>Meeting National Politique et Poétique Samedi 9 avril de 14h à 18h !
Collectif des 39 Contre la Nuit Sécuritaire
Meeting National Politique et Poétique
Samedi 9 avril de 14h à 18h
« UN POUR TOUS ET TOUS CONTRAINTS »
Devant la statue de Pinel
47 Bld de l’hôpital 75013 Paris
En 1793, Jean-Baptiste Pussin, un ancien patient nommé surveillant et sa femme Marguerite ont amené Philippe Pinel, médecin-chef de Bicêtre, à retirer les entraves et les chaînes aux aliénés.
En 2011, l’Assemblée Nationale vote une surveillance et un contrôle à domicile des personnes malades sous camisole chimique. Avec ce parti-pris de la répression, les bracelets électroniques suivront. Deux siècles après, les chaînes sont de retour…..
Le projet de loi instaurant des « soins » sans consentement y compris en ambulatoire a été adopté à l’Assemblée Nationale et doit être examiné au Sénat. Nous devons amener les Sénateurs dans un sursaut républicain à bloquer cette loi.
Le collectif des 39 contre la Nuit Sécuritaire appelle à une large mobilisation pour faire barrage à cette loi honteuse qui transforme les soignants en police sanitaire et qui enlève leur humanité aux personnes malades.
La Folie n’appartient pas à la psychiatrie, l’Art parle d’elle, s’adresse à elle. C’est naturellement que de nombreux collectifs d’artistes, de peintres, de comédiens, de musiciens se joignent au collectif des 39 pour défendre l’humanité des personnes malades. Le combat pour une hospitalité pour la folie doit se mener aussi sur le terrain culturel et artistique. La folie est indissociable de l’humain, elle est fait de culture.
Tout au long de ce Meeting Politique et Poétique les prises de paroles et les performances artistiques se succéderont.
Des patients, des familles, soignants, syndicats, politiques, philosophes, magistrats, membres du collectif des 39 et d’autres collectifs ou associations.
Des musiciens (Ens’batucada et fanfare Aïouentounos du Collectif La Blanchisserie),
Des comédiens (Atelier Théâtre de la clinique de la Borde, Githec)
Des plasticiens (Stéphane Gatti pour la parole errante, le collectif Pouch'd)
Et d’autres encore…
Tous sont engagés dans le mouvement d’une hospitalité pour la folie.
Contre cette déraison d'Etat, le Collectif des 39 a déjà recueilli 25000 signatures
Rendez-vous autour de la statue de Pinel le
SAMEDI 9 AVRIL DE 14H à 18H
Devant l’hôpital de la Pitié-Salpétrière
47 Bld de l’hôpital 75013 Paris
>Cyber-action : écrivez aux députés et aux sénateurs !
A l'initiative de Radio Citron, une cyber-action a été montée afin d'envoyer une lettre de refus en un clic eux députés et sénateurs.
http://www.cyberacteurs.org/cyberactions/presentation.php?id=268
Ce geste citoyen pourrait aider à faire entendre aux élus l'absurdité de cette loi à venir.
>Le pari des « évadés du bocal »
Il faut saluer le pari des « évadés du bocal » de provoquer une rencontre entre artistes, patients et « psychistes ». J’ai déjà remarqué samedi dernier lors de la rencontre entre radio citron et la patat’ose rémoise l’effervescence créatrice qui régnait en ce lieu. Et j’ai trouvé cela bien réjouissant !
Le week-end dernier, je participais à un colloque de psychanalyse, où certains analystes s’inquiétaient d’un risque d’idéalisation de la folie dans ce mouvement de révolte et de subversion de l’institué que nous avons impulsé. Ce risque est évidemment toujours possible avec une esthétisation de la souffrance qui ne serait qu’une imposture !
Nous avons effectivement connu cela dans l’après 68, et beaucoup dont j’ai été avant que la pratique m’ouvre la comprenette, n’ont pas échappé aux mirages de l’antipsychiatrie, qui consistait en un simple renversement. Il aurait suffi d’exalter la créativité de la folie pour arriver à la guérison en se passant de toute médication, comme d’ailleurs de tout travail psychanalytique !
Ce renversement comportait cependant sa part subversive en mettant en mouvement toute une génération, mais pour nous confronter aussitôt à une très grande déception. La folie comporte sa part d’une souffrance quelquefois immense, et appelle une hospitalité qui ne saurait se réduire à une simple gentillesse ou à la cruauté des bons sentiments.
L’approche psychothérapique analytique et en particulier de psychothérapie institutionnelle suppose une immense exigence chez les thérapeutes, les soignants et toutes les personnes qui se risquent à l’accueil. Il nous faut construire tout un support et en particulier le support des clubs thérapeutiques pour créer des espaces de réalité partagée, et dans ce partage il faut insister sur le partage sensible des choses matérielles, des affects et des émotions. Ce qui n’a rien à voir avec une absence de distinctivité entre les places, et surtout les fonctions. Tenir compte en permanence de la disparité subjective dans le transfert qui peut s’instaurer et se déployer y compris dans ces lieux où il s’agit d’organiser ensemble une fête, un repas, une exposition ou un festival comme aujourd’hui ; c’est cela le point crucial que je voudrais faire ressortir aujourd’hui.
C’est aussi une leçon forte de l’après-coup de l’illusion antipsychiatrique ! Nous ne pouvons pas nous contenter de nous montrer gentils et de porter notre badge à la boutonnière « Quelle hospitalité pour la folie ? ».
Ce serait un peu trop simple et même carrément idiot de laisser croire à cela. Ce n’est pas parce que nous nous mobilisons avec les patients contre une loi cruelle et folle qui nous propulserait dans l’univers de Big brother, qu’il faudrait pour autant céder à la répétition.
Certes quelque chose se répète dans la joyeuse effervescence qui se produit dans les lieux, encore trop rares encore, qui se mobilisent aujourd’hui. Car il faut quand même garder à l’esprit que nous sommes encore minoritaires, même si nous arrivons en ce moment à mettre en mouvement toute la Psychiatrie. Pourtant la psychiatrie se trouve aujourd’hui particulièrement déglinguée, avec une entreprise de démolition qui dure depuis 25 ans et qui a instrumentalisé et perverti le mirage de l’antipsychiatrie pour en faire un cauchemar. Les patients sont mis à la porte des hôpitaux avant même d’aller mieux, et il s’agit d’aller toujours plus vite dans une espèce de frénésie où les humains sont traités comme des marchandises. A ceci près que la folie résiste à ce traitement comme elle a résisté au renfermement asilaire. Mais un grand nombre de patients en payent le prix-très fort- et se retrouvent déjà à la rue ou en prison.
On nous promet demain de nouveaux lieux de renfermement et mieux encore l’internement à domicile !
On se demande comment une telle folie sociale a pu germer, prendre forme et que certains aient soutenu cela comme un progrès qui rendrait le déni soluble dans la loi !!
Toujours est-il que la loi est passée une première fois au parlement, et que la majorité étant ce qu’elle est, elle arrive au Sénat.
Il faut quand même remarquer, et je le dis d’autant plus que j’y croyais peu : la mobilisation du groupe des 39 a eu un impact absolument incroyable, bien au-delà des cercles restreints de nos connaissances, que de nombreuses personnalités des arts, des lettres et de la politique ont signé notre appel. Et que la quasi-totalité des media a quasiment pris notre parti. La plupart des journalistes ont été saisis par la folie de cette loi, alors qu’ils étaient indifférents à la chose psychiatrique jusqu’alors ; nous informant même des divisions et du malaise de la droite, de l’absence du seul député psychiatre, Nicolas Dhuic, retourné discrètement dans son département pour ne pas avoir à voter ni à défendre cette loi.
D’autres signaux ne trompent pas : mon directeur d’HP a dit ouvertement son embarras devant une loi inapplicable, et pire encore des membres de l’ARS et de la MDPH m’ont demandé des badges des 39 !
Il se passe donc quelque chose de très intéressant dans cette crise où la destruction programmée de la psychiatrie se trouve entravée, remise en cause dans un débat qui est devenu public.
Fait nouveau aussi que la présence des patients qui prennent la parole, témoignent, et s’engagent aussi chacun à sa manière et à son rythme.
Il est remarquable que dans cette période de grande adversité et de menaces explicites, il n’y ait jamais eu autant de vitalité qu’actuellement dans les collectifs au travail. Je veux parler des collectifs où une psychothérapie institutionnelle se pratique et se réinvente chaque jour.
Bien au-delà des blasons, ce qui importe c’est de s’inscrire dans cette transmission de Tosquelles, Oury et tous les autres qui nous ont précédés. D’où le travail dans ces collectifs sur l’intime intrication entre l’aliénation politique et l’aliénation à l’inconscient et au langage.
La seule manière me semble-t-il d’être fidèle à la transmission dans la quelle nous nous inscrivons, ce serait de la réinventer sans cesse en considérant la fondation de la Pi comme toujours à venir.
Je ne vois pas comment nous pourrions faire autrement si nous voulons éviter un « arrêt sur image » et l’idéalisation d’une geste héroïque qui aurait tendance à énerver les meilleurs parmi les jeunes qui arrivent dans le métier.
Cette posture par rapport à la transmission de la PI mais aussi de la psychanalyse, constitue un des motifs cruciaux de ce qui m’anime, et de ce que j’essaie de mettre en pratique dans la clinique comme dans mon enseignement. Transmettre ainsi l’alliage hétérogène des théories et des auteurs qui ont compté pour la fabrication de ma boite à outils conceptuelle et me permettent de m’orienter dans ma clinique.
Ceci pour dire qu’il n’est pas de clinique transmissible sans une théorisation permanente. Il ne suffit pas en effet de construire un dispositif le mieux fourni possible en réunions de supervision, encore faut-il arriver à produire un mouvement permanent d’analyse institutionnelle, autrement dit de remise en cause de l’institué.
Cette subversion nécessaire de l’institué m’aura ainsi permis de traverser de multiples strates, celles inaugurales de l’antipsychiatrie, comme celle de la psychanalyse mise en place de signifiant ultime de l’institution.
Je crois qu’il faut vraiment insister sur la place des clubs thérapeutiques comme outil indispensable de cette subversion. Se mettre sur un pied d’égalité, mettre entre parenthèses les statuts professionnels et construire ensemble des espaces vivants, c’est le principe toujours à relancer.
C’est par le biais du club que le centre Antonin Artaud a été fondé depuis 30 ans, après plusieurs années de formation à cette pratique, où nous avons redécouvert les fondements de la Psychothérapie Institutionnelle. D’où la rencontre avec Jean Oury qui se poursuit aujourd’hui : son enseignement bien sur, mais surtout ce qu’il transmet de ce désir indestructible qu’il met au travail en nous branchant sur notre arrière-pays. Dimension d’une poiésis de la rencontre qu’il s’agit de viser si nous voulons éviter la routine et les stéréotypes ; je ne parle même pas de protocoles qui sont l’exact opposé de ce qu’il s’agit de faire. Avec cette bêtise imposée par la HAS et l’Etat il s’agit de ruser et de désobéir pour continuer à faire notre boulot.
Encore un mot sur le club : il est important de ne pas isoler cette méthode dans un lieu qui deviendrait bien vite un isolat clivé du service, mais de le concevoir comme une dimension d’horizontalité structurante de l’ensemble des espaces de soin. D’où la multiplicité des clubs dans le service : 5 fédérés par le Grillon et articulés au GEM la Locomotive que nous avons délibérément articulé aux autres clubs.
Depuis maintenant plus de 15 ans, il existe un club intrahospitalier qui ne cesse de faire scandale en organisant avec les patients la vie quotidienne, et en proposant quotidiennement des moments de rencontre autour de la vente du café et des friandises, en tenant à un rythme de plus en plus soutenu des repas confectionnés en commun et en s’articulant au club extra-hospitalier. La circulation est ainsi encouragée quotidiennement entre l’intra et l’extra, de même qu’entre les lieux éclatés dans la ville.
D’où l’importance de moments de rassemblement fréquents et institués pour que l’équipe mette au travail les enjeux cliniques de cette circulation, et aussi des AG où chacun quel que soit son statut peut prendre la parole, et surtout que cette parole soit prise en compte.
D’où l’importance aussi de ce qui se joue dans les interstices entre ces moments institués et à quoi il s’agit d’être sensibles et attentifs.
Il faut enfin insister sur la dimension du transfert, qui est bien autre chose qu’une simple relation affective, alors qu’il met en jeu la dimension du désir inconscient.
Tous nos dispositifs même les mieux construits ne seraient pas grand-chose s’ils ne prenaient pas en compte cette dimension du transfert qui ne saurait être la concession exclusive d’aucune profession. Nous sommes très bien placés pour savoir qu’un être en souffrance s’adresse à qui veut l’entendre et l’accueillir, et qu’il s’agit de prendre en compte la dimension multifocale et imprévisible de cette adresse. Ainsi certains cherchent des « oreilles fraiches » parmi les nouveaux arrivants dans l’équipe, et il faut également être sensible à la réalité des transferts latéraux. S’il n’y avait pas ces transferts latéraux entre patients qui s’appuient sur l’entraide mutuelle et une dimension d’hospitalité diffuse dans le Collectif, nous ne pourrions guère y arriver.
Cela peut paraitre paradoxal à certains, mais si nous voulons soutenir un désir d’analyse, c’est en nous gardant de toute fétichisation corporatiste et stérilisante qui cantonnerait l’analyse au seul exercice d’une profession.
Vous pouvez constater que je ne fais qu’un rappel d’une méthode de travail dont nous constatons chaque jour l’efficacité symbolique, à rebours de toute pratique d’évaluation comptable. Et que cette pratique s’inscrit donc à contre courant du discours dominant actuel qu’il s’agit de combattre en nous mobilisant avec tous ceux qui refusent ce qui s’apparente à une sorte de barbarie.
Quand le député Guy Lefrand, rencontré pendant la manif du 15 devant l’assemblée, commence par agresser cruellement des patients de radio citron, puis nous annonce qu’il s’agit que les psychiatres cessent l’exercice de la psychothérapie, et que ce soit les psychologues qui pratiquent des thérapies courtes et réadaptatives, il s’agit d’une déclaration de guerre contre la PI et contre toute pratique psychiatrique fondée sur l’accueil et l’écoute du sujet. Et c’est ce qui nous est promis pour le plan de santé mentale de la rentrée, avec toute la déclinaison du programme de Fondamental (dépistage précoce, diagnostic précoce et recherche fondamentale !)
D’où la mobilisation qui s’impose urgemment contre ce projet de loi qui va repasser au Sénat en Mai, contre l’horreur des soins sous contrainte en ambulatoire dont le protocole sera décidé en conseil d’Etat, et puis aussi contre tout ce que ce projet véhicule de haine froide et de barbarie à l’égard des patients.
Je vous invite donc à venir nombreux à la manif politico-poétique devant la statue de Pinel samedi 9 avril de 14H à 18H.
Il y aura des interventions d’artistes, de patients, de soignants et de tous ceux qui voudront faire entendre leur voix pour refuser énergiquement toute cette saloperie, mais aussi pour créer ensemble les conditions d’une psychiatrie à refonder dans la transmission vivante de ceux qui nous ont précédé depuis 50 ans !
Patrick Chemla
>Un pour Tous et Tous Contraints !
Meeting le samedi 9 avril 14h-18h
Devant la statue de Pinel, 47 Bd de l’hôpital à Paris
Il a suffi d’une journée de débat pour statuer sur le sort réservé à la folie. Il n’est plus question d’accueil pour les patients en souffrance psychique. Quelle place dans notre société leur donne cette Loi ?
Les députés de la majorité ont validé la vieille représentation populaire, l’image du fou errant et dangereux. Ils ont oublié la souffrance et privilégié la dangerosité. Ils viennent par leur vote de semer les graines de milliers de futurs malades en errance.
Cette Loi prétend répondre à la demande des familles, mais elle se focalise sur la peur du fou. Elle fait d’événements dramatiques, l’ordinaire de la folie.
Les maladies psychiques sont très souvent longues, les crises sont comme dans toute vie, des moments ponctuels. L’état de crise, de délire grave, voire dangereux est loin, très loin d’être un état permanent.
La Loi se focalise sur la crise, un pic dans l’intensité des symptômes dans le déroulement de la vie d’un sujet.
Elle prend des dispositions qui vont transformer, ou plutôt rendre impossible toute thérapeutique.
Or, la crise doit être désamorcée en amont. La thérapeutique est justement là pour travailler à en diminuer le nombre, la fréquence, l’intensité. Ce sont avant tout des états de souffrances psychiques, d’angoisse extrême pour la personne qui les vit. L’administration d’un médicament a des vertus- et aussi des effets secondaires importants. Il n’a pas de pouvoirs magiques.
Cette Loi ne s’occupe pas du soin. En réalité, elle instaure une psychiatrie de la seringue, une psychiatrie de la surveillance, qui répondra à l’urgence, mais pas au quotidien d’une vie dans la cité pour une personne malade.
La psychiatrie est une spécialité médicale spécifique par la place donnée à la qualité de la relation avec le patient, et son entourage dans la réussite du soin. Le soin nécessite une présence, une disponibilité auprès des familles et des patients, au quotidien et dans un climat de confiance. La disponibilité doit être continue et humaine. Cela implique des moyens sanitaires, sociaux, médico-sociaux.
Seul un tel réseau cohérent permet d’accueillir les patients et leurs familles.
Si des patients sont seuls dans la rue, si des familles n’ont personne pour les aider, c’est que ce réseau de soin n’a pas de moyens suffisants ( en personnel, en formation, en temps).
Pour le fortifier, il n’est pas besoin d’un nouveau cadre juridique, cette Loi est donc inutile. Pire, elle est contreproductive car elle ne s’appuie en rien sur la réalité clinique du soin en psychiatrie. La technologie et l’informatisation ne peuvent remédier aux carences de moyens. À un problème grave, la solution apportée est totalement erronée.
L’urgence avec laquelle ce projet de Loi est validé -sans deuxième lecture à l’Assemblée Nationale- révèle l’importance idéologique, démagogique que le gouvernement lui donne.
L’hospitalité pour la Folie est véritablement le cadet de ses soucis. La contrainte est instaurée comme principe de soin. Les soignants sont mis dans l’obligation d’exercer une surveillance et un contrôle sur les patients.
On échange la possibilité d’une relation soignante contre l’assurance d’une méfiance réciproque.
Ne sommes-nous pas légitimés à craindre que les patients se cachent des soignants, qu’ils dissimulent leur angoisse le plus longtemps possible ?
Ne sommes-nous pas légitimes de dénoncer la fonte des moyens d’accueil ambulatoire ?
Tout le monde sait que pour s’approcher de l’intimité de quelqu’un, il faut gagner sa confiance. Cela demande du temps, de la continuité, de la disponibilité, mais surtout une formation spécifique (qui soit adéquate avec) sous-tendue par une conception humaniste de la folie.
La stigmatisation et la peur ne répondent à aucune de ces obligations.
Après des années d’abandon, la psychiatrie est dans un état catastrophique. Toutes les catégories de professionnels luttent pour donner un accueil humain, des soins. Les nombreuses réformes successives ont déjà beaucoup réduit leurs marges de manoeuvres. De nombreux lieux ont repris les couleurs sombres du grand renfermement. L’usage des contentions se banalise. La contrainte devient par la Loi un mode de traitement de l’humain, au mépris de toute connaissance clinique. Le soin psychique mérite mieux.
Il y a plus de 200 ans Jean-Baptiste Pussin a libéré les fous de leurs chaînes. Philippe Pinel a accompagné son geste et a ouvert une nouvelle voie pour la psychiatrie. Qu’en est-il aujourd’hui ?
La journée de mobilisation du 15 mars lancée par le collectif des 39 a donné lieu à un rassemblement inédit des syndicats et associations de citoyens, de patients et de familles. Nous continuons la mobilisation. Une nouvelle réunion à notre initiative s'est déroulée ce vendredi 25 mars, avec l’ensemble des organisations syndicales et associatives opposées à cette Loi. Cette réunion a confirmé l'organisation du rassemblement du 09 avril devant la statue de Pinel. Nous vous communiquerons dans les prochains jours le programme de cet événement.
Messieurs les Sénateurs, Les 25000 signataires de notre appel vous le disent, cette Loi transforme les fondements de notre mission de soin.
Nous refusons cette politique, cette idéologie qui enferme, exclut.
Nous ne deviendrons pas des techniciens de la répression psychique.
Nous exigeons le retrait de la Loi.
Nous exigeons un moratoire avant toute réforme de la psychiatrie.
N’ajoutons pas à l’aliénation de la folie la déraison d’un État qui prône la peur et la stigmatisation.
Avant le passage de la Loi au Sénat, le collectif des 39 Contre La Nuit Sécuritaire appelle à un grand rassemblement citoyen et festif devant la statue de Philippe Pinel au 47 boulevard de l’hôpital à Paris. Nous pouvons briser les chaînes de la peur et de la stigmatisation.
