrie de service public (le privé partage les mêmes exigences, mais s’appuie sur des liens beaucoup plus confortables : ceux de la cooptation de tous les membres de l’équipe entre eux, cooptation absente du service public : nous devons là établir la même qualité de liens avec tous les acteurs présents dans l’équipe où nous arrivons, sans accord préalable, ni libre choix).

 

Dans un tel ‘contexte’ de souffrance, le seul réflexe possible des soignants est de ne prendre aucun risque, et d’avoir recours à la contrainte, c’est ce que font peu à peu les psychiatres depuis 1990, et la présence du tiers au lieu de diminuer le recours à la contrainte le soutient : 20 ans d’expérience l’ont prouvé.

 

Cette description était nécessaire pour apprécier l’absurdité des ‘protocoles’ de la future loi.

Prévoyant une garde à vue de 72h (comment oser prétendre que ce temps est suffisant pour créer la confiance, et établir des liens avec un patient ?) il est évident que cette obligation ne peut déboucher que sur une « imposition » d’un soin non consenti, et que tout ce qui va suivre après ne sera que provocations amenant les patients à n’avoir qu’une idée ‘obsédante’ tout au long de leur ‘carrière de patient’ : se défendre contre des personnes aussi hostiles.

 

Nous ne reprenons pas ici le texte ‘magistral’ de la magistrature critiquant avec précisions et prudence le projet de loi. Il est assez éloquent.

 

Il n’est pas question non plus de l’interpréter, il est très clair, chacun le lira et se l’appropriera.

Par contre nous voulons insister fortement sur un autre aspect non abordé par la loi ; cet aspect manque douloureusement aux yeux des familles et des usagers qui se sont mobilisées pour l’obtenir entre 2001 et 2005, la complémentarité de l’action sociale.

 

En effet une autre gravité de ce projet c’est de donner une image fausse de la folie : elle la ‘dit’ dangereuse, alors que nous savons que les patients ne commettent pas plus de crimes que le reste de la population, par contre qu’ils sont 17 fois plus souvent victimes de délits. Mais surtout leur folie a des conséquences sociales et relationnelles très lourdes qui vont provoquer des pertes de logement, de ressources, du travail, de leurs amis, voire de leur famille.

 

Cette loi l’ignore et ne parle que de soins. Elle décapite la Santé Mentale ! Les patients ont simultanément besoin de toute une suite d’accompagnements sociaux. La France s’est dotée d’une loi remarquable pour faire face à ces difficultés et apporter les compensations adaptées : c’est la loi du 11-2-2005 sur l’égalité des chances et des droits des personnes handicapées proposant mesures personnelles et services variés, dont le plus modeste mais le plus ingénieux est le GEM Groupe d’Entraide Mutuelle. C’est de tout cet ensemble ‘coordonné’, soins ‘et’ compensations sociales, dont ont besoin les patients. Ce projet est très grave parce qu’il donne une idée fausse de la folie et de ses conséquences : il se limite aux soins, alors qu’en l’absence de compensations sociales les patients sont voués à la rue, à l’abandon, à la prison.

 

Au total nous remercions profondément les magistrats d’avoir passé en examen avec autant d’attention, sans polémique ni agressivité ce projet de loi.

Mais cette étape n’est pas suffisante, il est essentiel qu’ils puissent continuer leur réflexion avec les professionnels de la psychiatrie, avec ceux de l’action sociale, et avec les grandes associations nationales de familles l’UNAFAM et d’usagers de la Santé Mentale la FNAPSY ;  ce n’est que sous l’effet de nos regards croisés et d’une attention commune et complémentaire que nous pourrons, à la place de ce projet dangereux parce que ‘non humain’ pour toute la société (qui ne donnera-t-elle pas le ‘droit’ d’interner, tout en se protégeant par tous les papiers officiels que l’on peut toujours détourner ?), proposer un « Plan cadre » pour l’ensemble de la Santé Mentale associant psychiatrie, action sociale, et prévention.

 

Rappelons que la France est en avance sur la plupart des pays car elle a entre ses mains déjà cet ensemble indissociable ‘politique de secteur’ (qui malgré les obstacles en 50 ans a fait preuve de son efficacité), et loi du 11-2-2005 reconnaissant l’appui social complémentaire indispensableLes hommes sont là, les outils sont là, ce qui manque c’est la confiance des médias, des élus pour leur permettre d’établir une continuité, une confiance suffisantes mettant l’humain de chacun de nous au service de la souffrance de nos proches.

 

Guy Baillon

 

[1] (« Quel accueil pour la folie ? » champs social éditions, collection dirigée par Yves Gigou, p 147 et s).

[2] Dénonciation des gardes forcées en psychiatrieRadio-Canada  21 févr. 2011

Une dizaine de personnes se sont présentées lundi au bureau du ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, Yves Bolduc, pour lui demander 

[3] Association Accueils, et « Les urgences de la folie. L’accueil en santé mentale », Gaëtan morin, 1998.

Le document du syndicat de la magistrature : observations-Syndicat-Magistrature

 

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>Projet scélérat : quelle psychiatrie pour demain?

Par Yolène de Vassoigne

 

Le point de vue exprimé ici est d'abord celui d'une mère qui, lassée de voir le mépris avec lequel sont traités usagers et familles dans la quasi-totalité des cas, lassée de constater l'absence d'accompagnement des familles, a décidé de créer il y a bientôt 5 ans une association regroupant les familles de personnes souffrant de troubles psychiques (schizophrénies, troubles bi-polaires et dépression majeure), un réseau d'entraide des familles.Et qui dénoncent ce projet au nom du respect dû à l' usager de la psychiatrie, avant tout une personne qui comme toute personne, doit jouir de ses droits humains élémentaires.

C'est aussi le point de vue d'une présidente d'association de familles qui, lassée des dérives de la psychiatrie et de la pratique du "médicament-tout-puissant", a décidé de créer un GEM (Groupe d'Entraide Mutuelle) pour offrir aux usagers enfin un lieu d'accueil non médicalisé, un espace où l'on essaie d'oublier le médical, un espace de liberté où l'usager n'est plus un numéro de dossier, mais une personne avec une souffrance qui doit se dire non se contenir.

Une loi scélérate, inhumaine, va être présentée à l'Assemblée Nationale dans quelques jours.

Une loi qui détruit ce qu'a essayé de construire la Loi de Février 2005 sur l'Egalité des Droits et des Chances et l'accès à la citoyenneté des Personnes en situation de handicap, y compris de handicap psychique.


Une loi qui fait de chaque usager de la psychiatrie un criminel potentiel, qui permettra de ficher chaque usager déjà hospitalisé sous contrainte (d'office ou à la demande d'un tiers, généralement un proche).


Ici, à la Martinique, ce sont au moins 90% des usagers qui sont concernés.


Une loi qui permettra une "garde à vue psychiatrique" de 72h sans avocat.


Une loi qui permettra à des équipes de flics-infirmiers de violer le domicile d'un usager juste parce qu'il est réticent au soin et à lui passer une camisole chimique.

 

Quand le soin est absent, contraindre par la violence est bien plus facile, plus rapide, donc moins coûteux à première vue que de chercher à comprendre, que d'établir un lien, une relation, une communication. Cela suppose une volonté, une empathie, la capacité de toucher la souffrance de l'autre, ce qui aurait dû être la qualité première de tout soignant en psychiatrie.

 

Or aujourd'hui que voit-on? les "restrictions budgétaires" régissent la psychiatrie aussi… pas assez de moyens, pas assez de soignants, pas assez de temps… un pur non-sens quand on sait que communiquer c'est d'abord prendre le temps, autant de temps qu'il faudra… mais le temps c'est l'argent donc communiquer n'est pas "rentable"…

 

Pendant plus de deux ans, j'ai écouté 24h sur 24, 365 jours dans l'année, les appels de détresse des familles (dans 99,99% des cas des mères), leurs craintes, leurs angoisses parce qu'un proche "en crise" n'était pas pris en charge, parce qu'elles avaient vainement appelé au secours les soignants, j'ai écouté leurs larmes et leurs sanglots, leur profonde douleur car elles aiment leur proche, leur solitude immense de n'avoir jamais pu être écoutées, entendues, de n'avoir jamais pu dire leur souffrance; j'ai constaté leur incompréhension parfois totale de ce que vit leur proche.


Alors il a fallu agir, les rassembler pour prendre le temps de les écouter, leur tendre la main, leur redonner espoir. Souvent simplement écouter, parfois des heures durant, sans parler, suffisait à leur redonner espoir.


Je pourrais écrire des livres et des livres de ces témoignages parfois si douloureux que d'autres familles elles-mêmes avaient du mal à les entendre. Quant aux rares bénévoles qui nous avaient rejoints au début, d'entendre l'immensité de cette souffrance les a tous fait fuir, "un coup de poing dans l'estomac" m'a dit un jour l'un d'entre eux que je n'ai jamais revu, après une de ces rencontres où les familles témoignaient de leur vécu.

 

Comment comprendre, sans approuver bien sûr, que certaines familles soutiennent ce projet ?


Quand l'accompagnement des familles est absent, qu'un appel d'une famille aux soignants pour un proche "en crise", c'est-à-dire en phase aigue d'une psychose, reste sans réponse pendant des jours, voire des semaines.


Quand les familles, la plupart du temps sans connaissance ni compréhension des troubles – les soignants ne savent pas, ne veulent pas prendre le temps ou refusent d'écouter leur parole – doivent gérer comme elles peuvent des situations où elles sont parfois en danger. Parce qu'une personne en souffrance extrême, angoissée, en proie à un délire paranoïaque, déconnectée de la réalité, peut être dangereuse (dans la réalité la plupart ne le sont pas) car elle se sent entourée de toutes parts d'ennemis, parce que parfois il suffit d'un regard, d'un geste mal interprétés pour engendrer une réaction de défense qui peut se traduire par une attitude agressive, y compris vis-à-vis de l'entourage immédiat.


Quand certaines familles ont par le passé vainement appelé au secours les soignants, qu'elles n'ont aucune notion de ce qu'est un soin humain pour ne l'avoir jamais vu à l'oeuvre

Quand la réponse aux appels de détresse est "appelez la police si votre enfant est agité ou agressif, nous on ne se mettra pas en danger", que la police arrive pour parfois faire demi-tour en disant "mais contrôlez le (la), c'est votre enfant" quand elle ne repart pas avec votre enfant menotté comme un criminel…


Car c'est cela le vécu de bien trop de familles et d'usagers de la psychiatrie : l'hôpital, la contrainte, la force parfois brute des soignants, la violence institutionnelle, la camisole chimique… pas l'humain 


Alors oui, certaines de ces familles, déboussolées, applaudissent une loi qui portera "le soin à domicile" … n'en mesurant pas la portée, l'atteinte inadmissible aux droits élémentaires de leurs proches, l'approche purement "sécuritaire".


La dérive sécuritaire ne sera jamais une solution, une réponse à la souffrance.


Bien sûr qu'il y a des exceptions, mais de plus en plus rares chez les soignants : manque de formation, manque de motivation dans un système qui ne reconnaît pas la difficulté d'une telle profession, manque de temps, manque de moyens. Parfois certains soignants prennent sur eux, hors temps de travail, le temps de construire une relation… mais combien ?


Quelle psychiatrie pour demain ?

 

– Faire confiance aux usagers en en faisant les acteurs de leur mieux-être ou de leur moindre souffrance, apprendre à les écouter, à les entendre, y compris et surtout quand ils contestent le soin, la psychiatrie. Savoir encourager leur démarche vers l'autonomie.

– Faire confiance aux familles qui, dans la majorité des cas, partagent leur quotidien et vivent leur souffrance.


Qui mieux qu'elles est apte à accompagner à condition d'être informées, accompagnées elles-mêmes. En faire les partenaires indispensables qu'elles sont, non des boucs émissaires.


– Comprendre que sans la triple alliance usagers-familles-soignants, aucun soin ne marchera.


– Ne pas stigmatiser soi-même quand on est soignant.


– Admettre, quand on est soignant, que le soin parfois échoue, qu'il faille se remettre en question, que le tout-médical est une erreur monumentale.


– Faire des hôpitaux psychiatriques des lieux d'accueil humains, non des prisons.


– Etre conscient, quand on est soignant, que l'hospitalisation est toujours un échec, non LA solution. C'est souvent qu'on n'a pas su, en amont, intervenir à temps pour établir une communication.


– Comprendre que l'accompagnement social – ce que font les GEM : rompre l'isolement, permettre la plus grande autonomie possible, permettre l'expression de la souffrance pour apprendre à la gérer, construire des projets ensemble, devenir acteur de sa propre vie – représente 50% des chances de réhabilitation, voire de guérison pour un usager.


– Etre conscient, quand on est soignant, que l'âme humaine ne s'apprend pas dans des livres mais dans le champ de la vie, dans l'échange, le partage, dans l'humain libre d'être tout simplement différent.


– Pour tous, comprendre que ce qui se reflète dans le miroir, c'est souvent la peur de sa propre folie.

 

PS. Aucun des stagiaires venus dans notre GEM (pour des périodes d'immersion quotidienne allant de trois semaines à deux mois) n'a regretté d'avoir découvert le monde "étrange" de la dite-folie. Aucun n'avait jamais eu de contact avec cet univers. TOUS ont dit que l'image qu'ils se faisaient du "fou" a complètement changé. Qu'ils ont beaucoup appris à les côtoyer, beaucoup grandi à découvrir leurs univers. Et qu'ils reviendront, espèrent-ils, "travailler" un jour dans un GEM. Car dans un GEM on ne "travaille" pas, on vient rencontrer l'autre.


Yolène de Vassoigne

 

 

Equinoxe , association (réseau d'entraide et de solidarité) de familles et amis de personnes en souffrance psychique (schizophrènies, troubles bi-polaires et dépressions majeures Martiniquaise a créé en décembre 2007 un GEM, structure d'accompagnement social pour les personnes en souffrance psychique à travers des ateliers de créativité artistique. Basé à Fort-de-France et ouvert (du lundi au vendredi 10h-18h) à tous ceux qui veulent bien partager des instants de vie conviviaux avec eux.
Collecte permanente de denrées alimentaires pour le GEM (repas gratuits offerts tous les jours).

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>La menace d’être en permanence sous surveillance

Le Projet de loi sur les soins sans consentement ? 

La menace d’être en permanence sous surveillance et une sortie d’essai à vie !

Un contrôle insupportable ! 

Les adhérents de la RadioCitron ont écrit aux Députés et vont saisir les sénateurs. Après les « V.I.P. en psy », les Voix Iséroises des Patients en psy, le Groupe d’Entraide Mutuelle La Locomotive, le Club thérapeutique le Grillon de Reims, une nouvelle prise de position d’association. 

Les Patients se saisissent de la parole et ont leur mot à dire sur ce projet de loi qui les concerne au premier chef ! Salutaire. 

Paul Machto

 

LETTRE DES ANIMATEURS DE RADIO CITRON AUX DEPUTES 

 

Mesdames et Messieurs les Députés,

Un projet de loi va vous être soumis à la mi-mars concernant la psychiatrie. En tant que patients et en tant qu'animateurs de Radio Citron, nous avons lu attentivement ce projet de loi et nous tenons à attirer votre attention sur différents points.

La substitution de la notion d'hospitalisation sous contrainte par la notion de soins sous contrainte représente pour le patient la menace d'être en permanence sous surveillance, même bien après la crise et jusque dans son espace privé. En cas de soupçon de discontinuité d'observance, le patient serait réhospitalisé d'office, ce qui équivaut à être une sortie d'essai à vie : c'est un contrôle insupportable.

Le fichage et la surveillance par un comité spécial dès l'hospitalisation d'office, en plus du psychiatre, à l'encontre du patient même stabilisé ou guéri, la décision d'un juge ou d'un préfet sur le placement, le prolongement et la levée de l'enfermement, la dénonciation des soignants auprès d'eux, le protocole de soins établi par le Conseil d'Etat, protocole stéréotypé et non personnalisé, l'accaparement des psychiatres à des fins d'expertise auprès des juges au lieu des soins, les jours d'hospitalisation complète imposés pour débuter les soins, la suppression totale des sorties d'essai, l'agitation procédurière nuisant au patient, toutes ces mesures et bien d'autres encore dans ce projet sont démesurément sécuritaires.

 

Rappelons qu'un patient en psychiatrie n'est pas un délinquant, mais un sujet de droit, qui, pour un moment, peut avoir le discernement amoindri. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, favoriser l'enfermement et la médication, considérer les personnes comme dangereuses, et à vie, n'est pas la solution à cette souffrance. C'est même pathogène.

