Intervention pour le colloque de Poitiers du 19 Novembre 2010
Je vous remercie pour votre invitation qui est l’occasion d’une rencontre sur des questions qui sont aussi les miennes. Je précise que membre du « groupe des 39 » dès sa fondation au lendemain du discours tenu par Sarkozy à Antony, je parlerai ici en mon nom et depuis ma pratique de psychiatre et de psychanalyste. Une pratique orientée depuis plus de 30 ans par la Psychothérapie Institutionnelle dans un service que j’anime depuis le Centre Antonin Artaud, mais aussi dans le service hospitalier qui lui est étroitement articulé.
C’est pour soutenir cette pratique et sa transmission, mais aussi pour lutter contre la haine froide d’une psychiatrie déshumanisante et protocolisée que je milite dans le groupe des 39 qui tente de mobiliser tous ceux qui se sentent concernés par cette dérive barbare de la psychiatrie ; et il est important de souligner la présence importante des patients qui prennent la parole dans nos rassemblements et en particulier notre meeting du 25 Septembre.
Une question préside à l’argument du colloque qui nous réunit: que s’est-t-il passé depuis 1976 pour que le film « Vol au dessus d’un nid de coucous » nous paraisse toujours aussi actuel ? Cette question est troublante, et reflète bien les inquiétudes d’une génération qui a cru pouvoir en finir avec la violence asilaire en développant des pratiques alternatives. Or ce même discours alternatif a été détourné de façon perverse par l’Etat néolibéral pour détruire la psychiatrie en rejetant les patients à la rue ou en prison. Le film de P.Borel « un monde sans fous » est à ce sujet terrifiant, commençant par le recueillement d’une famille sur la tombe de l’un des siens schizo mort dans la rue.
Nous avons ainsi assisté à ce retournement de tous les mots et les mots d’ordre que nous avancions, et depuis 25 ans tous les gouvernements de droite comme de gauche sont allés dans la même direction avec entre autres la fermeture de 40000 lits en psychiatrie, la fin de l’internat en psychiatrie, la fin d’une formation spécifique pour les infirmiers psy et maintenant l’expulsion progressive de l’enseignement de la psychanalyse dans les facultés de psychologie.
Il est même question dans le rapport Millon d’une fin de la séparation entre la psychiatrie et la neurologie, en raison des progrès des neurosciences. Cela alors que tous les chercheurs les plus sérieux avouent leur déception devant leurs hypothèses biologiques : ni l’IRM, ni les recherches sur les neurotransmetteurs ne sont venus rendre compte de l’étiologie de la schizophrénie. Ce dont on pouvait se douter mais ce discours aura eu une fonction essentielle dans le dispositif du biopouvoir.
D’ailleurs certains praticiens et politiques font mine de croire toujours à ces hypothèses causalistes et simplificatrices. La croyance dans la toute puissance des psychotropes, et des cruellement nommés antipsychotiques, continue à faire des ravages dans les services où l’on pense soigner en abrasant les délires et en remettant les malades dehors le plus vite possible. Cette croyance, appuyée bien sur par le lobbying de Fondamental que l’on voit s’exhiber sans vergogne dans le film de Borel est sans doute à la source du projet de loi qui prévoit l’obligation des traitements en ambulatoire. Projet délirant d’une « gestion de la folie » comme l’affirmait tranquillement le rapport Couty qui n’ira pas sans reste puisqu’il est déjà prévu que les psychiatres auraient une obligation de délation au directeur qui referait interner le patient.
Nous avons quelquefois l’impression, sans doute discutable, d’assister à un retour du même dans un mouvement de répétition qui fait fi de toute l’histoire de la psychiatrie, alors que nous devrions savoir que la répétition n’est pas un simple retour à l’identique et qu’elle peut permettre à certaines conditions de faire advenir le nouveau.
Beaucoup parmi nous ont ainsi avancé cette hypothèse d’un retour en arrière, d’un nouveau « grand renfermement », d’un « retour à l’Asile » après la fermeture d’une parenthèse historique où nous aurions pu espérer une psychiatrie plus humaine et moins enfermante.
Du coup cela provoque un mouvement de déploration et de nostalgie d’un âge d’or qui laisse croire qu’il fut un temps où tout était possible, et cette nostalgie risque fort de plomber toute transmission vis-à-vis des jeunes générations qui arrivent dans nos métiers soignants.
Disons le tout de go : je ne partage pas cette manière d’envisager la réalité politique de la psychiatrie. Il n’y eut jamais d’âge d’or, hormis dans les espoirs utopiques que nous avons porté et dans l’énergie que nous avons déployée pour transformer nos pratiques.
Ce qui s’est effondré et fait l’objet d’un deuil difficile pour certains, c’est justement la croyance en une utopie où nous pourrions en finir avec l’Asile, cela à partir de l’idéalisation d’expériences étrangères comme l’aventure basaglienne ou celle de Cooper, ou d’autres. Effectivement il fut une époque où nous avons cru qu’il serait possible de faire du passé table-rase et que (comme dans la chanson) la révolution serait victorieuse demain ».
