Tous les articles par Collectif des 39

>PSYCHOLOGUES : praticiens ET universitaires, tous en grève !

Les psychologues praticiens sont en grève et organisent une manifestation aussi bien à Paris que devant les ARS des différentes régions, le 28 JANVIER 2011, co-organisée par la CGT, le syndicat Sud Santé, le Réseau National des Psychologues. "

 


Le mouvement du terrain est massif, du jamais vu depuis 10 ans. 


"La raison principale de ce mouvement est le démantèlement entier de notre profession, quel que soit le champ de notre exercice. L'Université n'en est pas exclue, avec la volonté de la disparition de la psychologie clinique et de la psychanalyse. Sur un fond de musique d'un avenir où le psychologue n'aura plus de place s'il continue à remplir sa mission première, mentionnée dans nos textes officiels (statuts …), qui est celle d' "œuvrer à l'autonomie de la personnalité". Dans la société actuelle, pas d'autonomie, pas de répit !"


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>Le gouvernement modifie sa réforme de l'hospitalisation d'office

 

(©AFP / 26 janvier 2011 13h52) 

PARIS – Le ministre de la Santé Xavier Bertrand a présenté mercredi en Conseil des ministres un texte qui introduit dans le projet de loi sur la psychiatrie l'interdiction de prolonger l'hospitalisation d'office d'un patient au-delà de 15 jours sans intervention d'un juge.

Cette "lettre rectificative" a été adoptée pour se conformer à un arrêt rendu le 26 novembre par le Conseil constitutionnel, qui avait censuré un article du Code de la santé publique qui permettait le maintien de l'hospitalisation sans consentement à la demande d'un tiers sans l'intervention d'un magistrat, a rapporté le porte-parole du gouvernement.

Le nouveau texte "prévoit notamment l'intervention du juge des libertés et de la détention pour maintenir une personne en hospitalisation complète sans son consentement au-delà de 15 jours", a expliqué François Baroin en rendant compte à la presse des travaux du Conseil.

"Ce contrôle systématique du juge des libertés et de la détention s'ajoute aux possibilités systématiques d'intervention déjà en vigueur. Le juge peut intervenir à tout moment sur toute mesure de soin sans consentement à la demande du patient, d'un de ses proches ou sa propre initiative", a poursuivi le ministre du Budget.

Le projet de réforme de la loi concernant les personnes faisant l'objet de soins psychiatriques, qui concerne près de 70.000 personnes par an, doit entrer en vigueur le 1er août 2011.

Lors du Conseil des ministres, le chef de l'Etat a également "demandé que soit engagé un plan pluriannuel de prévention et d'accompagnement des personnes souffrant de troubles mentaux", selon M. Baroin.


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>Travail comparatif sur le nouveau texte de la réforme de la loi de 1990

(Rectificatif)

"Nous publions le travail d'Eric Bogaert, psychiatre de secteur ( Lot), membre de l'Union Syndicale de la Psychiatrie. Il s'est attelé à comparer le nouveau projet de loi sur les "soins en psychiatrie", texte qui "réforme" la loi de 90 sur les hospitalisations, avec le texte qui avait été adopté en Conseil des Ministres en mai 2010 et qui devait être présenté au Parlement à l'automne. 
 
Ce texte de mai avait été finalement ajourné sans cesse, du fait de la mobilisation importante organisée par le Collectif des 39, l'Appel Mais c'est un homme…, et globalement de nombreuses protestations de syndicats de professionnels. 
 
"L'avis "récent du Conseil Constitutionnel, fin novembre, largement discuté sur le site, a poussé le Gouvernement à retravailler ce texte, du fait de l'obligation faite de se conformer à la décision du Conseil Constitutionnel avant le 1er Août 2011. 
 
Nous proposons donc ce travail, à titre d'information, pour que chacun puisse avoir en main tous les éléments."
 
(Rectificatif : le document anciennement publié n'avait pas pris en compte les parties supprimées : nous publions le document d'origine au format PDF, qui lui contient bien les parties barrées du projets de loi, c'est à dire supprimées. Toutes nos excuses.)

Travail comparatif de la réforme de la loi de 1990 : 2011


 

 
 
 

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>Gardons notre « âme », résistons au contrôle

 


Faisons comme Martin Amis dans «  la flèche du temps », racontons notre histoire à reculons :


«….On nous attacha sur des tables pour nous faire subir la Grande Opération. Le lendemain, je me rendis chez le Bienfaiteur et lui racontai tout ce que je savais sur les ennemis du Bonheur. Je ne comprends pas pourquoi cela m’avait paru si difficile auparavant. Ce ne peut être qu’à cause de ma maladie, à cause de mon âme.» 


Ainsi parle D-503, le personnage d’Eugene ZAMIATINE dans « Nous autres » un homme « des siècles futurs », qui vit dans une société qui impose fermement l’Harmonie sous la direction du Guide !