 

Pourquoi donc nous enfermer, nous surveiller et nous contraindre pour une dangerosité supposée, quand toutes les études menées démontrent que nous ne sommes pas plus dangereux que les autres ? Même, les malades psychiques sont 300 fois plus susceptibles d'être attaqués par des gens non malades, que l'inverse. L'événement qu'évoque Nicolas Sarkozy dans son discours d'Anthony en 2008 est l'exception. Alors pourquoi nous stigmatiser ? Et pourquoi vouloir soumettre cette loi en urgence, alors qu'elle est loin d'être anodine, et qu'elle est lourde de conséquences pour nous ?

 

En fait, cette réforme est complètement centrée sur une prise en charge autoritaire de la maladie psychique, contre la liberté individuelle et contre toute logique de résultat parce qu'elle ne prend pas en compte l'idée d'un contrat responsable entre patient et psychiatre, et donc la possibilité pour le patient de négocier sa prise en charge librement avec les soignants, ce qui garantit l'observance du soin.

Les soins efficaces, qui laissent au patient la possibilité d'adhérer librement au soin et lui permettent donc d'être un je-sujet de son être, de sa vie, capable de penser sa maladie, la mettre en perspective, en comprendre la source de ce fait, la désamorcer en partie ou complètement, et éviter un éventuel passage à l'acte, les soins qui permettent le lien transitionnel avec les soignants, les soins humains, la parole, les entretiens, les activités sociales et créatives, ces soins efficaces ne sont pas soutenus par cette loi, au contraire elle les met en péril, contre toute raison. De plus, contraindre aux soins médicamenteux certains patients est si violent que l'ambiance des unités de soins psychiatriques s'en trouvera détériorée.

Poser un jugement de dangerosité et d'"irrécupérabilité" sur un patient, c'est lui donner la sensation qu'il est traqué, par tous et partout, et cela favorise les passages à l'acte violents. Or les malades psychiques ont souvent subi une maltraitance dans leur jeunesse, source de pathologies. Car c'est par trop de souffrance que l'esprit cherche des solutions qui parfois génèrent des pathologies. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, l'enfermement et la médication, les considérer comme dangereux, à vie, n'est donc pas la solution à cette souffrance.

 

Cette loi nous propose d'aller mal, à vie. Elle est totalement contre-productive. Qui y gagne ? Ni les malades, ni la société, ni la sécurité.

 

Déjà, nous connaissons depuis quelques années une augmentation des hospitalisations d'office, pas parce que nous sommes plus dangereux ou plus nombreux à être malades, mais parce que beaucoup de structures de proximité, intermédiaires, qui accueillaient la parole des patients, on été fermées, alors qu'elles constituaient un véritable outil de prévention des risques et dont se saisissaient les patients. Celles qui restent manquent de moyens, de personnel, les attentes pour des rendez-vous sont dangereusement longues. Telle structure a vu en quelques mois son nombre d'hospitalisations d'office être multiplié par… 10 ! Par 10 ! Alors que les pathologies restent les mêmes. Que se passe-t-il ? Le préfet semble signer l'enfermement à tour de bras, comme le psychiatre, mais hésite à signer les levées : ils ont peur d'être jugés trop laxistes… non pour le bien du patient, ni pour celui de la société ! Voici des conséquences déjà visibles de l'esprit de cette loi.

Toute hospitalisation d'office est toujours extrêmement violente pour le patient. Tous nos témoignages personnels sont terrifiants. Nous en gardons un traumatisme à vie. L'hospitalisation doit de toute façon être soigneusement réfléchie et durer le moins possible. Or ce n'est pas du tout le sens de cette loi.

Si le grand public et notre entourage sont amenés à penser que nous sommes dangereux au point de nous contraindre, de nous enfermer à ce point, de nous contrôler à ce point, de nous "judiciariser" et qui plus est, d'urgence, quelle image de nous et quelle réaction vont-ils avoir ? Et nous, quelle image pouvons-nous avoir de nous-mêmes ? Et vous, si vous craquez ? Comment va se comporter une population persuadée que tous les malades sont dangereux, ou que tous les dangereux sont enfermés ?

Aussi, dans un souci d'efficacité des soins, comme dans un souci d'une société capable de se pencher avec raison sur les véritables dangerosités dans notre vie à tous, dans un souci de justice et de justesse, nous refusons chaque terme de cette réforme. Ces actes risquent d'être perpétrés en votre nom, en notre nom.

Ne sacrifions pas des citoyens qui souffrent, qui se battent individuellement pour se soigner, et toute la profession qui avait tant progressé pour le bien de toute la société. Nous souffrons de ce projet. Nous faisons peu de bruit parce que nous sommes surtout occupés à tenir et nous soigner. Mais nous sommes là, nombreux, à vouloir nous soigner correctement et rester citoyens libres et responsables.

Ne nous enfermez pas dans des hôpitaux-prisons, dans une image terrible, dans des contraintes et des protocoles de soins stéréotypés, par peur ! Au nom d'un principe illusoire de précaution. Aidez-nous, au contraire, car nous souhaitons aller mieux, souffrir moins et avoir notre place, utile et légitime, dans notre société.

Mesdames et messieurs les députés, vous nous représentez, nous vous demandons de porter nos voix et notre refus légitime de cette loi, lors du débat à l'Assemblée Nationale.

Veuillez recevoir nos salutations citoyennes.

Les patients et animateurs de RADIOCITRON.COM

Une émission récente avec Pierre Sadoul, membre du collectif des 39 : http://www.radiocitron.com/index.php?pisteId=393&pisteEmision=1&page=0&PHPSESSID=6240158b8aa553b0e1512778e2126e05

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>Sommes-nous coupables de notre maladie ?

 

J'ai reçu la demande des adhérents du Groupe d'Entraide Mutuelle de Reims, La Locomotive, du club le Grillon, la Lettre Ouverte qu'ils adressent aux députés de leur région.

Cette mobilisation d'associations de patients, comme celle des Voix Iséroises des Patients en psy, Les V.I.P. en psy, de Grenoble, comme celle du GEM de Reims me semblent être des initiatives remarquables dans le contexte du rejet massif qui s'annonce contre ce projet de loi sur les soins sans consentement.

L'irruption dans le champ politique des personnes qui fréquentent, soit des lieux associatifs, soit des espaces de soins, est fondamentale et témoigne de la nécessité indispensable de repenser fondamentalement la place du patient dans l'espace social, dans la Cité, mais aussi et surtout dans le dispositif de soins : une place de citoyen, qui a son mot à dire sur les conditions de soins, quelqu'un qui a une place de sujet, responsable.

Vouloir le bien de quelqu'un, avoir une posture soit médicale dominatrice, soit d'assistance pour décider ce qui est bon pour lui, n'est elle pas la pire façon de "traiter" une personne ? 

Paul Machto 


Lettre ouverte des adhérents du

Groupe d’Entraide Mutuelle de Reims, La Locomotive,

du Club Thérapeutique Le Grillon,

 et des Clubs M.E.I.D. et Atout Cœur

Aux députés de la région Champagne-Ardenne


Un projet de réforme de la loi du 27 juin 1990[1]doit être discuté à l’Assemblée Nationale le 14 ou 15 mars 2011, mais nous, en tant qu’adhérents de l’association du G.E.M.[2]

La Locomotive, du club thérapeutique le Grillon et de ses clubs affiliés (M.E.I.D.et Atout Cœur), en tant que soignés et soignants, acteurs principaux de la psychiatrie publique, nous nous élevons vivement contre cette notion de soins sans consentement, contre cette notion d’une garde à vue psychiatrique, bref d’un mélange des genres entre la psychiatrie et la justice, entre le soin et une criminalisation de la maladie mentale.

Nous nous opposons radicalement à cette proposition de loi qui va déformer voire détruire la relation de confiance et d’écoute nécessaire entre patient et soignant, proposition qui met le soignant en place d’auxiliaire de la police, ce n’est pas sa mission : sa mission, c’est de soigner. Le soin ne peut être que librement consenti, sinon ce n’est plus un soin.

Que pouvons-nous dire en tant que malade face à ce projet de loi ? Sommes-nous coupables de notre maladie ? Un malade est un citoyen à part entière et il vote.

Alors Mesdames, Messieurs les Députés, transformerez-vous les malades en prisonniers et les soignants en surveillants?

Non ! Aux soins ambulatoires forcés.

Non ! à l’espace privé sous le coup d’une loi irrespectueuse de la dignité humaine.

Mesdames et Messieurs les Députés, vous nous représentez, nous vous demandons de porter nos voix et notre refus légitime, lors du débat à l’Assemblée Nationale.

 

[1] Loi du 27 juin 1990 qui régit les conditions d’hospitalisation en psychiatrie ( hospitalisation sur demande d’un tiers -HDT-, hospitalisation d’office (H.O.).

[2] Les Groupes d’Entraide Mutuelle créés par La loi Nº 2005-102, du 12 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette loi reconnaît la spécificité du handicap psychique et crée un nouveau  dispositif adressé aux personnes souffrant de troubles psychiques, le G.E.M/pour groupe d'entraide mutuelle et son intention est l'amélioration des conditions de vie de ces personnes.

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>Présomption de dangerosité

Le projet de loi adopté en conseil des ministres le 26 janvier 2011 et qui sera discuté au Parlement le 15 mars prochain consacre une nouvelle notion : la présomption de dangerosité.


Les malades mentaux et plus largement les personnes ayant vécu une crise psychique grave vont, selon ce texte, expérimenter une nouvelle étape du principe de précaution. Il est question d’enfermer, de ficher, de neutraliser (y compris à domicile), de surveiller des citoyens dits potentiellement dangereux parce qu’ils auraient été l’objet de « soins psychiatriques » sans consentement. 


Sa prétention est d’éliminer un risque de passage à l’acte et de généraliser à cette fin un système de contrôle:  Il s’agit d’un bouleversement juridique et d’un enjeu démocratique majeur. Cette présomption de risque suffirait à déclencher des règles coercitives. Sa dérive est d’ores et déjà avérée puisque la population désignée n’est pas plus dangereuse que les autres selon toutes les études menées. 


Suivant les principes qui ont guidé la volonté de ségrégation d’enfants dès l’âge de 3 ans en fonction de leur violence future supposée, le gouvernement continue à développer son arsenal législatif. Il s’agit, avec ce projet de loi, d’établir des soins sous contrainte y compris à domicile et de réformer un texte sanitaire en un dispositif sécuritaire. 


Le vocabulaire utilisé et les mesures préconisées dans ce texte relèvent davantage du code pénal que du code de la santé publique.


Ainsi : « Lorsque les soins prennent la forme prévue au 2° (soins ambulatoires , pouvant comporter des soins à domicile), un protocole de soins est établi, PROTOCOLE, DONT LE CONTENU EST fixé par le conseil d’ETAT, défini le ou les types de soins, les lieux de leur réalisation et la périodicité des soins ».

Le conseil d’Etat est-il habilité à définir un protocole de soins ?

« les avis mentionnés au I et au II sont rendus après que le patient a été ENTENDU……  faisant obstacle à la COMPARUTION…. » 


S’agit-il d’un prévenu en garde à vue ou d’un examen médical ?


« autorisation de sortie accompagnée avec l’accord du directeur, celui-ci aura prévenu le représentant de l’Etat 48 h auparavant qui doit donner son autorisation… en cas de soins psychiatriques sans consentement avec hospitalisation».

 

Cela concerne-t-il un malade ou un détenu?


« A l’AUDIENCE, la personne est entendue( par le juge des libertés et de la détention), sauf si elle ne peut comparaître …….Dans ce cas le juge, d’office ou à la demande de l’intéressé, lui désigne un avocat pour assurer sa défense ».


Après la garde à vue, l’audience en jugement…..


« Le juge ne peut décider la main levée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres… ». 


Et pendant ce temps-là, qui soigne les patients ? Le psychiatre est-il un expert ou un soignant ? Le juge n’est-il pas réduit à légitimer un système ?


« le juge peut décider que l’audience se déroule avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ». 


« Docteur, j’ai vu un juge à la télé qui parlait de moi…. J’avais même un avocat que je n’avais jamais rencontré pour me défendre! ».


« lorsqu’un patient est pris en charge sous la forme d’une hospitalisation complète susceptible de se prolonger au-delà de 15 jours, le directeur de l’établissement en est avisé par la transmission d’un certificat médical établi au plus tard le huitième jour de l’hospitalisation, certificat transmis au représentant de l’Etat,le juge des libertés et détention est saisi, il statue après débat contradictoire » 


Une complexité qui va fluidifier les hospitalisations ! La souffrance n’est-elle qu’une question administrative?


Au sein de toutes ces mesures, quelle place reste-t-il pour les soins ?


Le déroulement des 15 premiers jours d’une hospitalisation dans le cadre de soins sous contrainte, si ce projet de loi devait être adopté, ceci dans le programme « de la lutte contre les maladies et dépendances et la lutte contre les maladies mentales », deviendrait une scène juridico-administrative et les soins remis à plus tard alors qu’il s’agit d’une hospitalisation…


Imagine-t-on l’état du malade au milieu de toute cette agitation procédurière ?  


L’idéologie sécuritaire n’envahit-elle pas des pans entiers de notre quotidien au nom de notre protection ?


Patrice Charbit


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>Lettre du Collectif des 39 à l'ensemble des Associations d'Usagers en psychiatrie, des Familles, des Associations, des Syndicats de Professionnels en psychiatrie, des Associations de psychanalystes


En 2003, nous étions tous réunis pour organiser les Etats Généraux de la Psychiatrie. Unitairement et démocratiquement, nous avions élaboré « les 22 mesures d’urgence » ainsi que les 4 motions fondant les axes généraux de notre exercice.


Il n’était pas question dans ces décisions de la révision de la loi de 1990. C’était sans doute une façon d’exprimer que cette loi ne semblait pas être un obstacle fondamental à nos pratiques et que d’autres urgences nous animaient.


Sept années plus tard, seule la révision de cette loi est la réponse du ministère à nos revendications. Et ceci dans un climat particulièrement difficile puisque depuis le discours d’Antony du Président de la République, la dérive sécuritaire envahit le champ de la psychiatrie : comme si tous les patients étaient identifiés à des criminels dangereux, actuels ou potentiels.


Nous étions ensemble à Montreuil le 7 Février 2009 pour dire notre indignation devant cette idéologie inacceptable ; à l’appel du collectif des 39, 2000 personnes ont clairement manifesté leur refus d’une telle politique.


30000 citoyens ont signé un appel condamnant le discours du président de la république.

Et pourtant 70 millions d’euros furent débloqués pour des murs, des caméras, des clés, des portes. Le pacte républicain s’est rompu : les préfets discréditent les avis des psychiatres, décident contre leur avis. Si l’hospitalisation protège le patient pour des soins, celle- ci devient un enfermement arbitraire quand le préfet refuse la sortie demandée par le psychiatre.


C’est dans ce climat délétère et morbide que nous a été proposée une modification de la loi de 1990 avec un projet de loi instaurant les soins sans consentement en ambulatoire.

En Septembre nous étions de nouveau tous ensemble à Villejuif : mille participants avec toutes les forces politiques d’opposition, tous les syndicats de psychiatres, plusieurs syndicats professionnels, quelques associations d’usagers, et des familles, ont affirmé leur opposition au projet de loi.


Après la décision du Conseil Constitutionnel le 26 novembre 2010, ce projet nous revient, modifié, avec « l’introduction » du juge pour les hospitalisations sous contrainte.


Vous savez que si depuis la loi de 1838, l'hospitalisation seule pouvait faire l'objet d'une contrainte identifiant les soins à un lieu, le changement prévu par le législateur est une modification sans précédent ! Il s’agit d’un changement paradigmatique dans ses conséquences car ce projet de loi n' identifie plus l'hospitalisation, mais les soins eux-mêmes à la contrainte, les réduisant à une pure surveillance. L'obligation n'a t- elle pas pris le pas sur le contenu du soin ? Ce hors lieu de la surveillance, donc son omni-présence, penche dangereusement vers des choix totalitaires, des choix « contrôlitaires » ! C'est un lourd tribut : le monde de la psychiatrie est-il prêt à s’y soumettre ? à le payer ? Un constat est à faire : même si c’est pour des raisons différentes, parfois contradictoires, divergentes voire opposées, la quasi totalité des professionnels rejette ce projet.


Ce projet ne répond pas aux attentes des professionnels, des familles, des patients

C’est un projet qui s’oppose frontalement aux nécessaires évolutions que des soins de qualité nécessitent : il maltraite les patients, il trompe les familles, il disqualifie les professionnels.