Le collectif des 39 soutien l'appel à la manifestation du 2 avril lancé par le mouvement de défense de l'hôpital public.
>Communiqué suite à la manifestation du 15 mars
Collectif des 39
Contre La Nuit Sécuritaire.
Communiqué de presse
Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire se réjouit du succès de la manifestation qu’il a organisée le mardi 15 mars 2011 à l’Assemblée Nationale pour protester contre le Projet de loi de réforme de la psychiatrie et exiger son retrait.
Cette manifestation qui a été soutenue par des associations de patients, de parents, mais aussi par l’ensemble des syndicats de tous les professionnels en psychiatrie, – fait exceptionnel-, des associations de psychanalystes, le Collectif « Mais c’est un homme… », a réuni près d’un millier de personnes pendant quatre heures !
Pendant ces quatre heures, des prises de paroles, des témoignages poignants et émouvants de patients, de parents, des animations créatrices illustrant ce à quoi conduirait cette loi, se sont succédés sans discontinuer.
Toutes et tous ont dénoncé l’axe central autour duquel ce projet de loi est construit : un axe sécuritaire pour valider une politique de suspicion à l'égard des malades désignés comme des criminels potentiels. Cet a priori a été soigneusement entretenu depuis le discours du Président de la République à Antony le 2 décembre 2008.
Toutes et tous ont dénoncé :
- le caractère uniquement sécuritaire de ce dispositif,
- la transformation radicale de la psychiatrie qu’il induirait,
- la transformation des soignants en « auxiliaires sanitaires » de police,
- la suspicion et la disqualification des professionnels psychiatriques,
- l’expropriation de ceux-ci de leur fonction soignante et être assignés à « surveiller, contrôler, injecter »,
- la conception du « soin » réduit par ce projet de loi aux seuls médicaments psychotropes,
- l’institutionnalisation de la peur du malade, de la peur de l’autre.
Toutes et tous ont réclamé à la place de ce projet de loi, confus, absurde, incohérent, l’élaboration à partir d’une authentique concertation et d’un débat public, d’une politique de soins psychiatriques dignes, humains, articulée autour de trois axes essentiels :
- Quelle conception de la maladie mentale ?
- Quelle formation pour les professionnels ?
- Quel budget et quels moyens spécifiques pour l’ensemble de la psychiatrie ?
Nous avons rappelé que depuis les États Généraux de la Psychiatrie qui avaient réuni toutes les organisations syndicales et scientifiques en juin 2003 et déjà à l’époque avaient alerté sur la situation catastrophique de la psychiatrie, aucune des 22 mesures d’urgence réclamées à l’époque n’a été prise an compte !
Une délégation a été reçue par le Groupe Gauche Démocrate et Républicaine.
De nombreux députés du Groupe Socialiste, d’Europe Écologie Les Verts, du Parti Communiste Français, du Parti de Gauche se sont déplacés pour rejoindre le rassemblement et ont pris la parole.
Une délégation a été reçue par le Rapporteur du Projet de Loi, Mr Guy Lefrand, député UMP de l’Eure, qui a accepté finalement, en dernière limite, de nous recevoir.
Un compte-rendu exhaustif sera rendu public ultérieurement.
Devant ce succès, et parce que cette lutte ne fait que commencer, le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire appelle à d’autres initiatives :
- Il s’associe à la journée d’action pour la défense de l’hôpital public, le 2 avril,
- Il invite aussi à participer dans l’après midi du samedi 2 avril au débat sur les suites du mouvement à propos du projet de loi, débat qui se tiendra au Lieu Dit, 6 rue Sorbier, Paris 20ème, dans le cadre du Festival des «Évadés du Bocal »
- Il appelle à l’organisation d’un rassemblement de toutes celles et de tous ceux qui se sentent concernés par la psychiatrie, le Samedi 9 avril 2011, devant l’entrée de la Salpetrière autour de la statue de Philippe Pinel, le fondateur de la psychiatrie, en 1793 « enlevant leurs chaînes aux insensés », avant l’examen du Projet de Loi par le Sénat.
Le Collectif des 39
Contacts :
Collectif des 39 : yglns39@orange.fr
Dr Hervé Bokobza : 06 85 31 71 61
Yves Gigou : 06 60 48 98 84
Dr Paul Machto : 06 80 65 47 79
Dr Elie Winter : 06 73 24 21 47
>Nuit Sécuritaire : Musique…
>Et si nous aussi nous sauvions la psychiatrie, les patients et leurs familles !
Mais alors soyons concrets.
Au lieu d’une loi mal fagotée qui va augmenter les souffrances de tous, examinons ce que chacun peut faire dès maintenant. D’abord changeons notre regard sur la folie.
L’expérience prouve que devant les souffrances psychiques graves tout le monde partage ou veut partager la souffrance des personnes touchées.
Mais le résultat de cette générosité désordonnée est le chaos, comme l’hôpital psychiatrique actuel (rapport de monsieur Delarue), ou la loi en examen au Parlement ces jours-ci.
Cela vient d’une ‘toute petite erreur’ de perspective prenant des proportions démesurées :
Malgré un point de départ commun, cette souffrance, le désordre s’installe pour deux raisons :
-aucun des acteurs n’a une vision complète de l’étendue de la souffrance psychique des intéressés.
-aucun n’a en mains l’ensemble des réponses rassemblant soins et appuis sociaux.
Chacun cependant pense tout comprendre de cette souffrance : mais ce n’est qu’une ‘impression’ et elle est fausse. C’est là que se trompent aujourd’hui la plupart des acteurs, même l’UNAFAM (union nationale des familles), la FNAPSY (les patients qui se nomment usagers de la Santé Mentale), et les syndicats de professionnels de la psychiatrie et de l’action médico-sociale (chacun croit tout savoir ou tout pouvoir).
A la veille du vote de la loi nous devons agir vite et proposer une série de mesures immédiates que chacun des acteurs ci-dessous peut réaliser sans règle, ni loi :
– familles qui vous plaignez de ne pas être reçues par les psychiatres (ceux-ci sous prétexte de manque de temps ou de conflit d’intérêt, c’est faux, c’est par peur de ne pas savoir parler avec elles).
Voici ma proposition : vous avez totalement raison de vouloir avoir des informations et des conseils, alors frappez chaque jour à la porte des psychiatres, au bout de quelques jours sans réponse allez à plusieurs ‘casser’ la porte du psychiatre !
– patients : rassemblez-vous dans des associations de patients (les procureurs de la République sont hors d’atteinte) car celles-ci se fédérant dans la FNAPSY, les élus seront à l’écoute de votre parole, allez leur dire que les cellules d’isolement et les camisoles de force (disparues entre 1970 et 2000), qui se multiplient en ce moment, sont des instruments de torture inhumains, à détruire définitivement.
-tous les professionnels de la psychiatrie qui êtes actuellement objets de toutes les critiques (seules les deux précédentes sont justifiées) avez perdu la confiance de l’ensemble du pays à cause des propos infâmants d’un grand nombre de Médias (ne parlant que des scandales qui existent là comme dans le reste de la société, cela leur permet de dire que la folie est la cause de tous les maux sociaux, sauf Libé, Médiapart, Le Monde), des directeurs, des Préfets (qui eux sont aux ordres du grand père fouettard) : expliquez leur que votre courage est atteint violemment par cette perte de confiance générale, par l’abandon dont vous êtes l’objet par l’Etat depuis 1990 et qui vous maltraite de façon totalement inacceptable.
–psychiatres d’abord, dont le nombre diminue (il y aura bientôt un psychiatre pour deux postes en moyenne), dès la loi refusez de signer tout papier administratif (nous l’avons fait dans les années 1974, 1980 et 1990), et tout certificat médical surtout ceux concernant la loi de 1990 : cela bloque toute la machine directeur, Préfet, ARS : solide grève administrative !
–infirmiers dépossédés de votre identité par la disparition de leurs diplômes et depuis abandonnés : demandez à recevoir une reconnaissance économique et une formation spécifique, obtenez que les psychiatres et les directeurs vous respectent, vous serez alors bien placés pour demander avec les autres soignants un plan d’établissement relocalisant les lits hospitaliers hors hôpital dans le quartier ou la commune de votre secteur, besoin vital mettant fin à la stigmatisation des patients, voulant être prohes des leurs, leur ‘tissu humain’.
– psychiatres privés qui gagnez pas mal d’argent depuis que le service public se détériore (et qui avez abandonné ce service public qui vous a formés). Au lieu d’être passifs devant l’aggravation du service public, quittez un peu votre fauteuil, allez travailler un quart de votre temps dans ce service public auprès de vos frères. Cela résoudra ‘aussitôt’ leur pénurie grave actuelle, croissante depuis 15 ans, même les analystes ! si utiles à penser.
– directeurs d’hôpitaux qui allez selon la loi nouvelle (loi médicale totalement inadéquate à la psychiatrie) nommer et dégommer les chefs de services de secteur, vous avez été formés à mettre les soignants au service de la gestion, soyez au contraire attentifs à mettre votre capacité honorable de gestionnaire au service des outils forgés par les soignants pour que la gestion soit au service des soins, et non l’inverse comme maintenant, c’est-à-dire que, selon le projet de la politique de secteur, au lieu de veiller à renforcer sans cesse les services hospitaliers, recommencez à déployer les soins dans la ville et d’abord les lits.
–ensemble personnels des équipes et administratifs, au lieu de créer des espaces ‘‘intersectoriels pour telle ou telle pathologie’’ ce qui affaiblit ou fait disparaitre le soin de proximité et l’appui de l’entourage relationnel, donc le secteur : créez dans chaque équipe un espace d’accueil et de préalable aux soins ouvert 24/24h dans le secteur (surtout pas dans l’hôpital) (sachant que ce ‘travail préalable’ doit impliquer entre ¼ et 1/3 de l’ensemble de l’équipe de secteur); ce dispositif dans chaque secteur permet de répondre à toutes les demandes dites urgentes, toutes les ruptures de soin, ils supplantent les grands systèmes couteux et perturbants que sont les SAMU-psy, les équipes ambulatoires, ou les services d’urgences des grands hôpitaux ; il va établir d’emblée un lien entre la réponse à un épisode dit aigu et le soin en continuité, cette mise à disposition permet en plus de faire des économies.
– juges qui avez en France (seul pays) été écartés depuis deux siècles de cette atteinte aux libertés que sont les « internements » (appelés hypocritement ‘placements d’office’ puis ‘hospitalisation sous contrainte’) et qui allez être amenés à veiller aux demandes de soins ‘obligatoires’ (avant que le Conseil Constitutionnel ne les dénonce car cette mesure est anticonstitutionnelle), demandez dès maintenant à décider ‘vous-mêmes’ de la nécessité ou non d’une atteinte aux libertés, non seulement après 15 jours, mais forcément quand il faut décider, c’est-à-dire au début et à la fin, au lieu de laisser ce pouvoir discrétionnaire à des administratifs, directeurs et Préfets qui vivent sous la peur permanente et croissante de l’opinion et du ‘Père Fouettard’.
– professionnels de l’Action Sociale et Médico-sociale qui avez l’impression d’être deux fois malmenés par la loi de 2002 organisant votre travail autour de vos ‘usagers’, puis par le rapprochement avec les ‘fous’ avec le ‘handicap psychique’, établissez des espaces de concertation avec le champ de la psychiatrie par le biais des MDPH et des liens de ‘continuité’ au service de ces patients-usagers qui le même jour ont besoin de vous deux.
–Madame la Ministre qui avez largement laissé aller la psychiatrie vivre les mêmes règles que le reste de la médecine, alors qu’elle est soumise à deux autres exigences incontournables qui sont du ressort de deux autres Ministres : l’atteinte aux libertés, et l’appui social engageant dépenses et réflexions différentes voire contradictoires simultanément, Madame la Ministre vous pouvez re-créer (elles ont existé jusqu’en 1990) deux instances modestes et capitales :
-La Commission des Maladies Mentales réunissant des ‘sages’ de toute profession et usagers veillant à la nécessaire ré-évaluation et adaptation de la ‘politique’ de santé mentale, dite de secteur depuis 1960.
-Et le Bureau de la Psychiatrie ayant mission de suivre et de faire face aux défaillances et difficultés de croissance de chacune des 1127 équipes (830 adultes, les autres enfants) de vos 830 secteurs (c’est leur absence qui a mis en abandon la psychiatrie de secteur).
-Elus, qui avez à débattre en urgence d’une loi sur la psychiatrie alors que vous manquez de données globales appréciant la diversité et la dimension humaine de cette question, vous n’avez devant les yeux ni nos témoignages directs ni un bilan historique de la psychiatrie de secteur (50 années sont indispensables à connaitre, une journée suffirait), ses liens avec l’ensemble du fonctionnement de la société, vous, élus qui êtes en tel désarroi devant l’ampleur de la question, exigez que ces tâches soient sériées en trois temps :
–votez une loi faite d’un seul article ce jour impliquant la présence du juge pour toute mesure portant atteinte aux libertés en psychiatrie ; puis
–organisez avec vos électeurs une vase campagne de concertation sur un ou deux ans en France pour apprécier l’intérêt humain de la folie au quotidien, la question de la psychiatrie associant soins et appuis sociaux ; vous en dégagerez une vision humaine (ce qui n’est pas le cas actuellement), qui vous guidera pour toute décision;
-enfin dans les deux ans préparez (non une loi nouvelle, la psychiatrie en a trop et est devenue illisible et kafkaïenne) mais un « Plan Cadre ».
Dès aujourd’hui, par contre, veillez à ce que dans chaque secteur soit créé (il en existe déjà quelques dizaines) un ‘Conseil de Santé Mentale local’ (surtout à ne pas confondre avec les instances départementales ou régionales). Ce n’est pas une nouvelle instance de décision ni de contrôle, mais une instance de concertation, bénévole, citoyenne, avec divers acteurs, menés par l’élu et le responsable du secteur, et permettant régulièrement de réfléchir à la complexité que joue la représentation de la folie et de ses implications et réponses diverses (et pas seulement psychiatriques) dans une communauté (quartier, commune, ville, Cité).
L’âme de la Cité est la référence citoyenne de chacun associée avec la définition nationale des tâches et des services.
La folie fait partie de l’âme de tout homme, elle s’exprime soit quotidiennement dans l’amour et dans la haine, soit en vrillant notre être et en nous faisant souffrir; dans ces deux moments c’est la qualité humaine du regard qui permet à chacun de trouver les réponses juste ‘assez bonnes’ pour reprendre le cours de notre vie dans une Cité où chacun trouve sa place.
Guy Baillon
[1] Dernier livre paru
Quel accueil pour la folie ? par BAILLON Guy , Éditeur : Champ Social Editions : www.champsocial.com
>Psychiatrie: le rapport qui accuse (article du journal Libération du 18/03/11)
Le contrôleur général des lieux de privation de liberté dénonce, dans un avis que s’est procuré «Libération», l’hospitalisation sous contrainte.
Par Eric Favereau
«Nous disons que tout cela est insupportable.» Les mots sont durs. Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, est pourtant un homme posé, conseiller d’Etat de formation. Il va faire paraître au Journal officiel un avis sur l’hospitalisation d’office en psychiatrie, et une recommandation sur l’Infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris (lire ci-contre), deux textes que Libération a pu se procurer.
Constat terrible. Leur parution intervient au moment même où le Parlement débat d’un projet de loi qui vise à étendre encore les mesures de contrainte pour les malades mentaux. «Nous ne parlons pas dans le vide, argumente Jean-Marie Delarue. Depuis deux ans, nous avons visité plus d’une vingtaine de lieux d’hospitalisation psychiatrique. Ce ne sont pas de simples visites. Nous arrivons à l’improviste, nous restons, nous regardons tout.» Le contrôleur général des lieux de privation de liberté lâche : «Au regard des droits de l’homme, la situation est inquiétante et elle s’aggrave.» Avec, en arrière-fond, un mal typiquement français : le législateur fait des lois, mais les droits qu’elles sont censées garantir ne sont pas accessibles.
C’est sur la question centrale de l’hospitalisation d’office qu’a planché le contrôleur. En vertu de la loi de 1990, les préfets peuvent, sur le fondement d’un certificat médical, faire admettre à l’hôpital des personnes, contre leur gré, «atteintes de troubles mentaux et qui compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public». Cette mesure, supposée exceptionnelle, est appelée «hospitalisation d’office» (HO). Elle peut être renouvelée, sans limite de temps. «Le malade en sort lorsque le médecin psychiatre, qui estime la sortie possible, la propose au préfet, lequel décide ou non la mainlevée de l’hospitalisation d’office», note Jean-Marie Delarue.
Droits formels.
Le législateur avait donc recherché un équilibre, entre le médical et l’administratif. Mais «aujourd’hui, quatre éléments mettent en cause gravement cet équilibre». D’abord, note l’avis, dans de très nombreux cas, les droits formels du patient ne sont pas respectés. Exemple : «On interdit la plupart du temps au malade d’avoir recours à un avocat. On lui dit, certes, qu’il peut saisir un juge, mais sans lui donner l’adresse, ni le lieu. Les formulaires qui lui sont fournis sont illisibles. L’accès à ses possibilités de recours n’est pas possible», s’étonne le contrôleur.
Deuxième point qui noircit le paysage de la psychiatrie : «C’est le grand retour de l’enfermement qui caractérise désormais ces lieux de soins.» Cela n’est pas sans aberration : dans un même service de psychiatrie, les patients en hospitalisation libre sont contraints de vivre comme les autres, c’est-à-dire reclus, «en totale contradiction avec leur situation», note Jean-Marie Delarue. «Les portes d’un nombre croissant d’unités hospitalières psychiatriques sont en effet fermées à clef. Les patients, qui sont là librement, ne peuvent sortir, même pour se promener dans un parc, ni pour se rendre dans une cafétéria, ou participer à un office religieux.» Et de préciser : «Ces restrictions ne sont pas sans incidence sur la vie des malades et sur les relations avec leurs proches.» En d’autres termes, la logique de l’enfermement tire tout le monde vers le bas.
Troisième point : les sorties d’essai. Depuis des années, c’était une pratique essentielle pour permettre à un patient en HO de commencer à se réhabituer à la vie hors les murs. Le médecin responsable signait alors un certificat, qui était ensuite, la plupart du temps, validé par le préfet autorisant la sortie. Depuis le meurtre à Grenoble en novembre 2008 d’un étudiant par un patient en fugue, les préfets ont peur. Une crainte renforcée par une circulaire de 2010, signée par les ministres de la Santé et de l’Intérieur, rappelant leur responsabilité directe. «Aujourd’hui, devant ces demandes de sortie d’essai, le préfet hésite, diligente une enquête de police. Les sorties d’essai se sont réduites comme peau de chagrin. Des malades, habitués à sortir régulièrement, en sont interdits.»
Attaché. Dans le même ordre d’idée, les levées de HO, décidées par le préfet, sur demande du médecin, sont de plus en plus difficiles. «Aujourd’hui, le préfet hésite, demande une expertise, mais il n’a pas d’argent pour la faire. Au final, cela traîne des mois, voire des années»,lâche Jean-Marie Delarue. Des patients sont ainsi retenus, sans aucune justification médicale. «Le préfet fait ce qu’il veut au nom d’arguties juridiques qui ne sont pas opératoires.»
Quatrième point : la situation des détenus qui bénéficient de l’article D 398, permettant à l’autorité préfectorale de placer un détenu en hôpital psychiatrique. Voilà des personnes incarcérées qui sont en crise. Le médecin de la prison demande qu’ils soient hospitalisés, et le préfet peut transformer leur incarcération en hospitalisation d’office. Mais là encore, c’est d’abord le parapluie que l’on ouvre. «Le préfet craint, par-dessus tout, l’évasion. Il traîne. Alors qu’il y a urgence, cela peut prendre jusqu’à deux semaines, alors que la personne est en crise aiguë.» Pendant cette crise, le détenu reste en cellule. Quand il arrive enfin à l’hôpital, il est mis systématiquement en chambre d’isolement, durant tout son séjour. Parfois, il est même attaché, sans discontinuer, pendant deux semaines. Résultat ? «On ne leur donne pas les soins appropriés à leur état, cela est absolument inadmissible. Nombreux sont ceux qui préfèrent retourner en prison, car en prison au moins ils peuvent avoir des visites, ou bénéficier de promenades.»
De fait, c’est tout un monde caché que fait entrevoir le contrôleur général, un monde où les droits élémentaires des personnes ne sont pas respectés. Et dans ce monde-là, «ce n’est pas tant la loi, quelle qu’elle soit qui est en cause, mais la réalité des pratiques», conclut Jean-Marie Delarue.
Le rapport du contrôleur de privation des libertés relatif à certaines modalités de l'hospitalisation d'office (15 mars 2011) : avis-du-controleur-general-des-lieux-de-privation-de-liberte
>La maladie mentale
L'usage intempestif de la psychologie ressemble de plus en plus visiblement à une gigantesque prise d'otage, parfois même réciproque. Au moindre fait divers, on fait appel immédiatement aux "ex-pères" des cellules psys ! Qui sert à qui et à quoi?
