Une réflexion sur « >Conférence-débat à Besançon le 18 novembre : Psychiatrie, quelle hospitalité pour la folie aujourd'hui ? »

  1. La folie est un spectre de comportements caractérisés par des degrés mentaux et comportementaux anormaux. La folie peut se manifester en tant que violation des normes sociales, incluant la possibilité d'être un danger pour soi et pour les autres, et impliquant également certains autres actes considérés comme faisant partie de la folie. La folie peut être passagère ou perdurer, être provoquée ou exister à l'état de base. La folie, en terme psychiatriques, recouvre plusieurs réalités et des termes plus spécifiques sont utilisés par les spécialistes (psychose, schizophrénie, catatonie, paranoïa, trouble bipolaire, etc.).
    La folie n'est plus considérée comme diagnostic médical. Ces maladies, anciennement classées comme Maladie mentale sont désormais diagnostiquées sous les termes de psychose, schizophrénie, trouble bipolaire et autres maladies psychotiques.
    L'aspect médical de la folie, telle que considérée anciennement, a été historiquement considéré en plusieurs étapes:

    Une maladie qui entraine une souffrance autour des autres.
    Une maladie qui fait souffrir le patient (souffrances psychiques, mais aussi physiques: mutilations, ascétisme, manque de soins, d'hygiène…)
    Une maladie que l'on peut guérir, parfois[1].

    Parmi les traitements envisagés pour vaincre la folie, on peut citer:

    l'Extraction d'une "pierre de folie" visible dans des tableaux de Hieronymus Bosch et Pieter Bruegel
    L'exorcisme
    Les douches froides et l'immersion
    L'activité physique, le voyage
    Les Electro Chocs
    Les saignées
    Les vertus de la parole, du recours à l'imaginaire, du rappel au réel seront envisagées à partir de la fin du XVIIIe siècle, d'après Foucault– 

    La folie peut être perçue comme une sorte de sagesse, ou de raison. Le fou porte un message divin, dont la différence par rapport aux comportements humaines entraine une folie apparente[2].
    Elle peut aussi être perçue comme un envahissement de l'individu victime d'une créature maléfique. L'un des remèdes consiste alors en un exorcisme.
    La folie est un terme reconnu dans l'histoire et à travers la société. Les cultures primitives avaient pour guérisseurs des docteurs et shamans, des herbes, ou médecine folklorique concernant les esprits maléfiques et comportements bizarres, par exemple[3]. Des archéologues ont déterrés des squelettes (d'au moins 7000 ans) plein de trous. Le sujet pensait probablement être possédé par les démons[4]. La perception de la folie a évolué suivant les sociétés. Tantôt fatalité causée par la naissance, tantôt don ou malédiction divine, tantôt maladie. Louis XI, Roi de France, parle ainsi de sa fille: "la moins folle femme de France, car de sage il n'y en a point".
    Une grande partie des sociétés humaines s'attache à réserver un traitement spécifique à ceux qu'elles désignent comme fous. La motivation est d'ordre multiple:

    Protéger l'individu contre lui-même: autoagressions, suicides, destruction des ses propres biens.
    Protéger des individus désignés des agissements du fou: agressions.
    Protéger la société et son ordre. Par exemple: lutter contre les agissements de l'individu tels que: exhibition, tapage, destruction de biens publics, propos jugés antisociaux.

    Il en résulte que:

    Il existe une folie sociale, qui n'est pas reconnue par le corps médical.
    Les lignes de démarcation entre folie et non folie dépendent des règles gouvernant une société, à un instant donné. Ainsi, peut-être considéré comme fou quelqu'un qui dilapide ses biens, ou un opposant politique virulent. Exemples: les internements psychiatriques sous le régime communiste Roumain[5] en URSS et autres cas.

    Par ailleurs, de nombreuses sociétés acceptent l'idée d'une folie temporaire, quelles qu'en soient leurs causes. On parle de folie meurtrière, de coupe de folie, quart d'heure de folie, folie amoureuse/amou fou. Se posent alors deux questions:

    La possibilité pour l'individu de recouvrer la raison de façon durable.
    Sa responsabilité en cas d'actes répréhensibles durant son état de folie.