Dans la précipitation, dans un simulacre de concertation, sans prendre le temps de penser le soin en psychiatrie, cette « réforme » de la loi de 1990, si elle était adoptée, aggraverait d’autant plus les conditions de notre exercice, dont la dégradation nous avait amenés à élaborer 22 mesures d’urgences en 2003.


Pour une loi sanitaire qui prendrait en compte les moyens, la formation, la conception de la maladie (qui s’oppose à celle de la Fondation « FondaMental » qui vient d’être richement dotée), n’est il pas possible d’organiser dans l’urgence qui nous est imposée, un front du refus unitaire, actif, mobilisateur ?


Le collectif des 39 ne restera pas inactif devant la gravité de la situation.


Il appelle toutes les forces vives de ce pays à se rassembler pour demander le retrait de ce projet.


Le temps presse : nous avons l’immense responsabilité d’organiser cette riposte ensemble.


Nous restons à l’écoute des propositions. Nous en ferons également. Bien cordialement à vous,

pour le Collectif des 39 :

 

Dr Mathieu Bellahsen, Selma Benchelah, dr Philippe Bichon, dr Hervé Bokobza, dr Loriane Brunessaux, Marie Cathelineau, dr Patrice Charbit, dr Franck Chaumon, dr Patrick Chemla, dr Guy Dana, dr Alexandra De Seguin, dr Roger Ferreri, dr Sarah Gatignol, Yves Gigou, dr Michaël Guyader, Serge Klopp, Émile Lumbroso, dr Paul Machto, Antoine Machto, Bénédicte Maurin, Simone Molina, Françoise Nielsen, Sylvie Prieur, dr Pierre Sadoul, dr Pedro Serra, dr Olivier Schmitt, dr Bruno Tournaire-Bacchini, dr Anne Tuffelli , Monique Vincent, dr Élie Winter.


Contacts :

Collectif des 39 : yglns39@orange.fr Dr Hervé Bokobza : 06 85 31 71 61 Yves Gigou : 06 60 48 98 84 Dr Paul Machto : 06 80 65 47 79

 

(Cette lettre a été envoyée à l'ensemble des associations concernées)

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>Une réforme absurde et dangereuse des soins sous contrainte

Pourquoi absurde ? Des soins sans consentement ! Impossible ! Soin et consentement vont de pair. A moins de limiter les soins psychiatriques à une prise de médicaments. Nous revendiquons le droit et l'accès aux soins psychothérapeutiques qui sont pour nous indissociables d'un traitement adéquat. Quelque soit la théorie appliquée (thérapie comportementale, institutionnelle ou psychanalytique), celle-ci devrait d'ailleurs être "explicitée" systématiquement au patient par son médecin thérapeute, c'est une démarche personnelle de la part du malade qui bien sûr nécessite sa pleine adhésion. Il ne peut y avoir stabilisation de son état que par des soins complets: un traitement adapté et un travail psychothérapeutique.

Nous ne cessons d'entendre que le système judiciaire est engorgé de toute part, il faut tout de même rappeler que les H.S.C (hospitalisations sous contrainte) représentent plus de 7.4000 hospitalisations par an! Comment les juges des libertés et de la détention (J.L.D) vont-ils pouvoir faire face à ce surcroît de travail? Avec quelles compétences spécifiques à part celle de consulter les avis médicaux? De plus il est précisé que l'intervention d'un juge judiciaire garantit le principe du contradictoire, c'est-à-dire que le patient pourra alors être représenté par un avocat lors de ses démarches… mais cet avocat encore faut-il pouvoir le contacter, le trouver, le payer et nous pensons que cela est rendu très difficile voire impossible par une situation d'H.S.C.

 

Pourquoi dangereuse ? Le passage à une durée de 72h d'observation (24h auparavant) avant que le médecin ne se prononce laisse en effet la porte ouverte aux abus à l'encontre du patient. Cette durée ressemble plus à une "garde à vue" qu'à une période de soins pourtant primordiale. Qu'en est-il des visites de la personne de confiance désignée par le patient durant ces trois jours ? Une plus grande réactivité et donc une levée des HDT et HO selon l'état du malade nous paraît indispensable, les délais des décisions nous paraissent trop longs ! Passez donc quelques semaines dans un hôpital psychiatrique et vous comprendrez. Certes il y a quelques petites choses à faire dans certains pavillons mais c'est trop rare par manque de moyens et de personnel.

L'argent mis à construire des chambres d'isolement et à installer des barricades (70 M€ ! pour le plan de sécurisation ) aurait pu être utilisé afin d'améliorer les conditions d'hospitalisation et donc, j'en suis persuadée, de diminuer la durée moyenne des "séjours" des patients dans ces établissements (en 2009: 52 jours en HL, 60j en HDT et 95j en HO).

"Précaire" signifie "qui n'offre aucune garantie, qui peut toujours être remis en cause". Or la condition humaine est vulnérable certes, mais non "précaire" dans le sens où elle ne peut pas être remise en cause comme l'affirme le président d'ADVOCACY France. Cela signifierait alors que certaines personnes pourraient ne pas être dignes de faire partie de l'humanité. C'est ce que l'on veut nous faire croire en appliquant une norme dans notre société et en enfermant, en rendant clandestins ceux qui ne peuvent s'y conformer. Il est vrai qu'aujourd'hui nous vivons dans la précarité, mais c'est celle engendrée par le fonctionnement même de notre société.

Les H.S.C (auparavant hospitalisations sous contrainte devenues soins sans consentement!) doivent rester des exceptions et non un moyen de contrôler la population dans un but normatif. Les critères énoncés dans la réforme de la loi de 1990 prêtent à interprétation libre de la part du décideur (juge, maire ou préfet…): il y est stipulé qu'en cas de "péril imminent" une H.S.C doit être prononcée. Une atteinte à l'ordre public, même qualifiée de "grave" (ce qui demande des précisions), n'est en aucun cas un critère valable pour un internement sous contrainte systématique. Selon nous l'H.S.C se justifie uniquement si il y a un danger pour une personne (le patient ou un tiers) ou bien si il y a une perte d'autonomie de la personne c'est-à-dire que le patient n'est pas en capacité de choisir pour lui-même.

L'intervention d'un juge pourrait impliquer une dérive dangereuse entre HDT, HO et mise sous tutelle/curatelle qui reste une décision lourde de conséquences pour le patient et son entourage. Il faut de plus noter la difficulté de sortir de ses systèmes de tutelles/curatelles. En effet c'est la personne concernée qui doit aujourd'hui payer l'expert psychiatre qui se prononcera sur la levée ou non de la mesure de protection. Nous retiendrons que cette somme est loin d'être négligeable pour un petit budget. De plus pour quelqu'un qui doit justifier de ses dépenses auprès de son curateur/tuteur il est d'autant plus compliqué de le faire quand c'est dans le but de supprimer le rôle de cette tierce personne.

La réforme de la loi de 1990 suscite un amalgame dangereux entre délinquants (qui relèvent de la justice) et malades (qui nécessitent des soins psychiatriques appropriés). Cela ne fera que renforcer les méprises telles que l'emprisonnement de malades et inversement (même si cela paraît plus rare) l'hospitalisation d'auteurs de délits alors qu'ils ne relèvent pas des soins psychiatriques. L'intervention du juge des libertés et de la détention à postériori (15 jours après la première décision) ne fait que renforcer cette confusion. Le patient est donc moins perçu comme personne souffrant d'une pathologie que comme un danger. Auparavant nous pouvions déplorer une réduction du patient à sa maladie, aujourd'hui il y a en plus confusion de la personne souffrante à un sentiment d'insécurité qui ne cesse d'être invoqué par les politiques.

Objets d'exclusion par la peur nous ne resterons pas silencieux !

"objets" oui, car le vocabulaire utilisé dans ces textes de lois nous réduisent à cet état.

 

Cécile Aventurier

 

Article d'origine, contes de la folie ordinaire, édition de Mediapart : http://blogs.mediapart.fr/edition/contes-de-la-folie-ordinaire/article/170211/loi-1990-reaction

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Lettres de psychotiques (magazine Books-février 2011)

Après la publication de ses « Confessions d’un schizophrène (1) », Luiz Ferri Barros a commencé à recevoir des lettres des quatre coins du Brésil. Nous publions des extraits de deux d’entre elles, et l’une de ses réponses.

Le Livre

Un ange facteur. Correspondance de la psychose

par Luiz Ferri Barros 

Imago

Babel, 18 août 1993

Cher Lucas (2),

Le fait est que nous sommes comme frère et sœur. J’ai découvert que je souffrais de cette maladie et, grâce à votre livre, j’en ai eu la confirmation.

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>Ce jour-là, Sally a basculé ( Magazine Books-février 2011)

Courant dans le flot des voitures, sûre de pouvoir les arrêter du simple fait de sa volonté… Aujourd’hui pudiquement baptisée trouble bipolaire, la psychose maniaco-dépressive touche, comme la schizophrénie, 1 % de la population.

Le Livre

Le jour où ma fille est devenue folle

par Michael Greenberg 

Flammarion

« Le 5 juillet 1996, commence Michael Greenberg, ma fille a été prise de folie. » L’auteur ne perd pas de temps en préliminaires, et le livre avance promptement, de façon presque torrentielle, à partir de cette phrase introductive, à l’unisson des événements qu’il rapporte (1). Le déclenchement de la manie est soudain et explosif : Sally, sa fille de 15 ans, était dans un état survolté depuis quelques semaines, écoutant les Variations Goldberg par Glenn Gould sur son Walkman, plongée dans un volume de sonnets de Shakespeare jusqu’à des heures avancées de la nuit. Greenberg écrit : « Ouvrant le livre au hasard, je découvre d’invraisemblables griffonnages faits de flèches, de définitions, de mots entourés au stylo. Le Sonnet 13 ressemble à une page du Talmud, les marges remplies d’un si grand nombre de commentaires que le texte imprimé n’est guère plus qu’une tache au centre de la feuille. » Sally a également écrit des poèmes troublants, à la Sylvia Plath (2). Son père y jette discrètement un coup d’œil. Il les trouve étranges, mais ne songe pas un instant que l’humeur ou le comportement de sa fille soit de quelque manière pathologique.

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>John Strauss : « La réalité échappe aux manuels de psychiatrie » (Magazine Books-février 2011)

Ni la schizophrénie ni la psychose maniaco-dépressive ne peuvent faire l’objet d’une définition précise. Le danger est grand de donner aux mots plus de réalité qu’ils n’en ont vraiment, car la psychiatrie n’est pas une science. L’admettre lui permettrait de mieux explorer la subjectivité des malades, et donc leur traitement.

Books : Vous avez plus de quarante ans de pratique auprès de patients atteints de schizophrénie. En quoi consiste cette maladie ? Peut-on la définir ?

John Strauss : La schizophrénie est un mot en usage depuis un siècle environ pour désigner certains types de malades. On perd le sens du réel, on éprouve des hallucinations, on entend des voix, on délire. Mais, comme les autres mots utilisés en psychiatrie pour désigner telle ou telle forme de pathologie mentale, c’est une construction du corps médical. On veut croire que c’est un concept clair, qui désigne nettement son objet, mais ce n’est pas le cas. Beaucoup de définitions de la schizophrénie ont été données au fil du temps (1). Et il n’existe pas de frontière nette entre la schizophrénie et certaines formes de psychose maniaco-dépressive. Ainsi parlons-nous de trouble « schizo-affectif » pour désigner un état dans lequel le patient entend des voix et est en même temps hyperactif ou, au contraire, déprimé. On est alors quelque part entre la schizophrénie et la maladie maniaco-dépressive. De même, il peut y avoir des éléments de paranoïa dans une schizophrénie ou dans une maladie maniaco-dépressive ; mais la paranoïa peut ne relever ni de l’une ni de l’autre. Depuis quelques années, on a remplacé la notion de maladie maniaco-dépressive, ou manie, par celle de maladie bipolaire. Mais ce qu’on appelle « bipolaire » peut relever du maniaco-dépressif ou simplement du dépressif (lire ci-dessous « La mode du “bipolaire” »).

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>VST N°108 : CONTENIR OU ENFERMER (4E TRIMESTRE 2010)

L’approche sécuritaire devient la réponse privilégiée des décideurs politiques : enfermement en HP, chambres d’isolement, établissements pénitentiaires pour mineurs, rétention administrative à tout va… Pourquoi ce recul de deux siècles, ce retour à la psychiatrie d’avant Pinel et aux colonies pénitentiaires pour mineurs ? Certes, il y a et il y aura toujours besoin de cadres, de limites, de « non », de contenants. Mais parlons-nous alors de la même chose ?

 

Dossier coordonné par Dominique Besnard et François Chobeaux

Sommaire du N° : http://www.cemea.asso.fr/spip.php?article7187

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>Soutien au Mouvement des magistrats de France

Collectif des 39

Contre La Nuit Sécuritaire. 

 

Soutien au Mouvement des magistrats de France

 

 

Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire apporte son soutien total au mouvement de protestation des magistrats, à la suite des propos indignes du Président de la République. 


Comme à son habitude dans des circonstances analogues, nous l’avons constaté après le drame de Grenoble en novembre 2008, après chaque fait divers qui peut faire fructifier son populisme émotionnel et simpliste, ce Président se précipite et jette à la vindicte populaire des « responsables » immédiats sans aucune précaution, au mépris d’un travail d’enquête sur les faits. 


Il a instauré comme ligne politique l’attaque du lien social, la désignation de boucs émissaires sous prétexte de se placer du côté des victimes : les « schizophrènes dangereux », « les roms voleurs et fauteurs de troubles », les « monstres», et maintenant les professionnels. 


Tous coupables, devient l’axe essentiel de cette politique ! Diviser pour régner ?


Cette orientation politique a pour effet d‘attiser les haines, d’accroître le sentiment de peur, de favoriser les affrontements des citoyens les uns contre les autres, mais aussi de détourner l’opinion sur sa responsabilité dans la détérioration de la vie quotidienne, la précarité, la destruction des services publics, les conditions inacceptables des moyens affectés à la Justice, l’introduction d’un management dévastateur et une gestion stérilisante dans les hôpitaux, le grand renfermement des malades mentaux, l’amplification des inégalités, le règne de l’argent. 


Comme lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, il désignait immédiatement au mépris de tout élément de véracité, comme délinquants et cambrioleurs, les deux jeunes Zyed et Bouna qui venaient de mourir électrocutés dans le transformateur EDF victimes de leur peur de la police. 


Le mensonge servirait-il de politique ? 


Dans le drame de Pornic, au mépris de toute vérité des faits, il a été tenté d’abord de présenter le suspect de délinquant sexuel récidiviste ! 


Oui, un meurtre est toujours horrible ! 

Oui, un meurtre est toujours révoltant ! 

Oui, un meurtre est le signe d’une impuissance ! 

Oui, un meurtre est le témoin de la cruauté et du « désir » de destruction qui se niche au fond de chaque être humain. Les actes horribles, abjects de « bons pères de famille » qui se transforment en barbares en situation de guerre, nous l’ont bien montré.


La barbarie fait partie de l’humain, son côté obscur. 


La raison, le respect de l’altérité, la solidarité, l’hospitalité, l’accueil des diversités, peuvent être les outils pour limiter, réduire, empêcher autant que faire se peut l’expression de la barbarie humaine.


Alors laisser entendre que si un meurtre a été commis, il aurait pu être évité si « les responsables avaient fait leur travail », est un mensonge d’État. 


 

Les parents ont été désignés comme responsables de l’absentéisme scolaire, ou pire des actes de délinquance de leurs enfants. 


Les enseignants sont désignés comme responsables de l’échec scolaire. 


Les psychiatres ont été désignés comme responsables des actes de patients. 


C’est maintenant au tour des magistrats. 


A quand le tour du Président et du Gouvernement ? 


Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire soutient sans réserve le mouvement des magistrats par solidarité mais aussi pour être confrontés nous-mêmes, aux mêmes attaques, aux mêmes suspicions. À travers ce soutien il exprime ainsi la nécessité de rejeter avec force les propos indignes et récidivants de la plus haute autorité de l’État.


Lorsque celui dont la fonction fondamentale est d’être le garant du respect de la Constitution, se met pour la troisième fois au dessus de ces principes fondamentaux, ce fait pose une question gravissime sur le fonctionnement de nos institutions. 


Si le Président est un multi -récidiviste en la matière, quelle valeur, quel sens, les citoyens peuvent-ils alors donner à leurs conduites en société ?


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>UN PROJET DE LOI INFAME (communiqué de presse du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire)

Collectif des 39

Contre La Nuit Sécuritaire. 