Armés du mythe scientifique, nous avons cru devoir chercher les causes des comportements pour pouvoir, en les supprimant, délivrer ceux à qui ils avaient échappé. On les cherche encore, ces fameuses causes, car elles sont des myriades. Elles appartiennent la plupart du temps au passé révolu et sont emberlificotées en boucles rétroactives. Ce n'est en effet pas parce qu'on dort mal qu'on vit mal, mais parce qu'on vit mal qu'on dort mal ! On a essayé de regrouper toutes les formes de comportements en catégories, appelées "maladies", comme si on avait voulu faire entrer les gens, tous différents, dans trois ou quatre costumes "prêts" à porter. 800 diagnostics psychiatriques pour quatre type de traitements, et 6 milliards d'êtres humains !
Le mythe scientifique tend à faire croire que les diagnostics médicaux sont une "réalité", voire "la" réalité, scientifiquement établie. On a oublié depuis longtemps dans toutes les sciences du vivant que la causalité est en sciences exactes une méthode et pas un but. Le but des sciences est de devenir efficace en découvrant les lois de la nature. Le bon usage des sciences est d'ordre moral.
La seule vérité observable est celle de la biodiversité, une complexité infinie. Si on peut visiblement ne pas confondre un Congolais d'un suédois, il y a des Suédois noirs de cheveux et des Congolais blancs. Dans l'histoire, il y a eu des individus de tous types psychologiques qui sont, "néanmoins", devenus de grands sages, de grands saints, de grands artistes et de grands scientifiques. Dans les traditions, on relie d'ailleurs le concept de maladie à ce qu'on appelle la conscience morbide, celle d'être malade. Ceux qui ne se sentent pas "malades" ne le sont donc pas ! Que d'autres que les médecins s'en occupent donc !
Si on observe les gens comme je le fais depuis 30 ans, aucun d'entre eux ne consulte spontanément pour "maladie" mais pour différents malaises dont ils voudraient être débarrassés.
Des schizophrènes patentés ne consultent que sous pression, car eux, ils ne se sentent pas "malades", par définition.
À travers le mythe scientifique, la médecine est insensiblement devenue un instrument de pouvoir, du pouvoir, répressive, normalisante ! Mais le but de la vie n'est pas de tout "normaliser". Le but de la vie est de faire croître la biodiversité dans un processus où chaque élément est appelé à faire de ce qu'il a reçu comme héritage psychique, physique et environnemental une œuvre utile au service de la croissance de l'humanité.
Les diagnostics médicaux n'ont donc pas plus ni moins de réalité que les petits drapeaux nationaux que l'on agite frénétiquement lors des victoires d'équipes "nationales" de mercenaires poussés à l'engrais des écoles de sport-élites ! Ce qui caractérise ceux qui se reconnaissent eux-mêmes "malades mentaux" est soit leur naïveté soit leur intérêt. Eux-mêmes spontanément, comme chacun, ne se sentent pas autrement que "normaux", puisque ça leur est "naturel", habituel d'être comme ils le sont !
Vue du point de vue proposé par le modèle d'espace-temps en diabolo, la maladie mentale doit donc être considérée comme une fiction scientifique. Cette fiction est nécessaire en tant qu'outil, comme dans toute science même dite exacte. Cela ne signifie en effet rien dans la réalité que les astres s'attirent en fonction de leur masse et se repoussent en fonction du carré de la distance qui les sépare (Loi de Newton). C'est pratique de le considérer comme tel, et nécessaire de le simplifier ainsi pour être efficace. Pour chacun, le présent quel qu'il soit est le moins mauvais compromis entre tout ce qui lui est tombé dessus et la conservation de son potentiel évolutif. Le but de chacun ne peut être que celui d'être efficace, constructif quoi qu'il fasse.
En attendant de comprendre les lois qui régissent la nature humaine, les descriptions de la psychologie ont entre-temps comme autres avantages de permettre aux professionnels de s'entendre entre eux avec un minimum de mots à propos de ce dont ils parlent. De là à prétendre qu'il y aurait des "normaux", les "psys" sans doute, et des malades, ceux qui devraient fonctionner comme eux, il y une marge dangereuse à ne pas dépasser.
>Psychiatrie: autorisation de "soins" ambulatoires sous contrainte
>Manifestation pour le retrait du projet de loi de réforme de la psychiatrie : vidéo
Le 15 mars, Place Edouard Herriot a eu lieu la manifestation à l’initiative du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire.
Un court résumé vidéo en 5 minutes.
Manif-assembléee-collectif des 39-le15-03-2011 par collectif39
>Cahiers pour la folie N°1
En nos temps troublés où les « voix » de la folie sont sommées de se taire par tous les moyens y compris législatifs
>Cahiers pour la folie N°0
>Réforme de la Psychiatrie : Une déraison d’Etat (Pétition)
Nouvel appel des 39 Contre la Nuit Sécuritaire
EXIGEONS le retrait de ce projet loi qui va organiser le retour au "grand renfermement".
Masqué par une appellation toute séduisante : « Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge», il a été adopté au Conseil des Ministres du 26 janvier 2011, et va être débattu au Parlement au printemps.
Trente mille personnes ont signé avec nous l’Appel contre La Nuit Sécuritaire, lancé en réaction au discours du président de la République le 2 décembre 2008 qui assimilait la maladie mentale à une supposée dangerosité. À nouveau, le Collectif des 39* en appelle à l’ensemble des citoyens.
Ce discours promettait un traitement sécuritaire des malades mentaux.
Il a depuis largement pris corps dans la pratique quotidienne : les lieux de soins psychiatriques sont désormais truffés de caméras de surveillance et de chambres d’isolement, des grillages ont été disposés, des protocoles de neutralisation physique des patients ont vu le jour, les préfets empêchent les levées d’internements caducs.
Un projet de loi propose aujourd’hui un cadre juridique à cette dérive sécuritaire.
Adopté le 26 janvier 2011 en Conseil des Ministres, il sera discuté au Parlement le 15 mars après un simulacre de concertation.
– Dans un vocabulaire relevant du code pénal, il cautionne la défiance à l’égard de citoyens souffrants.
– Dans ce dispositif, seul le trouble à l’ordre public est pris en compte.
– Il instaure un changement paradigmatique sans précédent : l’institution des « soins » sans consentement en ambulatoire.
En effet, le projet de loi n’identifie plus seulement l'hospitalisation comme contraignante, mais les soins eux-mêmes,à l’hôpital comme à l’extérieur, avec le risque majeur de la mise en place d’une surveillance sociale planifiée.
Ainsi, pour répondre à l’inquiétude légitime des patients et de leurs familles, ce projet de loi, sous couvert de déstigmatisation, va instituer une logique de dérive sécuritaire induisant un contrôle inédit de la population. Il s’appuie sur un principe de précaution inapproprié.
La mystification est totale :
Il ne s’agit pas d’un projet de soins, mais d’un engrenage portant atteinte aux libertés fondamentales dans un état démocratique.
Prétendant améliorer « l’accès aux soins » et leur « continuité », ce projet propose uniquement un accès à la contrainte sans limite de durée.Il détourne la fonction des soignants vers une orientation de dénonciation, de rétention, de « soins » sous contraintes et de surveillance.
Il impose aux patients d’accepter des « soins » stéréotypés, protocolisés, identiques pour tous. Ils seront sous surveillance, associée à un contrôle de leur dignité : ainsi se met en place une police de l’intime. Il instaure un fichier national, « un casier psychiatrique ? », de toute personne ayant été soumise ne serait-ce qu’une seule fois aux soins sans consentement.
Il institue un mensonge en laissant penser que seuls les médicaments psychotropes administrés sous contrainte suffisent à soigner les patients gravement atteints : enfermés chez eux, malgré eux.
Une partie des citoyens a été désignée à la vindicte médiatique. Le mot schizophrène, jeté à tort et à travers, en bafouant le secret médical, n’est plus un diagnostic mais une menace, qui accable les malades et leurs familles, effraie jusqu’à leur voisinage.
Penser que ce projet de loi va améliorer cette situation est une déraison d’Etat.
Bien plus, il risque de s’opposer frontalement à toute réforme sanitaire digne de ce nom, qui aurait pour principes élémentaires de reposer sur une fonction d’accueil, une logique ouverte et déségrégative, des thérapeutiques diversifiées centrées sur le lien relationnel et la confiance, dans la durée.
Ce projet va à l’encontre d’une politique de soins psychiatriques respectueuse des libertés, offrant une hospitalité pour la folie au cœur du lien social, qui allierait sécurité publique et soins à la personne.
Il institue la défiance envers les professionnels dans une démarche politique analogue à celle appliquée récemment aux magistrats et à la Justice, comme à d’autres professions.
– Nous voulons que les budgets subventionnent des soins et non des aménagements carcéraux, la formation des personnels, des effectifs conséquents, pour une conception humaine de l’accueil de la souffrance.
– Nous rejetons les réponses démagogiques qui amplifient délibérément l’émotion suscitée par des faits-divers dramatiques. Ces réponses ne font qu’accroître et entretenir la peur de l’autre.
– Nous voulons résister, nous opposer, avec une élaboration citoyenne de propositions pour une politique de soins psychiatriques au plus proche des réalités de terrain. La psychiatrie est l’affaire de tous.
Nous soignants, patients, familles, citoyens appelons au retrait immédiat de ce projet de loi.
SIGNER LA PETITION : https://www.collectifpsychiatrie.fr/phpPetitions/index.php?petition=8
* Le Collectif des 39 s'est constitué le 12 décembre 2008, autour de l'Appel contre La Nuit Sécuritaire signé depuis par près de 30.000 citoyens. Il réunit des professionnels de la psychiatrie tous statuts confondus (en grande majorité), et des personnes du monde de la Culture et des citoyens qui nous ont rejoints.
La liberté peut être aussi thérapeutique
La justice, les magistrats, les professionnels du monde judiciaire sont attaqués, dénoncés comme coupables des crimes commis, dénigrés, comme jamais.
L’école, les enseignants, les parents tout autant.
La psychiatrie, les fous, les malades mentaux, les professionnels des soins psychiatriques ne sont pas en reste.
Depuis son arrivée au ministère de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy n’a eu de cesse de mettre en œuvre son obsession : assimiler les malades mentaux à des délinquants. En février 2007, sous la pression de la mobilisation des professionnels, des associations de familles et d’usagers de la psychiatrie, il a retiré cette disposition de sa loi de Prévention de la Délinquance. En promettant qu’il y reviendrait ….
Ce fut chose faite avec son discours, prononcé le 2 décembre 2008 à l’hôpital Érasme d’Antony en tant que Président de la République. L’auteur de l’Éloge de la Folie qui a donné son nom à cet établissement psychiatrique a dû se retourner dans sa tombe. « Les malades mentaux sont, selon ce Président, potentiellement dangereux, voire criminels ».
Depuis ce discours, le grand renfermement a commencé. Augmentation des chambres d’isolement, construction de murs, élévation des grillages, installation de caméras dans les hôpitaux et même dans certains services ! Un budget de 70 millions d’euros a été immédiatement débloqué uniquement pour ces équipements sécuritaires. Les moyens, pour les personnels soignants, pour l’amélioration des conditions d’accueil et de soins attendront.
Le pacte républicain qui soutient la séparation des pouvoirs, est rompu : les préfets discréditent les avis des psychiatres, décident contre leur avis. Si l’hospitalisation protège le patient pour des soins, celle-ci devient un enfermement arbitraire quand le préfet refuse la sortie demandée par le psychiatre.
C’est dans ce contexte, dans ce climat délétère et morbide que nous est proposée une modification de la loi de 1990, avec un projet de loi qui donne un cadre juridique à cette dérive sécuritaire.
Masqué par une appellation toute séduisante :« Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge», il a été adoptée au Conseil des Ministres du 26 janvier 2011, et va être débattu au Parlement au printemps.
Ce texte s’inscrit dans le droit fil du projet sécuritaire de Nicolas Sarkozy. Explicitement énoncé dans l’exposé des motifs :
« Divers événements dramatiques survenus ces derniers temps attestent de la nécessité,
rappelée par le Président de la République, de mieux encadrer les sorties
des établissements de santé et d’améliorer la surveillance de certains patients ».
Au sécuritaire, s’associent l’objectif strictement gestionnaire qui met le contenu des soins à l’arrière plan, et l’idéologie du principe de précaution appliquée en contre-point des risques encourus par tout un chacun.
Dans un vocabulaire relevant du code pénal, il cautionne la défiance à l’égard de citoyens souffrants. Dans ce dispositif, seul le trouble à l’ordre public est pris en compte.
Ce projet de loi s’inscrit dans une stratégie de communication qui s’appuie sur l’amalgame « fou – dangerosité », utilisant le désarroi des familles, et la peur dans l’opinion publique. Le recours désormais facile à la disqualification des professionnels, et notamment de ceux qui ont développé des logiques de soins ouvertes et déségrégatives, est sous-jacent dans l’esprit de ce texte, organisé autour de la réduction des soins aux seuls traitements médicamenteux.
Le changement prévu par le gouvernement est une modification sans précédent, un bouleversement sociétal sous la parure d’une meilleure gestion de l’accès aux soins.
Au cœur de ce dispositif, un changement paradigmatique sans précédent : l’institution des « soins » sans consentement en ambulatoire.
Depuis la loi de 1838, l'hospitalisation seule pouvait faire l'objet d'une contrainte identifiant les soins à un lieu. Ce projet de loi n'identifie plus l'hospitalisation, mais les soins eux-mêmes à la contrainte, les réduisant à une pure surveillance. L'obligation prend le pas sur le contenu même du soin. Cette dérive vers la surveillance, le contrôle des patients penche dangereusement vers des choix totalitaires, des choix « contrôlitaires ». C'est un lourd tribut : le monde de la psychiatrie, la société française sont-ils prêts à s’y soumettre ? à le payer ?
La mystification est totale :
Il ne s’agit pas d’un projet de soins, mais d’un engrenage portant atteinte aux libertés fondamentales dans un état démocratique.
Prétendant améliorer « l’accès aux soins » et leur « continuité », ce projet propose uniquement un accès à la contrainte sans limite de durée.
Il détourne la fonction des soignants vers une orientation de dénonciation, de rétention, de « soins » sous contraintes et de surveillance.
Il impose aux patients d’accepter des « soins » stéréotypés, protocolisés, identiques pour tous. Ils seront sous surveillance, associée à un contrôle de leur dignité : ainsi se met en place une police de l’intime. Il instaure un fichier national, « un casier psychiatrique ? », de toute personne ayant été soumise ne serait-ce qu’une seule fois aux soins sans consentement.
Ce projet de loi concerne l’ensemble de la société, pas seulement les malades désignés comme dangereux. L’extension du domaine de la norme, – troubles du comportement, désordres psychiques, dangerosité, troubles affectifs -, fait qu’un tiers de la population est considéré comme atteinte d’un « trouble psy ». Nous entrons dans l’ère de la « Police Sanitaire », avec en toile de fond la perspective du « bien-être mental pour tous », cette idéologie du santémentalisme promu par quelques apprentis sorciers.
Ce projet de loi se soutient d’une vision simpliste, et s’appuie sur la peur dans l’opinion publique. Il détourne l’opinion en utilisant l’illusion, la tromperie, le mensonge … et les menaces pour les libertés individuelles.
- Illusion pour les familles, qui confrontées à des difficultés majeures pour obtenir le soutien nécessaire et l’assurance de la continuité des soins pour leur proche, espèrent que cette loi va atténuer leur désarroi et leur solitude. Alors que seuls une amélioration de la formation, le développement de soins de proximité pourront permettre de tisser des liens, et pousser des équipes plus attentives et en nombre, à prendre en compte les attentes des familles.
- Tromperie, car ce que laisse entendre ce projet de loi, c’est qu’une contrainte aux soins, une obligation de soins se réduit à des traitements médicamenteux imposés à domicile ou à l’hôpital. Alors que l’expérience nous apprend que ce n’est qu’au prix d’une disponibilité, d’un travail autour de la fonction d’accueil, s’appuyant sur le lien relationnel, l’établissement progressif d’une confiance réciproque, que la peur peut être atténuée et l’efficacité d’une thérapeutique patiente, longue et diversifiée être obtenue.
- Mensonge car il s’agit de faire croire à l’opinion publique, qu’avec cette loi, le risque zéro sera possible. Des dispositions sont prévues obligeant les soignants à dénoncer les manquements aux soins, brisant toute confiance thérapeutique possible, et provoquant l’intervention de la force publique pour ré-interner un malade. Aveuglés par leur idéologie sécuritaire, les responsables de ce projet de loi ignorent que, délaissés de toute relation soignante de confiance et acculés à la méfiance qui exacerbe leur sentiment de persécution, certains malades pourraient d’autant plus passer à l’acte.
- Enfin, menaces sur les libertés individuelles des patients mais aussi quiconque potentiellement confronté à un désordre psychique, affectif, moral, généré par le contexte social, le travail, l’entourage. L’orientation de l’obligation de soins passe ainsi dans les mœurs, dans la banalité du ça va de soi.
A l'encontre de toute démarche sanitaire, cette loi va devenir un abri "légal" pour la déresponsabilisation des soignants auprès des patients les plus en souffrance.
Faute d'améliorer l’accès aux soins et leur continuité en instaurant un budget spécifique pour la psychiatrie, de corriger la pénurie des effectifs soignants, de transformer la formation de tous les personnels, ce projet propose un accès à la contrainte et une continuité de celle-ci. Il est certainement plus « économique » de contraindre que de créer les conditions dignes et humaines pour soigner.
Ce projet de loi esquisse une perspective de normalisation, d’uniformisation et de contrôle, par le biais d’un objectif d’une santé mentale plus proche d’une police sanitaire que respectant la singularité de chaque individu.
Mais aussi, il institue la défiance envers les professionnels dans une démarche politique analogue à celle appliquée récemment aux magistrats et à la Justice, comme à d’autres professions.
La complexité de la question que pose la folie, la maladie mentale dans la société, la nécessité de l’élaboration d’une politique de soins psychiatriques dignes et respectueux des libertés, qui prenne en compte les besoins des malades, les attentes des familles et le soutien aux professionnels de la psychiatrie, justifient la mise en œuvre d’une immense réflexion dans le pays, à l’échelon local, départemental, régional et national.
Aux réponses démagogiques et précipitées à l’émotion suscitée par des faits divers dramatiques, réponses qui ne font qu’accroître et entretenir la peur de l’autre, nous voulons opposer l’élaboration citoyenne de propositions pour une politique de soins psychiatriques du XXIème siècle au plus proche des réalités de terrain.
La psychiatrie est l’affaire de tous.
À la complexité de l’humain dont la folie est partie intégrante, il n’y a pas de réponses simplistes qui s’appuient sur un scientisme en expansion et des marchands d’illusion.
Le poète nous éclaire avec ces quelques vers :
« Il n’y a pas de chemin,
Le chemin se fait en marchant. »
Antonio Machado.
Pour construire ce chemin, à l’aune des enjeux fondamentaux de la démocratie, citoyens, usagers, familles, professionnels, nous voulons une toute autre démarche que celle qui nous est proposée.
Nous rejetons totalement ce projet de loi. Nous nous engageons à tout mettre en œuvre pour cette seule exigence, son retrait.
Le collectif des 39, le 20 février 2011.
>Semaine de la folie ordinaire à Reims
Après La Locomotive, un Groupe d’Entraide Mutuel de Reims, les “V.I.P. en psy” de Grenoble ( “Voix Iséroises de Patients en psy), et les adhérents, patients et soignants, de la Radio Citron de Paris, voici un nouveau collectif à Reims, une ville où ça bouge décidément, qui se manifeste contre le projet de loi sur les soins sans consentement.
Après l’appel à la grève des quatre syndicats de psychiatres hospitaliers pour le mardi 15 mars, premier jour d’examen du projet de loi à l’Assemblée Nationale, les professionnels ont opposé un refus unanime de participer aux groupes de travail proposés par le ministère de la Santé pour préparer les futurs décrets d’applica- tion de la loi sur les soins sans consentement en psychiatrie, selon une dépêche A.P.M. du 2 mars 2011.
Il ne va plus y avoir grand monde pour soutenir ce projet de loi, tant l’opposition s’amplifie, avec l’expression de plus en plus forte et nouvelle des associations de patients eux mêmes.
Avec en prime des expos, des initiatives culturelles, des débats, comme par exemple le propose ce Collectif de Reims, du 15 au 19 mars.
Mais aussi, nous y reviendrons, avec cet événement inédit, à Paris dans le 20ème, au Lieu-Dit, 6 rue Sorbier : le Festival des “Évadés du Bocal” : un mois du lundi 7 mars au dimanche 3 avril 201, des expos, des films, des débats, des pièces de théâtre, des concerts…. à suivre.