Rompons l’harmonie pour retrouver notre âme :


Nous sommes une équipe pluridisciplinaire , qui travaille dans un CAMSP ( Centre d’Action Médico – Sociale Précoce ) qui accueille des jeunes enfants de 0 à 6 ans en situation de handicap ou à risque de handicap et leurs parents. L’employeur, une association privée loi 1901 a installé un système de vidéosurveillance dans la salle d’attente et les couloirs donnant  sur les bureaux de soins contre l’avis de toute  l’équipe soignante et ce, malgré la gêne et les interrogations  exprimées par certaines familles. 


La démarche des familles qui s'adressent au CAMSP est difficile, délicate. Elle ne peut se faire que si le respect, la confidentialité des échanges sont assurés. Nous refusons au nom de nos valeurs éthiques que les patients soient soumis à cette surveillance qui ne se justifie ni sur un plan pratique ni sur un plan sécuritaire.

Par contre, nous ne voyons aucun inconvénient à ce que ces caméras soient en service lorsque l'établissement est fermé au public.


Au delà des arguments pragmatiques évoqués par l'employeur, nous tenons à défendre un cadre de travail qui garantit l'intégrité de l'écoute des parents et des enfants, conditions indispensables à l'acte thérapeutique. 


En outre, du fait du handicap ou des difficultés de leur enfant, ces familles peuvent souffrir du regard des autres. Certaines ont par ailleurs témoigné, y compris par écrit, de leur désapprobation et pose la question de l’atteinte à leur vie privée.


C'est pourquoi il nous semble tout à fait inacceptable, de filmer ou d'enregistrer des couloirs ou une salle d'attente qui sont des lieux d’interactions, de passage et de transition éminemment sensibles et qui font partie intégralement de la prise en charge. 


Nous revendiquons la confidentialité du colloque clinique, le respect des libertés démocratiques fondamentales, et le droit à une expression libre.

L’argument sécuritaire s’est peu à peu imposé dans le discours de l’association gestionnaire alors que nous tentions d’avancer notre point de vue de soignants.


Les caméras devenaient des outils efficaces pour combattre et prémunir l’établissement contre les vols, intrusions et dégradations des locaux. Bien évidemment, cet argument sécuritaire reflète une méconnaissance profonde de la population accueillie et du contenu du travail que nous proposons, fondé sur une relation de confiance et une alliance thérapeutique indispensable à nos missions.


Ce genre de dispositif qui participe de l’illusion d’un contrôle omnipotent, d’un œil qui ne se ferme jamais met à mal notre travail de soins et d’accueil.

Ces dispositifs déjà mis en place dans d’autres domaines se banalisent et s’introduisent maintenant dans le milieu de la petite enfance.


Le dialogue est quasi absent et nos demandes n’ont pas pu être entendues. Notre avis émane pourtant de professionnels qui ont une qualification et une expérience de terrain avérées.


La gestion associative, prenant modèle sur des méthodes de management issues de l’entreprise empiète et contrarie le projet de soins porté par l’équipe soignante.


Ces pratiques, au nom de la « modernité », vont à l’encontre de nos principes éducatifs et thérapeutiques.

Une telle logique de surveillance induit une désaffection du relationnel et une délégation des compétences parentales, tout en engendrant le danger d’une stigmatisation des conduites.




L’Équipe 

du Centre d’Action Médico Sociale Précoce

D ‘Épernay.

 

 

POUR SIGNER LA PETITION : http://www.mesopinions.com/Ensemble-contre-la-vid%C3%A9o-surveillance-au-Centre-d%E2%80%99Action-M%C3%A9dico-Sociale-Pr%C3%A9coce-d%E2%80%99Epernay-petition-petitions-3c6626a98d40916419821c640785fc16.html

 

 

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>Les évaluations nationales ne passeront pas par nous !

 

 

Le Réseau des enseignants du primaire en résistance diffuse ce jour un appel au boycott des évaluations nationales CM2 signé nominativement par 200 professeurs des écoles. Cet appel s’inscrit dans la continuité des actions collectives de résistance pédagogique organisées par les enseignants du primaire pour lutter contre les pseudo-réformes qui déconstruisent l’école publique.

 

Intitulé « Les évaluations nationales ne passeront pas par nous ! », cet appel est soumis à la signature des enseignants du primaire sur le site http://resistancepedagogique.org/site/.

 

Il est d’ores et déjà soutenu par plusieurs personnalités, telles Philippe Meirieu, Pierre Frackowiak, Hubert Montagner, André Ouzoulias, Laurent Ott et Daniel Calin.

 

Le Réseau des enseignants du primaire en résistance appelle les syndicats d’enseignants à soutenir cette initiative et à relayer largement cet appel auprès de leurs adhérents  et de l'opinion publique.

 

 

Contacts :

contact@resistancepedagogique.org

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>Non à la politique de la peur ! (réunion le 01er février à Lille)

 

 

Non à la politique de la peur!