 

UN PROJET DE LOI INFAME


 

 

Le conseil des ministres vient d'adopter un projet de réforme de la loi de 1990 sur les hospitalisations sous contrainte qui permettrait d’introduire l’extension de l'obligation de soin au-delà du temps de l’hospitalisation, c'est à dire y compris à domicile.

 

Le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire dénonce vivement le contenu de ce projet sous tendu par une seule et unique idéologie : « les malades mentaux doivent être traités comme des délinquants et des récidivistes voire des criminels potentiels ».


Le soin en psychiatrie n'est pas une succession et un assemblage de techniques. C'est un mensonge de faire croire qu'une sélection de « bonnes pratiques » professionnelles reproductible d'une personne à une autre soulagera la souffrance de chacun. Chaque sujet est singulier et appelle à une proposition spécifique de soin.


Un dispositif gestionnaire, policier et sécuritaire se met progressivement en place depuis plusieurs années et tend à se substituer aux véritables soins dont les malades ont besoin.

Donner l'illusion de répondre à la détresse des malades et à l'inquiétude des familles par un système de contrôle permanent est une imposture qui ne fera qu'aggraver les conditions d'accueil des patients et de travail des soignants.

 

Nous dénonçons cette dangereuse dérive qui interdit toute possibilité de construire un projet sanitaire de qualité pour l'avenir qui tiendrait compte de la singularité des situations.


Le collectif demande le retrait immédiat de ce projet indigne et appelle à une mobilisation la plus large possible des patients, des familles, des professionnels, et des responsables politiques pour le faire abroger.

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>De la santé mentale vers la psychiatrie

 

De la santé mentale vers la psychiatrie


En liminaire, les trois bases indissociables pour une psychiatrie de demain non ségrégative :


– La nécessité d’une formation spécifique

– Des personnes humaines pour soigner plutôt que des techniques instrumentales.

-Un budget global avec une enveloppe spécifique pour soutenir la spécificité de l’abord relationnel princeps en psychiatrie.


Depuis le rapport Piel et Roelandt, la psychiatrie se doit d’aller vers « la santé mentale ».


1) A quoi correspond aujourd’hui ce terme de « santé mentale » ? Quelles sont les logiques sous jacentes et ses effets ?


2) Comment comprendre qu’actuellement, en s’appuyant sur la logique santé-mentaliste les acteurs du champ social prônent toujours plus de « déstigmatisation » par le biais de la santé mentale alors que les nombre de personnes enfermées à l’intérieur des HP ou bientôt à leur domicile, ne cesse d’augmenter ?


3) Si la santé mentale voulait initialement en finir avec l’asile, les nouvelles logiques asilaires ne seraient-elles pas maintenant au cœur de la cité, dans nos rues, nos prisons et bientôt au domicile de toute personne un tant soit peu en marge avec les SSCA ?


4) Comment comprendre les SSCA sinon comme une adaptation économique compensant la diminution des moyens accordés à la psychiatrie, notamment en terme de soins à temps plein ?


5) Les patients les plus fous et les plus démunis seront-ils la variable d’ajustement de notre nouveau modèle de gestion de la folie ?


Sous couvert de déstigmatisation, c’est le grand retour de la ségrégation pour les plus fous d’entre-nous.


Par ailleurs, dans le préambule du projet de loi, la prostitution des mots concoure à parler de continuité de « soins » et d’accès aux « soins » alors qu’il ne s’agit que d’un égal accès à la contrainte et d’une continuité de la contrainte dans tout le champ social pour qui se décalera un peu des normes en vigueur.


Aujourd’hui, la psychiatrie gestionnaire n’est qu’une version affadie de la psychiatrie sécuritaire du discours d’Antony. Gestion et sécuritaire sont dans un continuum implicite.

D’une santé mentale psychiatrique à une santé mentale néolibérale Le terme de « santé mentale » ne recouvre pas une seule et unique réalité.


Il y a une grande confusion


Dans son origine d’après-guerre, la santé mentale est le concept de psychiatres progressistes qui veulent transformer les systèmes asilaires, en premier lieu les hôpitaux psychiatriques, en pratiques ouvertes sur la cité. C’est l’avènement des pratiques désaliénistes et de psychothérapie institutionnelle, fécondées par la psychanalyse et la prise en compte de la dimension politique et sociale de la psychiatrie.Le tournant gestionnaire des années 1980 allant de pair avec le climat de rigueur budgétaire, la « santé mentale » se déterritorialise de son origine psychiatrique pour progressivement couvrir tous les troubles ou autres pathologies de « l’adaptation ». En parallèle, c’est le retour du modèle objectiviste avec les tentatives de faire coïncider les pathologies psychiatriques avec des anomalies neurologiques, génétiques etc.


Le tournant est net à partir des années 2000 quand l’OMS ouvre le chantier de la santé mentale et que la France entreprend sa politique de « démocratie sanitaire ».

La santé mentale devient un paradigme qui vide la psychiatrie de sa substance pour se consacrer depuis 2009 à « la santé mentale positive », reléguant les pathologies les plus lourdes à des filières de handicap chronique où les patients psychotiques seraient figés une fois pour toute dans leur maladie.


Dès lors, la santé mentale ne va plus s’occuper de pathologies psychiatriques mais devra se consacrer à rendre les individus performants dans un climat de concurrence mondialisée. C’est le rapport remis à NKM en 2009.


Le santé-mentalisme : déni de la réalité psychiatrique ?


Tout cela s’appuie sur la création de nouveaux concepts comme : « autonomie, bien être, santé mentale positive, qualité de la vie, déstigmatisation » qui vont s’agencer peu ou proue aux logiques sécuritaires actuelles.


Selon le rapport du centre d’analyse stratégique remis à NKM en 2009, la santé mentale devient « l’affaire de tous », sauf des psys, relégués à la prise en charge de la santé mentale négative. Ce rapport est essentiel puisqu’il agence les visées concurrentielles de l’Union Européenne (Livre Vert, stratégie de Lisbonne) et les visées hygiéniste de l’OMS (plaidoyer pour la santé mentale).


L’objectif est le suivant, je cite : « avoir une population en bonne santé mentale pour remplir les objectifs stratégiques de l’Union Européenne » (livre vert de l’UE). C’est donc par l’avènement de la santé mentale « positive » que ce cadre normatif doit se déployer.


Ces normes ont-elles encore quelque chose à voir avec le soin psychique ? C’est ce que pense des fondations comme FondaMental qui n’ont pourtant plus pour perspective de soigner réellement les patients mais bien plus de créer un modèle exploitable facilement par les décideurs politiques, afin de normaliser les comportements.


Pour simplifier, les pathologies psychiatriques se calqueront sur le modèle des pathologies médicales. Rappelons la phrase introductive au rapport Milon : « Aux vues des progrès de l’imagerie médicale et des neurosciences, la partition entre neurologie et psychiatrie n’est plus de mise à l’heure actuelle ». Cette analogie est tout simplement fausse en pratique, pour qui voit encore des patients au quotidien. Il n’y a qu’à penser les spécificités du déni, de l’articulation avec le contexte social et environnemental etc.


Créer un outil de soin psychique qui se pense et se remet en cause au quotidien ne va pas sans poser de problèmes actuellement : les normalisateurs patentés ont alors l’outrecuidance de nous dire que ce n’est pas comme cela qu’il faut faire… Cela s’appelle la «certification». Par exemple, les certificateurs s’intéressent plus dans les hôpitaux psychiatriques aux « infections nosocomiales » médicales qu’aux réelles maladies nosocomiales psychiatrique que sont l’agitation, la violence, la chronicisation, la passivité etc.


Les centres experts « FondaMentalistes » promus actuellement, censés faire un diagnostic et mettre en place un traitement sont un non sens en pratique et d’une simplification ravageuse.

Ce cadre santé-mentaliste diffuse dans le champ de la psychiatrie mais ne prend pas en compte ses spécificités, et notamment l’impossible « choix rationnel des acteurs » chez les personnes en proie à des crises de folie : voilà l’impasse de la santé mentale.


Les personnes les plus en difficultés, celles que l’Union Européenne dénomme comme « des personnes mentalement diminuées » ( !) ne maximisent pas leur capital santé mentale… Les logiques présidant à leur existence ne sont pas tout à fait les mêmes que les logiques des « gens normés ».


Par ailleurs, la logique de l’OMS, sous couvert de rendre les individus en bonne santé, crée des normes hygiénistes marquant le retour d’une police sanitaire pour conduire les conduites des individus. Injonctions qui nous détournent de plus en plus du cœur de notre métier, dans le même temps, tous les savoirs faire spécifiques, comme la nécessité du lien thérapeutique singulier, ne sont plus à l’honneur.


Attention, l’individu statistique qui est à la base des logiques actuelles n’existe pas dans la réalité de notre travail.


Les impasses pratiques


Avec les patients psychotiques « aigus du quotidien », les projets se construisent dans le temps, singulièrement avec un lien de confiance et pas dans des centres experts.

C’est le strict opposé du projet de loi de défiance qui nous est proposé, où les soins psychiques se résument à une prise en charge standardisée pour des patients déjà « normalisés », où les professionnels se voient déresponsabilisés de l’engagement singulier dans les soins : protocole, loi…


Dans le même temps, les pratiques psychiatriques réellement accueillantes sont « stigmatisées » car, n’étant pas dans la norme dominante mais aux plus près des patients, pris dans leur singularité.

A défaut, tomberons-nous dans l’avènement d’une psychiatrie contrôlitaire telle qu’elle est proposée ?


Enfermer ou normaliser ceux qui résistent à la rationalité dominante, cela provoque de la violence, de l’exclusion, des sujets qui n’ont plus la possibilité de tisser du lien social.


Le reste du santé-mentalisme


Pour tourner rond, la rationalité santé-mentaliste doit se débarrasser de ce qui lui résiste, à savoir les fous avec leur folie encombrante. Mais en résistant, le si médiatique «schizophrène dangereux » paye dans son corps ces normes sociales ségrégatives… Que ce soit en prison, en rééducation thérapeutique, dans l’errance des rues, derrières des hauts murs sécurisés ou qu’il soit muni de bracelets de géolocalisation ou autre !


Pour finir sur l’exemple de l’implicite du modèle gestionnaire sécuritaire actuel : tous les termes politiquement corrects masquent un implicite de mise à l’écart des plus fous comme il a été formulé très tôt, en 2003, dans le rapport Cléry Melin : la question était posée de savoir ce que la société doit choisir : soigner le plus grand nombre ou soigner les personnes les plus gravement atteintes ?


Conclusion


Si les politiques ne s’interrogent pas sur cette « santé mentale » qui tente d’éradiquer ce qui lui résiste au cœur de la psychiatrie, les contrées ségrégatives pour la Folie continueront à se multiplier et auront vite fait de la transformer en Furie. Furie qui, à défaut d’être canalisée par les UMD, les injonctions de soins, les camisoles de force, les cellules d’isolement, ne pourra s’apaiser que dans leur mise au ban de la société.


Mathieu Bellahsen, psychiatre responsable de l’unité d’hospitalisation Alberto Giacometti, secteur de psychiatrie adulte 91G08

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>La Fnapsy ne soutient plus le projet des pairs-aidants : réponse du Centre Collaborateur de l'Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale

En préambule, nous notons que dans le rapport du bureau de la Fnapsy apparaît une confusion constante entre les quatre positions suivantes : usagers des services de santé mentale, responsable d’association d’usagers, chargé de mission national pour le projet médiateurs de santé/pairs.


INTRODUCTION – RAPPORT FNAPSY

« La FNAPSY participe, depuis plusieurs années, à l'étude du projet « Pairs-aidants » rebaptisé depuis « Médiateurs de santé-pairs »

L'approfondissement de ce projet a confirmé les craintes exprimées dès le début par la FNAPSY.

Un voyage au Québec a permis de constater que la réalité dans ce pays était loin de la présentation qui en était faite.

Le déroulement des premiers mois de travail a mis en lumière l'incommunicabilité entre professionnels et usagers, et la quasi impossibilité de créer et de faire vivre harmonieusement des équipes communes.

Tirant les leçons de ces constatations le bureau de la FNAPSY a décidé, dans sa séance du 7 janvier 2011, faisant suite à la réflexion du conseil d'administration du 27 novembre 2010, de se retirer de ce projet.

Le présent rapport a pour objet de diffuser les renseignements recueillis lors de cette participation et de détailler les raisons de cette décision ».



REPONSE DU CCOMS


Le CCOMS prend bonne note « des craintes exprimées dès le début par la FNAPSY » concernant ce projet. Il avait noté les réticences de celle-ci tout au long du projet expérimental et s’était étonné du ralliement positif de la FNAPSY à ce projet le dernier jour de la formation des pairs-aidants dispensée par l’équipe québécoise à Lille en septembre 2009. Nous l’avions attribué d’une part au dynamisme évident du projet québécois, et d’autre part à la demande de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) d’inclure la Fnapsy au projet. 


Le voyage d’étude au Québec de l’équipe projet « médiateurs de santé/pairs » en novembre 2010 a mis en évidence non seulement les limites mais également les réalités d’un projet innovant et de l’espoir qu’il suscitait chez les usagers et les équipes de santé mentale. 


Il est tout à fait possible de communiquer harmonieusement entre usagers et professionnels non usagers à la condition que chacun soit à sa place et dans son rôle. Les exemples québécois, américain et marseillais sont là pour le prouver (…)

 

document complet à télécharger (12 pages) : Reponse CCOMS

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>Une liste de discussion Du Collectif National de Résistance à l'Informatisation des Données Personnelles en Psychiatrie

 

 

Une liste de discussion du "Collectif National de Résistance à l'Informatisation des Données Personnelles en Psychiatrie",  – CNR-IDPPsy – est maintenant lancée. 

Créée à l'initiative d'Olivier  Labouret, elle a été réalisée par Esther Joly

Son objet : diffuser et discuter les informations et les actions concernant l'informatisation des données personnelles en psychiatrie. 

On peut considérer que tout ce qui concerne le "fichage" des populations, dans le champ de la médecine plus particulièrement, et tout ce qui concerne les questions juridiques, éthiques et politiques autour de la question de l'informatisation des données personnelles, intéresse aussi les "usagers" et les soignants de la psychiatrie : à chacun de "sélectionner" selon ces critères les informations méritant d'être diffusées.

Une liste est créée pour permettre à un ensemble d'individus réunis autour d'un projet ou d'un objet commun, d'échanger avec toutes celles et  tous ceux qui sont d'accord, simplement en répondant au message qui est  passé par l'adresse de la liste. La « netiquette » est à respecter pour faciliter les échanges. 

Vous pouvez modifier sur le serveur votre mode de réception, le format des courriels…

Le nom de la liste est « idppsy ».

L'adresse du serveur est : http://agora.chahut.info/wws  à inscrire dans votre navigateur sur la Toile.

Son nom : « idppsy »,

l'adresse : <idppsy@agora.chahut.info>

A votre première connexion sur la page web de la liste, vous entrez comme login, l'adresse mail que vous avez transmise pour participer aux échanges initiés par Olivier Labouret.

Le mot de passe nécessaire pour accéder au serveur, vous sera envoyé sur votre adresse mail, suite à votre première connexion et ainsi avec le mot de passe vous pourrez revenir et modifier vos choix de réception.

Avec votre mot de passe, vous pouvez explorer les variables que vous pouvez modifier. Nous pouvons aussi y déposer des documents pour les partager . Par exemple, vous partez en vacances, pour ne pas surcharger votre boîte mails, vous pouvez dire que vous ne voulez pas recevoir de mails.

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>Quand l'incompétence politique devient synonyme de victimisation…

Depuis 2007 les ministres de la santé à la solde de Nicolas Sarkozy se succèdent et se ressemblent conformes à une politique du "tout sécuritaire" sans aucune volonté de différencier les missions des institutions représentant notre pays, d'estimer à leur juste valeur les catégories de professionnels spécifiques, de respecter les usagers dans leur singularité.

On ne privatise pas "les soins aux malades mentaux" comme on privatise France Telecom ou la Poste me diriez-vous ? !

Par conséquent ne nous plaignons pas : "Circulez y'a rien à voir !" , "Enfermez-moi ces fous que je ne saurais voir !" ; j'appelle le patient  "tel numéro de telle chambre.." et maintenant  "L'affaire numéro tant (patient en HSDT ou HO) du JLD de tel TGI".

La politique de "rabotage budgétaire" connue de tous, touchant essentiellement les domaines de la fonction publique, ici les professions "de contact", "de prévention", "de continuité des soins"nous ramène à une simplification, à une causalité linéaire qui fait abstraction des causes multifactorielles d'une pathologie récurrente, anéantissant ainsi l'histoire, la singularité de la personne souffrant de troubles mentaux.