Paul Machto
Semaine de la folie ordinaire à Reims
du 15 au 19 mars 2011
La réforme de la loi de 1990 relative « aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge » qui sera soumise au vote mi-mars à l’Assemblée nationale, signe un virage sécuritaire qui est délétère vis à vis des soins en psychiatrie.
En effet, nous savons d’expérience qu’il n’y a pas de soin possible sans l’adhésion du patient. En instaurant des soins sous contrainte, cette loi anéantirait la relation de confiance, entre soignants et patients, indispensable à la bonne conduite d’une thérapie.
Elle transformerait les soignants en police de la pensée et la vie des patients en liberté surveillée. Ce projet établit ainsi un paral- lèle douteux qui assimile patient et criminel. Enfin, il porte at- teinte à un droit fondamental, à savoir que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.
La seule thérapeutique proposée est une camisole chimique, n’étant en fait qu’une réduction au silence de la souffrance et entretenant l’illusion du soin. Les médicaments font partie de la thérapie, en aucun cas ils ne représentent la thérapie. L’écoute, la parole, la prise en charge psychologique, la mise en place d’un environnement respectueux du patient sont primordiaux.
L’introduction, dans les soins, du juge des libertés et de la détention, comme le propose le projet de loi, assimile l’hospitalisation d’office à la détention et rend la levée de cette mesure aussi difficile qu’une levée d’écrou.
Devant toutes ces attaques, à l’initiative de patients, un collectif de soignants et de patients du secteur ZR4 à Reims, propose une réponse.
Soudés au sein des différentes associations, club thérapeutique et centre d’accueil, nous exposons durant ce que nous appelons « La semaine de la folie ordinaire » du 15 au 19 mars, le travail effectué dans divers ateliers.
Notre désir est d’opposer à la négation de la folie et à son enfermement, l’expression et la chaleur humaine.
La mairie de Reims nous soutient en mettant des locaux à notre disposition pendant la semaine de la santé mentale.
Pour le collectif, Matthieu, Michèle Exposition A la maison de la vie associative 122 bis, rue du Barbâtre.
Reims Du mardi 15 au samedi 19 mars 2011 De 9h à 22h30 sauf samedi de 9h à20h Vernissage le mardi 15 mars à 15h Soirée débat : « La folie de vivre » Jeudi 17 mars 2011 de 18h à 22h Salle Armonville 7 bis rue Armonville Reims.
Article publié le dimanche 06 mars 2011 sur Mediapart
>Contre une réforme rétrograde et inapplicable des soins sans consentement
Intersyndicale des Psychiatres Publics
(Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux et Intersyndicale de Défense de la Psychiatrie Publique)
Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public
Union Syndicale de la Psychiatrie Comité d’Action Syndical de la psychiatrie Syndicat des Psychiatre Français
Syndicat National des Psychiatres Privés
Union Syndicale des Magistrats Syndicat de la Magistrature
Communiqué du 9 mars 2011
La loi du 27 juin 1990 devait être évaluée et amendée dans les cinq ans après sa promulgation. C’est finalement 20 ans qui ont été laissés à une réflexion qui aurait dû permettre l’élaboration de la loi sur les soins sans consentement qu’attendaient les usagers, les familles, et les professionnels de la santé mentale.
Cette loi devait être conforme aux attentes d’un pays moderne, aux pratiques européennes, et à l’évolution des conceptions médicales. Elle devait être une véritable loi sanitaire, garantissant à la fois la qualité des soins et les libertés individuelles.
Décevant ces espérances, le projet gouvernemental de mai 2010 maintenait la double voie juridictionnelle administrative et judiciaire, élargissait considérablement les prérogatives du préfet, renforçait la référence à la notion ambiguë d’ordre public, – qui ouvre la porte à toutes les dérives -, durcissait les conditions de sortie et multipliait les catégories de patients concernés au nom d’une supposée dangerosité.
C’était ignorer l’esprit et la lettre de la Constitution.
Car il aura fallu qu’une patiente soulève pour la première fois une question prioritaire de constitutionnalité pour que le gouvernement soit contraint de revoir sa copie.
Deux options s’offraient alors à lui :
– soit il sautait le pas et optait enfin pour l’unification des deux modes d’hospitalisation sans consentement sous le seul contrôle de la justice, abandonnait la référence à l’ordre public, et ne retenait pour la levée des soins sans consentement que les seuls motifs médicaux,
– soit il s’entêtait à maintenir un dispositif obsolète et injuste, pourtant abandonné par la plupart des pays européens en accord avec les recommandations de la communauté.
C’est pourtant, cette dernière qu’a choisie le Gouvernement, donnant au projet l’allure d’une véritable machinerie infernale tellement il se complexifie, en durcissant d’un côté la dimension sécuritaire tout en voulant donner de l’autre au moins l’apparence d’une meilleure garantie des libertés. En réalité, il va à l’encontre de l’esprit même de la décision du Conseil Constitutionnel puisque le préfet garde de très larges prérogatives sur l’ensemble du dispositif, allant jusqu’à l’obtention d’un recours suspensif contre la décision du juge !
En effet, même après les derniers amendements en commission des affaires sociales, ce nouveau projet de loi n’étend pas les prérogatives du juge ni le recours systématique en cas de désaccords entre les avis médicaux et les décisions préfectorales à toutes les formes des soins sans consentement. Il maintient également un casier psychiatrique basé sur les antécédents médicaux, livrés à l’administration. Il multiplie inutilement les avis médicaux.
Pour l’ensemble des organisations professionnelles de psychiatres, alors même qu’une partie d’entre-elles estime que le principe même des soins ambulatoires sans consentement n’est pas acceptable, il va sans dire que sans contrôle direct du juge et telle qu’elle est présentée, imposée par protocole et jusqu’à l’intérieur du domicile, cette forme de soins constitue une extension inadmissible du contrôle étatique des populations par une instrumentalisation de la psychiatrie.
La logique sous-jacente est claire : aucune confiance n’est accordée aux juges, pas plus qu’aux médecins. Priorité est donnée au contrôle a priori de l’ordre public face aux garanties des libertés et à l’opportunité des soins. L’équilibre entre le bien-fondé de l’intervention thérapeutique et les droits des personnes est rompu. La thématique de la peur des malades psychiatriques est mise en avant, partant de la situation de quelques malades dangereux pour envahir les situations cliniques les plus banales. Les conditions sont réunies d’une formidable régression des pratiques de soins psychiatriques, des conditions de vie des malades, et d’une aggravation de l’engorgement de l’appareil judiciaire sans aucun bénéfice réel de sécurité pour nos concitoyens.
On aurait également pu espérer qu’au pays des libertés, cette loi, qui concerne près de 70 000 situations par an et 3 ministères soit considérée comme essentielle en termes de droits et de santé publique. Or le résultat final est un imbroglio législatif qu’il faudrait adopter en urgence !
A moyens constants, il faudrait que psychiatrie et justice gèrent un nombre croissant de situations, dans les incohérences d’un dispositif qui associerait :
des délais décisionnels impossibles à tenir pour des juges, qui seraient en outre privés des possibilités d’engager des moyens d’investigations complémentaires
une absence de contrôle judiciaire des soins ambulatoires sans consentement
d’énormes difficultés à faire respecter le principe d’égalité des armes et l’application du principe des débats contradictoires dans des conditions acrobatiques
le maintien de contentieux administratifs et judiciaires distincts
le cumul d’obligations légales propres au domaine hospitalier et aux procédures
juridiques, aux risques de contradictions, comme dans les domaines des modalités d’accès aux informations médicales et des règles de publicité des débats et de communication des pièces juridiques
Les organisations syndicales signataires, qui représentent l’ensemble des psychiatres et des magistrats de notre pays, s’insurgent en conséquence contre un projet de loi rétrograde, injuste et inadapté. Elles regrettent vivement que le Gouvernement, les Ministères de la Justice et de la Santé, ne saisissent pas l’occasion d’imposer une modernisation du droit et des pratiques sociales, fassent le lit d’une multiplication des cas de contentieux, et engagent quantité de situations cliniques, du fait d’une loi inapplicable et en contradiction avec l’éthique du soin, dans des impasses douloureuses pour les usagers et les soignants.
Elles demandent instamment l’ouverture immédiate de concertations avec l’ensemble des acteurs concernés et que soit enfin programmé le projet d’une grande loi sanitaire « psychiatrie et santé mentale » dont notre pays, la discipline et les usagers ont à l’évidence un besoin criant, et dans laquelle les soins sans consentement trouveraient harmonieusement leur place et leur utilité strictement thérapeutique.
>Le Syndicat de la Magistrature condamne ‘sans’ appel le projet de loi sur la psychiatrie
Docteur Guy Baillon, Psychiatre des Hôpitaux
Le projet gouvernemental est en effet invalidé après une analyse ‘juridique’ attentive des diverses dispositions de la loi.
Etant donné que cette loi « porte atteinte aux libertés des citoyens » dans un certain nombre de situations, il était légitime que les magistrats l’examinent. Le camouflet que reçoit l’Etat est cuisant et définitif. Après les protestations de plus en plus vigoureuses des professionnels de la psychiatrie (voir ‘l’appel des 39’ qui réunit déjà plus de 15.000 signatures) les magistrats montrent que cette loi est la porte ouverte à tous les abus contre la liberté des citoyens. Ils soulignent la confusion grave qu’elle établit entre le domaine des soins et celui de la justice. Le résultat le plus patent est la stigmatisation qu’elle étend à l’ensemble du champ du soin psychique, et ses usagers, plus de 2 millions de personnes soignées par an vont pâtir des faits graves commis par quelques dizaines de personnes. Tout patient va se sentir futur criminel, et sera désigné et ‘traité’ comme tel !
Dès le début de [leur texte], comme beaucoup de censeurs de l’évolution de la psychiatrie française les magistrats ont fait le constat qui étonne : « comment se fait-il que depuis la fameuse loi de 1990 qui devait ‘toiletter’ la loi de 1838 (toiletter = faire le ménage en enlevant les mots scandaleux, mais sans changer le fond : volonté d’interner certains patients) le nombre d’hospitalisations sous contrainte au lieu de continuer à décroitre comme il l’avait fait depuis la mise en place de la politique de secteur en 1972, n’ait fait que croitre à partir de 1990 jusqu’à ce jour ? ». Ceci avait déjà été dénoncé par le rapport de la Cour des Comptes et du Conseil Constitutionnel dès1999. Une inspection a été déclenchée et a fait son rapport, mais n’a pas su trouver la vraie raison de l’inversion de l’évolution, … parce que celle-ci est trop évidente !
Ce qui est intéressant c’est que les magistrats donnent eux-mêmes l’explication, mais en parlant de l’avenir seulement, et sans voir que cela s’applique aussi à cette énigme (nous l’avons dénoncé dans divers articles depuis 2000, et rappelé dans notre dernier ouvrage sur l’état des lieux en 2011.[1] Quand dans des situations complexes comme le sont la plupart des états de ‘crise’ (appelons-les simplement les moments aigus des troubles psychiques graves) les soignants se trouvent devant le dilemme suivant, dans une équipe ‘solide’ (je parlerai des autres après) :
-soit les soignants arrivent d’emblée à établir un lien de confiance avec le patient, nous savons que si nous prenons le temps qu’il faut c’est toujours possible, ils créent un véritable dialogue qui va aboutir à des mesures de soin prises ensemble, et ceci même si d’emblée ‘on’ nous avait dit cette personne était dangereuse, et qu’il ‘fallait’ l’hospitaliser :
-soit ce lien ne se crée pas, pour x raisons : d’autres urgences autour de lui s’accumulent, le malade se sent abandonné car personne ne le reconnait, de plus en plus inquiet il se pense en milieu hostile et réagit en s’opposant à tout pour la simple raison qu’il « se sent en grand danger », lui ! Dans ces situations (ce sont les plus fréquentes) il faut aux soignants beaucoup de courage, d’expérience, de disponibilité à la fois dans l’immédiat et dans la continuité, une solidité des liens de l’équipe pour résister à « la » solution proposée d’emblée :
‘devant toute situation difficile (où est la limite de cette difficulté ?) une hospitalisation sans consentement permet d’être sûr qu’un soin va être installé, et surtout couvre le psychiatre et son équipe pour tout type de risque’ ! La couverture est tirée !
Les magistrats prévoient ce qui va se passer dans leur texte pages 2, 3 et 4 ; ils disent que « la tentation sera forte de recourir à une hospitalisation sous contrainte », « d’autant qu’il est évident qu’en 72 h de ‘garde à vue’ la personne n’est pas souvent en mesure de donner son avis ». enfin un commentaire lucide.
En réalité ce que les magistrats ne disent pas, car ils l’ignorent n’étant pas acteurs du soin, c’est que ce choix du refus de prendre de risque se fait déjà et trop souvent depuis 1990 (nos Inspecteurs qui ne sont pas ‘soignants’ n’ont pas su dépister cette raison majeure de l’échec de la loi de 1990). En fait la pratique du soin psychique n’est qu’une constante prise de risque !
Cette affirmation est d’autant plus importante à donner que l’absence de soutien des équipes de secteur par l’Etat a commencé lui aussi précisément en 1990 avec la fermeture du ‘Bureau de la psychiatrie’ du Ministère de la santé. Depuis ce moment un nombre d’équipes de plus en plus important s’est dégradé, par manque de soutien du ministère. Et il est clair que chaque dégradation a accentué ce mouvement de « facilité » qui depuis 1990 permet de choisir plus ‘facilement’ le recours à l’hospitalisation sous contrainte.
Le hasard veut que ces jours derniers un article provenant du Canada nous informe de la dérive actuelle des soins sous contraintes au Québec. [2] Le détour vaut la peine, lisez-le.
A ce point précis il m’apparait indispensable d’éclairer à notre tour les magistrats sur ce qui se passe concrètement dans ces moments de soin des troubles aigus, en nous appuyant sur deux données, l’une concernant les patients, l’autre concernant les soignants.
Nous devons d’abord insister sur un fait propre aux troubles psychiques graves : ces personnes sont le plus souvent dans la méconnaissance de la réalité de leurs troubles et refusent la nature psychique de ceux-ci.
Ceci constitue la difficulté la plus importante du traitement psychique. Personne ne peut ‘violer’ l’esprit d’une personne et lui imposer une soit disant vérité. Il doit y accéder en s’appuyant sur sa propre confiance en lui. Tout le travail du soin est fait de l’élaboration des mots, des attitudes qui vont permettre à la personne de quitter cette position ‘bétonnée’, celle de son délire, et de commencer à établir des liens (rien de cela ne peut s’obtenir sous la contrainte).
Les conditions pour que ceci évolue vers une ouverture sont nombreuses, parmi elles la connaissance antérieure du patient par tel ou tel membre de l’équipe, ensuite la qualité réelle du travail d’équipe (qui nécessite d’avoir pu écarter les conflits interpersonnels existant dans toute équipe mais qui là sont de vraies ‘barrières au traitement’, ceci nécessite que les psychiatres fassent un travail d’élaboration suffisant et clair pour tous pour comprendre les délires et les troubles), ensuite la disponibilité suffisante, … A ce prix le patient va se sentir en terrain humain, non hostile, enfin accueillant (nous avons beaucoup insisté tout au long de notre carrière sur l’importance d’un accueil suffisamment long, ouvert et déployé avant tout soin, en particulier lors des ‘indications’ d’hospitalisation).[3]
Quant aux soignants, je dois ici faire un aveu : dans mes différents écrits depuis 40 ans j’ai toujours évité de décrire la difficulté ‘humaine’ du travail des soignants en psychiatrie. Je croyais que c’était par pudeur et qu’il y avait plus urgent. Je pense avoir commis là une grave erreur, j’ai en réalité laissé dans l’ombre la souffrance de mes collaborateurs. Quand après ma retraite je me suis trouvé proche du président de l’UNAFAM , à chaque fois que j’abordais ce thème, il m’arrêtais en me disant « Docteur assez vous n’allez pas nous faire pleurer », j’avais en effet assez écouté les témoignages des familles pour percevoir leur douleur extrême, accrue par le fait que rares sont celles que les psychiatres acceptent de recevoir (nous n’avons pas tous encore compris aujourd’hui que le soin psychique ne peut se faire pour une personne que si sa famille est simultanément « accompagnée »).
J’arrêtais pour ne pas débattre de qui souffrait le plus. Mais je comprends aujourd’hui que j’aurai dû persister, car ce qui n’est jamais dit avec assez de clarté c’est l’« extrême » difficulté que rencontre un soin humain en psychiatrie, du fait de sa complexité et de ses dimensions non apparentes. Il faut que chaque soignant accepte de vivre une partie de la douleur du patient, qu’il vive cette empathie, qu’il accepte les doutes qui l’envahissent à chaque fois lui-même profondément, qu’il vive son impuissance devant le mur de la toute puissance du délire, qu’il accepte d’être mis à mal publiquement par tel ou tel patient (totalement inconscient de son attitude la plupart du temps, parfois en partie conscient), tout ceci la famille le vit, mais c’est l’un des ‘leurs’, alors que les soignants ne sont pas gratifiés par un attachement familial, ils sont dans la solitude.
Ceci toujours, mais quand en plus l’équipe pour une raison ou une autre est déstabilisée (manque d’effectif récent, maladie du chef de service, ou, plus grave, un conflit d’équipe) la vie des soignants peut devenir humainement insupportable parce que chacun se sent atteint au plus profond de lui-même, dévalorisé, blessé ; les psychiatres souffrent certes mais ils sont les plus protégés en raison de leur formation longue, de leur autorité, de leur pouvoir ; par contre leur responsabilité est déterminante pour la vie de l’équipe ; ce sont eux qui construisent la cohésion indispensable à l’origine d’une vraie vie d’équipe; sa défaillance va peser sur l’équipe plus qu’un manque d’effectif ; une équipe de secteur ne tient que par un travail de formation permanente en interne travaillant la rencontre entre théories et pratique, en continuité avec la souffrance singulière de chaque patient et du contexte environnant de chacun d’entre eux; ce travail nécessite aussi l’élaboration de contrats tacites avec toutes les institutions du secteur.
Si ce climat n’est pas créé il faut affirmer avec force que les soignants vont vivre un enfer qui est rarement décrit : c’est la solitude du vécu de chaque soignant face à la folie des patients, ce sont tous les dégâts que cette rencontre provoque si les soignants ne sont ni formés, ni protégés par l’équipe : les infirmiers en première ligne ; on pense que les psychologues ont une place plus facile en raison de leur formation, en réalité leur solitude dans une équipe non cohérente, est extrême ; le personnel moins formé souffre aussi mais paradoxalement il peut s’en sortir mieux ayant moins d’impératifs sur le plan du lien relationnel auprès des patients.
Cette description peut paraitre loin de la loi actuelle. Il n’en est rien car cette loi fait totalement abstraction de la complexité et de la pénibilité du travail de soin. Nous les psychiatres, qui animons si bien les discours, ne prenons pas assez le temps de montrer qu’aucun travail de soin ne se fait sans un partage profond de la souffrance. Pour cette raison toutes les procédures de management importées d’ailleurs pour la psychiatrie par nos administrations nous feraient sourire s’il n’y avait en arrière plan cette souffrance. L’exercice de l’autorité et la hiérarchie n’ont aucun sens et aucun effet positif en psychiatrie de service public (le privé partage les mêmes exigences, mais s’appuie sur des liens beaucoup plus confortables : ceux de la cooptation de tous les membres de l’équipe entre eux, cooptation absente du service public : nous devons là établir la même qualité de liens avec tous les acteurs présents dans l’équipe où nous arrivons, sans accord préalable, ni libre choix).
Dans un tel ‘contexte’ de souffrance, le seul réflexe possible des soignants est de ne prendre aucun risque, et d’avoir recours à la contrainte, c’est ce que font peu à peu les psychiatres depuis 1990, et la présence du tiers au lieu de diminuer le recours à la contrainte le soutient : 20 ans d’expérience l’ont prouvé.
Cette description était nécessaire pour apprécier l’absurdité des ‘protocoles’ de la future loi.
Prévoyant une garde à vue de 72h (comment oser prétendre que ce temps est suffisant pour créer la confiance, et établir des liens avec un patient ?) il est évident que cette obligation ne peut déboucher que sur une « imposition » d’un soin non consenti, et que tout ce qui va suivre après ne sera que provocations amenant les patients à n’avoir qu’une idée ‘obsédante’ tout au long de leur ‘carrière de patient’ : se défendre contre des personnes aussi hostiles.
Nous ne reprenons pas ici le texte ‘magistral’ de la magistrature critiquant avec précisions et prudence le projet de loi. Il est assez éloquent.
Il n’est pas question non plus de l’interpréter, il est très clair, chacun le lira et se l’appropriera.
Par contre nous voulons insister fortement sur un autre aspect non abordé par la loi ; cet aspect manque douloureusement aux yeux des familles et des usagers qui se sont mobilisées pour l’obtenir entre 2001 et 2005, la complémentarité de l’action sociale.