Le sécuritaire contre

les droits sociaux et citoyens 

Réunion Publique

1er février 2011 de 17 h 15 à 22 heures

Maison de l’Éducation Permanente (MEP)

1 place Georges Lyon à Lille

 

 

 

Un projet de loi « relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge » a été déposé à l’Assemblée Nationale le 5 mai dernier. Il  s’inscrit dans la logique des politiques de la peur et porte sur le domaine de la loi qui régit les soins obligés et les placements involontaires en psychiatrie.

 

Ce projet instaure, en particulier, une garde à vue psychiatrique de 72h et des soins sans consentement extensifs de l’hôpital au domicile sous gestion et contrôle du Préfet. Il crée une logique de gestion des risques basée sur la dangerosité du «malade mental », objet de soins à perpétuité. Il crée aussi un fichier national des malades mentaux qui s’ajouterait au trop nombreux déjà existant.

 

En conséquence, l’appel contre les soins sécuritaires Mais c’est un Homme se veut une plateforme de rassemblement pour défendre une certaine représentation de la folie et de la psychiatrie, opposée radicalement à ce qui est affirmé aujourd’hui.

 

Cette réforme s’inscrit dans une politique du tout sécuritaire et d’une succession ininterrompue de textes répressifs dont la loi LOOPSI2, le rapport BOCKEL, la proposition de la loi pénitentiaire, le fichage généralisé de la population, la vidéosurveillance, l’appel à la délation,  ne sont que les derniers avatars.

 

Face à un projet de société qui catégorise, trie, désigne, élimine, détruit, expulse et réprime nous opposons outre le dispositif d’accès aux soins, le refus de la délation et de l’exclusion, la promotion d’un socle de droits sociaux et citoyens dans le respect des droits de l’homme.

 

 

Organisations Signataires de l’appel « mais c’est un homme »: Collectif Non à la Politique de la Peur, Advocacy France, Association pour la Recherche et le Traitement des Auteurs d’Agressions Sexuelles (ARTAAS), ATTAC France, Collectif d’associations d’usagers en psychiatrie (CAUPsy), Fédération pour une Alternative Sociale et Écologique, Fondation Copernic, Groupe Information Asiles (GIA), Ligue des droits de l’Homme, Nouveau Parti Anticapitaliste, Parti Communiste Français, Parti de Gauche, Parti Socialiste, Les Sentinelles Egalité, SERPsy, SUD Santé Sociaux, Syndicat de la magistrature, Syndicat de la Médecine Générale, SNPES-PJJ-FSU, Union Syndicale de la Psychiatrie, Union Syndicale SOLIDAIRES,  les Verts.

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>Comment accueillir la folie? Un débat organisé lundi 24 janvier par Mediapart.

La loi sur l'hospitalisation sous contrainte sera réformée dans les prochains mois. Face à un texte à intention clairement sécuritaire, alimenté par un discours qui stigmatise les malades mentaux comme potentiellement dangereux, il est urgent de s'interroger sur l'accueil que la société réserve aux personnes souffrant de troubles psychiques. Tant à l'hôpital, qu'à l'école, dans les entreprises et plus généralement dans la cité.

Ce débat est né d'une proposition de Paul Machto, psychanalyste et psychiatre à Montfermeil et Yves Gigou, infirmier, tous deux abonnés à Mediapart et rédacteurs de l'édition Contes de la folie ordinaire.

Il réunira:
– Hervé Bokobza, psychiatre et psychanalyste, directeur de la clinique de psychothérapie institutionnelle de Saint-Martin de Vignogoul dans l'Hérault, ancien président de la Fédération Française de Psychiatrie et membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire;
– Bénédicte Maurin, éducatrice auprès d'enfants près de Blois; 
 Sylvie Zucca, psychanalyste (a beaucoup travaillé autour des questions de la psychiatrie en grande précarité, notamment au Samusocial), et auteur de Je vous salis ma rue – clinique de la désocialisation (ed. Stock, 2007);

Sera aussi présent dans la salle, Guy Dana auteur de Quelle politique pour la folie?: le suspense de Freud (ed. Stock, 2010).


Ce débat, animé par Sophie Dufau, journaliste à Mediapart et auteur de Le Naufrage de la psychiatre (ed. Albin Michel, 2006), s'inscrit dans le cadre des «lundis de Mediapart» qui, une fois par mois, propose une réunion publique la Maison des Metallos, à Paris.

L'entrée est libre et gratuite.  

RSVP: debats@mediapart.fr

Infos pratiques :
Maison des métallos, 94 rue Jean-Pierre Timbaud, 75011 Paris M° Couronnes
Lundi 24 janvier, de 19h00 à 21h00.

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La décision du conseil constitutionnel : Une avancée ? Une perversion supplémentaire ?

Communiqué des 39 sur la décision du Conseil constitutionnel :

Les 39 ont longuement débattu au sujet de cette décision et plusieurs approches ont émergé du débat. Il y eut donc plusieurs communiqués répondant à la décision du CC, dont un premier, publié le 25 décembre 2010, et celui-ci qui s’était perdu dans les méandres des messageries internet. Ce dernier communiqué publié remplace donc l’ancien, puisqu’il contient les apports d’un plus grand nombre de membres du collectif. 