Nous devenons de facto des acteurs compétents sur le clavier de l'ordinateur, rentrant des données informatiques afin de mieux répertorier sur le catalogue DSM IV tous comportements "non conformes" à la société dite "bienveillante" au regard de la sécurité de ses citoyens.

Nous sommes 60 millions de consommateurs et c'est là l'essentiel d'une politique aux intérêts mercantiles ! Performance et rentabilité signent la condamnation de l'Etat providence et le démantèlement des structures qui font l'ouverture pour les usagers de la psychiatrie dans la cité ! Je suis indignée vous n'en doutez pas !

Plutôt que de reprendre d'une manière pédagogique pour toutes les parties intéressées par la maladie mentale tels que usagers, familles d'usagers, associations, professionnels de santé, les dernières enquêtes menées par "les missions nationales d'appui en santé mentale" dans les secteurs médico-sociaux (prévention en amont et en aval) et sanitaire (évaluer et traiter), les politiques s'en tiennent à la rubrique "faits divers" et font de "l'empirisme pavlovien" !

Par conséquent, vidons de son sens la qualité des soins auprès des personnes souffrant de troubles mentaux en supprimant les postes de psychologues, en diminuant le ratio "infirmiers pour un malade", en disqualifiant le travail relationnel des médecins psychiatres au profit  d'une rentabilité aux actes, en raccourcissant la durée d'hospitalisation au moment où l'alliance thérapeutique prend le pas sur la camisole chimique.

La question de l'autonomie du patient est une période transitoire qui demande beaucoup de temps. Le travail de lien dans la cité avec les différents partenaires médicaux sociaux permet la prévention des rechutes par le choix du lieu proposé de rencontre et la relation de confiance qui se tisse entre les personnes. Ce langage non conventionnel ou politiquement incorrect (puisque le temps c'est de l'argent) n'interesse pas la sphère politique. Sous couvert d'une jurisprudence, ils condamnent par là même toute l'originalité des organisations de secteur psychiatrique. La baisse des moyens humains et structurels mettent à mal le respect à la dignité de la personne souffrante.

L'obligation de soin n'a jamais permis d'avancer dans la relation soignant/soigné car il n'y a pas de place pour le désir du sujet. La sécurité et la liberté n'est pas là où Xavier Bertrand veut nous la laisser croire.

Cette réforme de la loi de 1990 fera obstruction au projet individualisé du patient. Il y aura malheureusement "un catalogue/statistique" d'inadaptés, une liste noire en somme. Je n'ose pas imaginer que le dépistage en santé mentale fera office de "casier judiciaire" au même titre que le dépistage de la délinquance des enfants proposé dés la maternelle.

Le JLD contrôlera au quinzième jour de l'admission sous contrainte le HO ou l'HSDT, la validité de leurs documents et la décision du JLD dépendra des fluctuations de l'actualité gênant l'ordre public ou des émotions élyséennes desquelles son leader nous a si bien habituées.

Lors de son discours d'investiture, Nicolas Sarkozy, s'adressant à la foule sympathisante fit allusion aux plus démunis : "Ne les laissez pas sur le trottoir !"  Cette phrase m'a frappée car elle se veut victimisante et humiliante pour ceux qui sont usés par l'exclusion sociale. La ligne de défense des familles et usagers en santé mentale est la juridicisation parce qu'elle leur apparaît comme une garantie de liberté. J'ai bien peur que ce ne soit tout le contraire sans compter que la qualité des soins en pâtira.

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>Rapport de la FNAPSY Sur le projet « médiateur de santé pair » Ex « pairs aidants »

On ne peut que se féliciter de la décision de la Fnapsy de renoncer à un tel projet.

Il est dommage que certaines personnes aient dû en passer par cette douloureuse expérience pour se rendre compte que comprendre celui qui est malade n'équivaut pas à le soigner.

Prendre pour modèle le Québec est dans "l'air du temps", on pourrait citer pour exemple une formation sur la prise en charge de la violence dispensée dans les hôpitaux qui s'effectue sur un modèle purement comportemental et qui fait violence aux équipes soignantes par son inadéquation au contexte hospitalier français.

Il est intéressant de noter que l'expérience ratée des pairs aidants bute sur la transmission, transmission aux équipes soignantes d'un indicible, sommé de répondre à un idéal soignant qui prend des allures surmoïques .


Quant aux patients, que leur transmettre lorsque l'on se retrouve étiqueté "médiateurs de santé pairs", de la complexité et de la singularité d'un parcours de vie qui doit tout à coup montrer l'exemple, coacher, soigner, soutenir, accompagner ?  On ne sait plus.

Cette double impasse illustre bien la nécessaire prise en compte de l'altérité dans toute démarche de soin.


La confusion des rôles et place de chacun entraîne un brouillage identitaire difficilement supportable, renforcé sans doute encore par les attentes de performance du dispositif et de ces objectifs.

En matière de soin psychique, il vaut mieux parfois faire confiance à l'inattendu qu'au protocole !

 

 

Rapport de la FNAPSY sur le projet « médiateur de santé pair » Ex « pairs aidants »

 

La FNAPSY participe, depuis plusieurs années, à l’étude du projet « pairs aidants » rebaptisé depuis « médiateur de santé – pairs » L’approfondissement de ce projet a confirmé les craintes exprimées dès le début par la FNAPSY .

 

Un voyage au QUEBEC a permis de constater que la réalité dans ce pays était loin de la présentation qui en était faite Le déroulement des premiers mois de travail a mis en lumière l’incommunicabilité entre professionnels et usagers et la quasi impossibilité de créer et de faire vivre harmonieusement des équipes communes.


Tirant les leçons de ces constatations le bureau de la FNAPSY a décidé, dans sa séance du 7 janvier 2011, faisant suite à la réflexion du conseil d’administration du 27 novembre 2010, de se retirer de ce projet. Le présent rapport a pour objet de diffuser les renseignements recueillis lors de cette participation et de détailler les raisons de cette décision.


1. Historique

Le projet Pairs aidants a été proposé à la FNAPSY par le CCOMS (service dépendant de l’EPSM de Lille Métropole) voici plusieurs années. Le CCOMS a proposé d’étudier le développement en France du concept de pairs- aidants existant au QUEBEC et obtenant, d’après les renseignements dont il disposait, de bons résultats.


Le concept de pair aidant repose sur l’idée que les personnes les mieux placées pour comprendre une personne en souffrance psychique sont les personnes ayant elles même été en souffrance psychique. La désignation initiale résultait de ce concept, il s’agissait de faire aider les personnes en souffrance par d’autres personnes en souffrance (pairs).


Le but recherché était de favoriser la réinsertion des personnes embauchées comme pairs aidants tout en assurant une meilleure prise en charge des autres usagers. Dès l’origine la FNAPSY a indiqué que, si le concept était intéressant, il soulevait de multiples et délicats problèmes de conflit d’intérêts et, en plaçant les médiateurs de santé pairs dans une situation ambiguë, risquait de provoquer des rechutes des pairs aidants.

 

Elle a cependant, compte tenu de la réussite annoncée du concept au Québec, accepté d’en approfondir l’étude et en particulier de participer à la phase d’expérimentation telle que décrite par la convention passée en 2010 entre l’EPSM de Lille Métropole et la CNSA. C’est dans ces conditions que deux usagers ont été embauché à mi temps par l’Epsm Lille Métropole, en tant que chargés de mission usagers, dans le cadre de ce projet rebaptisé entre temps « médiateurs de santé pairs ».


Le présent rapport est tiré de leur expérience. Celle-ci a mis en évidence :

 

– Une réalité de l’expérience du Québec très différente de la présentation qui en était faite.

– La quasi impossibilité de faire travailler harmonieusement des équipes mixtes. Ces deux points seront développés ci après.


2. La réalité de l’expérience québécoise

L’un des usagers a participé au déplacement organisé au Canada en novembre 2010 et a pu, en marge des conférences officielles de présentation, rencontrer des pairs aidants québécois et des représentants des associations qui les emploient. Il est ressorti de ces entretiens :

 

– Qu’il y a eu des formations de pairs aidant au Québec – Que ces formations ont été organisées sous forme d’un campus de 15 jours, en immersion, et non sous forme d’un cursus à temps partiel s’étalant sur plusieurs mois. De plus ces formations ont été entièrement faites par la représentante usager « pairs aidants » du Québec.

– Que, sur les 30 pairs aidant formés, une minorité a eu un emploi, les autres étant au chômage.

– Que, au surcroit, les personnes employées ne sont pas rémunérées directement par les hôpitaux mais par l’intermédiaire d’associations.

 

Ce qui modifie totalement leurs liens avec les équipes soignantes. Il résulte de ces constatations que l’expérience québécoise est notablement différente des présentations qui en avaient été faites et des propositions de transcription en France. Il en résulte également que cette expérience n’a pas répondu aux attentes qu’elle soulevait puisque seuls quelques pairs aidants sont en fonction au Québec, ce qui est très peu pour la population concernée, surtout après plusieurs années.


3. Les problèmes généraux posés par la formation d’équipes mixtes professionnels usagers

Les relations de travail sont souvent délicates et sont un des grands sujets de stress dans le monde moderne, même quant elles rassemblent des personnes de caractéristiques similaires. Tous les psychologues du travail savent que les conflits s’exacerbent dès que certaines personnes présentent des caractéristiques différentes et que la gestion de telles équipes exige beaucoup de doigté.

 

Par exemple pour que les personnes qui se sentent « supérieures » respectent les autres membres et pour que les autres membres ne se « sentent » pas méprisés Par exemple pour que les personnes qui ont une meilleure résistance ne se sentent pas exploitées et pour que les autres ne se sentent pas « noyées » etc..

 

Ces difficultés sont évidentes dans le cas d’équipes mixtes soignants/ usagers rémunérés Les soignants possèdent des compétences techniques qui manquent aux usagers Les usagers possèdent une connaissance interne de la maladie, une empathie, savoir qui ne peut pas se transmettre aux soignants

 

Même lorsque le paroxysme de la pathologie est passé, les usagers souffrent d’une résistance physique ou psychique plus fragile, leur demander de suivre le même rythme de travail que des collègues professionnels soignants, est le meilleur moyen d’entrainer une rechute.


4. L’expérience française

Le but de la convention passée entre l’EPSM Lille Métropole et la CNSA était de préparer, conjointement entre des soignants et des usagers, la formation et l’embauche d’une première promotion de « médiateur de santé pair » et le suivi de leurs premières activités.

 

Cette formation devait être conçue avec la participation d’usagers qui devaient veiller à ce que la formation, mais aussi les activités confiées aux médiateurs de santé pairs, soient compatibles avec leur sensibilité et amènent des avantages positifs pour chacun, soignés, soignants et médiateurs.

Ils devaient être, en particulier, garants du respect du premier principe d’Esculape : « primo non nocere » appliqué, en premier, aux médiateurs. Leur souci, au moment de leur embauche par l’EPSM, était que, pris dans les problèmes de leur gestion quotidienne, les chefs de service, employant des médiateurs de santé pairs, n’en viennent pas à oublier la fragilité de ceux-ci, et ne leur impose pas des compétences excédant celles qu’ils possèdent, ou un rythme de travail insoutenable compte tenu de leur fragilité (qui est également leur force).


Ils s’attendaient à partager ce souci avec les professionnels promoteurs du projet et en particulier avec le directeur du CCOMS. Tel ne fut pas le cas Outre les problèmes d’organisation résultant de l’inexpérience de l’équipe du CCOMS dans le travail avec des personnes basées dans une région différente de l’agglomération Lilloise, les chargés de mission usagers se sont heurtés à deux sortes de problèmes :

 

– L’impossibilité de prendre en compte la parole des usagers.

– L’impossibilité de prendre en compte la spécificité des usagers


4.1. L’impossibilité de prendre en compte la parole des usagers.

La FNAPSY avait, malgré ses réticences, accepté de participer au projet pour que celui- ci ne soit pas uniquement une construction intellectuelle dressée par des professionnels soignants, sans prendre en compte les besoins des usagers, qui sont souvent différents de ce que les professionnels peuvent imaginer.


Or il est apparu que, non seulement les chargés de mission usagers n’ont pu, au cours des quatre mois passés, obtenir une réunion sérieuse consacrée à la définition précise du projet, mais que, dans la conduite quotidienne du projet, les avis qu’ils exprimaient n’étaient jamais pris en compte, tout au moins facteurs de discussion.


Le dernier exemple en date concerne le recrutement d’un nouveau chargé de mission usager (à 80% du temps), pour lequel le CCOMS a décidé de convoquer des candidats avant que la convention EPSM FNAPSY ne soit discutée et signée, laquelle devait définir exactement la mise en place de ce poste..


4.2. L’impossibilité de prendre en compte la spécificité des usagers

Les personnes étant ou ayant été en souffrance psychique se caractérisent par leur moindre résistance physique et psychique. La FNAPSY a toujours attiré l’attention du CCOMS sur ce point Elle s’attendait à ce que des personnes averties, comme le sont les cadres du CCOMS, en tiennent compte.

 

Or tel n’a pas été le cas, le chef de projet considérant que « quand on fait parti d’un projet de recherche on doit être disponible » « et que les personnes doivent être guéries » Une telle conduite est la négation même de la prise en compte des particularités des usagers qui ne peuvent soutenir un rythme de travail élevé sous peine de rechute. (Ce qui a été bien spécifié au Québec, chaque pair aidant mentionnant ce fait).


Cette attitude a elle seule montre le caractère dangereux du projet. Si une équipe de chercheur, a priori compétente et informée, néglige à ce point l’un des paramètres clefs du travail avec les usagers, comment attendre un meilleur respect de la part de chefs de service moins informés ?


CONCLUSION

Il apparaît à la lumière de l’expérience qui vient d’être vécue, non seulement que le projet de médiateur de santé pair ne répond pas aux attentes qu’on avait placées en lui mais en plus qu’il sera nocif – Pour la santé des médiateurs qui, confrontés à un rythme de travail dépassant leur capacité et à la souffrance d’autrui, sans possibilité d’en référer à un pair ou à l’association qui est leur responsable, ont toutes chance de subir des rechutes.

 

– Pour les services qui seront désorientées devant ces particularités, et désorganisés par les rechutes à répétition de ces collaborateurs.

– pour les patients qui auront des difficultés à bien identifier ces «nouveaux professionnels » et leur rôle exact


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>Le gouvernement modifie son projet de loi réformant la psychiatrie

Dépêche APM – Santé mentale

27 janvier 2011

Dans une lettre rectificative présentée mercredi 26 janvier en conseil des ministres, le gouvernement introduit "un contrôle juridictionnel du maintien en hospitalisation sans consentement" dans son projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, déposé à l’Assemblée nationale en mai dernier.

Cette disposition répond en fait à la décision rendue le 26 novembre dernier par le Conseil constitutionnel, qui avait jugé que l'hospitalisation sans consentement d'une personne atteinte de troubles mentaux, à la demande d'un tiers, ne pouvait être maintenue au-delà de 15 jours sans l'intervention d'un juge.

Un contrôle systématique du JLD

Le projet de loi rectifié prévoit ainsi "l'intervention du juge des libertés et de la détention pour maintenir une personne en hospitalisation complète sans son consentement au-delà de 15 jours, que cette hospitalisation soit consécutive à son entrée dans le dispositif de soins sans consentement ou qu'elle intervienne après une modification de la forme de sa prise en charge".

En cas de renouvellement de la mesure par l'autorité administrative, elle sera systématiquement soumise à un nouveau contrôle du juge au moins tous les six mois, précise le communiqué du conseil des ministres.

Ce contrôle systématique s'ajoute aux possibilités d'intervention d'ores et déjà en vigueur, le juge des libertés et de la détention pouvant "intervenir à tout moment, sur toute mesure de soins sans consentement, à la demande du patient ou d'un de ses proches, et même d'office".

La réforme à l'œuvre dès cet été

Toujours dans le souci de mieux garantir la conformité à la Constitution du dispositif, poursuit le communiqué publié par l'Elysée, "la lettre rectificative adapte les dispositions du projet de loi initial relatives aux certificats médicaux requis préalablement à l'admission dans le dispositif de soins sans consentement".

L'ensemble de cette réforme concerne près de 70 000 patients par an et entrera en vigueur le 1er août 2011, rappelle enfin le gouvernement, en indiquant cependant que le chef de l'Etat a demandé parallèlement au ministre de la Santé "d'engager, avec les acteurs du secteur et notamment les usagers et leur famille, l'élaboration d'un plan pluriannuel de prévention et d'accompagnement des personnes souffrant de troubles mentaux".

