> « On n’est pas fatigué mais on risque d’être fatiguant. »

Meeting des 39, le combat continu…

« On n’est pas fatigué mais on risque d’être fatiguant. »

 

Compte rendu

 

Le conciliabule s’est rendu au 4éme meeting de psychiatrie du 17 mars dernier, organisé par le collectif des 39 à Montreuil à la maison de l’arbre. La journée interrogeait : quelle hospitalité pour la folie en 2012 ? , et s’est déroulée autour de trois tables rondes ciblant trois des combats actuels dans les politiques concernant la psychiatrie : le sécuritaire, le scientisme et la norme. La loi du 5 juillet dernier concernant les soins sous contraintes a domicile et les derniers positionnements de l’HAS (Le 9 mars, la Haute Autorité de santé (HAS) a déclaré que non seulement «le packing ne devaiten aucun cas se faire», faute d’avoir été évalué, mais aussi que «la psychanalyse, comme la psychothérapie institutionnelle, n’étaient pas recommandées dans la prise en charge de l’autisme».) étaient aux cœurs des débats mais il a aussi était évoqué les conséquences dramatiques de la T2A, du DSM, de ABA, et de la loi HSPT.

 

De nombreux professionnels mais aussi soignés et membres de familles de patients ont répondu a l’appel des 39. Le meeting a rassemblé plus d’un millier de personnes. Malgré la gravité des annonces autour de ces réformes économiques, calomnieuses  et la lourdeur du combat simplement pour maintenir un soin humain, une humanité et une force impressionnante ce sont dégagés de cette journée.

Une pluralité d’intervenants se sont succédés (Hervé BOKOBZA, Lysia EDELSTEIN, Sylvianne GIANPINO, Serge KLOPP, Serge PORTELLI, Pierre SADOUL, Pierre JOXE, Philippe BICHON, Jacqueline Berger , Loriane BRUNESSAUX, André CORET, Guy DANA, Francois GONON, Patrick CHEMLA, Mathieu BELHASSEN, Marie CATHELINEAU, Helene DAVTIAN, Pierre DARDOT, Pierre DELION, Camille, Fred, Mathieu….). Psychiatres, psychologues clinicien, psychanalystes, cadres infirmiers, infirmiers magistrats, avocats, ministres, philosophes, patients,  se sont retrouvés autour d’un même consensus et avec la même rage de conviction : de l’humanité et du respect pour les soins. Le jugement, le gardiennage et le turn over des lits n’est pas l’affaire des soignants.

           

 

Le meeting s’est ainsi ouvert sur une vidéo interview de Lucien BONNAFE  qui nous rappelle que « toutes les opinions ne sont pas respectables. ». Puis Emile LUMBROSO membres des 39 a énoncé l’argumentaire de la journée. « Ce qui est imposé c’est l’interdit de penser » montrant ainsi qu’un degré de plus était franchi puisqu’il y a peu encore certain disait « On ne nous interdit pas de penser on nous en empêche ». Il est rappelé aussi  qu’il est désormais demandé aux soignants d’être « des techniciens du psychisme » sans formation, en comptant leurs actes et appliquant des lois qui viennent interroger sur où est l’hospitalité pour la folie ? Ou bien encore pour reprendre les mots Patrick COUPECHOUX de : « Comment la société d’aujourd’hui traite-t-elle ses fous ». Faut il encore rappeler, crier haut et fort ce que François TOSQUELLES  a défendu  « la santé c’est la capacité d’humaniser les soins ».

Par la suite, plusieurs interventions ont été poignantes. Celle de Pierre DELION qui faut-il le rappeler est fortement attaqué pour sa pratique du packing auprès d’enfant autiste et ce sans fondements plausibles.

 

Pierre DELION a été accueilli par la foule qui lui a fait un « standing ovation » de plusieurs minutes montrant ainsi son soutien. Face a cette accueil Pierre DELION a été submergé par l’émotion…Nous espérons que la chaleur et l’ovation qu’il a eu samedi dernier l’accompagnerons dans son procès qui aura lieu très prochainement. 