En effet une autre gravité de ce projet c’est de donner une image fausse de la folie : elle la ‘dit’ dangereuse, alors que nous savons que les patients ne commettent pas plus de crimes que le reste de la population, par contre qu’ils sont 17 fois plus souvent victimes de délits. Mais surtout leur folie a des conséquences sociales et relationnelles très lourdes qui vont provoquer des pertes de logement, de ressources, du travail, de leurs amis, voire de leur famille.
Cette loi l’ignore et ne parle que de soins. Elle décapite la Santé Mentale ! Les patients ont simultanément besoin de toute une suite d’accompagnements sociaux. La France s’est dotée d’une loi remarquable pour faire face à ces difficultés et apporter les compensations adaptées : c’est la loi du 11-2-2005 sur l’égalité des chances et des droits des personnes handicapées proposant mesures personnelles et services variés, dont le plus modeste mais le plus ingénieux est le GEM Groupe d’Entraide Mutuelle. C’est de tout cet ensemble ‘coordonné’, soins ‘et’ compensations sociales, dont ont besoin les patients. Ce projet est très grave parce qu’il donne une idée fausse de la folie et de ses conséquences : il se limite aux soins, alors qu’en l’absence de compensations sociales les patients sont voués à la rue, à l’abandon, à la prison.
Au total nous remercions profondément les magistrats d’avoir passé en examen avec autant d’attention, sans polémique ni agressivité ce projet de loi.
Mais cette étape n’est pas suffisante, il est essentiel qu’ils puissent continuer leur réflexion avec les professionnels de la psychiatrie, avec ceux de l’action sociale, et avec les grandes associations nationales de familles l’UNAFAM et d’usagers de la Santé Mentale la FNAPSY ; ce n’est que sous l’effet de nos regards croisés et d’une attention commune et complémentaire que nous pourrons, à la place de ce projet dangereux parce que ‘non humain’ pour toute la société (qui ne donnera-t-elle pas le ‘droit’ d’interner, tout en se protégeant par tous les papiers officiels que l’on peut toujours détourner ?), proposer un « Plan cadre » pour l’ensemble de la Santé Mentale associant psychiatrie, action sociale, et prévention.
Rappelons que la France est en avance sur la plupart des pays car elle a entre ses mains déjà cet ensemble indissociable ‘politique de secteur’ (qui malgré les obstacles en 50 ans a fait preuve de son efficacité), et loi du 11-2-2005 reconnaissant l’appui social complémentaire indispensable. Les hommes sont là, les outils sont là, ce qui manque c’est la confiance des médias, des élus pour leur permettre d’établir une continuité, une confiance suffisantes mettant l’humain de chacun de nous au service de la souffrance de nos proches.
Guy Baillon
[1] (« Quel accueil pour la folie ? » champs social éditions, collection dirigée par Yves Gigou, p 147 et s).
[2] Dénonciation des gardes forcées en psychiatrie, Radio-Canada – 21 févr. 2011
Une dizaine de personnes se sont présentées lundi au bureau du ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, Yves Bolduc, pour lui demander …
[3] Association Accueils, et « Les urgences de la folie. L’accueil en santé mentale », Gaëtan morin, 1998.
Le document du syndicat de la magistrature : observations-Syndicat-Magistrature
>Projet scélérat : quelle psychiatrie pour demain?
Le point de vue exprimé ici est d'abord celui d'une mère qui, lassée de voir le mépris avec lequel sont traités usagers et familles dans la quasi-totalité des cas, lassée de constater l'absence d'accompagnement des familles, a décidé de créer il y a bientôt 5 ans une association regroupant les familles de personnes souffrant de troubles psychiques (schizophrénies, troubles bi-polaires et dépression majeure), un réseau d'entraide des familles.Et qui dénoncent ce projet au nom du respect dû à l' usager de la psychiatrie, avant tout une personne qui comme toute personne, doit jouir de ses droits humains élémentaires.
C'est aussi le point de vue d'une présidente d'association de familles qui, lassée des dérives de la psychiatrie et de la pratique du "médicament-tout-puissant", a décidé de créer un GEM (Groupe d'Entraide Mutuelle) pour offrir aux usagers enfin un lieu d'accueil non médicalisé, un espace où l'on essaie d'oublier le médical, un espace de liberté où l'usager n'est plus un numéro de dossier, mais une personne avec une souffrance qui doit se dire non se contenir.
Une loi scélérate, inhumaine, va être présentée à l'Assemblée Nationale dans quelques jours.
Une loi qui détruit ce qu'a essayé de construire la Loi de Février 2005 sur l'Egalité des Droits et des Chances et l'accès à la citoyenneté des Personnes en situation de handicap, y compris de handicap psychique.
Une loi qui fait de chaque usager de la psychiatrie un criminel potentiel, qui permettra de ficher chaque usager déjà hospitalisé sous contrainte (d'office ou à la demande d'un tiers, généralement un proche).
Ici, à la Martinique, ce sont au moins 90% des usagers qui sont concernés.
Une loi qui permettra une "garde à vue psychiatrique" de 72h sans avocat.
Une loi qui permettra à des équipes de flics-infirmiers de violer le domicile d'un usager juste parce qu'il est réticent au soin et à lui passer une camisole chimique.
Quand le soin est absent, contraindre par la violence est bien plus facile, plus rapide, donc moins coûteux à première vue que de chercher à comprendre, que d'établir un lien, une relation, une communication. Cela suppose une volonté, une empathie, la capacité de toucher la souffrance de l'autre, ce qui aurait dû être la qualité première de tout soignant en psychiatrie.
Or aujourd'hui que voit-on? les "restrictions budgétaires" régissent la psychiatrie aussi… pas assez de moyens, pas assez de soignants, pas assez de temps… un pur non-sens quand on sait que communiquer c'est d'abord prendre le temps, autant de temps qu'il faudra… mais le temps c'est l'argent donc communiquer n'est pas "rentable"…
Pendant plus de deux ans, j'ai écouté 24h sur 24, 365 jours dans l'année, les appels de détresse des familles (dans 99,99% des cas des mères), leurs craintes, leurs angoisses parce qu'un proche "en crise" n'était pas pris en charge, parce qu'elles avaient vainement appelé au secours les soignants, j'ai écouté leurs larmes et leurs sanglots, leur profonde douleur car elles aiment leur proche, leur solitude immense de n'avoir jamais pu être écoutées, entendues, de n'avoir jamais pu dire leur souffrance; j'ai constaté leur incompréhension parfois totale de ce que vit leur proche.
Alors il a fallu agir, les rassembler pour prendre le temps de les écouter, leur tendre la main, leur redonner espoir. Souvent simplement écouter, parfois des heures durant, sans parler, suffisait à leur redonner espoir.
Je pourrais écrire des livres et des livres de ces témoignages parfois si douloureux que d'autres familles elles-mêmes avaient du mal à les entendre. Quant aux rares bénévoles qui nous avaient rejoints au début, d'entendre l'immensité de cette souffrance les a tous fait fuir, "un coup de poing dans l'estomac" m'a dit un jour l'un d'entre eux que je n'ai jamais revu, après une de ces rencontres où les familles témoignaient de leur vécu.
Comment comprendre, sans approuver bien sûr, que certaines familles soutiennent ce projet ?
Quand l'accompagnement des familles est absent, qu'un appel d'une famille aux soignants pour un proche "en crise", c'est-à-dire en phase aigue d'une psychose, reste sans réponse pendant des jours, voire des semaines.
Quand les familles, la plupart du temps sans connaissance ni compréhension des troubles – les soignants ne savent pas, ne veulent pas prendre le temps ou refusent d'écouter leur parole – doivent gérer comme elles peuvent des situations où elles sont parfois en danger. Parce qu'une personne en souffrance extrême, angoissée, en proie à un délire paranoïaque, déconnectée de la réalité, peut être dangereuse (dans la réalité la plupart ne le sont pas) car elle se sent entourée de toutes parts d'ennemis, parce que parfois il suffit d'un regard, d'un geste mal interprétés pour engendrer une réaction de défense qui peut se traduire par une attitude agressive, y compris vis-à-vis de l'entourage immédiat.
Quand certaines familles ont par le passé vainement appelé au secours les soignants, qu'elles n'ont aucune notion de ce qu'est un soin humain pour ne l'avoir jamais vu à l'oeuvre
Quand la réponse aux appels de détresse est "appelez la police si votre enfant est agité ou agressif, nous on ne se mettra pas en danger", que la police arrive pour parfois faire demi-tour en disant "mais contrôlez le (la), c'est votre enfant" quand elle ne repart pas avec votre enfant menotté comme un criminel…
Car c'est cela le vécu de bien trop de familles et d'usagers de la psychiatrie : l'hôpital, la contrainte, la force parfois brute des soignants, la violence institutionnelle, la camisole chimique… pas l'humain
Alors oui, certaines de ces familles, déboussolées, applaudissent une loi qui portera "le soin à domicile" … n'en mesurant pas la portée, l'atteinte inadmissible aux droits élémentaires de leurs proches, l'approche purement "sécuritaire".
La dérive sécuritaire ne sera jamais une solution, une réponse à la souffrance.
Bien sûr qu'il y a des exceptions, mais de plus en plus rares chez les soignants : manque de formation, manque de motivation dans un système qui ne reconnaît pas la difficulté d'une telle profession, manque de temps, manque de moyens. Parfois certains soignants prennent sur eux, hors temps de travail, le temps de construire une relation… mais combien ?
Quelle psychiatrie pour demain ?
– Faire confiance aux usagers en en faisant les acteurs de leur mieux-être ou de leur moindre souffrance, apprendre à les écouter, à les entendre, y compris et surtout quand ils contestent le soin, la psychiatrie. Savoir encourager leur démarche vers l'autonomie.
– Faire confiance aux familles qui, dans la majorité des cas, partagent leur quotidien et vivent leur souffrance.
Qui mieux qu'elles est apte à accompagner à condition d'être informées, accompagnées elles-mêmes. En faire les partenaires indispensables qu'elles sont, non des boucs émissaires.
– Comprendre que sans la triple alliance usagers-familles-soignants, aucun soin ne marchera.
– Ne pas stigmatiser soi-même quand on est soignant.
– Admettre, quand on est soignant, que le soin parfois échoue, qu'il faille se remettre en question, que le tout-médical est une erreur monumentale.
– Faire des hôpitaux psychiatriques des lieux d'accueil humains, non des prisons.
– Etre conscient, quand on est soignant, que l'hospitalisation est toujours un échec, non LA solution. C'est souvent qu'on n'a pas su, en amont, intervenir à temps pour établir une communication.
– Comprendre que l'accompagnement social – ce que font les GEM : rompre l'isolement, permettre la plus grande autonomie possible, permettre l'expression de la souffrance pour apprendre à la gérer, construire des projets ensemble, devenir acteur de sa propre vie – représente 50% des chances de réhabilitation, voire de guérison pour un usager.
– Etre conscient, quand on est soignant, que l'âme humaine ne s'apprend pas dans des livres mais dans le champ de la vie, dans l'échange, le partage, dans l'humain libre d'être tout simplement différent.
– Pour tous, comprendre que ce qui se reflète dans le miroir, c'est souvent la peur de sa propre folie.
PS. Aucun des stagiaires venus dans notre GEM (pour des périodes d'immersion quotidienne allant de trois semaines à deux mois) n'a regretté d'avoir découvert le monde "étrange" de la dite-folie. Aucun n'avait jamais eu de contact avec cet univers. TOUS ont dit que l'image qu'ils se faisaient du "fou" a complètement changé. Qu'ils ont beaucoup appris à les côtoyer, beaucoup grandi à découvrir leurs univers. Et qu'ils reviendront, espèrent-ils, "travailler" un jour dans un GEM. Car dans un GEM on ne "travaille" pas, on vient rencontrer l'autre.
>La menace d’être en permanence sous surveillance
Le Projet de loi sur les soins sans consentement ?
La menace d’être en permanence sous surveillance et une sortie d’essai à vie !
Un contrôle insupportable !
Les adhérents de la RadioCitron ont écrit aux Députés et vont saisir les sénateurs. Après les « V.I.P. en psy », les Voix Iséroises des Patients en psy, le Groupe d’Entraide Mutuelle La Locomotive, le Club thérapeutique le Grillon de Reims, une nouvelle prise de position d’association.
Les Patients se saisissent de la parole et ont leur mot à dire sur ce projet de loi qui les concerne au premier chef ! Salutaire.
Paul Machto
LETTRE DES ANIMATEURS DE RADIO CITRON AUX DEPUTES
Mesdames et Messieurs les Députés,
Un projet de loi va vous être soumis à la mi-mars concernant la psychiatrie. En tant que patients et en tant qu'animateurs de Radio Citron, nous avons lu attentivement ce projet de loi et nous tenons à attirer votre attention sur différents points.
La substitution de la notion d'hospitalisation sous contrainte par la notion de soins sous contrainte représente pour le patient la menace d'être en permanence sous surveillance, même bien après la crise et jusque dans son espace privé. En cas de soupçon de discontinuité d'observance, le patient serait réhospitalisé d'office, ce qui équivaut à être une sortie d'essai à vie : c'est un contrôle insupportable.
Le fichage et la surveillance par un comité spécial dès l'hospitalisation d'office, en plus du psychiatre, à l'encontre du patient même stabilisé ou guéri, la décision d'un juge ou d'un préfet sur le placement, le prolongement et la levée de l'enfermement, la dénonciation des soignants auprès d'eux, le protocole de soins établi par le Conseil d'Etat, protocole stéréotypé et non personnalisé, l'accaparement des psychiatres à des fins d'expertise auprès des juges au lieu des soins, les jours d'hospitalisation complète imposés pour débuter les soins, la suppression totale des sorties d'essai, l'agitation procédurière nuisant au patient, toutes ces mesures et bien d'autres encore dans ce projet sont démesurément sécuritaires.
Rappelons qu'un patient en psychiatrie n'est pas un délinquant, mais un sujet de droit, qui, pour un moment, peut avoir le discernement amoindri. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, favoriser l'enfermement et la médication, considérer les personnes comme dangereuses, et à vie, n'est pas la solution à cette souffrance. C'est même pathogène.
Pourquoi donc nous enfermer, nous surveiller et nous contraindre pour une dangerosité supposée, quand toutes les études menées démontrent que nous ne sommes pas plus dangereux que les autres ? Même, les malades psychiques sont 300 fois plus susceptibles d'être attaqués par des gens non malades, que l'inverse. L'événement qu'évoque Nicolas Sarkozy dans son discours d'Anthony en 2008 est l'exception. Alors pourquoi nous stigmatiser ? Et pourquoi vouloir soumettre cette loi en urgence, alors qu'elle est loin d'être anodine, et qu'elle est lourde de conséquences pour nous ?
En fait, cette réforme est complètement centrée sur une prise en charge autoritaire de la maladie psychique, contre la liberté individuelle et contre toute logique de résultat parce qu'elle ne prend pas en compte l'idée d'un contrat responsable entre patient et psychiatre, et donc la possibilité pour le patient de négocier sa prise en charge librement avec les soignants, ce qui garantit l'observance du soin.
Les soins efficaces, qui laissent au patient la possibilité d'adhérer librement au soin et lui permettent donc d'être un je-sujet de son être, de sa vie, capable de penser sa maladie, la mettre en perspective, en comprendre la source de ce fait, la désamorcer en partie ou complètement, et éviter un éventuel passage à l'acte, les soins qui permettent le lien transitionnel avec les soignants, les soins humains, la parole, les entretiens, les activités sociales et créatives, ces soins efficaces ne sont pas soutenus par cette loi, au contraire elle les met en péril, contre toute raison. De plus, contraindre aux soins médicamenteux certains patients est si violent que l'ambiance des unités de soins psychiatriques s'en trouvera détériorée.
Poser un jugement de dangerosité et d'"irrécupérabilité" sur un patient, c'est lui donner la sensation qu'il est traqué, par tous et partout, et cela favorise les passages à l'acte violents. Or les malades psychiques ont souvent subi une maltraitance dans leur jeunesse, source de pathologies. Car c'est par trop de souffrance que l'esprit cherche des solutions qui parfois génèrent des pathologies. Verrouiller encore plus l'hôpital psychiatrique, l'enfermement et la médication, les considérer comme dangereux, à vie, n'est donc pas la solution à cette souffrance.
Cette loi nous propose d'aller mal, à vie. Elle est totalement contre-productive. Qui y gagne ? Ni les malades, ni la société, ni la sécurité.
Déjà, nous connaissons depuis quelques années une augmentation des hospitalisations d'office, pas parce que nous sommes plus dangereux ou plus nombreux à être malades, mais parce que beaucoup de structures de proximité, intermédiaires, qui accueillaient la parole des patients, on été fermées, alors qu'elles constituaient un véritable outil de prévention des risques et dont se saisissaient les patients. Celles qui restent manquent de moyens, de personnel, les attentes pour des rendez-vous sont dangereusement longues. Telle structure a vu en quelques mois son nombre d'hospitalisations d'office être multiplié par… 10 ! Par 10 ! Alors que les pathologies restent les mêmes. Que se passe-t-il ? Le préfet semble signer l'enfermement à tour de bras, comme le psychiatre, mais hésite à signer les levées : ils ont peur d'être jugés trop laxistes… non pour le bien du patient, ni pour celui de la société ! Voici des conséquences déjà visibles de l'esprit de cette loi.
Toute hospitalisation d'office est toujours extrêmement violente pour le patient. Tous nos témoignages personnels sont terrifiants. Nous en gardons un traumatisme à vie. L'hospitalisation doit de toute façon être soigneusement réfléchie et durer le moins possible. Or ce n'est pas du tout le sens de cette loi.
Si le grand public et notre entourage sont amenés à penser que nous sommes dangereux au point de nous contraindre, de nous enfermer à ce point, de nous contrôler à ce point, de nous "judiciariser" et qui plus est, d'urgence, quelle image de nous et quelle réaction vont-ils avoir ? Et nous, quelle image pouvons-nous avoir de nous-mêmes ? Et vous, si vous craquez ? Comment va se comporter une population persuadée que tous les malades sont dangereux, ou que tous les dangereux sont enfermés ?
Aussi, dans un souci d'efficacité des soins, comme dans un souci d'une société capable de se pencher avec raison sur les véritables dangerosités dans notre vie à tous, dans un souci de justice et de justesse, nous refusons chaque terme de cette réforme. Ces actes risquent d'être perpétrés en votre nom, en notre nom.
Ne sacrifions pas des citoyens qui souffrent, qui se battent individuellement pour se soigner, et toute la profession qui avait tant progressé pour le bien de toute la société. Nous souffrons de ce projet. Nous faisons peu de bruit parce que nous sommes surtout occupés à tenir et nous soigner. Mais nous sommes là, nombreux, à vouloir nous soigner correctement et rester citoyens libres et responsables.
Ne nous enfermez pas dans des hôpitaux-prisons, dans une image terrible, dans des contraintes et des protocoles de soins stéréotypés, par peur ! Au nom d'un principe illusoire de précaution. Aidez-nous, au contraire, car nous souhaitons aller mieux, souffrir moins et avoir notre place, utile et légitime, dans notre société.
Mesdames et messieurs les députés, vous nous représentez, nous vous demandons de porter nos voix et notre refus légitime de cette loi, lors du débat à l'Assemblée Nationale.
Veuillez recevoir nos salutations citoyennes.
Les patients et animateurs de RADIOCITRON.COM
Une émission récente avec Pierre Sadoul, membre du collectif des 39 : http://www.radiocitron.com/index.php?pisteId=393&pisteEmision=1&page=0&PHPSESSID=6240158b8aa553b0e1512778e2126e05
>Séminaire : Les matinées de La Villa
Peut-on penser certains troubles psychiques comme troubles du lien ?
Freud l’évoquait déjà dans son article sur l’inconscient où il prend l’exemple des personnes dites schizophrènes : l’enfant s’est pour une raison inexpliquée, mais de façon très précoce, retiré de l’objet. Plus d’autre solution alors que le retrait narcissique, et cette manière bien repérable de mettre les mots à la place des choses. Plus d’autre solution parfois que le transfert interne.
L’aliénation psychique serait alors la conséquence d’une perte du lien originaire.
Mais est-ce l’enfant, ou bien l’autre, qui s’est retiré ? Qui, du sujet ou de l’autre, peut renouer le lien, qui est en capacité de le faire ?
A Corbeil-Essonnes, ont été mis en place depuis plus de vingt ans des associations et une institution « La Villa », pour travailler les questions de ces liens collectifs et sociaux autour de l’habitat, de l’art, de l’accueil, du corps, de la convivialité. Beaucoup de pratiques et de savoir-faire en ont découlé, et nous essaierons d’établir des ponts entre ces pratiques du collectif et les cures individuelles, à travers tous les abords qui se présenteront : clinique, artistique, politique…
La Villa est un centre d’accueil thérapeutique à temps partiel, dépendant du service de psychiatrie de Corbeil-Essonnes, qui accueille des patients pour des activités variées : de la simple rencontre autour d’un café à des activités corporelles ou artistiques. Elle est le lieu de deux associations :
-Diagonales pour l’habitat, réseau d’appartements dans la ville.