L’effondrement d’une illusion-car c’en était une- nous fait traverser une sorte d’espace vide qu’il ne s’agirait pas de combler par une nouvelle utopie qui ne pourrait à son tour que nous décevoir !
Je crois plutôt que ce moment de désarroi que nous traversons au travers de cette perte bien réelle peut être une chance si nous arrivons à renoncer à cet espoir d’une réconciliation du sujet avec lui-même, un espoir d’en finir en quelque sorte avec la division subjective dont le siècle qui vient de se passer nous a montré l’échec tragique.
Nous nous trouvons en quelque sorte « privés et délivrés » de tout recours à une idéologie messianique – je reprends là une formulation dont use G.Bataille dans l’Erotisme à propos des « anciens mythes ». Nous avons appris que la liberté n’était pas forcément thérapeutique et que le « sans-limite », fascinant, constituait une drogue dure et dangereuse : plus possible de croire qu’on en finira un jour avec l’enfermement ou avec l’hôpital psychiatrique, la clinique est là chaque jour pour nous le rappeler. Pour autant, nous avons maintenant une praxis qui nous donne une expérience de 30 ans dans l’accueil de la folie : un accueil humain fondé en raison sur la psychanalyse et la psychothérapie institutionnelle et dont nous pouvons vérifier chaque jour la pertinence inestimable.
Nous savons aussi maintenant que Freud avait raison quand il critiquait ceux qu’il appelait « les bolchévistes » (dans « le Malaise dans la Culture »), pour leur prétention à réaliser l’Utopie comme fin des conflits, le paradis sur terre à l’instar des chrétiens qui le promettent dans les cieux.
Nous le savons maintenant, parce que l’Histoire s’est chargée de nous l’apprendre, en nous cognant très fortement et en nous mettant le nez sur les massacres commis au nom du Bien : je me suis ainsi approprié l’hypothèse d’un effondrement traumatique des utopies révolutionnaires, que Jacques Hassoun, dans son dernier livre (Actualité d’un malaise), pense comme l’un des ressorts de l’actualité du malaise.
Après la Shoah et la catastrophe qu’elle ne cesse de produire dans la Culture, comme l’a fort bien développé Giorgio Agamben dans « Homo sacer » et dans « Ce qui reste d’Auschwitz », il s’est produit une série de catastrophes d’autant plus traumatiques qu’elles ont atteint l’espoir d’un autre monde possible. Il nous est devenu impossible de croire, comme nous l’avons fait pendant longtemps que l’humanité avait à choisir entre « Socialisme ou Barbarie ». Je reprends là intentionnellement le nom du mouvement créé après-guerre par C.Lefort et C.Castoriadis qui espéraient un socialisme dégagé du stalinisme . Il faudrait d'ailleurs faire une place particulière à Castoriadis, qui n’aura eu de cesse jusqu’au terme de sa vie que de penser les processus de subjectivation en les mettant en rapport avec les « constructions imaginaires de la société », pour constater in fine « la montée de l’insignifiance », qui a fait le lit du populisme et de tous les micro-fascismes actuels.
Notre époque, caractérisée par le cynisme et la mélancolisation du lien social, le fétichisme de la marchandise et la volonté explicite d’en finir avec Mai 68, aura vu nombre d’ex-gauchistes tourner leur veste. Je pense à tous ceux qui, « revenus de toute illusion », affirmant qu’on ne les y reprendra plus ont appuyé la remise en ordre sarkozyste.
Mais ce sur quoi je voudrais insister, c'est ce qui se présente de façon nouvelle sur ce fond de répétition, à savoir l’émergence de formes nouvelles de révoltes et de subversions dont nous n’attendons plus qu’elles tiennent « une ligne juste » ou qu’elles annoncent une révolution toujours « victorieuse demain ». De la désobéissance civile, du refus, nécessairement minoritaires d’ailleurs, provoquent des rassemblements inédits. Des retraités y côtoient des jeunes gens et, dans ce processus qui sait utiliser au mieux la modernité virtuelle d’internet, se créent des liens forts et réels, des lieux nomades qui ne cessent de s’enchevêtrer et de résister à toute tentative d’appropriation, ou à la stabilisation trop rapide d'une « bonne forme ». Des collectifs comme « le groupe des 39 » se constituent à la base et sans sommet, ce qui déçoit avec bonheur les demandes d’autorisation qui inévitablement resurgissent. Moment instable qui ne durera peut-être pas et qu’il ne s’agit pas d’idéaliser, où il semble possible d’accueillir du conflit dans le rassemblement. Il est intéressant aussi de remarquer que ces mouvements de révolte se trouvent dans la nécessité de se passer de modèle et que la transmission qui s’y effectue consiste aussi à faire la critique des fictions anciennes, qui se sont avérées des impostures.
