>La logique sécuritaire des « soins » sans consentement en ambulatoire enfin explicitée par le gouvernement

 

Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

Communiqué du 10.01.2012


Dans un projet de décret de trois ministères (Intérieur, Santé et Cohésion sociale), la logique des « soins sans consentement en ambulatoire » nommés « soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1 » par la loi du 5 juillet 2011 se précise.

 

Nos analyses concernant le contrôle social des personnes soumises à ce régime de « soins » sont clairement explicitées dans ce projet de décret (cf. l’annexe). Bien loin des discours rassurants sur l’atteinte aux libertés fondamentales prononcés lors du vote de la loi, le registre sécuritaire, sous couvert de permettre la réinsertion sociale, est entériné.

 

Sous prétexte d’une convention devant « définir le cadre global d’une prise en charge et un accompagnement de qualité en matière de réinsertion sociale des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1», il est imposé aux patients une levée du secret médical (Art. R.3222-11): « Les professionnels sociaux et médico sociaux intervenants dans la réinsertion sont informés des lieux et des horaires des différentes modalités de prise en charge mentionnées dans le programme de soins ».

 

Nous rappelons à l’ensemble des professionnels que la mise en place de tels « soins » n’est en rien obligatoire quand les personnes hospitalisées sans leur consentement sortent « définitivement » de l’hôpital. Ainsi est-il nécessaire de s’efforcer, pendant l’hospitalisation, à transformer les « soins sous la contrainte » en soins libres.

 

Il appartient aux équipes de travailler le consentement et l’alliance thérapeutique dans le temps de l’hospitalisation. En aucun cas la contrainte légale ne peut se substituer à la relation thérapeutique, sauf à croire qu’il n’y a que la loi pour soigner les patients.

 

Nous, collectif des 39, appelons de nouveau l’ensemble des équipes de psychiatrie à refuser la mise en place de tels « soins » pour les patients, une fois leur sortie de l’hôpital actée.

 

Nous appelons d’emblée au retrait de ce projet de décret levant le secret médical et qui, sous prétexte d’assurer une réinsertion pour les patients soignés « sans leur consentement », organise de fait leur stigmatisation dans l’espace démocratique accordé à tout citoyen en situation de précarité

 

Journée d’action des 39, le samedi 17 mars 2012 à Montreuil"La Parole Errante à la Maison de l'Arbre", 9 rue François Debergue,  93100 – Montreuil-sous-Bois, Metro Croix de Chavaux.(métro ligne 9)

 

Inscriptions à la journée d'action

 

ANNEXE : Projet de Décret

 

Décret n°                          du

 

relatif à la réinsertion sociale des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques.

 

NOR : […]

 

Le Premier ministre,

 

Sur le rapport du ministre du travail, de l’emploi et de la santé,

 

Vu le code de la santé publique, notamment son article L.3222-1-2 ;

 

Vu l’avis de la commission consultative d’évaluation des normes ;

 

 Le Conseil d’Etat (section sociale) entendu,

 

Décrète :

 

Article 1er

 

Au sein du chapitre II du titre II du livre II de la troisième partie du code de la santé publique,  il est inséré une section ainsi rédigée :

 

« Section II  Réinsertion sociale des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans leur consentement.

Art. R.3222-10  En application de l’article L.3222-1-2, le directeur de l’établissement de santé conclut des conventions avec le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police, les représentants des collectivités territoriales et leurs groupements compétents sur les territoires de santé correspondants et le directeur général de l’agence régionale de santé.

Ces conventions ont pour but de définir le cadre global d’une prise en charge et un accompagnement de qualité en matière de réinsertion sociale des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1. Elles définissent les modalités de coopération entre les personnels de l’établissement prenant en charge le patient, les personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux et les services territoriaux d’assistance sociale afin de préciser les conditions d’organisation des réponses des différents acteurs sur un territoire déterminé et les procédures à mettre en œuvre en cas d’urgence. Ces conventions assurent la coordination des coopérations ainsi définies avec les

 

actions de soutien et d’accompagnement des familles et des aidants des patients menées par l’établissement de santé et les associations mentionnées à l’article L.3221-4-1.

 

Ces conventions précisent pour chacun des services placés sous l’autorité des signataires les principes et modalités de leur collaboration en matière d’échanges d’information, de formation et en cas de réadmission des patients en hospitalisation complète.