Contre ce "millefeuille sécuritaire"

Du côté des professionnels du secteur de la psychiatrie, justement, on se montre plus que critique sur ces orientations, leSyndicat des psychiatres d'exercice public (SPEP) estimant que cette lettre rectificative ne fait rien d'autre qu'ajouter "une couche de contrôle au millefeuille déjà construit en introduisant dans le dispositif l'intervention du juge des libertés au 8e jour puis au 6e mois", sans pour autant "tirer les conséquences du positionnement du Conseil constitutionnel".

Rappelant d'ailleurs que, de son point de vue, le projet de loi présenté en mai 2010 esquivait déjà "le vrai débat attendu par l'ensemble des professionnels, des usagers et des familles sur la judiciarisation, et la mise en conformité de la législation française avec les règles européennes", le SPEP réclame donc toujours l'ouverture de véritables discussions "autour de cette question qui touche de près aux libertés publiques".

Pour une loi "équilibrée et juste"

Quant aux échéances imposées par la Haute Juridiction constitutionnelle, elles "ne doivent pas servir de prétexte pour faire passer ce texte à connotation trop sécuritaire", proteste le syndicat par la voix de son président, le Dr Angelo Poli.

"A défaut de pouvoir mettre en place ce débat d'ici à l'été, et pour respecter les attentes du Conseil constitutionnel, il suffirait d'intégrer [sa] demande aux textes [actuellement en vigueur] dans l'attente d'un texte concerté", issu des échanges auxquels le SPEP invite "solennellement l'ensemble des syndicats de psychiatres publics comme nous, mais aussi les syndicats de magistrats, aussi concernés que nous", à participer.

Et ce afin d'élaborer une "plate-forme commune qui servira de base de propositions et de négociations (…) pour la rédaction d'une loi équilibrée et juste".

 

Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, en ligne sur le site de l'Assemblée nationale, ainsi que son dossier législatif

 

 http://www.assembleenationale.fr/13/dossiers/soins_psychiatriques.asp

 

En complément à cette dépêche : 

 

>Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge : ETUDE D’IMPACT

Cette étude d'impact de 85 pages publiée moins d'un mois après la décision du conseil constitutionnel exprime les orientations à venir du projet de réforme de la loi de 1990 par le gouvernement Français. Morceaux choisis :


 

"…Sur le mode de soins (article L 3213-3 du code de la santé publique) La suppression des sorties d’essais, remplacées par un régime de soins sans consentement en ambulatoire ne devrait pas modifier sensiblement les nombres d’actes administratifs pris antérieurement. Au cours des années 2008 et 2009, le nombre d’autorisation de sorties d’essai a été respectivement de 4843 et 5236 au titre de la sectorisation parisienne.

 

En revanche, le projet de loi introduit une disposition qui impliquera davantage les préfets dans le suivi des patients. En effet, le texte prévoit, pour les patients en soins sur décision du représentant de l’Etat qui seront pris en charge selon une forme différente de l’hospitalisation complète, qu’un protocole de soins est adressé au préfet.

 

Ce protocole, qui sera établi par le psychiatre prenant en charge le patient, précisera les formes de la prise en charge, le(s) lieu(x) des soins et leur périodicité. En cas de modification substantielle de ce protocole, le représentant de l’Etat se prononcera pour savoir s’il autorise la modification de la forme de la prise en charge du patient.

 

Sur la levée de la mesure provisoire (article L3213-2, 2ème alinéa du code de la santé publique). A l’heure actuelle, seules les décisions d’hospitalisation d’office font l’objet d’arrêtés. La nécessité de se prononcer sur les levées de mesures provisoires intervenant avant le délai de 48h devra donner lieu à formalisation. C’est donc un doublement possible des arrêtés préfectoraux qui est à prévoir, compte tenu des 961 arrêtés précités et des 2000 conduites annuelles à l’IPPP."


…Cependant, les motifs de la décision du juge constitutionnel, et notamment ceux qui ont trait à l’insuffisance du recours actuel devant le juge, eu égard à son caractère facultatif, donnent à penser qu’un renouvellement de l’intervention de plein droit du juge judiciaire s’impose dès lors qu’une mesure d’hospitalisation contraignante est mise en œuvre dans la moyenne ou dans la longue durée.

 

Cette conclusion peut être corroborée par un parallèle avec le régime de la détention provisoire20 où, quand bien la durée globale de celle-ci a été encadrée par le juge, il appartient au juge des libertés et de la détention de se prononcer de plein droit sur la mesure selon une périodicité qui, selon les hypothèses, est de quatre ou de six mois."

 

Le document à télécharger : 2010-12-24 Et Impact Projet Loi

 

Lettre rectificative au projet de loi : http://www.assemblee-nationale.fr/13/dossiers/soins_psychiatriques.asp

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>PSYCHOLOGUES : praticiens ET universitaires, tous en grève !

Les psychologues praticiens sont en grève et organisent une manifestation aussi bien à Paris que devant les ARS des différentes régions, le 28 JANVIER 2011, co-organisée par la CGT, le syndicat Sud Santé, le Réseau National des Psychologues. "

 


Le mouvement du terrain est massif, du jamais vu depuis 10 ans. 


"La raison principale de ce mouvement est le démantèlement entier de notre profession, quel que soit le champ de notre exercice. L'Université n'en est pas exclue, avec la volonté de la disparition de la psychologie clinique et de la psychanalyse. Sur un fond de musique d'un avenir où le psychologue n'aura plus de place s'il continue à remplir sa mission première, mentionnée dans nos textes officiels (statuts …), qui est celle d' "œuvrer à l'autonomie de la personnalité". Dans la société actuelle, pas d'autonomie, pas de répit !"


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>Le gouvernement modifie sa réforme de l'hospitalisation d'office

 

(©AFP / 26 janvier 2011 13h52) 

PARIS – Le ministre de la Santé Xavier Bertrand a présenté mercredi en Conseil des ministres un texte qui introduit dans le projet de loi sur la psychiatrie l'interdiction de prolonger l'hospitalisation d'office d'un patient au-delà de 15 jours sans intervention d'un juge.

Cette "lettre rectificative" a été adoptée pour se conformer à un arrêt rendu le 26 novembre par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré un article du Code de la santé publique qui permettait le maintien de l'hospitalisation sans consentement à la demande d'un tiers sans l'intervention d'un magistrat, a rapporté le porte-parole du gouvernement.

Le nouveau texte "prévoit notamment l'intervention du juge des libertés et de la détention pour maintenir une personne en hospitalisation complète sans son consentement au-delà de 15 jours", a expliqué François Baroin en rendant compte à la presse des travaux du Conseil.

"Ce contrôle systématique du juge des libertés et de la détention s'ajoute aux possibilités systématiques d'intervention déjà en vigueur. Le juge peut intervenir à tout moment sur toute mesure de soin sans consentement à la demande du patient, d'un de ses proches ou sa propre initiative", a poursuivi le ministre du Budget.

Le projet de réforme de la loi concernant les personnes faisant l'objet de soins psychiatriques, qui concerne près de 70.000 personnes par an, doit entrer en vigueur le 1er août 2011.

Lors du Conseil des ministres, le chef de l'Etat a également "demandé que soit engagé un plan pluriannuel de prévention et d'accompagnement des personnes souffrant de troubles mentaux", selon M. Baroin.


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>Travail comparatif sur le nouveau texte de la réforme de la loi de 1990

(Rectificatif)

"Nous publions le travail d'Eric Bogaert, psychiatre de secteur ( Lot), membre de l'Union Syndicale de la Psychiatrie. Il s'est attelé à comparer le nouveau projet de loi sur les "soins en psychiatrie", texte qui "réforme" la loi de 90 sur les hospitalisations, avec le texte qui avait été adopté en Conseil des Ministres en mai 2010 et qui devait être présenté au Parlement à l'automne. 
 
Ce texte de mai avait été finalement ajourné sans cesse, du fait de la mobilisation importante organisée par le Collectif des 39, l'Appel Mais c'est un homme…, et globalement de nombreuses protestations de syndicats de professionnels. 
 
"L'avis "récent du Conseil Constitutionnel, fin novembre, largement discuté sur le site, a poussé le Gouvernement à retravailler ce texte, du fait de l'obligation faite de se conformer à la décision du Conseil Constitutionnel avant le 1er Août 2011. 
 
Nous proposons donc ce travail, à titre d'information, pour que chacun puisse avoir en main tous les éléments."
 
(Rectificatif : le document anciennement publié n'avait pas pris en compte les parties supprimées : nous publions le document d'origine au format PDF, qui lui contient bien les parties barrées du projets de loi, c'est à dire supprimées. Toutes nos excuses.)

Travail comparatif de la réforme de la loi de 1990 : 2011


 

 
 
 

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>Un point sur : les conséquences législatives truquées de la Décision du Conseil constitutionnel

Sur la Décision relative à l’intervention du juge judiciaire quant au maintien des hospitalisations sans consentement

Il s’agit de comprendre en quoi et avec quelle portée est truqué le texte rectificatif de projet de loi du gouvernement, présenté pour l’application de la Décision du Conseil Constitutionnel du 26 novembre 2010, constatant la nécessité d’intervention du juge judiciaire pour les maintiens en hospitalisations psychiatriques sans consentement au-delà de quinze jours (cf. les extraits de textes en Référence en pied du présent article). Le rédacteur du présent exposé est juriste de droit public. Il s’agit non pas d’un article au sens général du terme, mais d’un exposé partant de points de droit, et donc non de philosophie — à supposer que la philosophie puisse ignorer les points de droit, le droit ne dépend en rien de la philosophie (sauf s’agissant des textes supérieurs que sont les constitutions, textes et principes de cette nature, et les déclarations des droits de l’homme).

Une fois le trucage précité et sa portée exposés, il sera loisible au lecteur d’en tirer toutes inférences ou déductions de nature philosophique ou politique, à ce propos. Continuer la lecture de >Un point sur : les conséquences législatives truquées de la Décision du Conseil constitutionnel

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>Accueillir la folie ?

(Article publié sur le blog Mediapart "Contes de la folie ordinaire")

Accueillir la folie ?

 

Quelle ambition ! mais quelle … folie aussi ! Tout un art ?
Un slogan ou un projet ?
Un slogan ou une ambition ?
Un slogan ou une espérance ?

 

Accueillir la folie ! Que voilà un beau slogan en cette époque de rejet, de haines, de mises à l'écart, d'enfermement.

 

L'enfer me ment !

 

(..) Don quichotte mourut et descendit aux enfers, il y entra la lance en arrêt, et délivra tous les condamnés, comme il avait fait autrefois pour les galériens, et, en fermant les portes, il en arracha l’inscription, celle que Dante y avait lue, et il en mit une autre qui disait « Vive l’Espérance ! »

 

(Miguel de Unamuno « Du sentiment tragique de la vie chez les hommes et chez les peuples. » 1913) cité par Lucien Bonnafé in « Le Personnage du psychiatre ».

 

Mais qu’est ce donc qu’accueillir ?

 

Qu’est ce que l’accueil ?

 

La question va être débattue lundi 24 janvier 2011, de 19 à 21 heures, à la Maison des Métallos à Paris. Cette soirée, animée par Sophie Dufau, journaliste à Médiapart, s’inscrit dans les « Lundis de Médiapart », rencontre mensuelle proposée au public.

 

L’accueil, pourrez-vous dire, y a des endroits pour ça. Un comptoir, parfois avec un vitre blindée.

 

J’ai pour ma part envie de vous livrer mes cheminements autour d’accueillir, de l’accueil ?

 

Je distinguerai pour la question qui nous occupe, la folie, les souffrances et les désordres psychiques, les maladies mentales, trois façons d’accueillir en psychiatrie.

 

– une façon « médicale »

 

– une façon bureaucratique,

 

– une façon « thérapeutique ».

 

Voilà, ça y est nous y sommes : dans la caricature, dans l’outrance.

 

Je précise tout de suite que la « médicale » peut rejoindre la « thérapeutique ».Car pourquoi distinguer la médicale de la thérapeutique ?

 

Quelle est cette distinction que je propose :

 

       la médicale peut s’appuyer sur une posture dominante, le pouvoir du médecin vis à vis du malade, posture dominante pas forcément délibérément, elle peut être involontaire, voire inconsciente, ou encore s’appuyer sur une posture paternaliste. Il ne suffit pas d’être médecin pour se trouver dans ce cas de figure. Il y a des psychologues, des infirmiers, des psychanalystes même, si, si j’en connais ! C’est une posture qu’il faut sans cesse débusquer, repérer en soi. Elle peut aller se nicher dans ce puissant « désir de guérir » à l’œuvre en chacun de nous, qui va s’appuyer sur LE savoir.

 

       La thérapeutique : elle s’appuie sur « la fonction d’accueil ». C’est ce que je vais m’attacher à développer.

 

       La bureaucratique, que je vais rapidement décrire , pour nous en débarrasser, bien qu’elle ait tendance à envahir les pratiques, dans l’ère gestionnaire et managériale actuelle. Elle consiste essentiellement à se limiter à des questions d’horaires, de présence ! Mais une présence qui n’est pas ou peu incarnée, vivante. Une « présence hygiaphonique » ! Avec des tickets, des numéros ! Une présence où il s’agit de « faire ses heures ». L’accueil, c’est 9 heures – 17 heures par exemple.

 

La « fonction d’accueil » ? C’est d’abord une disposition, une disponibilité, une attention à l’autre, une possibilité d’être à l’écoute, une capacité à être en lien avec l’autre. Cet autre qui d’ailleurs n’est pas uniquement le patient. C’est aussi le collègue, l’autre soignant, ce qui va permettre de rendre vivante une équipe, de constituer un « collectif ».

 

Mais cela peut être soi-même ! c’est à dire cet autre en soi, cet « étranger » de l’intérieur, qui va parfois nous jouer des tours, nous surprendre, nous pousser à faire des choses bizarres, qui vont nous faire dire « mais qu’est ce qui m’a pris ? »…. d’acheter ceci ou cela, un objet dont on a nul besoin. Ou encore d’avoir dit une parole qui « ne me ressemble pas ». Ou encore, « mais pourquoi me suis-je mis en colère comme ça ? ». Alors oui, être en capacité d’accueillir ce qui nous surprend.

 

La fonction d’accueil est aux antipodes de l’assistance. La fonction d’accueil est à la relation humaine, ce que l’assistance est aux assurances privées ! L’assistance, c’est ce plus qui vous est « offert » si vous pouvez vous payer une bonne assurance.

 

La fonction d’accueil, elle, est gratuite. C’est un état d’esprit à l’égard de l’autre, cet inconnu, cet étranger, mon frère en humanité. En cela elle rejoint l’hospitalité.

 

L’assistance, dans le domaine du soin, consiste à dire au malade ce qu’il doit faire. L’éduquer, le rééduquer. Cette tendance est lourde. Elle est ancienne. Elle puise ses sources dans « la logique asilaire ». Ce que l’on appelle l’asile dans sa connotation péjorative. L’asile, dans sa dimension de refuge, d’abri, de protection, d’hospitalité, c’est tout autre chose. Donner asile, est alors du côté du Don. Sans attendre de réciprocité. Même si l’on sait que le don peut engendrer de la dette. Alors, la réciprocité va aller de soi. Mais elle n’est pas demandée.

 

La fonction d’accueil se soutient de la reconnaissance de l’autre en tant que tel, qu’il soit souffrant, malade, fou. C’est la reconnaissance de l’autre comme mon semblable, c’est à dire un autre humain, différent mais proche. C’est alors le reconnaître comme une personne responsable, en capacité d’autonomie. C’est reconnaître qu’il a « prise sur sa vie », qu’il est acteur, qu’il est pour quelque chose dans ce qu’il lui arrive, ce qu’il vit, traverse et donc qu’il pourra être pour quelque chose pour se sortir des épreuves auxquelles il est confronté, qui lui sont « tombés » dessus. Il pourra être l’acteur du traitement de ses difficultés psychiques, affectives, sociales, acteur de sa reconstruction.

 

C’est ici qu’entre en jeu ce que l’on appelle la « thérapeutique ».

 

Car bien évidemment lorsqu’il arrive à l’hôpital, ou dans le bureau du psychiatre, du médecin, il est envahi par quelque chose qui s’est imposé à lui. Il va d’ailleurs demander : « Mais qu’est ce qui m’arrive ? dites-moi ce que j’ai ! » D’être possédé par son délire par exemple, il se sent dépossédé de lui-même. Il subit. Ce qu’il vit, il le perçoit comme étranger à lui-même, extérieur. Il ne se sent pas du tout « acteur ». Il se sent agi. Il se sent comme un objet, un fragile esquif sur un océan déchaîné.