-Arimage pour les ateliers de pratiques artistiques et l’accueil d’artistes en résidence.
Le séminaire aura lieu le mardi matin à La Villa, 10 rue du Bas-Coudray, 91100 Corbeil-Essonnes, 01 60 90 77 76, aux dates indiquées ci-dessous, de 10H30 précises à 12H. Accueil à partir de 10 heures pour un café.
Il est ouvert à toutes les personnes intéressées par les thèmes qui sont traités dans chacune de ces matinées.
Pour tout renseignement, vous pouvez vous adresser à l’un des deux répondants :
– Jean-Pierre Bouleau : 06 31 21 06 67 jeanpierre.bouleau@wanadoo.fr
– Bernadette Chevillion : cattp.lavilla@ch-sud-francilien.fr
Programme de l’année 2011 :
08 mars : Jean-Pierre Bouleau. psychiatre à la Villa, psychanalyste. Quand l’enfant s’est retiré du lien.
10 mai : Paul Bretécher. Psychiatre, psychanalyste, président de l’association Agapes : Retour sur « le potentiel soignant… »
07 juin : Pascale Pasello, artiste plasticienne (à l’occasion de son exposition à la Villa) : Habillé, habité.
13 septembre : Bernadette Chevillion, psychologue clinicienne, présidente de l’association arimage : Aloïse et Jean Dubuffet. Introduction à l’art brut.
11 octobre : Béatrice Chemama-Steiner, psychiatre, psychanalyste, membre d’honneur de la société française de psychopathologie de l’expression : Etude d’un carnet d’Aloïse.
13 décembre : Benoit Cambois, psychiatre, psychanalyste : Giacometti et la mort enchevêtrée.
>Sommes-nous coupables de notre maladie ?
J'ai reçu la demande des adhérents du Groupe d'Entraide Mutuelle de Reims, La Locomotive, du club le Grillon, la Lettre Ouverte qu'ils adressent aux députés de leur région.
Cette mobilisation d'associations de patients, comme celle des Voix Iséroises des Patients en psy, Les V.I.P. en psy, de Grenoble, comme celle du GEM de Reims me semblent être des initiatives remarquables dans le contexte du rejet massif qui s'annonce contre ce projet de loi sur les soins sans consentement.
L'irruption dans le champ politique des personnes qui fréquentent, soit des lieux associatifs, soit des espaces de soins, est fondamentale et témoigne de la nécessité indispensable de repenser fondamentalement la place du patient dans l'espace social, dans la Cité, mais aussi et surtout dans le dispositif de soins : une place de citoyen, qui a son mot à dire sur les conditions de soins, quelqu'un qui a une place de sujet, responsable.
Vouloir le bien de quelqu'un, avoir une posture soit médicale dominatrice, soit d'assistance pour décider ce qui est bon pour lui, n'est elle pas la pire façon de "traiter" une personne ?
Paul Machto
Lettre ouverte des adhérents du
Groupe d’Entraide Mutuelle de Reims, La Locomotive,
du Club Thérapeutique Le Grillon,
et des Clubs M.E.I.D. et Atout Cœur
Aux députés de la région Champagne-Ardenne
Un projet de réforme de la loi du 27 juin 1990[1]doit être discuté à l’Assemblée Nationale le 14 ou 15 mars 2011, mais nous, en tant qu’adhérents de l’association du G.E.M.[2]
La Locomotive, du club thérapeutique le Grillon et de ses clubs affiliés (M.E.I.D.et Atout Cœur), en tant que soignés et soignants, acteurs principaux de la psychiatrie publique, nous nous élevons vivement contre cette notion de soins sans consentement, contre cette notion d’une garde à vue psychiatrique, bref d’un mélange des genres entre la psychiatrie et la justice, entre le soin et une criminalisation de la maladie mentale.
Nous nous opposons radicalement à cette proposition de loi qui va déformer voire détruire la relation de confiance et d’écoute nécessaire entre patient et soignant, proposition qui met le soignant en place d’auxiliaire de la police, ce n’est pas sa mission : sa mission, c’est de soigner. Le soin ne peut être que librement consenti, sinon ce n’est plus un soin.
Que pouvons-nous dire en tant que malade face à ce projet de loi ? Sommes-nous coupables de notre maladie ? Un malade est un citoyen à part entière et il vote.
Alors Mesdames, Messieurs les Députés, transformerez-vous les malades en prisonniers et les soignants en surveillants?
Non ! Aux soins ambulatoires forcés.
Non ! à l’espace privé sous le coup d’une loi irrespectueuse de la dignité humaine.
Mesdames et Messieurs les Députés, vous nous représentez, nous vous demandons de porter nos voix et notre refus légitime, lors du débat à l’Assemblée Nationale.
[1] Loi du 27 juin 1990 qui régit les conditions d’hospitalisation en psychiatrie ( hospitalisation sur demande d’un tiers -HDT-, hospitalisation d’office (H.O.).
[2] Les Groupes d’Entraide Mutuelle créés par La loi Nº 2005-102, du 12 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette loi reconnaît la spécificité du handicap psychique et crée un nouveau dispositif adressé aux personnes souffrant de troubles psychiques, le G.E.M/pour groupe d'entraide mutuelle et son intention est l'amélioration des conditions de vie de ces personnes.
>Festival "Les évadés du bocal"
Les évadés du bocal
Du 7 Mars au 3 avril 2011 au bar-restaurant le Lieu-Dit, 6 rue Sorbier, Paris XXe
C’est avant une histoire de rencontres. De rencontres et d’ouverture à autre.
Tout part d’une conversation, suivie de la proposition d’Hossein Sadeghi, le propriétaire du Lieu-dit, à une personne qu’il rencontrait pour la première fois, de mettre à disposition son lieu pour un événement politique sur l’art et la folie. Cette proposition engendra d’autres rencontres : entre des soignants en formation (Utopsy), des soignants révoltés (le collectif des 39), des artistes (collectif Pounchd), un collectif philosophique et radiophonique (Zones d’attraction), de Nouveaux cahiers pour la folie, un Théâtre du reflet… Ainsi est né le collectif des évadés du bocal.
Nous rêvons d’un festival qui parle d’art et de folie. Pourquoi associer ces deux champs ? Parce que nous constatons que nous sommes traversés par des discours et des pratiques que nous prenons pour des évidences et que l’art et la folie défont les évidences.
Le langage, qui s’agence en différents discours (sur ce qu’est une vie réussie, sur la normalité, l’art, la psychiatrie…), trame la réalité avec une efficacité sans pareil. Pourtant les mots ne disent pas tout : qui n’a pas vécu la difficulté d’essayer de dire ce qu’il ressent ou de raconter un rêve, par exemple. Les discours constitués n’offrent jamais qu’une version codée et normée du réel (…Lire la suite sur le blog)
>Présomption de dangerosité
Le projet de loi adopté en conseil des ministres le 26 janvier 2011 et qui sera discuté au Parlement le 15 mars prochain consacre une nouvelle notion : la présomption de dangerosité.
Les malades mentaux et plus largement les personnes ayant vécu une crise psychique grave vont, selon ce texte, expérimenter une nouvelle étape du principe de précaution. Il est question d’enfermer, de ficher, de neutraliser (y compris à domicile), de surveiller des citoyens dits potentiellement dangereux parce qu’ils auraient été l’objet de « soins psychiatriques » sans consentement.
Sa prétention est d’éliminer un risque de passage à l’acte et de généraliser à cette fin un système de contrôle: Il s’agit d’un bouleversement juridique et d’un enjeu démocratique majeur. Cette présomption de risque suffirait à déclencher des règles coercitives. Sa dérive est d’ores et déjà avérée puisque la population désignée n’est pas plus dangereuse que les autres selon toutes les études menées.
Suivant les principes qui ont guidé la volonté de ségrégation d’enfants dès l’âge de 3 ans en fonction de leur violence future supposée, le gouvernement continue à développer son arsenal législatif. Il s’agit, avec ce projet de loi, d’établir des soins sous contrainte y compris à domicile et de réformer un texte sanitaire en un dispositif sécuritaire.
Le vocabulaire utilisé et les mesures préconisées dans ce texte relèvent davantage du code pénal que du code de la santé publique.
Ainsi : « Lorsque les soins prennent la forme prévue au 2° (soins ambulatoires , pouvant comporter des soins à domicile), un protocole de soins est établi, PROTOCOLE, DONT LE CONTENU EST fixé par le conseil d’ETAT, défini le ou les types de soins, les lieux de leur réalisation et la périodicité des soins ».
Le conseil d’Etat est-il habilité à définir un protocole de soins ?
« les avis mentionnés au I et au II sont rendus après que le patient a été ENTENDU…… faisant obstacle à la COMPARUTION…. »
S’agit-il d’un prévenu en garde à vue ou d’un examen médical ?
« autorisation de sortie accompagnée avec l’accord du directeur, celui-ci aura prévenu le représentant de l’Etat 48 h auparavant qui doit donner son autorisation… en cas de soins psychiatriques sans consentement avec hospitalisation».
Cela concerne-t-il un malade ou un détenu?
« A l’AUDIENCE, la personne est entendue( par le juge des libertés et de la détention), sauf si elle ne peut comparaître …….Dans ce cas le juge, d’office ou à la demande de l’intéressé, lui désigne un avocat pour assurer sa défense ».
Après la garde à vue, l’audience en jugement…..
« Le juge ne peut décider la main levée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres… ».
Et pendant ce temps-là, qui soigne les patients ? Le psychiatre est-il un expert ou un soignant ? Le juge n’est-il pas réduit à légitimer un système ?
« le juge peut décider que l’audience se déroule avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ».
« Docteur, j’ai vu un juge à la télé qui parlait de moi…. J’avais même un avocat que je n’avais jamais rencontré pour me défendre! ».
« lorsqu’un patient est pris en charge sous la forme d’une hospitalisation complète susceptible de se prolonger au-delà de 15 jours, le directeur de l’établissement en est avisé par la transmission d’un certificat médical établi au plus tard le huitième jour de l’hospitalisation, certificat transmis au représentant de l’Etat,le juge des libertés et détention est saisi, il statue après débat contradictoire »
Une complexité qui va fluidifier les hospitalisations ! La souffrance n’est-elle qu’une question administrative?
Au sein de toutes ces mesures, quelle place reste-t-il pour les soins ?
Le déroulement des 15 premiers jours d’une hospitalisation dans le cadre de soins sous contrainte, si ce projet de loi devait être adopté, ceci dans le programme « de la lutte contre les maladies et dépendances et la lutte contre les maladies mentales », deviendrait une scène juridico-administrative et les soins remis à plus tard alors qu’il s’agit d’une hospitalisation…
Imagine-t-on l’état du malade au milieu de toute cette agitation procédurière ?
L’idéologie sécuritaire n’envahit-elle pas des pans entiers de notre quotidien au nom de notre protection ?
Patrice Charbit
>Lettre du Collectif des 39 à l'ensemble des Associations d'Usagers en psychiatrie, des Familles, des Associations, des Syndicats de Professionnels en psychiatrie, des Associations de psychanalystes
En 2003, nous étions tous réunis pour organiser les Etats Généraux de la Psychiatrie. Unitairement et démocratiquement, nous avions élaboré « les 22 mesures d’urgence » ainsi que les 4 motions fondant les axes généraux de notre exercice.
Il n’était pas question dans ces décisions de la révision de la loi de 1990. C’était sans doute une façon d’exprimer que cette loi ne semblait pas être un obstacle fondamental à nos pratiques et que d’autres urgences nous animaient.
Sept années plus tard, seule la révision de cette loi est la réponse du ministère à nos revendications. Et ceci dans un climat particulièrement difficile puisque depuis le discours d’Antony du Président de la République, la dérive sécuritaire envahit le champ de la psychiatrie : comme si tous les patients étaient identifiés à des criminels dangereux, actuels ou potentiels.
Nous étions ensemble à Montreuil le 7 Février 2009 pour dire notre indignation devant cette idéologie inacceptable ; à l’appel du collectif des 39, 2000 personnes ont clairement manifesté leur refus d’une telle politique.
30000 citoyens ont signé un appel condamnant le discours du président de la république.
Et pourtant 70 millions d’euros furent débloqués pour des murs, des caméras, des clés, des portes. Le pacte républicain s’est rompu : les préfets discréditent les avis des psychiatres, décident contre leur avis. Si l’hospitalisation protège le patient pour des soins, celle- ci devient un enfermement arbitraire quand le préfet refuse la sortie demandée par le psychiatre.
C’est dans ce climat délétère et morbide que nous a été proposée une modification de la loi de 1990 avec un projet de loi instaurant les soins sans consentement en ambulatoire.
En Septembre nous étions de nouveau tous ensemble à Villejuif : mille participants avec toutes les forces politiques d’opposition, tous les syndicats de psychiatres, plusieurs syndicats professionnels, quelques associations d’usagers, et des familles, ont affirmé leur opposition au projet de loi.
Après la décision du Conseil Constitutionnel le 26 novembre 2010, ce projet nous revient, modifié, avec « l’introduction » du juge pour les hospitalisations sous contrainte.
Vous savez que si depuis la loi de 1838, l'hospitalisation seule pouvait faire l'objet d'une contrainte identifiant les soins à un lieu, le changement prévu par le législateur est une modification sans précédent ! Il s’agit d’un changement paradigmatique dans ses conséquences car ce projet de loi n' identifie plus l'hospitalisation, mais les soins eux-mêmes à la contrainte, les réduisant à une pure surveillance. L'obligation n'a t- elle pas pris le pas sur le contenu du soin ? Ce hors lieu de la surveillance, donc son omni-présence, penche dangereusement vers des choix totalitaires, des choix « contrôlitaires » ! C'est un lourd tribut : le monde de la psychiatrie est-il prêt à s’y soumettre ? à le payer ? Un constat est à faire : même si c’est pour des raisons différentes, parfois contradictoires, divergentes voire opposées, la quasi totalité des professionnels rejette ce projet.
Ce projet ne répond pas aux attentes des professionnels, des familles, des patients
C’est un projet qui s’oppose frontalement aux nécessaires évolutions que des soins de qualité nécessitent : il maltraite les patients, il trompe les familles, il disqualifie les professionnels.
Dans la précipitation, dans un simulacre de concertation, sans prendre le temps de penser le soin en psychiatrie, cette « réforme » de la loi de 1990, si elle était adoptée, aggraverait d’autant plus les conditions de notre exercice, dont la dégradation nous avait amenés à élaborer 22 mesures d’urgences en 2003.
Pour une loi sanitaire qui prendrait en compte les moyens, la formation, la conception de la maladie (qui s’oppose à celle de la Fondation « FondaMental » qui vient d’être richement dotée), n’est il pas possible d’organiser dans l’urgence qui nous est imposée, un front du refus unitaire, actif, mobilisateur ?
Le collectif des 39 ne restera pas inactif devant la gravité de la situation.
Il appelle toutes les forces vives de ce pays à se rassembler pour demander le retrait de ce projet.
Le temps presse : nous avons l’immense responsabilité d’organiser cette riposte ensemble.
Nous restons à l’écoute des propositions. Nous en ferons également. Bien cordialement à vous,
pour le Collectif des 39 :
Dr Mathieu Bellahsen, Selma Benchelah, dr Philippe Bichon, dr Hervé Bokobza, dr Loriane Brunessaux, Marie Cathelineau, dr Patrice Charbit, dr Franck Chaumon, dr Patrick Chemla, dr Guy Dana, dr Alexandra De Seguin, dr Roger Ferreri, dr Sarah Gatignol, Yves Gigou, dr Michaël Guyader, Serge Klopp, Émile Lumbroso, dr Paul Machto, Antoine Machto, Bénédicte Maurin, Simone Molina, Françoise Nielsen, Sylvie Prieur, dr Pierre Sadoul, dr Pedro Serra, dr Olivier Schmitt, dr Bruno Tournaire-Bacchini, dr Anne Tuffelli , Monique Vincent, dr Élie Winter.
Contacts :
Collectif des 39 : yglns39@orange.fr Dr Hervé Bokobza : 06 85 31 71 61 Yves Gigou : 06 60 48 98 84 Dr Paul Machto : 06 80 65 47 79
(Cette lettre a été envoyée à l'ensemble des associations concernées)
>Une réforme absurde et dangereuse des soins sous contrainte
Pourquoi absurde ? Des soins sans consentement ! Impossible ! Soin et consentement vont de pair. A moins de limiter les soins psychiatriques à une prise de médicaments. Nous revendiquons le droit et l'accès aux soins psychothérapeutiques qui sont pour nous indissociables d'un traitement adéquat. Quelque soit la théorie appliquée (thérapie comportementale, institutionnelle ou psychanalytique), celle-ci devrait d'ailleurs être "explicitée" systématiquement au patient par son médecin thérapeute, c'est une démarche personnelle de la part du malade qui bien sûr nécessite sa pleine adhésion. Il ne peut y avoir stabilisation de son état que par des soins complets: un traitement adapté et un travail psychothérapeutique.
Nous ne cessons d'entendre que le système judiciaire est engorgé de toute part, il faut tout de même rappeler que les H.S.C (hospitalisations sous contrainte) représentent plus de 7.4000 hospitalisations par an! Comment les juges des libertés et de la détention (J.L.D) vont-ils pouvoir faire face à ce surcroît de travail? Avec quelles compétences spécifiques à part celle de consulter les avis médicaux? De plus il est précisé que l'intervention d'un juge judiciaire garantit le principe du contradictoire, c'est-à-dire que le patient pourra alors être représenté par un avocat lors de ses démarches… mais cet avocat encore faut-il pouvoir le contacter, le trouver, le payer et nous pensons que cela est rendu très difficile voire impossible par une situation d'H.S.C.
Pourquoi dangereuse ? Le passage à une durée de 72h d'observation (24h auparavant) avant que le médecin ne se prononce laisse en effet la porte ouverte aux abus à l'encontre du patient. Cette durée ressemble plus à une "garde à vue" qu'à une période de soins pourtant primordiale. Qu'en est-il des visites de la personne de confiance désignée par le patient durant ces trois jours ? Une plus grande réactivité et donc une levée des HDT et HO selon l'état du malade nous paraît indispensable, les délais des décisions nous paraissent trop longs ! Passez donc quelques semaines dans un hôpital psychiatrique et vous comprendrez. Certes il y a quelques petites choses à faire dans certains pavillons mais c'est trop rare par manque de moyens et de personnel.
L'argent mis à construire des chambres d'isolement et à installer des barricades (70 M€ ! pour le plan de sécurisation ) aurait pu être utilisé afin d'améliorer les conditions d'hospitalisation et donc, j'en suis persuadée, de diminuer la durée moyenne des "séjours" des patients dans ces établissements (en 2009: 52 jours en HL, 60j en HDT et 95j en HO).
"Précaire" signifie "qui n'offre aucune garantie, qui peut toujours être remis en cause". Or la condition humaine est vulnérable certes, mais non "précaire" dans le sens où elle ne peut pas être remise en cause comme l'affirme le président d'ADVOCACY France. Cela signifierait alors que certaines personnes pourraient ne pas être dignes de faire partie de l'humanité. C'est ce que l'on veut nous faire croire en appliquant une norme dans notre société et en enfermant, en rendant clandestins ceux qui ne peuvent s'y conformer. Il est vrai qu'aujourd'hui nous vivons dans la précarité, mais c'est celle engendrée par le fonctionnement même de notre société.
Les H.S.C (auparavant hospitalisations sous contrainte devenues soins sans consentement!) doivent rester des exceptions et non un moyen de contrôler la population dans un but normatif. Les critères énoncés dans la réforme de la loi de 1990 prêtent à interprétation libre de la part du décideur (juge, maire ou préfet…): il y est stipulé qu'en cas de "péril imminent" une H.S.C doit être prononcée. Une atteinte à l'ordre public, même qualifiée de "grave" (ce qui demande des précisions), n'est en aucun cas un critère valable pour un internement sous contrainte systématique. Selon nous l'H.S.C se justifie uniquement si il y a un danger pour une personne (le patient ou un tiers) ou bien si il y a une perte d'autonomie de la personne c'est-à-dire que le patient n'est pas en capacité de choisir pour lui-même.
L'intervention d'un juge pourrait impliquer une dérive dangereuse entre HDT, HO et mise sous tutelle/curatelle qui reste une décision lourde de conséquences pour le patient et son entourage. Il faut de plus noter la difficulté de sortir de ses systèmes de tutelles/curatelles. En effet c'est la personne concernée qui doit aujourd'hui payer l'expert psychiatre qui se prononcera sur la levée ou non de la mesure de protection. Nous retiendrons que cette somme est loin d'être négligeable pour un petit budget. De plus pour quelqu'un qui doit justifier de ses dépenses auprès de son curateur/tuteur il est d'autant plus compliqué de le faire quand c'est dans le but de supprimer le rôle de cette tierce personne.