En tout cas, et je vais m’y arrêter un peu, tout ceci provoque une nouvelle donne du transfert dans l’institution que j’anime à Reims, le Centre Antonin Artaud, qui soutient un accueil et une praxis se passant de toute « terre promise ». La Psychothérapie Institutionnelle s’y présente comme méthode pour penser l’hétérogène de la clinique. A distance du dispositif divan/fauteuil, et au travers des médiations les plus diverses, il s’agit de construire et reconstruire sans cesse le praticable pour donner lieu et figuration au réel de la psychose.
Travail passionnant et harassant qui ne pourrait s’imaginer sans le support du transfert, mais qui nous met en prise avec des éléments hétérogènes, en rapport avec l’Histoire et le Politique.
Pour la première fois depuis 30 ans, je me suis ainsi retrouvé à manifester le 19 Mars 2009 avec mes patients sous la banderole confectionnée avec eux : « Nous sommes tous des schizophrènes dangereux », et cela dans une ambiance tout à fait jubilatoire qui crée le réel de l’illusion d’une communauté partagée. J’insiste sur l’intégralité de cette formulation, car il peut paraitre insensé d’évoquer une communauté partagée avec des psychotiques qui, selon la doxa, ne sauraient produire du lien social. Et pourtant cela se produit, dans un transfert qu’il ne s’agit surtout pas d’interpréter, mais qui permet de construire de nouveaux praticables et fait surgir des avancées cliniques déroutantes.
Au lendemain de la manif du 19 Mars 2009, j’ai ainsi découvert avec une certaine sidération qu’un patient avait fabriqué une vidéo prise à notre insu avec son téléphone portable, qu’il avait construite, montée et mise en ligne sur You Tube, rajoutant des commentaires et mettant d’ailleurs en avant le lieu qu’il s’approprie ( en l’occurrence le Groupe d’entraide mutuelle La Locomotive).
Un tel acte est saisissant sur le plan politique : un patient s’inscrit ainsi comme sujet d’une histoire en train de se faire, se dégageant ainsi radicalement d’une posture d’objet de soins et « d’handicapé psychique » . Le même aura pu, à ma grande surprise aussi, témoigner en mon absence dans l’émission « les pieds sur terre » à France Culture, pour raconter de façon très voilée et discrète ses épisodes d’internement, son appui prolongé sur le Centre Artaud, et le temps qu’il prend maintenant pour s’occuper de sa famille. Il anime aussi de chez lui sous un pseudonyme un blog et un site internet, et arrive à réinventer du réel sur ce fond de réalité certes virtuelle, mais portée également par le transfert. Il intervient dans les forums du net, se désolant de l’ignorance des jeunes psy qui arrivent dans la profession et se plaignent à juste titre qu’on ne leur ait pas enseigné Freud et la Psychothérapie Institutionnelle…
Je respecterai sa discrétion et le voile qu’il tisse tout en se mettant en avant avec courage et ténacité, et je ne dévoilerai donc pas son histoire clinique pourtant passionnante. Je relèverai seulement dans le fil de mon propos cette capacité trouvée, et non pas retrouvée, à coanimer avec les soignants des espaces thérapeutiques et, aussi pendant les années précédentes, à se positionner très clairement comme cothérapeute, venant en séance me parler de son travail auprès des autres patients comme lors d’un contrôle analytique.
Comme vous pouvez l’entendre, je tiens le pari d’une praxis où la psychanalyse n’interdit en aucune façon, bien au contraire , de s’impliquer dans le mouvement politique …A rebours de cette impasse insistante et nihiliste d’un prétendu déclin inéluctable du symbolique, ne trouvant de ressource que dans l’espoir d’un retour à l’ordre ancien ! Comme si les processus de symbolisation ne pouvaient surgir que dans un mouvement littéralement réactionnaire, alors que nous devrions être bien placés pour soutenir qu’il n’y a d’analyse que dans la subversion de l’institué et dans la traversée des évidences qui ont toujours fait le lot de la bêtise.
Je ne suis pas loin de penser, à l’instar de J.Clavreul dans son dernier livre (« l’homme qui marchait sous la pluie »), que la jouissance de la servitude volontaire et de l’assujettissement constituent une sorte d’impensé de nombre d’analystes bien souvent réfugiés dans l’idolâtrie du texte lacanien, ceux qu’il appelle les « lacanistes ». Or, si nous voulons accueillir le vif de l’inconscient à venir, il est essentiel de pouvoir se soutenir d’une transmission qui se dégagerait autant que faire se peut de la religiosité. Ce que J. Hassoun indique dans une formulation qui me convient à merveille du « psychanalyste infidèle », reprenant ainsi en la détournant la posture freudienne du « juif infidèle ». Nous savons que pour Freud, cette posture impliquait un double mouvement de rupture radicale avec la religion, sans que cela implique pour autant de renier en sa judéité. Serons nous à même de soutenir une transmission freudienne, sans pour autant fétichiser la doxa, autrement dit de pouvoir accueillir le nouveau et l’inouï en nous passant d’une grille de décodage trop assurée, mais sans faire table rase non plus du savoir et de l’expérience accumulés ? C’est sans doute une posture exigeante, et qui suppose de réinventer sans cesse la psychanalyse, ainsi qu’une psychiatrie soucieuse du sujet de l’inconscient, à partir d’une refondation permanente.