 

C’est en cela que la thérapeutique est un art, qui prend en compte la complexité de ce que vit le patient, la complexité de la relation dans laquelle le thérapeute doit se sentir engagé. C’est là où la formation à la relation, la prise en compte de l’Inconscient est indispensable. Et cette formation ne concerne pas que le médecin, le psychiatre, le psychologue. Elle concerne tous les soignants, infirmiers, assistants sociaux, ergothérapeute, tous les acteurs d’une équipe soignante. Car certaines problématiques, certaines situations, ne peuvent s’appréhender qu’à plusieurs, par une équipe, un collectif. Cela demande de la diversité, de l’hétérogénéité.

 

C’est dans la mesure où le soignant, le thérapeute aborde l’autre dans cet état d’esprit, qu’il pourra l’amener à prendre conscience de sa capacité à prendre en main ses affaires, sa vie, à traiter ses désordres qui l’ont conduit à se retrouver dans cet état, dans la souffrance, dans la pathologie qui l’ont mené à l’hôpital, en consultation, en psychiatrie, ces désordres psychiques qui l’ont poussé à des actes incompréhensibles pour les autres mais aussi d’abord pour lui-même.

 

C’est dans ce cadre, que le soignant peut « l’assister », dans le sens de le soutenir, être à ses côtés. Lorsque l’on parle d’un assistant dans un film, un assistant à la réalisation, on désigne là une fonction, c’est celui qui aide le réalisateur, le metteur en scène. Ce n’est pas l’assistant qui fait le film. Dans l’objet qui nous occupe, l’assistant c’est le soignant, le réalisateur, c’est le patient ! Le soignant, c’est celui qui aide, pas celui qui fait à la place de, ou qui décide pour l’autre.

Paul Machto

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>Gardons notre « âme », résistons au contrôle

 


Faisons comme Martin Amis dans «  la flèche du temps », racontons notre histoire à reculons :


«….On nous attacha sur des tables pour nous faire subir la Grande Opération. Le lendemain, je me rendis chez le Bienfaiteur et lui racontai tout ce que je savais sur les ennemis du Bonheur. Je ne comprends pas pourquoi cela m’avait paru si difficile auparavant. Ce ne peut être qu’à cause de ma maladie, à cause de mon âme.» 


Ainsi parle D-503, le personnage d’Eugene ZAMIATINE dans « Nous autres » un homme « des siècles futurs », qui vit dans une société qui impose fermement l’Harmonie sous la direction du Guide !


Rompons l’harmonie pour retrouver notre âme :


Nous sommes une équipe pluridisciplinaire , qui travaille dans un CAMSP ( Centre d’Action Médico – Sociale Précoce ) qui accueille des jeunes enfants de 0 à 6 ans en situation de handicap ou à risque de handicap et leurs parents. L’employeur, une association privée loi 1901 a installé un système de vidéosurveillance dans la salle d’attente et les couloirs donnant  sur les bureaux de soins contre l’avis de toute  l’équipe soignante et ce, malgré la gêne et les interrogations  exprimées par certaines familles. 


La démarche des familles qui s'adressent au CAMSP est difficile, délicate. Elle ne peut se faire que si le respect, la confidentialité des échanges sont assurés. Nous refusons au nom de nos valeurs éthiques que les patients soient soumis à cette surveillance qui ne se justifie ni sur un plan pratique ni sur un plan sécuritaire.

Par contre, nous ne voyons aucun inconvénient à ce que ces caméras soient en service lorsque l'établissement est fermé au public.


Au delà des arguments pragmatiques évoqués par l'employeur, nous tenons à défendre un cadre de travail qui garantit l'intégrité de l'écoute des parents et des enfants, conditions indispensables à l'acte thérapeutique. 


En outre, du fait du handicap ou des difficultés de leur enfant, ces familles peuvent souffrir du regard des autres. Certaines ont par ailleurs témoigné, y compris par écrit, de leur désapprobation et pose la question de l’atteinte à leur vie privée.


C'est pourquoi il nous semble tout à fait inacceptable, de filmer ou d'enregistrer des couloirs ou une salle d'attente qui sont des lieux d’interactions, de passage et de transition éminemment sensibles et qui font partie intégralement de la prise en charge. 


Nous revendiquons la confidentialité du colloque clinique, le respect des libertés démocratiques fondamentales, et le droit à une expression libre.

L’argument sécuritaire s’est peu à peu imposé dans le discours de l’association gestionnaire alors que nous tentions d’avancer notre point de vue de soignants.


Les caméras devenaient des outils efficaces pour combattre et prémunir l’établissement contre les vols, intrusions et dégradations des locaux. Bien évidemment, cet argument sécuritaire reflète une méconnaissance profonde de la population accueillie et du contenu du travail que nous proposons, fondé sur une relation de confiance et une alliance thérapeutique indispensable à nos missions.


Ce genre de dispositif qui participe de l’illusion d’un contrôle omnipotent, d’un œil qui ne se ferme jamais met à mal notre travail de soins et d’accueil.

Ces dispositifs déjà mis en place dans d’autres domaines se banalisent et s’introduisent maintenant dans le milieu de la petite enfance.


Le dialogue est quasi absent et nos demandes n’ont pas pu être entendues. Notre avis émane pourtant de professionnels qui ont une qualification et une expérience de terrain avérées.


La gestion associative, prenant modèle sur des méthodes de management issues de l’entreprise empiète et contrarie le projet de soins porté par l’équipe soignante.


Ces pratiques, au nom de la « modernité », vont à l’encontre de nos principes éducatifs et thérapeutiques.

Une telle logique de surveillance induit une désaffection du relationnel et une délégation des compétences parentales, tout en engendrant le danger d’une stigmatisation des conduites.




L’Équipe 

du Centre d’Action Médico Sociale Précoce

D ‘Épernay.

 

 

POUR SIGNER LA PETITION : http://www.mesopinions.com/Ensemble-contre-la-vid%C3%A9o-surveillance-au-Centre-d%E2%80%99Action-M%C3%A9dico-Sociale-Pr%C3%A9coce-d%E2%80%99Epernay-petition-petitions-3c6626a98d40916419821c640785fc16.html

 

 

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>Les évaluations nationales ne passeront pas par nous !

 

 

Le Réseau des enseignants du primaire en résistance diffuse ce jour un appel au boycott des évaluations nationales CM2 signé nominativement par 200 professeurs des écoles. Cet appel s’inscrit dans la continuité des actions collectives de résistance pédagogique organisées par les enseignants du primaire pour lutter contre les pseudo-réformes qui déconstruisent l’école publique.

 

Intitulé « Les évaluations nationales ne passeront pas par nous ! », cet appel est soumis à la signature des enseignants du primaire sur le site http://resistancepedagogique.org/site/.

 

Il est d’ores et déjà soutenu par plusieurs personnalités, telles Philippe Meirieu, Pierre Frackowiak, Hubert Montagner, André Ouzoulias, Laurent Ott et Daniel Calin.

 

Le Réseau des enseignants du primaire en résistance appelle les syndicats d’enseignants à soutenir cette initiative et à relayer largement cet appel auprès de leurs adhérents  et de l'opinion publique.

 

 

Contacts :

contact@resistancepedagogique.org

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>Vol au dessus d'un nid de tabous

C’est fou ce que parler de la folie peut engendrer. Le site du collectif des 39 s’est transformé l’espace d’une semaine en petite foire d’empoigne. Il faut dire que tout ça part d’un communiqué du collectif réagissant à la décision du Conseil Constitutionnel. Il semble acquis que le collectif se devait de répondre à ces messieurs dames nommés par Notre Président National (ainsi que deux autres de son bord qui tapent du marteau pour l’un à l’Assemblée et l’autre au Sénat). Les psychiatres parlaient donc au Conseil. Et les «usagers» hurlaient au loup. Parce que si vous n’êtes ni usager défenseur des usagers de la psychiatrie ou soignant en psychiatrie, vous n’arrivez pas vraiment à comprendre. D’un côté un texte un peu ampoulé (le communiqué), il faut bien le dire, pas toujours évident à saisir mais déclarant en substance que le juge n’a rien à faire dans l’accueil de la folie et que l’hospitalisation en psychiatrie n’est pas une privation de liberté équivalente à la prison. De l’autre, des usagers «emballés» par la décision du conseil qui déclarent la «guerre» aux membres du collectif, devenus pour le coup des suppôts d'une psychiatrie toute puissante voulant conserver ses droits à "enfermer comme bon lui semble".

 

Comment s’y retrouver dans tout ça ?

 

Non, c’est vrai à la fin, on n’y comprend plus rien ! Le collectif défend une psychiatrie humaniste, milite contre le sécuritaire en psychiatrie et voilà donc qu’ils montreraient leur vrai visage de «privateurs de libertés» en étant simplement pas d’accord avec une décision du Conseil Constitutionnel de mettre un juge dans le coup ? Parce que cette décision de mettre un juge dans la boucle serait obligatoirement «bonne», plus humaine, les aideraient plus, les patients ? Si l’on essaye de suivre le raisonnement du côté des patients, on arrive mieux à comprendre leur emportement positif d’un côté (le juge) et leur indignation de l’autre (le communiqué qui ne veut pas du juge). Ceux qui sont montés au créneau déclarent en substance que l’hôpital ne peut être un lieu de non-droit, que le malade doit avoir des droits comme les autres personnes et que par conséquent il est normal et indispensable qu’un juge puisse se pencher sur son cas après 15 jours d’hospitalisation sans consentement. Et que ceux qui ne seraient pas d’accord avec cette obligation du juge seraient en fait les défenseurs d’un hôpital psychiatrique privant de libertés les citoyens sans avoir la possibilité de se faire entendre par la justice, comme tout le monde. 

 

Ca se complique, mais on peut simplifier quand même, enfin pas vraiment.

 

Ce qu’il ressort de flagrant c’est la vision très légèrement différente de l’hospitalisation qu’ont les usagers et les soignants. Du côté des premiers, l’hospitalisation sans consentement est une privation de liberté anormale puisque basée sur des critères purement médicaux. De l’autre, une obligation médicale. L’accord des deux ne paraît pas simple. Parce que l’hospitalisation dont tout le monde parle c’est celle de quelqu’un qui vit la folie. Pas juste quelqu’un qui a un bobo : un fou quoi. Un délirant qui voit des trucs que les autre ne voient pas ou croit qu’il est le messie, ou en communication avec une puissance extra-terrestre, que sais-je encore ? Peut être quelqu’un qui a lancé autour de lui qu’il allait se supprimer aussi. Ce quelqu’un inquiète ses proches, qui l’amènent voir le médecin et son hôpital plein de blouses blanches. Et il ne veut pas rester dans l’hôpital, pour peu qu’il soit convaincu d’un complot à son égard avant d’arriver, on comprend qu’il ne veuille vraiment pas. Alors la question, c’est : qu’est-ce qu’on fait ? On le laisse partir s’il veut pas rester ? Inquiétant quand même, et puis les proches, ils vont avoir vraiment la trouille. Le garder, oui, mais il veut pas. Bon, on le garde contre son gré et on tente de faire qu’il arrête de penser que tout le monde entend ses pensées ou que les voix qui l’insultent cessent. Donc c’est sans son consentement. Mais c’est pour le soigner. Mais il n’a plus le droit de faire comme il veut. Oui, mais il est pas en mesure de savoir ce qu’il veut parce qu’il est délirant ! Ah le dilemme. C’est insoluble cette affaire, non ?

 

Et si le problème n’était pas que le patient soit privé de liberté ? 

 

Oui, ce n’est pas très politiquement correct de dire ça, mais quand même. L’accueil de l’hôpital psychiatrique pour les gens en crise (et donc en HDT ou en HO), c’est pyjama, gros médicaments qui assomment, personnel pas en forme parce qu’en sous-effectif, locaux des années 60 et attente que la nuit vienne remplacer le jour et vice-versa. C’est sûr qu’en terme d’accueil, on pourrait faire mieux. Et là, on se dit qu’avec des conditions aussi minables et une thérapeutique à peu près inexistante, le patient, il se sent nié. Il a la sensation d’être un taulard, avec des blouses blanches au lieu de matons. Pour le reste, le cadre est proche de la taule, surtout si il a passé quelques jours dans la chambre d’isolement, encore plus si il a été mis en contention : attaché à son lit comme un animal rétif. Alors, maintenant, grâce à la décision du conseil constitutionnel, il aura son joli dossier, le patient, qui sera envoyé à un juge, après 15 jours. Le juge va vérifier que tout est bien conforme. A quoi ? On ne sait pas, mais il vérifiera. Là, je tiens à dire que pour l’observateur extérieur c’est assez bizarre, on ne comprend pas vraiment ce que ce juge va faire si il estime que c’est pas conforme malgré que le psychiatre dise qu’il est pas guéri, le patient. Demander à ce que le patient sorte ? Contre l’avis du psychiatre ? Ah. Et si le patient pète les plombs dehors le lendemain ? Rebelotte ? Les tiers qui le ramènent, ou les forces de l’ordre qui l’incarcèrent. Bon, la question ne se pose pas puisque c’est un juge et que la liberté, les droits de l’homme ont été respectés. Essentiel ça, les droits de l’homme, une caution imparable. Et si les juge vérifient tout le temps que tout est conforme, on aura une psychiatrie…conforme. Donc les locaux des années 60, les gros médicaments et les chambres d’isolements pourront tourner sur elles-mêmes avec des soignants en sous effectifs qui travaillent 15 heures d’affilées au milieux de patients bien protégés par la justice et les droits de l’homme. Hourra ! Victoire !

 

Conclusion sur une «possibilité probable» de l’utilisation du juge comme garantie imparable (aux soins ambulatoires contraints).

 

J’ai ouï dire qu’au printemps une belle loi sur la santé serait votée par la majorité du président de tous les Français. Dans celle-ci seront inscrites quelques petites choses «amusantes» pour garantir la sécurité des malades mentaux et de la société qui entoure les malade mentaux. Oui, on protège les deux, c’est mieux. Il y aura, par exemple, l’obligation de soins. C’est à dire que le patient schizophrène rentré en HDT pourra sortir de l’hôpital avec la garantie qu’un juge aura bien vérifié son dossier. Mais une fois dehors il sera sommé d’aller prendre des médicaments. Mais attention,  avec la justice qui aura bien vérifié que tout est conforme, que les droits de l’homme auront bien été respectés. Le bracelet électronique sera utilisé dans le cas où le schizophrène aura été violent ou aura donné des «signes de dangerosité». Cela aussi aura été validé par un juge. Et cette mesure de bracelet sera encadrée par le droit, pour le bien de la personne et de la société. Personne ne pourra dire que forcer des malades mentaux à prendre des médicaments, sans être enfermés à l’hôpital, avec la possibilité de sortir d’une hospitalisation sous contrainte grâce à un juge est une mauvaise chose. Puisque tout aura été vérifié, mis en conformité avec les droits de l’Homme ! Quant à les obliger à prendre des médicaments, puisque la justice sera passée par là et que les patients ne seront plus enfermés abusivement, où est le problème ? 

 

Pour finir sur une note plus optimiste et moins ironique : la question de l’accueil des patients en HDT ou HO semble beaucoup plus centrale que l’apparition d’une justice entourée d’un vernis «droit de l’hommiste». De l’accueil de ces patients, mais aussi des soins réels apportés au delà du traitement de crise (on ne parle plus de psychothérapie institutionnelle, c’est impossible en HP ?)

 

Qu’en est-il de la formation du personnel ? De la qualité relationnelle entre ces personnels et les patients ? A quand une réelle volonté de moyens pour permettre que les patients sortent le plus tôt possible de ces moments difficiles de mise à l’écart ?

 

Patients qui pourraient effectuer un «séjour contraint» mais respectueux, humain, thérapeutique et accueillis simplement comme des personnes en souffrance par des personnels soignants bien formés et en nombre suffisant ?

 

 

P.H

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>Décision du conseil constitutionnel sur l'hospitalisation sous contrainte : les soignants réfléchissent…(Interview Vidéo)

Le Conseil constitutionnel a censuré vendredi 26 novembre un article du code de la santé publique, estimant que l'hospitalisation sans consentement d'une personne atteinte de troubles mentaux ne pouvait être prolongée au-delà de quinze jours sans l'intervention d'un juge. Cette décision doit être appliquée avant le 1er juillet 2011.

Cette décision fait débat dans le monde de la psychiatrie : la crainte d'une "judiciarisation des soins en psychiatrie" se confronte à une forme de victoire du droit pour les patients, sachant que la loi de 1990 ne laisse actuellement qu'au seul tiers et au psychiatre le droit de déterminer la sortie d'un patient hospitalisé en HDT. 