Pour « le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire », l’arrêté du conseil Constitutionnel préservant les droits des patients hospitalisés sous contrainte pourrait apparaître comme une avancée démocratique. Cependant nous restons tout à fait circonspects quant aux effets de l’apparition d’un juge après 15 jours d’hospitalisation. Deviendrait-il un Juge d’application des soins veillant au « contrôle »  de l’activité des équipes de soins voire du bien fondé de telle ou telle technique ?

 Aussi tout en prenant acte de cette décision, nous souhaitons affirmer que ce n’est pas uniquement  la loi de 1990 qui entraine les effets délétères que nous constatons en psychiatrie depuis une vingtaine d’années, ni d’ailleurs l’existence de droits bafoués entrainant des internements arbitraires.

Le Conseil Constitutionnel oblige le gouvernement à se mettre en conformité avec cet arrêté avant la fin de l’été. Nous craignons que cela ne lui serve de point d’appui ou de prétexte pour modifier la loi de 1990 en faisant voter le projet de loi sécuritaire qui, après notre énergique combat du printemps dernier, dormait dans les tiroirs ministériels…

La colonne vertébrale de ce projet était la possibilité – après une garde à vue psychiatrique de 72 heures – d’un recours massif aux « soins » obligatoires  en ambulatoire : projet régressif, inefficace du point de vue de soins réels et notamment pour les patients qui refuseraient de s’engager dans ce « contrôle soignant », dangereux du point de vue des libertés fondamentales. Au sein de ce projet le recours à la contrainte ou à l’internement serait banalisé alors que nous pensons qu’il doit demeurer l’exception. Continuer la lecture de La décision du conseil constitutionnel : Une avancée ? Une perversion supplémentaire ?

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>Entendre leurs voix (France Inter, Sur les épaules de Darwin)

Une très belle émission, à écouter tranquillement…

samedi 4 décembre 2010 : Emissions de France Inter : "Sur les épaules de Darwin"

 

par Jean-Claude Ameisen, le samedi de 11h05 à 12h

ENTENDRE LEURS VOIX

« Que faire de cette parole ? … Aller vers l’autre… » Alexandre Jollien.

« Telle est l’étrangeté du langage : il traverse les frontières du corps… » Siri Hustvedt.

invités

 

Siri Hustvedt

Ecrivain, auteure de :

 

La femme qui tremble, une histoire de mes nerfs aux Editions Actes Sud

Violemment secouée, à l'occasion d'une évocation en public de son père récemment disparu, par un tremblement irrépressible accompagné d'une expérience de dissociation, Siri Hustvedt décide, pour comprendre enfin la nature d'un phénomène qu'elle rapproche d'autres états-limites qu'elle a également connus, de prendre la mesure la plus exacte possible de la véritable nature des "gouffres" invisibles qui, hantant, fragilisant et formatant nos existences, sont tapis sous la vie ordinaire, afin d'affronter les mystères du moi.

De la neurobiologie à la psychiatrie et à la littérature, une approche, aussi ambitieuse que personnelle, de l'histoire des pathologies mentales au fil d'une réflexion rigoureuse et lucide qui, transcendant la cartographie académique de la souffrance et de l'angoisse, aborde sans détour les rapports de la maladie avec le geste créateur.

Le site de Siri Hustvedt

 

 

Alexandre Jollien

Philosophe, auteur de:

 

Le Philosophe nu aux Editions du Seuil

Comment vivre plus librement la joie quand les passions nous tiennent ? Comment oser un peu de détachement sans éteindre un cœur ? Éprouvé dans sa chair, Alexandre Jollien tente ici de dessiner un art de vivre qui assume ce qui résiste à la volonté et à la raison.

Le philosophe se met à nu pour ausculter la joie, l’insatisfaction, la jalousie, la fascination, l’amour ou la tristesse, bref ce qui est plus fort que nous, ce qui nous résiste… Convoquant Sénèque, Montaigne, Spinoza ou Nietzsche, il explore la difficulté de pratiquer la philosophie au cœur de l’affectivité. Loin des recettes et des certitudes, avec Houei-neng, patriarche du bouddhisme chinois, il découvre la fragile audace de se dénuder, de se dévêtir de soi. Dans l’épreuve comme dans la joie, il nous convie à renaître à chaque instant à l’écart des regrets et de nos attentes illusoires.

Le site d'Alexandre Jollien

Le site de l'émission : http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/sur-les-epaules-de-darwin/index.php?id=98328

Ecouter l'émission : http://collectifpsychiatrie.fr/SUR LES EPAULES DE DARWIN 04.12.2010.mp3

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>UTOPSY invite Pierre Dardot

Pour la prochaine rencontre, nous aurons le plaisir d’inviter le lundi 17 janvier, au 27 rue des Bluets, (métro Ménilmontant ou Père Lachaise), à 20h30

 

Pierre DARDOT,

 

Philosophe et auteur avec Christian Laval de

« La nouvelle raison du monde, essai sur la société néolibérale »,

publié à la Découverte en 2009.