C’est ainsi que je m’inscris, par rapport à cette transmission dans le groupe des 39, ainsi qu’à La Criée fondée à Reims voici 24 ans quand nous avons pressenti le risque de formatage et de mesure de l’efficacité thérapeutique. Nous n’avons eu de cesse, dans la mesure de nos moyens, de penser ce qui nous arrivait pour trouver le moyen de tenir bon et de résister à cette construction d’un nouveau dispositif au sens que lui donne Michel Foucault. Je vais en reprendre la définition précisée par Agamben dans un petit livre récent « Qu’est-ce qu’un dispositif ? » : « Foucault a ainsi montré comment, dans une société disciplinaire, les dispositifs visent, à travers une série de pratiques et de discours, de savoirs et d’exercices, à la création de corps dociles mais libres qui assument leur identité et leur liberté de sujet dans le processus même de leur assujettissement. Le dispositif est donc, avant tout, une machine qui produit des subjectivations et c’est par quoi il est aussi une machine de gouvernement » Je poursuis ma citation beaucoup plus loin dans le même ouvrage « ce qui définit les dispositifs auxquels nous avons à faire dans la phase actuelle du capitalisme est qu’ils n’agissent plus sur la production d’un sujet, mais bien par des processus que nous pouvons appeler des processus de désubjectivation ».
Je trouve cette remarque d’Agamben fondamentale, et allant d’ailleurs bien au-delà de Foucault, dans une direction qui parait rejoindre nos préoccupations les plus cliniques. Il existe en effet une contradiction fondamentale entre la conception foucaldienne de la subjectivation, toujours conçue comme un assujettissement dans le dispositif de consentement à la norme, et la conception psychanalytique qui dégage les effets de subjectivation comme un progrès dans la cure, ou dans l’analyse institutionnelle. Je veux parler d’une institution dans le sens qui nous importe, un Collectif qui viserait toujours plus aux effets de surgissement et d’émergence du sujet de l’inconscient, ce que l’on peut repérer dans ses effets : surgissement de formations de l’inconscient telles que rêves, lapsus, actes manqués, mais aussi relance de la capacité d’invention et de confrontation à l’inconnu. Nous ne cessons de buter sur cette contradiction qu’il n’est pas question de suturer, mais de mettre au travail, puisque nous la vivons que nous voulions le savoir ou pas ! La perception par Agamben que le formatage actuel produit une désubjectivation, et la recherche qu’il fait pour une possible révolte, m’intéressent au plus haut point dans la mesure où elles produisent une ouverture pour la pensée, là où nous avions l’impression d’une opposition irréductible.
Je rappelle que ce qui est important chez Agamben, c’est le mouvement subjectivation/désubjectivation, ce dont il avait parlé dans un livre précédent à propos de la honte ; la honte qui dans le livre de Robert Antelme « L’espèce humaine », saisit le jeune homme choisi dans la foule par les nazis pour être exécuté et qui se met à rougir. A l’époque Agamben parlait de subjectivation à propos de cette honte, ce qui avait choqué nombre d’analystes. Question de registres de langages différents qu’il s’agit pour nous de préciser pour éviter de comprendre trop vite et de rester prisonniers d’un monolinguisme.
C’est d’ailleurs cette difficulté qui surgit d’entrée de jeu avec cette nécessité de penser l’hospitalité pour la folie: il nous faut pourtant bien assumer cette polyphonie sans espérer une traduction intégrale d’une langue à l’autre, mais en procédant plutôt par superposition et en travaillant sur le palimpseste ainsi produit…
Il me parait important de travailler ainsi en relevant le défi d’une double aliénation du sujet divisé par son désir inconscient mais également aliéné aux processus sociopolitiques.
Freud, nous le savons, s’est toujours tenu à distance clinique des schizophrènes, doutant même de la possibilité d’un transfert avec ces patients tout en gardant le contact avec les quelques analystes comme Ferenczi qui s’y risquaient. Il nous a laissé cependant dans son commentaire des mémoires du président Schreiber une hypothèse qui reste encore audacieuse : ce qu’on prend pour la maladie, le délire est en fait une tentative de guérison et de reconstruction du monde, un mode de lutte du sujet contre l’effondrement. Une hypothèse que nous vérifions dès lors que nous acceptons de faire émerger le transfert psychotique et de favoriser son accueil. Une hypothèse qui devrait interdire pour meurtre d’âme, toutes les volontés d’abrasion du délire qui visent à faire taire le délirant par tous les moyens que la psychiatrie actuelle ne cesse d’inventer.