La réforme de la loi de 1990 suscite un amalgame dangereux entre délinquants (qui relèvent de la justice) et malades (qui nécessitent des soins psychiatriques appropriés). Cela ne fera que renforcer les méprises telles que l'emprisonnement de malades et inversement (même si cela paraît plus rare) l'hospitalisation d'auteurs de délits alors qu'ils ne relèvent pas des soins psychiatriques. L'intervention du juge des libertés et de la détention à postériori (15 jours après la première décision) ne fait que renforcer cette confusion. Le patient est donc moins perçu comme personne souffrant d'une pathologie que comme un danger. Auparavant nous pouvions déplorer une réduction du patient à sa maladie, aujourd'hui il y a en plus confusion de la personne souffrante à un sentiment d'insécurité qui ne cesse d'être invoqué par les politiques.
Objets d'exclusion par la peur nous ne resterons pas silencieux !
"objets" oui, car le vocabulaire utilisé dans ces textes de lois nous réduisent à cet état.
Cécile Aventurier
Article d'origine, contes de la folie ordinaire, édition de Mediapart : http://blogs.mediapart.fr/edition/contes-de-la-folie-ordinaire/article/170211/loi-1990-reaction
Lettres de psychotiques (magazine Books-février 2011)
Après la publication de ses « Confessions d’un schizophrène (1) », Luiz Ferri Barros a commencé à recevoir des lettres des quatre coins du Brésil. Nous publions des extraits de deux d’entre elles, et l’une de ses réponses.
Le Livre
Un ange facteur. Correspondance de la psychose
Imago
Babel, 18 août 1993
Cher Lucas (2),
Le fait est que nous sommes comme frère et sœur. J’ai découvert que je souffrais de cette maladie et, grâce à votre livre, j’en ai eu la confirmation.
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>Juger et punir les malades mentaux ?
Les lois sécuritaires sur la santé mentale ne sont pas loin d'être promulguées. Le congrès "juger et punir les malades mentaux" risque d'être un moment important.
Le programme complet de la journée : Programme-congres-03-2011
>Ce jour-là, Sally a basculé ( Magazine Books-février 2011)
Courant dans le flot des voitures, sûre de pouvoir les arrêter du simple fait de sa volonté… Aujourd’hui pudiquement baptisée trouble bipolaire, la psychose maniaco-dépressive touche, comme la schizophrénie, 1 % de la population.
Le Livre
Le jour où ma fille est devenue folle
Flammarion
« Le 5 juillet 1996, commence Michael Greenberg, ma fille a été prise de folie. » L’auteur ne perd pas de temps en préliminaires, et le livre avance promptement, de façon presque torrentielle, à partir de cette phrase introductive, à l’unisson des événements qu’il rapporte (1). Le déclenchement de la manie est soudain et explosif : Sally, sa fille de 15 ans, était dans un état survolté depuis quelques semaines, écoutant les Variations Goldberg par Glenn Gould sur son Walkman, plongée dans un volume de sonnets de Shakespeare jusqu’à des heures avancées de la nuit. Greenberg écrit : « Ouvrant le livre au hasard, je découvre d’invraisemblables griffonnages faits de flèches, de définitions, de mots entourés au stylo. Le Sonnet 13 ressemble à une page du Talmud, les marges remplies d’un si grand nombre de commentaires que le texte imprimé n’est guère plus qu’une tache au centre de la feuille. » Sally a également écrit des poèmes troublants, à la Sylvia Plath (2). Son père y jette discrètement un coup d’œil. Il les trouve étranges, mais ne songe pas un instant que l’humeur ou le comportement de sa fille soit de quelque manière pathologique.
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>John Strauss : « La réalité échappe aux manuels de psychiatrie » (Magazine Books-février 2011)
Ni la schizophrénie ni la psychose maniaco-dépressive ne peuvent faire l’objet d’une définition précise. Le danger est grand de donner aux mots plus de réalité qu’ils n’en ont vraiment, car la psychiatrie n’est pas une science. L’admettre lui permettrait de mieux explorer la subjectivité des malades, et donc leur traitement.
Books : Vous avez plus de quarante ans de pratique auprès de patients atteints de schizophrénie. En quoi consiste cette maladie ? Peut-on la définir ?
John Strauss : La schizophrénie est un mot en usage depuis un siècle environ pour désigner certains types de malades. On perd le sens du réel, on éprouve des hallucinations, on entend des voix, on délire. Mais, comme les autres mots utilisés en psychiatrie pour désigner telle ou telle forme de pathologie mentale, c’est une construction du corps médical. On veut croire que c’est un concept clair, qui désigne nettement son objet, mais ce n’est pas le cas. Beaucoup de définitions de la schizophrénie ont été données au fil du temps (1). Et il n’existe pas de frontière nette entre la schizophrénie et certaines formes de psychose maniaco-dépressive. Ainsi parlons-nous de trouble « schizo-affectif » pour désigner un état dans lequel le patient entend des voix et est en même temps hyperactif ou, au contraire, déprimé. On est alors quelque part entre la schizophrénie et la maladie maniaco-dépressive. De même, il peut y avoir des éléments de paranoïa dans une schizophrénie ou dans une maladie maniaco-dépressive ; mais la paranoïa peut ne relever ni de l’une ni de l’autre. Depuis quelques années, on a remplacé la notion de maladie maniaco-dépressive, ou manie, par celle de maladie bipolaire. Mais ce qu’on appelle « bipolaire » peut relever du maniaco-dépressif ou simplement du dépressif (lire ci-dessous « La mode du “bipolaire” »).
>VST N°108 : CONTENIR OU ENFERMER (4E TRIMESTRE 2010)
L’approche sécuritaire devient la réponse privilégiée des décideurs politiques : enfermement en HP, chambres d’isolement, établissements pénitentiaires pour mineurs, rétention administrative à tout va… Pourquoi ce recul de deux siècles, ce retour à la psychiatrie d’avant Pinel et aux colonies pénitentiaires pour mineurs ? Certes, il y a et il y aura toujours besoin de cadres, de limites, de « non », de contenants. Mais parlons-nous alors de la même chose ?
Dossier coordonné par Dominique Besnard et François Chobeaux
Sommaire du N° : http://www.cemea.asso.fr/spip.php?article7187
>Soutien au Mouvement des magistrats de France
Collectif des 39
Contre La Nuit Sécuritaire.
Soutien au Mouvement des magistrats de France
Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire apporte son soutien total au mouvement de protestation des magistrats, à la suite des propos indignes du Président de la République.
Comme à son habitude dans des circonstances analogues, nous l’avons constaté après le drame de Grenoble en novembre 2008, après chaque fait divers qui peut faire fructifier son populisme émotionnel et simpliste, ce Président se précipite et jette à la vindicte populaire des « responsables » immédiats sans aucune précaution, au mépris d’un travail d’enquête sur les faits.
Il a instauré comme ligne politique l’attaque du lien social, la désignation de boucs émissaires sous prétexte de se placer du côté des victimes : les « schizophrènes dangereux », « les roms voleurs et fauteurs de troubles », les « monstres», et maintenant les professionnels.
Tous coupables, devient l’axe essentiel de cette politique ! Diviser pour régner ?
Cette orientation politique a pour effet d‘attiser les haines, d’accroître le sentiment de peur, de favoriser les affrontements des citoyens les uns contre les autres, mais aussi de détourner l’opinion sur sa responsabilité dans la détérioration de la vie quotidienne, la précarité, la destruction des services publics, les conditions inacceptables des moyens affectés à la Justice, l’introduction d’un management dévastateur et une gestion stérilisante dans les hôpitaux, le grand renfermement des malades mentaux, l’amplification des inégalités, le règne de l’argent.
Comme lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, il désignait immédiatement au mépris de tout élément de véracité, comme délinquants et cambrioleurs, les deux jeunes Zyed et Bouna qui venaient de mourir électrocutés dans le transformateur EDF victimes de leur peur de la police.
Le mensonge servirait-il de politique ?
Dans le drame de Pornic, au mépris de toute vérité des faits, il a été tenté d’abord de présenter le suspect de délinquant sexuel récidiviste !
Oui, un meurtre est toujours horrible !
Oui, un meurtre est toujours révoltant !
Oui, un meurtre est le signe d’une impuissance !
Oui, un meurtre est le témoin de la cruauté et du « désir » de destruction qui se niche au fond de chaque être humain. Les actes horribles, abjects de « bons pères de famille » qui se transforment en barbares en situation de guerre, nous l’ont bien montré.
La barbarie fait partie de l’humain, son côté obscur.
La raison, le respect de l’altérité, la solidarité, l’hospitalité, l’accueil des diversités, peuvent être les outils pour limiter, réduire, empêcher autant que faire se peut l’expression de la barbarie humaine.
Alors laisser entendre que si un meurtre a été commis, il aurait pu être évité si « les responsables avaient fait leur travail », est un mensonge d’État.
Les parents ont été désignés comme responsables de l’absentéisme scolaire, ou pire des actes de délinquance de leurs enfants.
Les enseignants sont désignés comme responsables de l’échec scolaire.
Les psychiatres ont été désignés comme responsables des actes de patients.
C’est maintenant au tour des magistrats.
A quand le tour du Président et du Gouvernement ?
Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire soutient sans réserve le mouvement des magistrats par solidarité mais aussi pour être confrontés nous-mêmes, aux mêmes attaques, aux mêmes suspicions. À travers ce soutien il exprime ainsi la nécessité de rejeter avec force les propos indignes et récidivants de la plus haute autorité de l’État.
Lorsque celui dont la fonction fondamentale est d’être le garant du respect de la Constitution, se met pour la troisième fois au dessus de ces principes fondamentaux, ce fait pose une question gravissime sur le fonctionnement de nos institutions.
Si le Président est un multi -récidiviste en la matière, quelle valeur, quel sens, les citoyens peuvent-ils alors donner à leurs conduites en société ?
>UN PROJET DE LOI INFAME (communiqué de presse du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire)
Contre La Nuit Sécuritaire.
UN PROJET DE LOI INFAME
Le conseil des ministres vient d'adopter un projet de réforme de la loi de 1990 sur les hospitalisations sous contrainte qui permettrait d’introduire l’extension de l'obligation de soin au-delà du temps de l’hospitalisation, c'est à dire y compris à domicile.
Le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire dénonce vivement le contenu de ce projet sous tendu par une seule et unique idéologie : « les malades mentaux doivent être traités comme des délinquants et des récidivistes voire des criminels potentiels ».
Le soin en psychiatrie n'est pas une succession et un assemblage de techniques. C'est un mensonge de faire croire qu'une sélection de « bonnes pratiques » professionnelles reproductible d'une personne à une autre soulagera la souffrance de chacun. Chaque sujet est singulier et appelle à une proposition spécifique de soin.
Un dispositif gestionnaire, policier et sécuritaire se met progressivement en place depuis plusieurs années et tend à se substituer aux véritables soins dont les malades ont besoin.
Donner l'illusion de répondre à la détresse des malades et à l'inquiétude des familles par un système de contrôle permanent est une imposture qui ne fera qu'aggraver les conditions d'accueil des patients et de travail des soignants.
Nous dénonçons cette dangereuse dérive qui interdit toute possibilité de construire un projet sanitaire de qualité pour l'avenir qui tiendrait compte de la singularité des situations.
Le collectif demande le retrait immédiat de ce projet indigne et appelle à une mobilisation la plus large possible des patients, des familles, des professionnels, et des responsables politiques pour le faire abroger.
>De la santé mentale vers la psychiatrie
De la santé mentale vers la psychiatrie
En liminaire, les trois bases indissociables pour une psychiatrie de demain non ségrégative :
– La nécessité d’une formation spécifique
– Des personnes humaines pour soigner plutôt que des techniques instrumentales.
-Un budget global avec une enveloppe spécifique pour soutenir la spécificité de l’abord relationnel princeps en psychiatrie.
Depuis le rapport Piel et Roelandt, la psychiatrie se doit d’aller vers « la santé mentale ».
1) A quoi correspond aujourd’hui ce terme de « santé mentale » ? Quelles sont les logiques sous jacentes et ses effets ?
2) Comment comprendre qu’actuellement, en s’appuyant sur la logique santé-mentaliste les acteurs du champ social prônent toujours plus de « déstigmatisation » par le biais de la santé mentale alors que les nombre de personnes enfermées à l’intérieur des HP ou bientôt à leur domicile, ne cesse d’augmenter ?
3) Si la santé mentale voulait initialement en finir avec l’asile, les nouvelles logiques asilaires ne seraient-elles pas maintenant au cœur de la cité, dans nos rues, nos prisons et bientôt au domicile de toute personne un tant soit peu en marge avec les SSCA ?
4) Comment comprendre les SSCA sinon comme une adaptation économique compensant la diminution des moyens accordés à la psychiatrie, notamment en terme de soins à temps plein ?
5) Les patients les plus fous et les plus démunis seront-ils la variable d’ajustement de notre nouveau modèle de gestion de la folie ?
Sous couvert de déstigmatisation, c’est le grand retour de la ségrégation pour les plus fous d’entre-nous.
Par ailleurs, dans le préambule du projet de loi, la prostitution des mots concoure à parler de continuité de « soins » et d’accès aux « soins » alors qu’il ne s’agit que d’un égal accès à la contrainte et d’une continuité de la contrainte dans tout le champ social pour qui se décalera un peu des normes en vigueur.
Aujourd’hui, la psychiatrie gestionnaire n’est qu’une version affadie de la psychiatrie sécuritaire du discours d’Antony. Gestion et sécuritaire sont dans un continuum implicite.
D’une santé mentale psychiatrique à une santé mentale néolibérale Le terme de « santé mentale » ne recouvre pas une seule et unique réalité.
Il y a une grande confusion
Dans son origine d’après-guerre, la santé mentale est le concept de psychiatres progressistes qui veulent transformer les systèmes asilaires, en premier lieu les hôpitaux psychiatriques, en pratiques ouvertes sur la cité. C’est l’avènement des pratiques désaliénistes et de psychothérapie institutionnelle, fécondées par la psychanalyse et la prise en compte de la dimension politique et sociale de la psychiatrie.Le tournant gestionnaire des années 1980 allant de pair avec le climat de rigueur budgétaire, la « santé mentale » se déterritorialise de son origine psychiatrique pour progressivement couvrir tous les troubles ou autres pathologies de « l’adaptation ». En parallèle, c’est le retour du modèle objectiviste avec les tentatives de faire coïncider les pathologies psychiatriques avec des anomalies neurologiques, génétiques etc.
Le tournant est net à partir des années 2000 quand l’OMS ouvre le chantier de la santé mentale et que la France entreprend sa politique de « démocratie sanitaire ».
La santé mentale devient un paradigme qui vide la psychiatrie de sa substance pour se consacrer depuis 2009 à « la santé mentale positive », reléguant les pathologies les plus lourdes à des filières de handicap chronique où les patients psychotiques seraient figés une fois pour toute dans leur maladie.
Dès lors, la santé mentale ne va plus s’occuper de pathologies psychiatriques mais devra se consacrer à rendre les individus performants dans un climat de concurrence mondialisée. C’est le rapport remis à NKM en 2009.
Le santé-mentalisme : déni de la réalité psychiatrique ?
Tout cela s’appuie sur la création de nouveaux concepts comme : « autonomie, bien être, santé mentale positive, qualité de la vie, déstigmatisation » qui vont s’agencer peu ou proue aux logiques sécuritaires actuelles.
Selon le rapport du centre d’analyse stratégique remis à NKM en 2009, la santé mentale devient « l’affaire de tous », sauf des psys, relégués à la prise en charge de la santé mentale négative. Ce rapport est essentiel puisqu’il agence les visées concurrentielles de l’Union Européenne (Livre Vert, stratégie de Lisbonne) et les visées hygiéniste de l’OMS (plaidoyer pour la santé mentale).
L’objectif est le suivant, je cite : « avoir une population en bonne santé mentale pour remplir les objectifs stratégiques de l’Union Européenne » (livre vert de l’UE). C’est donc par l’avènement de la santé mentale « positive » que ce cadre normatif doit se déployer.
Ces normes ont-elles encore quelque chose à voir avec le soin psychique ? C’est ce que pense des fondations comme FondaMental qui n’ont pourtant plus pour perspective de soigner réellement les patients mais bien plus de créer un modèle exploitable facilement par les décideurs politiques, afin de normaliser les comportements.
Pour simplifier, les pathologies psychiatriques se calqueront sur le modèle des pathologies médicales. Rappelons la phrase introductive au rapport Milon : « Aux vues des progrès de l’imagerie médicale et des neurosciences, la partition entre neurologie et psychiatrie n’est plus de mise à l’heure actuelle ». Cette analogie est tout simplement fausse en pratique, pour qui voit encore des patients au quotidien. Il n’y a qu’à penser les spécificités du déni, de l’articulation avec le contexte social et environnemental etc.
Créer un outil de soin psychique qui se pense et se remet en cause au quotidien ne va pas sans poser de problèmes actuellement : les normalisateurs patentés ont alors l’outrecuidance de nous dire que ce n’est pas comme cela qu’il faut faire… Cela s’appelle la «certification». Par exemple, les certificateurs s’intéressent plus dans les hôpitaux psychiatriques aux « infections nosocomiales » médicales qu’aux réelles maladies nosocomiales psychiatrique que sont l’agitation, la violence, la chronicisation, la passivité etc.
Les centres experts « FondaMentalistes » promus actuellement, censés faire un diagnostic et mettre en place un traitement sont un non sens en pratique et d’une simplification ravageuse.
Ce cadre santé-mentaliste diffuse dans le champ de la psychiatrie mais ne prend pas en compte ses spécificités, et notamment l’impossible « choix rationnel des acteurs » chez les personnes en proie à des crises de folie : voilà l’impasse de la santé mentale.
Les personnes les plus en difficultés, celles que l’Union Européenne dénomme comme « des personnes mentalement diminuées » ( !) ne maximisent pas leur capital santé mentale… Les logiques présidant à leur existence ne sont pas tout à fait les mêmes que les logiques des « gens normés ».
Par ailleurs, la logique de l’OMS, sous couvert de rendre les individus en bonne santé, crée des normes hygiénistes marquant le retour d’une police sanitaire pour conduire les conduites des individus. Injonctions qui nous détournent de plus en plus du cœur de notre métier, dans le même temps, tous les savoirs faire spécifiques, comme la nécessité du lien thérapeutique singulier, ne sont plus à l’honneur.
Attention, l’individu statistique qui est à la base des logiques actuelles n’existe pas dans la réalité de notre travail.
Les impasses pratiques
Avec les patients psychotiques « aigus du quotidien », les projets se construisent dans le temps, singulièrement avec un lien de confiance et pas dans des centres experts.
C’est le strict opposé du projet de loi de défiance qui nous est proposé, où les soins psychiques se résument à une prise en charge standardisée pour des patients déjà « normalisés », où les professionnels se voient déresponsabilisés de l’engagement singulier dans les soins : protocole, loi…
Dans le même temps, les pratiques psychiatriques réellement accueillantes sont « stigmatisées » car, n’étant pas dans la norme dominante mais aux plus près des patients, pris dans leur singularité.
A défaut, tomberons-nous dans l’avènement d’une psychiatrie contrôlitaire telle qu’elle est proposée ?
Enfermer ou normaliser ceux qui résistent à la rationalité dominante, cela provoque de la violence, de l’exclusion, des sujets qui n’ont plus la possibilité de tisser du lien social.
Le reste du santé-mentalisme
Pour tourner rond, la rationalité santé-mentaliste doit se débarrasser de ce qui lui résiste, à savoir les fous avec leur folie encombrante. Mais en résistant, le si médiatique «schizophrène dangereux » paye dans son corps ces normes sociales ségrégatives… Que ce soit en prison, en rééducation thérapeutique, dans l’errance des rues, derrières des hauts murs sécurisés ou qu’il soit muni de bracelets de géolocalisation ou autre !
Pour finir sur l’exemple de l’implicite du modèle gestionnaire sécuritaire actuel : tous les termes politiquement corrects masquent un implicite de mise à l’écart des plus fous comme il a été formulé très tôt, en 2003, dans le rapport Cléry Melin : la question était posée de savoir ce que la société doit choisir : soigner le plus grand nombre ou soigner les personnes les plus gravement atteintes ?
Conclusion
Si les politiques ne s’interrogent pas sur cette « santé mentale » qui tente d’éradiquer ce qui lui résiste au cœur de la psychiatrie, les contrées ségrégatives pour la Folie continueront à se multiplier et auront vite fait de la transformer en Furie. Furie qui, à défaut d’être canalisée par les UMD, les injonctions de soins, les camisoles de force, les cellules d’isolement, ne pourra s’apaiser que dans leur mise au ban de la société.
Mathieu Bellahsen, psychiatre responsable de l’unité d’hospitalisation Alberto Giacometti, secteur de psychiatrie adulte 91G08
>Journée d'étude, travail d’équipe en santé mentale le 09 février : Mythe ou réalité ?