 

Présentation

 

Dans leur ouvrage, Dardot et Laval analysent les modifications du capitalisme et voient dans le passage du libéralisme au néo-libéralisme, l’avènement d’une nouvelle rationalité où la question centrale n’est plus de « laisser-faire » (Adam Smith) mais bien de « conduire les conduites » des hommes, en créant un cadre normatif propice au développement de la concurrence.

 

Après une analyse politique, historique et philosophique s’appuyant notamment sur les outils foucaldiens comme « la gouvernementalité », les auteurs définissent un nouveau processus de subjectivation où les individus intègrent eux-mêmes la normativité concurrentielle, chacun devenant « auto-entrepreneur » de lui-même, ce qu’ils définissent comme étant la fabrique du « sujet néo-libéral ».

 

S’appuyant sur cette analyse politique, les auteurs développent une pensée critique pour sortir des alternatives proposées par l’antilibéralisme classique, où nombres de partitions sont devenues inopérantes pour analyser les enjeux du monde contemporain (notamment la partition entre l’Etat et le Marché, entre le public et le privé). Pour ce faire, Dardot et Laval étudient les questions amenées par Marx, s’extirpant par là des définitions imposées par le marxisme orthodoxe, véritables « obstacles à la pensée » qui plutôt que de s’affronter à un « champ de questions » élaborent des « réponses définitives sur le sens des mots » (Cités 2010/3, n° 43).  

 

Présentées comme « naturelles » ou « allant de soi », Dardot et Laval montrent que ces normes peuvent être considérées comme des constructions politiques, d’autant plus efficaces qu’elles ne peuvent être remises en cause qu’après une analyse minutieuse. Dès lors, comment mettre en perspective le « pouvoir de la norme » ?

 

C’est du côté des « communs », en tant que ces derniers sortent du cadre de pensé imposé par le néolibéralisme, qu’une politique d’émancipation pourrait se recréer. L’enjeu est bien d’avancer dans un constructivisme à même de fonder une politique des communs : « La théorie des communs permet de souligner le caractère construit des communs. Rien ne peut laisser penser qu’un commun pourrait fonctionner sans règles instituées, qu’il pourrait être considéré comme un objet naturel.»

 

Inventer des outils pour penser le monde contemporain, sortir des positions orthodoxes pour affronter les nouveaux agencements problématiques, mettre en acte une praxis émancipatrice : cette analyse des nouvelles figures de l’aliénation sociale n’a-t-elle pas de grandes résonances avec ce qui se joue pour nous dans la clinique quotidienne avec la folie ?

 

Ainsi, comment questionner les orthodoxies de tous poils qui prétendent diriger nos actes explicitement ou implicitement ? Aux politiques d’émancipation pourrait-il correspondre des cliniques émancipatrices ?

 

Rappel des épisodes précédents

 

L’an passé, Yves Clot et Samuel Lézé, nous ont tous deux commentés le rapport du Centre d’Analyse Stratégique remis à N. Kosciusko-Morizet« La santé mentale, l’affaire de tous ». Ce rapport, en pointe dans la redéfinition du champ psy et dans l’avènement du « santé-mentalisme », nous obligent à questionner le cadre normatif qui tente de s’imposer par des entités « naturelles » comme « le bien-être », « la qualité de la vie », « la souffrance au travail », « la santé mentale positive » etc.

 

Ces nouvelles normes nous ont été décrites par Y. Clot comme un « hygiénisme rénové » tandis que S. Lézé y voyait une entreprise de dépossession de la problématique même de la « santé mentale » qui en devenant « l’affaire de tous » n’est paradoxalement plus celle des psys, concourant ainsi à délégitimer toute une série de pratiques inventives.

 

Par ailleurs, les mots employés sont révélateurs : si le terme de « santé mentale » fut à une époque porteur d’une ouverture dans le champ psychiatrique, il est désormais un mot récupéré et « occupé » par la rationalité dominante, tout comme les mots d’usagers, de déstigmatisation etc.

 

Perspectives et lignes de fuite

 

Dès lors, comment penser une clinique fondée sur un autre type de processus de subjectivation qui porterait en son sein la question du désir inconscient articulé à un « agir en commun » émancipateur ? Comment se nourrir des réflexions sur le commun pour articuler une praxis clinique qui serait émancipatrice et s’articulerait autour d’un agir commun. « Une politique des communs [nécessite] d’inventer des normes de l’action qui permettent de faire fonctionner un commun » précisent les auteurs.

 

De fait, les conditions du renouvellement de la pensée critique se précisent, à mesure que se créent des outils,  des concepts et des pratiques pour penser le monde et agir sur lui. Du côté de la clinique, cela nous a été amené par nos premiers invités de l’année : Christophe Chaperot, Guy Dana et Paul Brétécher.