Ce sont donc les soins sous contraintes qui sont peut-être au cœur de cette décision du conseil constitutionnel, et à termes, les nouvelles procédures d'obligations de soins psychiatriques en ambulatoire poussées par le chef de l'état depuis son discours du 2 décembre 2008.

A question complexe, réponse complexe : nous sommes allés demander à Paul Machto, Médecin Psychiatre, responsable du centre de jour de Montfermeil (Unité d'accueil de jour du 15ème secteur de Seine Saint Denis) et membre du collectif des 39 ce qu'il pensait de cette décision.

Interview de 14 minutes, le 01/12/2010 :

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>Loi pour la désaliénation et limitation des internements abusifs en Argentine !

  • Argentine-

Viernes, 26 de noviembre de 2010

 

Le projet de désaliénation 

et de limitation des internements abusifs 

est désormais une loi.

 

Un changement de paradigme en santé mentale.

 

Le Sénat a sanctionné la nouvelle Loi de Santé Mentale qui interdit la création de nouveaux asiles et promeut des lieux alternatifs de soin. Les internements se feront désormais dans des hôpitaux généraux qui devront comporter des services spécifiques.

Par Pedro Lipcovitch

 

La nouvelle Loi de Santé Mentale selon laquelle « est interdite la création de nouveaux asiles ou institutions d’internement monovalents, publics ou privés » a été sanctionnée. Elle promeut des dispositifs alternatifs comme les « maisons de vie en commun et les hôpitaux de jour ». Elle modifie le Code civil pour empêcher les internements de personnes en raison de leur « dangerosité ». Les internements sous contrainte sont limités et soumises à un contrôle par un organisme de révision auquel participeront des associations de défense des droits de l’homme. La loi exige que les internements, toujours de courtes durées, sont effectués dans les hôpitaux généraux : ceux-ci – si la loi s’applique – ne pourront refuser de recevoir ces patients, ce qui serait « considéré comme un acte discriminatoire ». De la même façon, le système des incapacités est modifié : jusqu’à présent, une personne qui était déclarée incapable d’administrer ses biens, en situation de crise, pouvait être privée de ses droits pour toujours. De plus, les professionnels et les employés d’institutions psychiatriques auront « la responsabilité d’informer le juge et l’organisme de révision de tout « traitement indigne ou inhumain ».

 

Les institutions monovalentes qui existent déjà « devront s’adapter aux objectifs et aux principes de la loi, « jusqu’à leur remplacement définitif par des dispositifs alternatifs ». A la différence des autres lois dans le monde, celle-ci ne conduit pas à interdire purement et simplement l’internement dans ces institutions.

Pour faciliter les sorties, la loi requiert de « promouvoir les services d’inclusion sociale et professionnelle après la permission de sortie institutionnelle : elle exige une « attention particulière aux problèmes de logement, avec l’appui des organisations familiales et communautaires, les maisons de vie en commun, les hôpitaux de jour, les coopératives de travail, les centres de formation et les familles tutrices ».

 

Les hospitalisations sous contrainte requièrent désormais une évaluation interdisciplinaire alors que sous le régime antérieur la décision de la psychiatrie était suffisante. Le juge doit désormais autoriser chaque hospitalisation, mais il perd le pouvoir d’ordonner celles-ci. De la même façon, l’autorisation du juge pour les sorties, est supprimée. « Dans beaucoup de province, les sorties des patients se font avec retard parce que le juge ne l’autorise pas » explique Leonardo Gorbaez, qui, en tant que député, a présenté le projet original et qui est aujourd’hui assesseur à la direction du Cabinet de la Nation.

 

Conceptuellement, le Code civil a été modifié pour remplacer le critère d’internement qui obéissait à la notion de « dangerosité pour soi-même et pour les autres », par le concept de « risque sûr et imminent ». Cette disposition a été requise par deux fois par la Cour Suprême de Justice.

 

Au-delà de 90 jours d’hospitalisation sous contrainte, si l’institution persiste à maintenir la personne enfermée, la loi exige un second avis, à la charge de l’organisme de révision qu’elle a créé. Si cet organisme se prononce contre cette décision, l’institution devra laisser le patient en liberté. De plus, les patients, leurs avocats ou leurs familles ont le droit d’accéder au dossier clinique et de prendre toutes décisions en accord avec le traitement.

 

La loi exige que les internements se fassent en hôpital général. « Le refus de celui-ci d’hospitaliser des patients pour le seul fait de problème de santé mentale sera considéré comme un acte discriminatoire ».

La loi ordonne également de réaliser un recensement national des personnes internées en institutions publiques ou privées. « Les cliniques privées sont les moins contrôlées, du fait que les inspections se limitent aux conditions de celles-ci : le recensement déterminera s’il y a des personnes séquestrées de fait.

 

L’organe de révision inclura des représentants des associations d’usagers et des familles, des professionnels et des travailleurs de la santé mentale, des organisations de défense des droits de l’homme, des défenses officielles et du pouvoir exécutif. Ses fonctions incluront de « superviser d’office ou à partir de plaintes de particuliers les conditions d’internement dans la sphère publique et privée ».

De plus, « les membres, professionnels ou non, de l’équipe de santé, ont la responsabilité d’informer l’organe de révision et le juge de tout traitement indigne ou inhumain de patients. Cette procédure pourra se faire avec la garantie de protection de l’identité.

 

Le régime des incapacités est également modifié : « jusqu’alors, remarque Gorbaez, une personne en crise, n’étant pas en mesure d’administrer ses biens immobiliers, pouvait être déclarée dans l’incapacité de jouir de tous ses droits personnels, comme par exemple ceux de se marier ou de voter, généralement à vie. La nouvelle loi stipule que l’incapacité ne pourra s’étendre au-delà de trois ans, que l’on devra justifier les fonctions et les actes en question, et veiller à ce que la déclaration d’incapacité personnelle soit la plus courte possible ».

 

La loi est « d’ordre public », ce qui implique qu’elle devra être appliquée à toutes les juridictions du pays, sans requérir une adhésion spécifique. Elle avait reçu la sanction des députés depuis l’an dernier et elle a été adoptée par la Sénat hier avec une seule abstention, celle du radical Nito Artaza. La loi a été explicitement appuyée par l’Organisation panaméricaine pour la santé » (OPS)  et par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

 

(Traduction : Patrick Coupechoux)

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>Pour une politique en santé mentale non hygièniste…

 

Avoir fait mes premiers pas dans le monde de la folie dans un établissement géré par les « Sœurs de St Joseph de Cluny » à Limoux (11) a failli stopper mes études d’infirmière psychiatrique. Les rites judéo-chrétiens agissent insidieusement en dogme bien orchestré, cherchant la victime et son bourreau. Je veux dire par-là que l’autorité engendrée par le port du vêtement et de la cornette en imposait aux malades et aux soignants. Dire que je vivais à la « même enseigne » que les hospitalisés n’est pas exagéré.

 

 L’entretien des locaux duraient trois semaines sur quatre, une éternité ! Pendant la semaine d’infirmerie, la méthode, la science enseignée, l’observation clinique et  la collaboration directe avec le médecin devenaient un privilège. Tout ceci se passait en 1970/1974. La politique de secteur existait dans un ailleurs, Paris 13e.

 

L’information ne circulait pas, les évènements de mai 68 amélioraient nos conditions de travail sur un plan national. Les malades touchaient le « pécule » une rémunération dont ils ne pouvaient pas pour la plupart profiter car les sœurs ne concevaient pas l’ « autonomie » du patient comme un objectif à atteindre. Pour les soignants, la pensée contradictoire signée une atteinte à la hiérarchie instituée.

 

Les dortoirs accueillaient 60 à 90 patients. Les mesures d’hygiène primaient sur la relation soignant/soigné perçue alors comme une perte de temps. Le post-taylorisme c’était mieux !

 

            La loi de 1838 liée aux internements psychiatriques ne faisait pas grand bruit. Les malades chroniques issus dans leur majorité d'un milieu rural, étaient placés par leur famille qui elles-mêmes versaient une « pension » à la congrégation et un peu plus pour remercier le seigneur.

 

Tout ceci sans un encadrement infirmier critique de son environnement, mais plutôt à la recherche d’un bâton de maréchal. Certaines infirmières dont l'ami avait connu les horreurs de la guerre d’Algérie me rappelaient non sans animosité mes origines d'immigrantes.

 

La peur me serrait le ventre si une patiente traitée pour épilepsie testait à juste titre mes faiblesses d'une distance dans le trop ou le pas assez. La difficulté première résultait d’une impossibilité à trouver les mots apaisants car le monde autour de moi n’était qu’agitation, contention, enfermement, électrochocs sans curarisation, chocs humides par injection d’insuline pour les jeunes schizophrènes, et cocktails de sédatifs puissants en camisole chimique. Vingt ans après la découverte des NRL, les troubles bipolaires et l’épilepsie comme symptôme des déficients mentaux constituaient le plus grand nombre des pathologies mise à part les démences séniles comme nous les appelions autrefois.

 

 La psychothérapie en était à ses balbutiements.. Pourtant la nécessité d’apporter un réconfort par la parole qui accompagne le geste technique s’avérait nécessaire. Fallait-il encore se connaître, avoir dépasser ses problèmes existentiels et ne rien dire plutôt que de dire n’importe quoi !

 

Quand certains professionnels de la santé font référence aux trente glorieuses, c’est un tollé général ! Peut-être ressentent-ils une nostalgie des moyens,  le besoin d'une reconnaissance en tant que soignant ? Ou peut-être adoptent-ils une attitude de renoncement ?

 

Si j’ai choisi cet épisode alors que d’autres non moins plus simples m'ont permis la rencontre avec l’autre, l’expérience "d’une réalité partagée" , du discours contenant qui ne s’improvise pas, du soutien moral et  souvent de situations de "violence physique" comme expression de l'angoisse du soigné nécessitant chez le soignant une supervision psychanalytique, c’est parce que je ne souhaite pas que notre société nous mette à la poubelle !

 

Je désire que les structures de transition et le personnel qui les fait exister,  puissent « continuer » sans que la direction/entreprise oblige ces mêmes soignants à  pourvoir des  postes supprimés, au pied levé, vers d’autres spécialités. L’hôpital psychiatrique ne doit pas disparaître, appelons le : « refuge », « asile » en tout cas un lieu de soins de psychothérapie institutionnelle où peut s'exprimer la folie, un dedans sécurisant pour que la frontière avec un dehors devienne possible tout aussi accueillant. Le patient devrait pouvoir se situer sur un entre deux pour re-tisser un lien social. Cela me paraît indispensable (CMP)

 

Les traitements médicamenteux ne peuvent faire l’économie de la parole, de la relation. Il faut du temps et encore du temps pour que les personnes en souffrance se reconstruisent…

 

 "Ce qui ne vient pas à temps dans le symbolique arrive plus tard dans le réel" (J. Lacan)

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>Non à l'instauration de juges d'application des soins !

 

La décision du Conseil Constitutionnel a eu un effet de sidération et de confusion sur les soignants en psychiatrie pour la raison qu'elle soulève un paradoxe qui n'est certes pas nouveau, mais qui était tant bien que mal traité au cas par cas jusqu'à présent dans la confiance relative aussi bien envers la justice qu'envers les psychiatres.

Cette décision a immédiatement comme corollaire que les placements sont avant tout des privations de liberté.

Là il nous faut réfléchir ensemble à la différence qu'il y a entre protection sociale discutable et qui doit être discutée et privation de liberté qui serait de fait reconnue par le contrôle judiciaire. 

Cette décision veut dire que l'acte de protection sociale par HO et l’acte de protection d'une personne par HDT ne seraient plus assumés par la civilisation, mais par un "état objectivable dans son écart par rapport à une norme"  puisque ce serait le trouble en lui-même, expertise à l'appui, qui orienterait la vérité judiciaire chargée de relier nature du trouble et privation de liberté. 

Les personnes atteintes de troubles mentaux seraient ainsi, au nom du contradictoire, condamnées ou relaxées, en ce qui concerne leur placement. L'hôpital psychiatrique fonctionnerait alors comme un lieu de privation de liberté c'est-à-dire une prison et la folie comme une faute punissable! 

Avec les mesures d’HO ou d’HDT, nous ne  privons pas les patients de liberté, nous les écartons de la société pour nous protéger de leurs actes ou pour les protéger d’eux-mêmes et cela doit rester l'absolue exception. 

Qu'une personne ainsi placée considère qu'on la prive de liberté c'est son droit le plus strict, et elle doit pouvoir obtenir un droit de recours juridictionnel qui doit lui être offert quel que soit son état, et cela, sans délai, c'est un principe de séparation du soin et du droit qui ne doit souffrir aucune exception.

Nous ne pouvons qu'être inquiets par la prise en compte dans nos démocraties de la question posée par l'accueil et les soins à dispenser auprès des personnes présentant des troubles mentaux quand nous constatons que ces derniers sont essentiellement proposés à la discussion sous l'angle sécuritaire ou judiciaire.

L'idée de perfectionner la loi de 1990 focalise la réflexion sur le temps de la contrainte, alors qu'elle devrait principalement porter sur les traitements, les prises en charge, l'accueil de la folie. Cela risque d'amplifier ce qui s'est produit dans la suite de la loi de 1990 qui n'a en rien amélioré les pratiques psychiatriques. Bien au contraire elle n'a fait qu'augmenter pour une part sensible le nombre de recours au placement en même temps qu'elle a, par effet d'aspiration, diminué les investissements de prévention, de club thérapeutique, de suivi, avec l'accroissement scandaleux du nombre de patients mis en errance, SDF, ou se retrouvant en prison.

Toute la psychiatrie moderne depuis la symbolique de l'acte Pinelien libérant le fou de ses chaînes, très précisément la symbolique qui initie la soustraction de la conception de l’acte soignant d’une contrainte des corps, n’a cessé de s'en départir contre le retour cyclique d’une psychiatrie hygiéniste, dégénérescence incluse, visant à établir une Raison comme norme avec les procédures de rejet et de traitement obligatoire qui en découlent, contre une fiction politique de la Raison, politique partageable parce que discutable et qui doit en permanence s’enrichir par la confrontation à ses limites, en particulier, avec ce que la folie interroge en nous. 

C’est en ce sens que nous refusons de faire des moments exceptionnels de la contrainte le noyau organisateur de la psychiatrie. Le recours judiciaire doit être du côté des patients et non du côté d’un perfectionnisme procédural qui ne ferait que déplacer la question de la folie vers une vérité judiciaire de son traitement. 

C’est en ce sens que nous refusons de voir les pratiques soignantes organisées sous le modèle de l’enquête judiciaire et de la peine. La folie n’est pas en soi un délit ou un crime.

Nous refusons les centres de rétention de 72 heures construits sur le modèle de la garde à vue.

Nous refusons la mise en place d’un juge d’application des soins sur le modèle du juge d’application des peines.

Nous refusons les traitements ambulatoires obligatoires construits sur le modèle de la liberté conditionnelle.

Bref nous refusons de participer à l'organisation « contrôlitaire du soin ».

 

Le Collectif des 39 Contre la Nuit Sécuritaire

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>Toulouse: levée du mouvement de grève dans un hôpital psychiatrique

 

Des personnels infirmiers en psychiatrie de l'hôpital Marchant de Toulouse, qui campaient depuis 66 jours devant leur établissement pour réclamer des créations de postes de soignants, ont levé jeudi leur mouvement après avoir obtenu pour partie satisfaction.

L'Agence régionale de santé (ARS) avait débloqué vendredi une enveloppe exceptionnelle de 423.000 euros, mais les infirmiers grévistes du seul syndicat SUD avaient continué à se relayer pour dormir devant l'hôpital car selon eux "l'affectation des ces ressources n'était pas encore définie selon notre priorité d'augmentation du personnel soignant".

Après une assemblée générale jeudi, les personnels grévistes qui "assuraient la continuité des soins" ont décidé "devant l'affaiblissement de la mobilisation pendant la période des fêtes" de lever leur mouvement, a indiqué Cyril Moulin, infirmier en psychiatrie de SUD-Santé.

"On est contents car la lutte paie. Maintenant on fait reposer les troupes mais on se réserve la possibilité de remonter la tente à la rentrée car nous n'avons aucune certitude quant à l'utilisation de cet argent", a-t-il ajouté.

Une intersyndicale SUD-CGT-FO-CFDT avait décidé le 18 octobre d'installer un campement devant l'entrée de l'hôpital Marchant pour réclamer des créations de postes. Seuls les infirmiers du syndicat SUD avaient par la suite prolongé le mouvement.

Dépêche AFP 23.12.2010, 18h48

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