    Dans la mesure où la folie est décrétée par un ordre social établi, certains opposants à cet ordre se revendiquent de la folie, ou font l'apologie de la folie, comme source de la vraie sagesse. Les références sont nombreuses. On peut citer:
    Une représentation graphique symbolique du fou est constituée d'un individu portant sur la tête un entonnoir en guise de chapeau. Certaines expressions populaires parlent du fou "comme un lièvre de Mars" "comme un chapelier" en langue anglaise. Le parler Québécois parlera d'"une poule pas de tête".Antonin Artaud a longuement développé le thème de la folie dans ses ouvrages. Georges Simenon a traité à de nombreuses reprises de l'article 64 du Code Pénal Français, qui traite de la responsabilité des criminels -Si l'on s'en tient au 20ème siècle :
    C’est au début de notre siècle que survint ce qu’il convient d’appeler la révolution psychanalytique. Sigmund Freud, né en Moravie en 1856, d’une famille de commerçants israélites, obtient son grade de docteur en médecine à l’université de Vienne en 1880. Dès le début de sa carrière, il veut comprendre la maladie mentale avant de la soigner et se met à observer les phénomènes d’une manière systématique. Il réussit ainsi, pour la première fois, à expliquer le comportement humain en termes psychologiques dans une théorie fondée sur l’observation et non seulement sur l’hypothèse.
    Si la notion d’inconscient ne date pas de Freud, il lui a donné un sens particulier en l’investissant du rôle de siège des pulsions de vie, de mort et sexuelles, ainsi que d’expériences accumulées dans la petite enfance et même avant la naissance. La psychanalyse, méthode dont il est le père, est le moyen qui permet de comprendre, de déchiffrer les messages de l’inconscient. Pour lui, l’analyse des rêves, qu’il a beaucoup développée, est la voie royale qui mène à l’inconscient. Avec Freud, on peut comprendre la folie comme un comportement dicté par les forces refoulées de l’inconscient.
    En Suisse, Carl Gustav Jung divergea des théories de Freud en introduisant la notion d’un inconscient collectif.
    En 1912, pendant que Freud développait sa théorie psychanalytique, le prix Nobel de médecine était attribué à un chirurgien et physiologiste français, Alexis Carrel. Né en 1873 dans une famille de la grande bourgeoisie lyonnaise, il était devenu directeur de l’Institut Rockefeller de New York. En 1935, Carrel publie un ouvrage qui connaît un grand succès d’édition: «L’homme cet inconnu». Que dit Carrel ?
    «Il y a encore le problème non résolu de la foule immense des déficients et des criminels. Ceux-ci chargent d’un poids énorme la population restée saine. Le coût des prisons et des asiles d’aliénés, de la protection du public contre les bandits et les fous est, comme nous le savons, devenu gigantesque.
    »Un effort naïf est fait par les nations civilisées pour la conservation d’êtres inutiles et nuisibles. Les anormaux empêchent le développement des normaux. Il est nécessaire de regarder ce problème en face.
    »(…) Il ne faut pas hésiter à ordonner la société moderne par rapport à l’individu sain. Les systèmes philosophiques et les préjugés sentimentaux doivent disparaître devant cette nécessité. »
    Ces thèses sur l’inégalité biologique des individus s’accordaient avec les thèses racistes des nazis. En octobre 1939, Hitler décréta l’euthanasie des malades après examen critique de leur état pathologique par des médecins. Ses acolytes Bouhler et Brandt constituèrent une équipe de médecins et l’opération T4 pût commencer en janvier 1940. Près de 100 000 personnes, principalement des patients psychiques et handicapés mentaux, furent euthanasiées en Allemagne, puis dans les territoires occupés à l’Est. Ces «bouches inutiles», comme disaient les nazis, furent exterminées par gazage, piqûres ou administration de médicaments à doses mortelles. Les corps étaient incinérés et les proches étaient informés du décès que l’on liait à des causes inventées, par exemple des épidémies. Mais le secret fut éventé et les familles, ainsi que des ecclésiastiques protestèrent. Hitler dut arrêter le programme d’euthanasie, du moins en Allemagne, en août 1941.
    Si l’opération T4 des nazis est connue, on sait moins qu’en France, environ 40 000 malades mentaux sont morts de faim et de froid dans les asiles psychiatriques pendant la Seconde Guerre mondiale. Le tableau suivant montre l’augmentation des décès, sans augmentation de la morbidité, à l’Hôpital psychiatrique de Clermont, au nord de Paris.S'l faut parler de l'institution psychiatrique : 
    C’est au milieu de XIXe siècle que sont construits en Suisse les grands hôpitaux qui ont marqué l’histoire des patients psychiques et celle de la psychiatrie : le Burghölzli à Zurich, Préfargier à Neuchâtel en 1849, la Waldau à Berne en 1855, Cery à Lausanne en 1873. Ces institutions vont être reconnues par la faculté de médecine, développer et appliquer des traitements à la fois plus scientifiques et plus humains : la psychologie, l’ergothérapie, les médicaments calmants. Les grands noms suisses sont Eugène Bleuler, Auguste Forel, Jean Piaget, Hermann Rorschach, Adolph Meyer. Malheureusement pour les patients, ces institutions n’ont pas toujours su éviter des aventures dangereuses comme celle de la psychochirurgie, errances d’apprentis sorciers prétentieux et irresponsables (Gottlieb Burckhardt, 1888, Préfargier).
    Un rapport de 1874, concernant Cery, montre à quel point le vent a tourné. Il y est fait état d’un certain nombre d’évasions mais, celles-ci étant liées à une plus grande liberté laissée aux malades, c’est un petit mal pour un grand bien. L’augmentation du personnel, ajoute le rapport, a permis de réaliser ce que chacun souhaitait depuis longtemps : la suppression graduelle des moyens de rigueur telles qu’entraves, camisoles de force, douches par contrainte, etc.
    Le directeur type est un médecin énergique, bienveillant et paternaliste, qui habite l’institution avec sa famille et se bat pour obtenir de l’État les moyens financiers nécessaires pour un meilleur traitement des malades. Cery a eu longtemps des problèmes d’adduction d’eau, à cause de sources insuffisantes. Est-ce pour cette raison que l’hôpital consomma, par exemple en l’année 1900, 28 720 litres de vin blanc et 700 de rouge? On achète pourtant une machine à préparer l’eau gazeuse et la limonade.

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