Pour les professionnels de la santé mentale, qu’ils interviennent dans le champ du sanitaire, du médicosocial ou de l’action sociale, le « travailler ensemble » s’impose dans de nombreuses configurations des pratiques quotidiennes.
Mais actuellement, alors que la division des taches et l’hyperspécialisation des intervenants s’accentuent, dans des structures de plus en plus spécialisées et plus ou moins articulées, les collectifs s’interrogent. A quels besoins répond l’organisation pluridisciplinaire des institutions ?
A ceux des personnes accompagnées ou à ceux des équipes ? Comment se posent les questions de hiérarchie, rôle, statut et fonction ? Quelle place est donnée aux réunions d’équipe ? Pour quels échanges ? Quels sont les moyens qui permettent de mettre en jeu au mieux les compétences des uns et des autres en dépassant le socle des savoirs et connaissances ?
Travail en équipe : Collectif de partage ou partage du collectif ?
Le Mercredi 9 février 2011, à partir de 13h30
Hôpital Henri EY 15 avenue de la Porte de Choisy 75013 Paris (Métro Porte de Choisy – Ligne 7)
Participation aux frais : 10 euros par personne. A régler sur place
Le programme complet de la demi-journée : journee d'etude du 9 fevrier 2011
>La Fnapsy ne soutient plus le projet des pairs-aidants : réponse du Centre Collaborateur de l'Organisation Mondiale de la Santé pour la recherche et la formation en santé mentale
En préambule, nous notons que dans le rapport du bureau de la Fnapsy apparaît une confusion constante entre les quatre positions suivantes : usagers des services de santé mentale, responsable d’association d’usagers, chargé de mission national pour le projet médiateurs de santé/pairs.
INTRODUCTION – RAPPORT FNAPSY
« La FNAPSY participe, depuis plusieurs années, à l'étude du projet « Pairs-aidants » rebaptisé depuis « Médiateurs de santé-pairs »
L'approfondissement de ce projet a confirmé les craintes exprimées dès le début par la FNAPSY.
Un voyage au Québec a permis de constater que la réalité dans ce pays était loin de la présentation qui en était faite.
Le déroulement des premiers mois de travail a mis en lumière l'incommunicabilité entre professionnels et usagers, et la quasi impossibilité de créer et de faire vivre harmonieusement des équipes communes.
Tirant les leçons de ces constatations le bureau de la FNAPSY a décidé, dans sa séance du 7 janvier 2011, faisant suite à la réflexion du conseil d'administration du 27 novembre 2010, de se retirer de ce projet.
Le présent rapport a pour objet de diffuser les renseignements recueillis lors de cette participation et de détailler les raisons de cette décision ».
REPONSE DU CCOMS
Le CCOMS prend bonne note « des craintes exprimées dès le début par la FNAPSY » concernant ce projet. Il avait noté les réticences de celle-ci tout au long du projet expérimental et s’était étonné du ralliement positif de la FNAPSY à ce projet le dernier jour de la formation des pairs-aidants dispensée par l’équipe québécoise à Lille en septembre 2009. Nous l’avions attribué d’une part au dynamisme évident du projet québécois, et d’autre part à la demande de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) d’inclure la Fnapsy au projet.
Le voyage d’étude au Québec de l’équipe projet « médiateurs de santé/pairs » en novembre 2010 a mis en évidence non seulement les limites mais également les réalités d’un projet innovant et de l’espoir qu’il suscitait chez les usagers et les équipes de santé mentale.
Il est tout à fait possible de communiquer harmonieusement entre usagers et professionnels non usagers à la condition que chacun soit à sa place et dans son rôle. Les exemples québécois, américain et marseillais sont là pour le prouver (…)
document complet à télécharger (12 pages) : Reponse CCOMS
>Une liste de discussion Du Collectif National de Résistance à l'Informatisation des Données Personnelles en Psychiatrie
Une liste de discussion du "Collectif National de Résistance à l'Informatisation des Données Personnelles en Psychiatrie", – CNR-IDPPsy – est maintenant lancée.
Créée à l'initiative d'Olivier Labouret, elle a été réalisée par Esther Joly
Son objet : diffuser et discuter les informations et les actions concernant l'informatisation des données personnelles en psychiatrie.
On peut considérer que tout ce qui concerne le "fichage" des populations, dans le champ de la médecine plus particulièrement, et tout ce qui concerne les questions juridiques, éthiques et politiques autour de la question de l'informatisation des données personnelles, intéresse aussi les "usagers" et les soignants de la psychiatrie : à chacun de "sélectionner" selon ces critères les informations méritant d'être diffusées.
Une liste est créée pour permettre à un ensemble d'individus réunis autour d'un projet ou d'un objet commun, d'échanger avec toutes celles et tous ceux qui sont d'accord, simplement en répondant au message qui est passé par l'adresse de la liste. La « netiquette » est à respecter pour faciliter les échanges.
Vous pouvez modifier sur le serveur votre mode de réception, le format des courriels…
Le nom de la liste est « idppsy ».
L'adresse du serveur est : http://agora.chahut.info/wws à inscrire dans votre navigateur sur la Toile.
Son nom : « idppsy »,
l'adresse : <idppsy@agora.chahut.info>
A votre première connexion sur la page web de la liste, vous entrez comme login, l'adresse mail que vous avez transmise pour participer aux échanges initiés par Olivier Labouret.
Le mot de passe nécessaire pour accéder au serveur, vous sera envoyé sur votre adresse mail, suite à votre première connexion et ainsi avec le mot de passe vous pourrez revenir et modifier vos choix de réception.
Avec votre mot de passe, vous pouvez explorer les variables que vous pouvez modifier. Nous pouvons aussi y déposer des documents pour les partager . Par exemple, vous partez en vacances, pour ne pas surcharger votre boîte mails, vous pouvez dire que vous ne voulez pas recevoir de mails.
>Quand l'incompétence politique devient synonyme de victimisation…
Depuis 2007 les ministres de la santé à la solde de Nicolas Sarkozy se succèdent et se ressemblent conformes à une politique du "tout sécuritaire" sans aucune volonté de différencier les missions des institutions représentant notre pays, d'estimer à leur juste valeur les catégories de professionnels spécifiques, de respecter les usagers dans leur singularité.
On ne privatise pas "les soins aux malades mentaux" comme on privatise France Telecom ou la Poste me diriez-vous ? !
Par conséquent ne nous plaignons pas : "Circulez y'a rien à voir !" , "Enfermez-moi ces fous que je ne saurais voir !" ; j'appelle le patient "tel numéro de telle chambre.." et maintenant "L'affaire numéro tant (patient en HSDT ou HO) du JLD de tel TGI".
La politique de "rabotage budgétaire" connue de tous, touchant essentiellement les domaines de la fonction publique, ici les professions "de contact", "de prévention", "de continuité des soins"nous ramène à une simplification, à une causalité linéaire qui fait abstraction des causes multifactorielles d'une pathologie récurrente, anéantissant ainsi l'histoire, la singularité de la personne souffrant de troubles mentaux.
Nous devenons de facto des acteurs compétents sur le clavier de l'ordinateur, rentrant des données informatiques afin de mieux répertorier sur le catalogue DSM IV tous comportements "non conformes" à la société dite "bienveillante" au regard de la sécurité de ses citoyens.
Nous sommes 60 millions de consommateurs et c'est là l'essentiel d'une politique aux intérêts mercantiles ! Performance et rentabilité signent la condamnation de l'Etat providence et le démantèlement des structures qui font l'ouverture pour les usagers de la psychiatrie dans la cité ! Je suis indignée vous n'en doutez pas !
Plutôt que de reprendre d'une manière pédagogique pour toutes les parties intéressées par la maladie mentale tels que usagers, familles d'usagers, associations, professionnels de santé, les dernières enquêtes menées par "les missions nationales d'appui en santé mentale" dans les secteurs médico-sociaux (prévention en amont et en aval) et sanitaire (évaluer et traiter), les politiques s'en tiennent à la rubrique "faits divers" et font de "l'empirisme pavlovien" !
Par conséquent, vidons de son sens la qualité des soins auprès des personnes souffrant de troubles mentaux en supprimant les postes de psychologues, en diminuant le ratio "infirmiers pour un malade", en disqualifiant le travail relationnel des médecins psychiatres au profit d'une rentabilité aux actes, en raccourcissant la durée d'hospitalisation au moment où l'alliance thérapeutique prend le pas sur la camisole chimique.
La question de l'autonomie du patient est une période transitoire qui demande beaucoup de temps. Le travail de lien dans la cité avec les différents partenaires médicaux sociaux permet la prévention des rechutes par le choix du lieu proposé de rencontre et la relation de confiance qui se tisse entre les personnes. Ce langage non conventionnel ou politiquement incorrect (puisque le temps c'est de l'argent) n'interesse pas la sphère politique. Sous couvert d'une jurisprudence, ils condamnent par là même toute l'originalité des organisations de secteur psychiatrique. La baisse des moyens humains et structurels mettent à mal le respect à la dignité de la personne souffrante.
L'obligation de soin n'a jamais permis d'avancer dans la relation soignant/soigné car il n'y a pas de place pour le désir du sujet. La sécurité et la liberté n'est pas là où Xavier Bertrand veut nous la laisser croire.
Cette réforme de la loi de 1990 fera obstruction au projet individualisé du patient. Il y aura malheureusement "un catalogue/statistique" d'inadaptés, une liste noire en somme. Je n'ose pas imaginer que le dépistage en santé mentale fera office de "casier judiciaire" au même titre que le dépistage de la délinquance des enfants proposé dés la maternelle.
Le JLD contrôlera au quinzième jour de l'admission sous contrainte le HO ou l'HSDT, la validité de leurs documents et la décision du JLD dépendra des fluctuations de l'actualité gênant l'ordre public ou des émotions élyséennes desquelles son leader nous a si bien habituées.
Lors de son discours d'investiture, Nicolas Sarkozy, s'adressant à la foule sympathisante fit allusion aux plus démunis : "Ne les laissez pas sur le trottoir !" Cette phrase m'a frappée car elle se veut victimisante et humiliante pour ceux qui sont usés par l'exclusion sociale. La ligne de défense des familles et usagers en santé mentale est la juridicisation parce qu'elle leur apparaît comme une garantie de liberté. J'ai bien peur que ce ne soit tout le contraire sans compter que la qualité des soins en pâtira.
>Rapport de la FNAPSY Sur le projet « médiateur de santé pair » Ex « pairs aidants »
On ne peut que se féliciter de la décision de la Fnapsy de renoncer à un tel projet.
Il est dommage que certaines personnes aient dû en passer par cette douloureuse expérience pour se rendre compte que comprendre celui qui est malade n'équivaut pas à le soigner.
Prendre pour modèle le Québec est dans "l'air du temps", on pourrait citer pour exemple une formation sur la prise en charge de la violence dispensée dans les hôpitaux qui s'effectue sur un modèle purement comportemental et qui fait violence aux équipes soignantes par son inadéquation au contexte hospitalier français.
Il est intéressant de noter que l'expérience ratée des pairs aidants bute sur la transmission, transmission aux équipes soignantes d'un indicible, sommé de répondre à un idéal soignant qui prend des allures surmoïques .
Quant aux patients, que leur transmettre lorsque l'on se retrouve étiqueté "médiateurs de santé pairs", de la complexité et de la singularité d'un parcours de vie qui doit tout à coup montrer l'exemple, coacher, soigner, soutenir, accompagner ? On ne sait plus.
Cette double impasse illustre bien la nécessaire prise en compte de l'altérité dans toute démarche de soin.
La confusion des rôles et place de chacun entraîne un brouillage identitaire difficilement supportable, renforcé sans doute encore par les attentes de performance du dispositif et de ces objectifs.
En matière de soin psychique, il vaut mieux parfois faire confiance à l'inattendu qu'au protocole !
Rapport de la FNAPSY sur le projet « médiateur de santé pair » Ex « pairs aidants »
La FNAPSY participe, depuis plusieurs années, à l’étude du projet « pairs aidants » rebaptisé depuis « médiateur de santé – pairs » L’approfondissement de ce projet a confirmé les craintes exprimées dès le début par la FNAPSY .
Un voyage au QUEBEC a permis de constater que la réalité dans ce pays était loin de la présentation qui en était faite Le déroulement des premiers mois de travail a mis en lumière l’incommunicabilité entre professionnels et usagers et la quasi impossibilité de créer et de faire vivre harmonieusement des équipes communes.
Tirant les leçons de ces constatations le bureau de la FNAPSY a décidé, dans sa séance du 7 janvier 2011, faisant suite à la réflexion du conseil d’administration du 27 novembre 2010, de se retirer de ce projet. Le présent rapport a pour objet de diffuser les renseignements recueillis lors de cette participation et de détailler les raisons de cette décision.
1. Historique
Le projet Pairs aidants a été proposé à la FNAPSY par le CCOMS (service dépendant de l’EPSM de Lille Métropole) voici plusieurs années. Le CCOMS a proposé d’étudier le développement en France du concept de pairs- aidants existant au QUEBEC et obtenant, d’après les renseignements dont il disposait, de bons résultats.
Le concept de pair aidant repose sur l’idée que les personnes les mieux placées pour comprendre une personne en souffrance psychique sont les personnes ayant elles même été en souffrance psychique. La désignation initiale résultait de ce concept, il s’agissait de faire aider les personnes en souffrance par d’autres personnes en souffrance (pairs).
Le but recherché était de favoriser la réinsertion des personnes embauchées comme pairs aidants tout en assurant une meilleure prise en charge des autres usagers. Dès l’origine la FNAPSY a indiqué que, si le concept était intéressant, il soulevait de multiples et délicats problèmes de conflit d’intérêts et, en plaçant les médiateurs de santé pairs dans une situation ambiguë, risquait de provoquer des rechutes des pairs aidants.
Elle a cependant, compte tenu de la réussite annoncée du concept au Québec, accepté d’en approfondir l’étude et en particulier de participer à la phase d’expérimentation telle que décrite par la convention passée en 2010 entre l’EPSM de Lille Métropole et la CNSA. C’est dans ces conditions que deux usagers ont été embauché à mi temps par l’Epsm Lille Métropole, en tant que chargés de mission usagers, dans le cadre de ce projet rebaptisé entre temps « médiateurs de santé pairs ».
Le présent rapport est tiré de leur expérience. Celle-ci a mis en évidence :
– Une réalité de l’expérience du Québec très différente de la présentation qui en était faite.
– La quasi impossibilité de faire travailler harmonieusement des équipes mixtes. Ces deux points seront développés ci après.
2. La réalité de l’expérience québécoise
L’un des usagers a participé au déplacement organisé au Canada en novembre 2010 et a pu, en marge des conférences officielles de présentation, rencontrer des pairs aidants québécois et des représentants des associations qui les emploient. Il est ressorti de ces entretiens :
– Qu’il y a eu des formations de pairs aidant au Québec – Que ces formations ont été organisées sous forme d’un campus de 15 jours, en immersion, et non sous forme d’un cursus à temps partiel s’étalant sur plusieurs mois. De plus ces formations ont été entièrement faites par la représentante usager « pairs aidants » du Québec.
– Que, sur les 30 pairs aidant formés, une minorité a eu un emploi, les autres étant au chômage.
– Que, au surcroit, les personnes employées ne sont pas rémunérées directement par les hôpitaux mais par l’intermédiaire d’associations.
Ce qui modifie totalement leurs liens avec les équipes soignantes. Il résulte de ces constatations que l’expérience québécoise est notablement différente des présentations qui en avaient été faites et des propositions de transcription en France. Il en résulte également que cette expérience n’a pas répondu aux attentes qu’elle soulevait puisque seuls quelques pairs aidants sont en fonction au Québec, ce qui est très peu pour la population concernée, surtout après plusieurs années.
3. Les problèmes généraux posés par la formation d’équipes mixtes professionnels usagers
Les relations de travail sont souvent délicates et sont un des grands sujets de stress dans le monde moderne, même quant elles rassemblent des personnes de caractéristiques similaires. Tous les psychologues du travail savent que les conflits s’exacerbent dès que certaines personnes présentent des caractéristiques différentes et que la gestion de telles équipes exige beaucoup de doigté.
Par exemple pour que les personnes qui se sentent « supérieures » respectent les autres membres et pour que les autres membres ne se « sentent » pas méprisés Par exemple pour que les personnes qui ont une meilleure résistance ne se sentent pas exploitées et pour que les autres ne se sentent pas « noyées » etc..
Ces difficultés sont évidentes dans le cas d’équipes mixtes soignants/ usagers rémunérés Les soignants possèdent des compétences techniques qui manquent aux usagers Les usagers possèdent une connaissance interne de la maladie, une empathie, savoir qui ne peut pas se transmettre aux soignants
Même lorsque le paroxysme de la pathologie est passé, les usagers souffrent d’une résistance physique ou psychique plus fragile, leur demander de suivre le même rythme de travail que des collègues professionnels soignants, est le meilleur moyen d’entrainer une rechute.
4. L’expérience française
Le but de la convention passée entre l’EPSM Lille Métropole et la CNSA était de préparer, conjointement entre des soignants et des usagers, la formation et l’embauche d’une première promotion de « médiateur de santé pair » et le suivi de leurs premières activités.
Cette formation devait être conçue avec la participation d’usagers qui devaient veiller à ce que la formation, mais aussi les activités confiées aux médiateurs de santé pairs, soient compatibles avec leur sensibilité et amènent des avantages positifs pour chacun, soignés, soignants et médiateurs.
Ils devaient être, en particulier, garants du respect du premier principe d’Esculape : « primo non nocere » appliqué, en premier, aux médiateurs. Leur souci, au moment de leur embauche par l’EPSM, était que, pris dans les problèmes de leur gestion quotidienne, les chefs de service, employant des médiateurs de santé pairs, n’en viennent pas à oublier la fragilité de ceux-ci, et ne leur impose pas des compétences excédant celles qu’ils possèdent, ou un rythme de travail insoutenable compte tenu de leur fragilité (qui est également leur force).
Ils s’attendaient à partager ce souci avec les professionnels promoteurs du projet et en particulier avec le directeur du CCOMS. Tel ne fut pas le cas Outre les problèmes d’organisation résultant de l’inexpérience de l’équipe du CCOMS dans le travail avec des personnes basées dans une région différente de l’agglomération Lilloise, les chargés de mission usagers se sont heurtés à deux sortes de problèmes :
– L’impossibilité de prendre en compte la parole des usagers.
– L’impossibilité de prendre en compte la spécificité des usagers
4.1. L’impossibilité de prendre en compte la parole des usagers.
La FNAPSY avait, malgré ses réticences, accepté de participer au projet pour que celui- ci ne soit pas uniquement une construction intellectuelle dressée par des professionnels soignants, sans prendre en compte les besoins des usagers, qui sont souvent différents de ce que les professionnels peuvent imaginer.
Or il est apparu que, non seulement les chargés de mission usagers n’ont pu, au cours des quatre mois passés, obtenir une réunion sérieuse consacrée à la définition précise du projet, mais que, dans la conduite quotidienne du projet, les avis qu’ils exprimaient n’étaient jamais pris en compte, tout au moins facteurs de discussion.
Le dernier exemple en date concerne le recrutement d’un nouveau chargé de mission usager (à 80% du temps), pour lequel le CCOMS a décidé de convoquer des candidats avant que la convention EPSM FNAPSY ne soit discutée et signée, laquelle devait définir exactement la mise en place de ce poste..
4.2. L’impossibilité de prendre en compte la spécificité des usagers
Les personnes étant ou ayant été en souffrance psychique se caractérisent par leur moindre résistance physique et psychique. La FNAPSY a toujours attiré l’attention du CCOMS sur ce point Elle s’attendait à ce que des personnes averties, comme le sont les cadres du CCOMS, en tiennent compte.
Or tel n’a pas été le cas, le chef de projet considérant que « quand on fait parti d’un projet de recherche on doit être disponible » « et que les personnes doivent être guéries » Une telle conduite est la négation même de la prise en compte des particularités des usagers qui ne peuvent soutenir un rythme de travail élevé sous peine de rechute. (Ce qui a été bien spécifié au Québec, chaque pair aidant mentionnant ce fait).
Cette attitude a elle seule montre le caractère dangereux du projet. Si une équipe de chercheur, a priori compétente et informée, néglige à ce point l’un des paramètres clefs du travail avec les usagers, comment attendre un meilleur respect de la part de chefs de service moins informés ?
CONCLUSION
Il apparaît à la lumière de l’expérience qui vient d’être vécue, non seulement que le projet de médiateur de santé pair ne répond pas aux attentes qu’on avait placées en lui mais en plus qu’il sera nocif – Pour la santé des médiateurs qui, confrontés à un rythme de travail dépassant leur capacité et à la souffrance d’autrui, sans possibilité d’en référer à un pair ou à l’association qui est leur responsable, ont toutes chance de subir des rechutes.
– Pour les services qui seront désorientées devant ces particularités, et désorganisés par les rechutes à répétition de ces collaborateurs.
– pour les patients qui auront des difficultés à bien identifier ces «nouveaux professionnels » et leur rôle exact