 

 La  modalité de mise en œuvre de la convention peut être précisée dans un protocole individuel relatif à un patient. Ce protocole constitue une pièce du dossier médical du patient.

 

 Art. R.3222-11   Les conventions précisent les modalités des échanges d’information prévus à l’article R.3222-10 intervenants, sauf en cas d’urgence due notamment à la levée de l’hospitalisation complète par le juge des libertés et de la détention avant la définition du programme de soins du patient et pendant l’exécution de ce programme de soins.

 

 Avant l’établissement du programme de soins, le psychiatre prenant en charge le patient informe les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion  de la prochaine modification de la prise en charge du patient, des caractéristiques du patient ainsi que de ses difficultés et de ses besoins en matière de réinsertion sociale.

 

Pendant le suivi du programme de soins, l’équipe soignante, les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion organisent des échanges réguliers sur la réinsertion sociale du patient et sur son évolution, afin de favoriser la continuité de la prise en charge, d’éviter les situations de crise et les ré hospitalisations à temps complet en urgence. Le protocole établi pour un patient indique la procédure à suivre en cas d’urgence.

 

Les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion sont  informés des lieux et des horaires des différentes modalités de prise en charge mentionnées dans le programme de soins

 

Art. R.3222-12  Les conventions prévoient que les équipes soignantes, les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion définissent leurs besoins communs et spécifiques en formation, notamment en matière de connaissances des pathologies mentales, de soins sans consentement, de dispositifs pour la réinsertion sociale.

 

 Art. R.3222-13  Sans préjudice des dispositions de l’article L.3222-1-1A, les conventions précisent les conditions dans lesquelles le patient en programme des soins est ré hospitalisé à temps complet, les organisations mises en place et les missions de chaque professionnel concerné pour :

 

– le  transport du patient, du lieu où il se trouve vers l’établissement de santé, par l’équipe soignante éventuellement escortée par les forces de police ou de gendarmerie requises par le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police lorsque le patient présente un risque d’atteinte grave à l’ordre public résultant de sa dangerosité particulière attestée par un certificat ou un avis médical.

 

– l’accès au domicile du patient par l’équipe soignante.  En cas de refus réitéré du patient de laisser le libre accès à son domicile, et après que l’équipe soignante a tenté d’obtenir l’assentiment du patient d’accéder à son domicile, le recours aux forces de l’ordre peut être sollicité par l’intermédiaire du directeur d’établissement saisi par l’équipe soignante. Les forces de police ou de gendarmerie requises par le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police interviennent lorsque les troubles mentaux du patient compromettent sa sécurité etla sureté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

 

Art. R.3222-14 Les conventions mentionnées à l’article R.3222-10 sont signées pour une durée d’un an, renouvelable par tacite reconduction. Leur application fait l’objet d’une évaluation annuelle conduite par l’établissement de santé avec l’ensemble des signataires de la convention. Cette évaluation est établie à partir d’une liste minimale d’indicateurs validés par l’agence régionale de santé et relatifs au projet de réinsertion sociale du patient, à la formation des professionnels concernés, et aux réadmissions en hospitalisation complète.

Les conventions et leurs avenants sont publiés au bulletin des actes administratifs de la préfecture du département dans lequel l’établissement de santé initiateur de la convention a son siège.

                                                            Article 2

 

 Le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités locales et de l’immigration, le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, la ministre des solidarités et de la cohésion sociale et la secrétaire d’Etat auprès du ministre du travail, de l’emploi et de la santé chargée de la santé sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

 

 Le

Par le Premier ministre :

 

Le ministre du travail, de l’emploi et de la santé

Xavier BERTRAND

 

Le  ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités locales et de  l’immigration

 

Claude GUEANT

La ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Roselyne BACHELOT-NARQUIN

 

La secrétaire d’Etat auprès du ministre du  travail, de l’emploi et de la santé chargée de la santé

Nora BERRA

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Une réflexion sur « >La logique sécuritaire des « soins » sans consentement en ambulatoire enfin explicitée par le gouvernement »

  1. Si ce décret est pris et publié au J.O. il sera attaqué en nullité devant le Conseil d'Etat. Son volet violation disproportionnée de la vie privée et du logement des gens soumis aux mesures de soins sous contrainte risque fort de ne pas passer la barre.
     
    On verra bien si le Gouvernement va prendre le risque, en période de campagne électorale, de publier ce décret, avant les élections présidentielles et législatives.

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