On sait que Lacan est parti de son transfert à Aimée, et qu’il ainsi construit sa méthode à partir de la paranoïa. Il me parait important de souligner aussi comme le fait F.Davoine qu’il ne fut pas le thérapon de sa patiente mais son témoin et son scribe ; et qu’il consacra toute une partie de son enseignement aux présentations de malades, qui m’ont toujours paru une façon de se protéger du transfert pour mieux observer le patient d’une façon qui reste objectivante.
Par contre il a dans le même temps encouragé les meilleurs de ses élèves à se risquer avec des psychotiques, et Jean Oury, G.Michaud et quelques autres sur lesquels nous ne cessons de nous appuyer ne cessent d’en témoigner.
Je vais, pour les besoins de l’exposé relever quelques aspects de sa position quant à une hospitalité pour la folie.
J’ai donc relu pour la circonstance le texte « l’agressivité en psychanalyse » que l’on trouve dans les Ecrits: Lacan conclut son propos sur une « fraternité discrète (avec l’analysant) à la mesure de laquelle nous sommes toujours trop inégaux », mais il évoque auparavant tout au long de ce texte, la recherche de l’apathie pour le psychanalyste qui à trop désirer pour son patient ne ferait que renforcer son agressivité.
Je cite Lacan : à propos de l’attitude de l’analyste : « offrir au dialogue un personnage aussi dénué que possible de caractéristiques individuelles ; nous nous effaçons, nous sortons du champ où pourraient être perçues cet intérêt, cette sympathie, cette réaction que cherche celui qui parle sur le visage de l’interlocuteur, nous évitons toute manifestation de nos gouts personnels, nous cachons ce qui peut les trahir, nous nous dépersonnalisons, et tendons à ce but de représenter pour l’autre un idéal d’impassibilité. »
On voit donc dans ce texte par ailleurs remarquable deux postures : l’une qui court pendant tout le texte et une autre apportée par une conclusion apportant une sorte de modération. Sans ouvrir la discussion trop tôt, que vaudrait cette recherche de l’apathie dans un transfert psychotique, et même dans d’autres situations cliniques, où il s’agit que l’analyste, le « psychiste » manifeste son activité psychique et son désir d’analyse que je ne peux imaginer autrement que tourné vers la vie ?
Par ailleurs il faudrait aussi évoquer la critique lacanienne de l’intersubjectivité en psychanalyse dans le séminaire sur le Transfert. Lacan insiste sur la disparité subjective dans le transfert analytique et sur la signification de l’amour en tant que substitution de l’amant à l’aimé, sur une manière d’apprendre à aimer. Je le cite : « est-ce à dire que je doive lui apprendre à aimer ? Assurément, il parait difficile d’en élider la nécessité… ». Encore faut-il que l’analyste puisse perlaborer cet amour avec discernement dans le cadre du transfert et du progrès de la cure…
Lacan évoque dans ce même séminaire la dimension de l’atopia que Lacan prête à Socrate, le côté insituable, traduit de façon magnifique par le nulle part de son être qui donne voie à la recherche d’une position subjective.
Je vais maintenant citer Pascale Hassoun qui nous a fait à Reims un très bel exposé sur cet enjeu de l’hospitalité : « d’où vais-je entendre la personne qui vient me voir ? En quoi ma propre atopia est-elle ou non mise en jeu ? N’est-ce pas l’autre/l’hôte qui va me permettre de passer de l’atopia au topos car son altérité va me permettre de me positionner ».
En d’autres termes comment supposer un passage entre l’autre du transfert et l’hôte de l’hospitalité, un passage aussi entre le travail de la métaphore dans le transfert et le jeu de substitution de l’hospitalité ?
Ce sont ces passages qu’il va nous falloir explorer jusque dans leurs aspects les plus paradoxaux, et je vais essayer d’en déployer maintenant quelques uns.
Pour Freud et la psychanalyse, il semble que ce soit toujours le crime qui soit premier et fonde une origine à la Culture fut-ce de façon mythique. Et l’on peut constater que si le meurtre de Moïse est effacé du texte et reconstruit par Freud, le premier fratricide lui peut se lire en toutes lettres ainsi que le progrès qu’il permet d’effectuer dans la Culture.
Cette question de ce qui est premier : le don ou le crime peut paraître abstraite, voire métaphysique ; mais elle est absolument essentielle et très concrète pour notre praxis.
Donnons tout de suite un exemple : si nous devons accueillir un patient psychotique très perturbé, qui témoigne peut-être par sa folie et son hostilité paranoïde d’un crime dans sa filiation et son histoire, il est de la plus haute importance de décider d’un mode d’accueil. Et si ce patient rencontre une institution hostile ou indifférente à sa détresse, ou un analyste neutre et apathique, alors sa situation risque de s’aggraver sérieusement.