 

Comment repenser les apports fondamentaux développés par la psychanalyse à partir du transfert et par le mouvement de psychothérapie institutionnelle en termes de collectif et de pratiques instituantes ?

 

Si la psychothérapie institutionnelle travaille l’articulation entre aliénation  sociale et aliénation psychopathologique, entre marxisme et psychanalyse, penser la contemporanéité en mettant à jour les questions posées par Marx tout en se détachant de son orthodoxie, nous semble fondamental.

 

« Seul l’acte d’instituer les communs fait exister les communs » précisent Dardot et Laval. N’est-ce pas là poser la question du processus d’institutionnalisation et de l’analyse institutionnelle (Oury), là où l’ouvert de l’instituant est en proie aux tentatives de fermetures de l’institué ?

 

Mathieu Bellahsen et Loriane Brunessaux pour UTOPSY

utopsys@yahoo.fr

http://utopsy.over-blog.fr/

 

 

Bibliographie

 

Ouvrages

>  Pierre Dardot et Christian Laval, La nouvelle raison du monde, Essai sur la société néolibérale, collection La Découverte poche, La Découverte, 2010.

 Pierre Dardot, Christian Laval et El Mouhoub Mouhoud, Sauver Marx ? Empire, multitude, travail immatériel, La Découverte, 2007.

 

Articles : disponibles sur CAIRN : www.cairn.info

 

 Mouvements 2007/2 (n° 50), Pierre Dardot et Christian Laval, La nature du néolibéralisme : un enjeu théorique et politique pour la gauche

 

 Cités 2010/3 (n° 43), Christian Laval et Pierre Dardot, Entre communauté et association

 

 Revue du MAUSS 2010/1 (n° 35), Pierre Dardot et Christian Laval, Du public au commun

 

 Cités 2010/1 (n° 41), Pierre Dardot et Christian Laval, Néolibéralisme et subjectivation capitaliste

 

 Mouvements 2005/2 (no 38), Pierre Dardot, À propos de la multitude

 

 

Séminaire collectif : « Du public au commun »

http://www.dupublicaucommun.com/

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>Décision du conseil constitutionnel sur l'hospitalisation sous contrainte : les soignants réfléchissent…(Interview Vidéo)

Le Conseil constitutionnel a censuré vendredi 26 novembre un article du code de la santé publique, estimant que l'hospitalisation sans consentement d'une personne atteinte de troubles mentaux ne pouvait être prolongée au-delà de quinze jours sans l'intervention d'un juge. Cette décision doit être appliquée avant le 1er juillet 2011.

Cette décision fait débat dans le monde de la psychiatrie : la crainte d'une "judiciarisation des soins en psychiatrie" se confronte à une forme de victoire du droit pour les patients, sachant que la loi de 1990 ne laisse actuellement qu'au seul tiers et au psychiatre le droit de déterminer la sortie d'un patient hospitalisé en HDT. 

Ce sont donc les soins sous contraintes qui sont peut-être au cœur de cette décision du conseil constitutionnel, et à termes, les nouvelles procédures d'obligations de soins psychiatriques en ambulatoire poussées par le chef de l'état depuis son discours du 2 décembre 2008.

A question complexe, réponse complexe : nous sommes allés demander à Paul Machto, Médecin Psychiatre, responsable du centre de jour de Montfermeil (Unité d'accueil de jour du 15ème secteur de Seine Saint Denis) et membre du collectif des 39 ce qu'il pensait de cette décision.

Interview de 14 minutes, le 01/12/2010 :

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>Loi pour la désaliénation et limitation des internements abusifs en Argentine !

  • Argentine-

Viernes, 26 de noviembre de 2010

 

Le projet de désaliénation 

et de limitation des internements abusifs 

est désormais une loi.

 

Un changement de paradigme en santé mentale.

 

Le Sénat a sanctionné la nouvelle Loi de Santé Mentale qui interdit la création de nouveaux asiles et promeut des lieux alternatifs de soin. Les internements se feront désormais dans des hôpitaux généraux qui devront comporter des services spécifiques.

Par Pedro Lipcovitch

 

La nouvelle Loi de Santé Mentale selon laquelle « est interdite la création de nouveaux asiles ou institutions d’internement monovalents, publics ou privés » a été sanctionnée. Elle promeut des dispositifs alternatifs comme les « maisons de vie en commun et les hôpitaux de jour ». Elle modifie le Code civil pour empêcher les internements de personnes en raison de leur « dangerosité ». Les internements sous contrainte sont limités et soumises à un contrôle par un organisme de révision auquel participeront des associations de défense des droits de l’homme. La loi exige que les internements, toujours de courtes durées, sont effectués dans les hôpitaux généraux : ceux-ci – si la loi s’applique – ne pourront refuser de recevoir ces patients, ce qui serait « considéré comme un acte discriminatoire ». De la même façon, le système des incapacités est modifié : jusqu’à présent, une personne qui était déclarée incapable d’administrer ses biens, en situation de crise, pouvait être privée de ses droits pour toujours. De plus, les professionnels et les employés d’institutions psychiatriques auront « la responsabilité d’informer le juge et l’organisme de révision de tout « traitement indigne ou inhumain ».