Dans les interventions marquantes il y a aussi Camille, patiente et membre du collectif des 39 et d’HumaPsy qui a apporté son témoignage dos a la foule. « Je ne suis pas face à vous parce que vous faites un peu peur, vous êtes nombreux quand même, mais aussi parce que je suis une hors la loi : j’ai pris la décision de ne plus prendre de traitement depuis 6 ans, alors que ma carte vitale indique une maladie longue durée».  Camille a connu des hospitalisations sous contrainte et n’est pas opposée aux traitements mais elle a fait d’autres choix une fois sortie de l’hôpital et même si cela est difficile elle résiste et s’engage dans des combats comme avec ce collectif de patients HumaPsy. Ce collectif offre la parole aux patients  et recueille les idées, doléances et autres pour les soumettre aux états généraux de la psychiatrie. Camille a également adressé un message à François Hollande qu’elle avait rencontré dans un train sans oser lui parler à cœur ouvert de ses craintes sur l’avenir de la psychiatrie.

 

L’intervention du magistrat Serge PORTELLI, a également beaucoup marqué  la journée. Son engagement auprès des 39 est important depuis le départ «  Je suis peut être le 40 éme des 39 » dit-il pour commencer. Il a souligné que nous avons affaire à un véritable changement de civilisation avec toutes ces réformes de psychiatrie. Il a ensuite expliqué comment il était choquant de voir passer par les mêmes portes du tribunal les délinquants, les criminels et les malades mentaux . « Le fou n’est coupable de rien. La folie n’est pas une infraction. »

 

François GONON neurobiologiste et membres des 39 a dénoncé lui l’abus des neurosciences. « La psychiatrie biologique n’a pratiquement rien apporté à la psychiatrie clinique (…) pour la bonne et simple raison qu’il n’y a pas de marqueur biologique a la maladie psychique.les médicaments existants ont 40 ans depuis 40 ans aucune nouvelle découverte. La psychiatrie est une bulle spéculaire. » Il a ainsi formulé des conclusions claires et logiques pour faire évoluer les choses. Première proposition : « l’égalité c’est la santé, la neurobiologie fait croire que c’est le cerveau qui est défaillant et non la société ». Deuxième proposition : « il faut préserver l’indépendance de la psychiatrie et de la neurobiologie ». « Il faut également promouvoir la recherche clinique ». Et enfin  « il faut libérer la recherche des neurosciences en arrêtant le financement des recherche sur les projets. Pour avoir de l’argent actuellement il faut promettre monts et merveilles » …apporter de l’apaisement, du soulagement aux patients  n’est pas suffisant il faut proposer d’éradiquer la maladie….

Hervé BOKOBZA a terminé la journée en insistant sur l’importance de faire évoluer les choses en créant et inventant autour de nos référentiels cliniques. « arrêtons de dire c’était bien il y a 20 ans » . « Rendre compte de ce que nous faisons de notre pratique s’oppose à rendre des comptes. » Il a également insisté sur l’importance du combat a mener. « Le combat va être colossal quelque soit les résultats des élections… » et a terminé sur ces mots des indignés « On nous empêche de rêver on va les empêcher de dormir ».

 

           

Au cours de cette journée, les gens se sont rencontrés au sens d’une véritable rencontre que ce soit dans les débats autour, à coté…Des collectifs de patients comme Humapsy ou radio citron, la radio qui n’a pas peur des pépins recueillaient les témoignages de terrain. Les intervenants étaient présents pour échanger et poursuivre les discussions, rappelant l’ambiance des journées de formation de  psychothérapie institutionnelle comme celle de st Alban et si manquant dans notre quotidien à l’hôpital.

Loin d’être des lamentations les débats apportaient des témoignages de terrain mais aussi des positionnements, des refus, car il est possible de refuser. Certains psychiatres on fait par des positionnements de leur service ou aucun patient n’avait de soins sous contraintes à domicile, des engagements et des propositions.

Ce qui fit dire a Mathieu BELHASEM « on est pas fatigué mais on va être fatiguant ». Les 39 ont aussi invité des représentants des candidats à l’élection présidentielle à prendre position pour leur manifeste et ont demandé l’abrogation de la loi HSPT , de la loi du 5 juillet 2011 et l’abrogation de l’HAS. Les verts, le front de gauche et le PS ont répondu a l’appel et se sont positionnés de manière encourageante.

           

C’est empreins des forces de convictions de cette journée de meeting et des engagements que nous avons déjà pris l’an dernier que l’association conciliabule vous propose sa rentrée 2012 en avril prochain. Une soirée d’ouverture, au Gran lux , aura lieu, dans la prolongation du meeting ou nous pourrons reprendre ce qui a été échanger et débattre ensemble sur les perspectives stéphanoises.

 

A très bientôt,

Le conciliabule.

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