D’où le pari de l’hospitalité que je mettrai en rapport avec une bejahung, une affirmation primordiale à soutenir avec force et détermination, éventuellement malgré un contre-transfert négatif ou une inquiétude à se risquer. Cette inquiétude à risquer le « nulle part de son être » pour accueillir l’autre alors que je pressens la difficulté de le rencontrer, d’apprivoiser nos inquiétudes respectives pour qu’il m’ouvre la porte, et me laisse rentrer dans son paysage tourmenté ; la difficulté aussi que j’ouvre ma porte et que je puisse l’accueillir…
Ma résistance, celle de l’analyste ou celle d’un collectif, est-elle le témoignage d’une hostilité foncière à l’autre ? Ou plutôt du travail qu’il va falloir effectuer et dont je peux pressentir qu’il ne sera pas une partie de plaisir. J’ai longtemps pensé que la négativité était première : ça collait bien avec ma formation marxiste comme avec la tradition freudienne. Freud nous a effectivement transmis un savoir fort utile sur la verneinung (la dénégation), la verleugnung (déni/désaveu), la verwerfung sur laquelle Lacan a insisté en la traduisant par forclusion, abolition primordiale, et en faisant de la forclusion des noms du père la clé de voute d’une élucidation de la structure psychotique. Il a aussi insisté et Oury mieux encore, et bien d’autres depuis, pour évoquer une atteinte du refoulement primaire ou primordial dans la psychose (et les états limites psychotiques).
Et nous aurions tendance à penser qu’il n’y a pas de possibilité de sujet pour la psychanalyse s’il n’y avait pas ce refoulement primaire, cette séparation de das Ding, cette perte primordiale…
Je pourrais ainsi égrener tranquillement mon chapelet psychanalytique ce qui serait assez ennuyeux ! Mais je préfère remarquer que l’on ne peut imaginer une abolition aussi radicale que la forclusion qu’à la seule condition d’imaginer un temps logique antérieur de bejahung.
D’ailleurs si l’abolition était totale, le sujet ne pourrait sans doute même pas exister ; et cela sans même parler de forclusion partielle ou d’enclaves psychotiques, vacuoles de désymbolisation qui sont tout de même fréquentes dans la clinique des états-limites, des troubles psychosomatiques et autres…
Au commencement il y aurait donc la bejahung que nous ne pouvons que supposer, et que je mettrai bien rapport avec la préoccupation maternelle primaire dont parle Winnicott. Ou pour le dire autrement il faut bien que le sein ait été donné pour que l’enfant puisse s’en sevrer !
Voilà ce qui à mon avis dessine la nécessité d’un accueil fondé sur une hospitalité première de l’Autre, et c’est là que l’élaboration de Levinas que nous avions lu (Totalité et Infini) à Reims voici 10 ans pour préparer le colloque Asile peut nous être d’une aide précieuse. Je m’explique : je ne propose pas une adhésion au système de valeurs profondément religieuses de Levinas, ni même au mouvement de pensée de Derrida qui dans son livre Adieu s’emploie à transmettre sa lecture d’un ami disparu.
Notons d’ailleurs que Derrida n’use pas cette fois de sa méthode de déconstruction mais tente plutôt un recueil et même un recueillement.
Derrida vise à faire valoir la valeur philosophique de l’œuvre de l’ami disparu, montre sa signification d’immense traité de « l’hospitalité inconditionnelle », et n’hésite pas à expliciter, questionner les concepts. Par exemple à propos de la question de la primauté du don ou de l’hostilité, il montre à un lecteur profane en philosophie combien la thèse de Levinas s’oppose radicalement à celle de Kant. Kant suppose, ce que nous avons tous tendance à supposer au nom d’un certain sens des réalités, un fond d’hostilité permanente entre les hommes, qu’il s’agit d’apprivoiser, de réguler par des traités pour aboutir à une paix perpétuelle qui n’aurait rien de naturel. On voit la proximité avec Freud et son inquiétude légitime devant « l’humaine pulsion de destruction » qui conclut le Malaise dans la Culture. Inquiétude que je suis bien obligé de partager devant l’exacerbation de la destructivité contemporaine, et après les catastrophes que nous avons connues au 20° siècle marqué par la Shoah, le stalinisme, les génocides et les guerres qui n’ont jamais cessé.
Pourtant la pensée de Levinas s’est élaborée pendant la montée du nazisme dans l’enseignement de Husserl et d’Heidegger qu’il a participé à transmettre, alors pourtant qu’il publie le petit livre « Quelques réflexions sur la philosophie de l’hitlérisme » qui amorce dès 1934 une critique voilée de la proximité des thèses d’Heidegger avec le mythe nazi. (En particulier tout ce qui tourne autour d’une mystique du sol et de l’enracinement).