 

Les institutions monovalentes qui existent déjà « devront s’adapter aux objectifs et aux principes de la loi, « jusqu’à leur remplacement définitif par des dispositifs alternatifs ». A la différence des autres lois dans le monde, celle-ci ne conduit pas à interdire purement et simplement l’internement dans ces institutions.

Pour faciliter les sorties, la loi requiert de « promouvoir les services d’inclusion sociale et professionnelle après la permission de sortie institutionnelle : elle exige une « attention particulière aux problèmes de logement, avec l’appui des organisations familiales et communautaires, les maisons de vie en commun, les hôpitaux de jour, les coopératives de travail, les centres de formation et les familles tutrices ».

 

Les hospitalisations sous contrainte requièrent désormais une évaluation interdisciplinaire alors que sous le régime antérieur la décision de la psychiatrie était suffisante. Le juge doit désormais autoriser chaque hospitalisation, mais il perd le pouvoir d’ordonner celles-ci. De la même façon, l’autorisation du juge pour les sorties, est supprimée. « Dans beaucoup de province, les sorties des patients se font avec retard parce que le juge ne l’autorise pas » explique Leonardo Gorbaez, qui, en tant que député, a présenté le projet original et qui est aujourd’hui assesseur à la direction du Cabinet de la Nation.

 

Conceptuellement, le Code civil a été modifié pour remplacer le critère d’internement qui obéissait à la notion de « dangerosité pour soi-même et pour les autres », par le concept de « risque sûr et imminent ». Cette disposition a été requise par deux fois par la Cour Suprême de Justice.

 

Au-delà de 90 jours d’hospitalisation sous contrainte, si l’institution persiste à maintenir la personne enfermée, la loi exige un second avis, à la charge de l’organisme de révision qu’elle a créé. Si cet organisme se prononce contre cette décision, l’institution devra laisser le patient en liberté. De plus, les patients, leurs avocats ou leurs familles ont le droit d’accéder au dossier clinique et de prendre toutes décisions en accord avec le traitement.

 

La loi exige que les internements se fassent en hôpital général. « Le refus de celui-ci d’hospitaliser des patients pour le seul fait de problème de santé mentale sera considéré comme un acte discriminatoire ».

La loi ordonne également de réaliser un recensement national des personnes internées en institutions publiques ou privées. « Les cliniques privées sont les moins contrôlées, du fait que les inspections se limitent aux conditions de celles-ci : le recensement déterminera s’il y a des personnes séquestrées de fait.

 

L’organe de révision inclura des représentants des associations d’usagers et des familles, des professionnels et des travailleurs de la santé mentale, des organisations de défense des droits de l’homme, des défenses officielles et du pouvoir exécutif. Ses fonctions incluront de « superviser d’office ou à partir de plaintes de particuliers les conditions d’internement dans la sphère publique et privée ».

De plus, « les membres, professionnels ou non, de l’équipe de santé, ont la responsabilité d’informer l’organe de révision et le juge de tout traitement indigne ou inhumain de patients. Cette procédure pourra se faire avec la garantie de protection de l’identité.

 

Le régime des incapacités est également modifié : « jusqu’alors, remarque Gorbaez, une personne en crise, n’étant pas en mesure d’administrer ses biens immobiliers, pouvait être déclarée dans l’incapacité de jouir de tous ses droits personnels, comme par exemple ceux de se marier ou de voter, généralement à vie. La nouvelle loi stipule que l’incapacité ne pourra s’étendre au-delà de trois ans, que l’on devra justifier les fonctions et les actes en question, et veiller à ce que la déclaration d’incapacité personnelle soit la plus courte possible ».

 

La loi est « d’ordre public », ce qui implique qu’elle devra être appliquée à toutes les juridictions du pays, sans requérir une adhésion spécifique. Elle avait reçu la sanction des députés depuis l’an dernier et elle a été adoptée par la Sénat hier avec une seule abstention, celle du radical Nito Artaza. La loi a été explicitement appuyée par l’Organisation panaméricaine pour la santé » (OPS)  et par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

 

(Traduction : Patrick Coupechoux)

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>Malentendu sur le séminaire de Jean Oury qui ne sera pas payant

SUITE AUX DÉMARCHES DE FRANCOISE GOROG ET À DE NOMBREUX COURRIERS DE PROTESTATION VOICI LE COURRIER DE JACQUES PONTIS DIRECTEUR ADJOINT DE L'HÔPITAL SAINTE-ANNE ADRESSÉ À JEAN OURY:

 
 
Objet : Accueil des séminaires mensuels du Dr Jean Oury

 

À l’intention du Dr Jean OURY

 

Docteur,

 

Comme vous l'a dit Mme le Dr GOROG, je tiens à vous confirmer que Sainte-Anne continuera à accueillir votre séminaire mensuel comme il le fait depuis 30 ans, et ce bien-sûr gratuitement.
C'est un regrettable malentendu qui est à l'origine de votre inquiétude.
 