Mais c’est comme s’il ne lui était pas possible de penser le crime autrement que comme une tentative de destruction du visage, ce visage qui définit la relation métaphysique avec autrui. L’hospitalité se définit alors comme accueil du visage : « l’hospitalité devient le nom même de ce qui s’ouvre au visage, de ce qui plus précisément l’accueille. Le visage toujours se donne à un accueil et l’accueil accueille seulement un visage ».
Le meurtrier, et là il reprend l’exemple de Caïn, est celui qui croit que la mort est passage au néant. Mais même ce néant se présente alors comme une sorte d’impossibilité ou plus précisément une interdiction. « Le visage d’autrui m’interdit de tuer, il me dit tu ne tueras point même si cette possibilité reste supposée par l’interdit qui la rend impossible ». [Pour Levinas la mort c’est la non-réponse dans le visage d’autrui].
Vous entendez encore une fois le chiasme : avec cette possibilité qui reste supposée par l’interdit qui la rend impossible, et le fait que Caïn dévoré par l’envie, comme nous l’avons vu, tue effectivement Abel, ce qui n’empêche pas qu’il soit à l’origine d’un progrès de la Culture, avec l’invention de la métallurgie, des instruments de musiqueetc…
Je pense qu’il doit y avoir mille commentaires talmudiques pour justifier cette réussite du crime, mais pour moi, pour tous ceux qui essaient de penser ce paradoxe avec la psychanalyse, il parait important de donner raison à ce montage textuel. Comme tous les textes fondateurs la Genèse construit un montage, un dispositif qui donne sa place au désir, à l’envie et à la pulsion de destruction.
Encore une fois il faut insister sur la distinction qu’ont fait Lacan, J.Oury, J.Hassoun, N.Zaltzmann et d’autres entre pulsion de mort et pulsion de destruction. Ces deux pulsions sont d’abord confondues par Freud dans « l’au-delà du principe de plaisir »(1920), et distinguées dans d’autres textes ultérieurs même s’il ne tranche jamais très clairement. C’est dans « Problèmes économiques du masochisme »(1924) qu’il va parler de la pulsion de destruction comme colonisation par Eros de la pulsion de mort, que l’on peut plutôt définir comme silenciation, énigme et ressort du symbolique.
Définir la mort comme « non-réponse » et soutenir comme le fait Derrida « qu’il faut commencer par répondre, qu’il n’y aurait donc pas au commencement de premier mot » puisque « le premier mot, le premier oui est déjà une réponse à l’Autre » peut peut-être être mis en perspective avec l’hypothèse première de Lacan définissant le sujet comme pris dans le discours de l’Autre. Mais Lacan écrit cette formule in fine S barré poinçon petit a pour écrire cette entame au lieu de l’Autre et cette chute de l’objet cause de désir.
Cette entame nécessaire, je dirai que c’est ce que nous avons à garder à l’esprit si nous voulons rester le plus lucide possible en face de cette difficulté : il nous faut donc supposer en permanence cette entame du oui, de la bejahung, pour le dire dans la langue freudienne. Ce serait une manière de soutenir ce nouage qui nous empêche de penser séparément pulsion de mort et pulsion de vie : il s’agit d’une intrication intime et instable. Toute désintrication ayant des effets cliniques immédiats, des effets de désymbolisation et de dévitalisation.
Lacan en avançant cette figure de l’analyste apathique, faisant le mort, voulait bien sur démolir la posture de l’analyste oblatif, voulant tout le bien de son patient, et entrant avec lui dans un échange faisant fi de la disparité subjective du transfert. Il avait sans doute en partie raison en son temps, mais aujourd’hui que cette figure a fait des ravages, et pas seulement chez les psychotiques, il me parait essentiel d’essayer de penser ce qui nous est nécessaire pour nous engager et nous tenir dans le transfert. Pour permettre aussi ces « greffes silencieuses de transfert » dont parlent Pankow et Oury qui ne peuvent se produire à mon avis que sur ce fond d’une hospitalité vivante sur laquelle Oury insiste sans cesse, d’ailleurs en la référant d’ailleurs à Levinas. Comment imaginer des greffes de désir, de vie, avec un analyste cadavérisé ??
A l’inverse il faut aussi souligner qu’un analyste qui s’avancerait sans prudence et sans tact sur son désir, et en oubliant la disparité subjective prendrait le risque d’érotiser le transfert. Ce qui est une faute dans la névrose, et conduit aux passages à l’acte qui alimentent la chronique, devient tragique dans la psychose, car l’excitation provoquée peut faire des ravages en raison de la désintrication pulsionnelle toujours menaçante et de la très grande proximité du patient avec sa destrudo. Winnicott a beaucoup insisté sur cette proximité et Oury, quand l’érotisation se produit nous conseille de pratiquer l’art de la conversation…
Tout un programme qui suppose de pouvoir travailler à partir d’éléments apparemment triviaux, superficiels, qui sont autant de médiations nécessaires pour aborder de façon précautionneuse les enjeux du désir inconscient chez le psychotique. Se rappeler sans cesse que cela nous conduit toujours dans des zones extrêmement archaïques où la nécessité de localiser un site de la mort peut éviter un engouffrement du sujet dans la tourmente. Autrement dit il va falloir réduire autant que faire se peut la part de narcissisme secondaire, de jouissance des enjeux imaginaires de prestance, pour permettre d’aborder cette hospitalité là. Comme le disait un patient qui fut un de mes maitres : « il faut que les soignants s’abaissent pour que les patients puissent s’élever ». Son intervention magnifique fit alors une très belle coupure interprétative dans l’érotisation d’un groupe percussion où les animatrices avaient quelque peu tendance à s’intéresser plus à l’animateur qu’aux patients. Pour autant il faut qu’il y ait cette première strate où un imaginaire du groupe se construit, et produise une certaine jouissance de la vie, pour qu’une telle coupure puisse s’effectuer.
A ce point quelques mots sur la perversion possible d’une telle hospitalité, ou plutôt ce que Derrida appelle « une possible hospitalité au pire pour que la bonne hospitalité ait sa chance ».
Cette possibilité serait à mettre en rapport avec « l’impossibilité de contrôler, de situer pour s’y tenir par des critères, des normes, des règles, le seuil qui sépare la pervertibilité de la perversion.
Cette impossibilité, il la faut. »
Cette assertion, je la reprendrai bien à mon compte pour souligner ce paradoxe à maintenir comme paradoxe de l’hospitalité dans le transfert : pas de règles ni de normes qui viendraient nous rassurer, mais à chaque fois et sans cesse une prise de risque absolument nécessaire. D’où la nécessité d’une analyse infinie pour l’analyste, et d’une analyse institutionnelle permanente dans toute institution digne de ce nom.
Précisons : ce qu’on peut attendre d’un analyste, c’est qu’il ait pu se familiariser suffisamment avec la chose inconsciente et avec son symptôme pour accueillir le patient sans trop l’en encombrer. Ou même puisqu’il offre l’hospitalité de son espace psychique, qu’il puisse travailler à partir des points de trauma de son histoire qu’il aura traversé dans sa cure, et aussi dans les rencontres qui vont relancer sans cesse son analyse. Qu’on pense à F. Davoine nous disant à quel point l’orthodoxie lacanienne l’avait rendu muette, et la nécessité pour elle de s’étranger aux USA, d’y rencontrer des analystes étrangers à tous points de vue et des chamans des indiens des plaines pour prendre la parole et créer son style et son dispositif analytique inimitable. Chacun ayant me semble-t-il à s’étranger pour pouvoir accueillir l’altérité sans la banaliser ou la réduire à du déjà connu.
En institution, la surprise vient de l’inattendu des rencontres qui se produisent pour des patients très perturbés : certains comme on sait auront tendance à se précipiter vers des « oreilles fraiches » : des personnes jeunes, inexpérimentées et donc ressenties moins dangereuses pour les défenses paranoïdes. Le risque est donc démultiplié d’analyse sauvage et de délire à deux ou à plusieurs, même si le collectif se donne des lieux d’élaboration des transferts engagés.
On peut récuser ce risque en récusant la possibilité de l’engagement dans le transfert, ce qui constitue l’actuelle banalité des institutions qui s’en trouvent dévitalisées, avec une très forte tendance au désinvestissement voire à la perte du désir soignant.
On peut aussi et c’est le pari de la PI, construire à plusieurs le dispositif nécessaire : avec une pluralité de lieux d’élaboration, des séminaires et groupes de travail, une théorisation permanente de la praxis. C’est dans cette perspective d’une hospitalité construite à plusieurs que nous allons nous frotter en permanence aux paradoxes que j’essaye de dégager. Les résistances du Collectif ne seront pas envisagées comme des obstacles à abattre-faut-il le préciser, mais comme l’espace même de la construction. Chacun s’y engagera peu ou prou, avec la pulsatilité du désir inconscient, et l’unicité de son être au monde. Que cette unicité ait à voir avec son symptôme n’est pas une mince affaire, car il s’agit de réduire les effets d’analyse sauvage, de tamponner leur cruauté par l’humour et une certaine légèreté de l’ambiance, de la stimmung.
C’est dans cette « conjugaison des points aveugles de chacun » (JP Lehmann) que nous pouvons quelquefois espérer voir un peu mieux à condition bien entendu que cette conjugaison n’aboutisse pas à un aveuglement collectif…
C’est ainsi que se dessine une hospitalité orientée par le transfert où les passages de l’un à l’autre, les constellations transférentielles seront sans cesse travaillées par l’enjeu d’une responsabilité éthique que Oury a toujours référée à Levinas : « être responsable de la responsabilité d’autrui ».
Patrick Chemla