L'amphithéâtre de la CMME qui vous accueille habituellement, sera en effet en travaux durant plusieurs mois à compter du mois d'avril et le Service de Communication, qui a en charge la gestion des salles, avait besoin d'informations sur votre séminaire mensuel pour trouver une solution appropriée. Cette démarche n’avait en aucun cas pour objectif de remettre en cause les conditions d’accueil de votre séminaire.
 
C'est chose faite, nous vous réserverons un autre amphithéâtre de 120 places durant cette période, et, ensuite, vous pourrez retrouver l’amphithéâtre de la CMME.

 

Nous avons seulement besoin de connaître les dates de vos séminaires, dès qu'elles sont fixées, pour procéder à la réservation, à la préparation de la salle et à sa fermeture par notre service de Sécurité.

 

Nous vous prions de nous excuser pour ce malentendu : Sainte-Anne continuera à jouer son rôle d'accueil et de diffusion du savoir, dans toutes ses composantes..

 

Veuillez agréer, Docteur, l’expression de ma considération distinguée.

 

 

Jacques PONTIS
Adjoint au Directeur
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>Non à l'instauration de juges d'application des soins !

 

La décision du Conseil Constitutionnel a eu un effet de sidération et de confusion sur les soignants en psychiatrie pour la raison qu'elle soulève un paradoxe qui n'est certes pas nouveau, mais qui était tant bien que mal traité au cas par cas jusqu'à présent dans la confiance relative aussi bien envers la justice qu'envers les psychiatres.

Cette décision a immédiatement comme corollaire que les placements sont avant tout des privations de liberté.

Là il nous faut réfléchir ensemble à la différence qu'il y a entre protection sociale discutable et qui doit être discutée et privation de liberté qui serait de fait reconnue par le contrôle judiciaire. 

Cette décision veut dire que l'acte de protection sociale par HO et l’acte de protection d'une personne par HDT ne seraient plus assumés par la civilisation, mais par un "état objectivable dans son écart par rapport à une norme"  puisque ce serait le trouble en lui-même, expertise à l'appui, qui orienterait la vérité judiciaire chargée de relier nature du trouble et privation de liberté. 

Les personnes atteintes de troubles mentaux seraient ainsi, au nom du contradictoire, condamnées ou relaxées, en ce qui concerne leur placement. L'hôpital psychiatrique fonctionnerait alors comme un lieu de privation de liberté c'est-à-dire une prison et la folie comme une faute punissable! 

Avec les mesures d’HO ou d’HDT, nous ne  privons pas les patients de liberté, nous les écartons de la société pour nous protéger de leurs actes ou pour les protéger d’eux-mêmes et cela doit rester l'absolue exception. 

Qu'une personne ainsi placée considère qu'on la prive de liberté c'est son droit le plus strict, et elle doit pouvoir obtenir un droit de recours juridictionnel qui doit lui être offert quel que soit son état, et cela, sans délai, c'est un principe de séparation du soin et du droit qui ne doit souffrir aucune exception.

Nous ne pouvons qu'être inquiets par la prise en compte dans nos démocraties de la question posée par l'accueil et les soins à dispenser auprès des personnes présentant des troubles mentaux quand nous constatons que ces derniers sont essentiellement proposés à la discussion sous l'angle sécuritaire ou judiciaire.

L'idée de perfectionner la loi de 1990 focalise la réflexion sur le temps de la contrainte, alors qu'elle devrait principalement porter sur les traitements, les prises en charge, l'accueil de la folie. Cela risque d'amplifier ce qui s'est produit dans la suite de la loi de 1990 qui n'a en rien amélioré les pratiques psychiatriques. Bien au contraire elle n'a fait qu'augmenter pour une part sensible le nombre de recours au placement en même temps qu'elle a, par effet d'aspiration, diminué les investissements de prévention, de club thérapeutique, de suivi, avec l'accroissement scandaleux du nombre de patients mis en errance, SDF, ou se retrouvant en prison.

Toute la psychiatrie moderne depuis la symbolique de l'acte Pinelien libérant le fou de ses chaînes, très précisément la symbolique qui initie la soustraction de la conception de l’acte soignant d’une contrainte des corps, n’a cessé de s'en départir contre le retour cyclique d’une psychiatrie hygiéniste, dégénérescence incluse, visant à établir une Raison comme norme avec les procédures de rejet et de traitement obligatoire qui en découlent, contre une fiction politique de la Raison, politique partageable parce que discutable et qui doit en permanence s’enrichir par la confrontation à ses limites, en particulier, avec ce que la folie interroge en nous. 

C’est en ce sens que nous refusons de faire des moments exceptionnels de la contrainte le noyau organisateur de la psychiatrie. Le recours judiciaire doit être du côté des patients et non du côté d’un perfectionnisme procédural qui ne ferait que déplacer la question de la folie vers une vérité judiciaire de son traitement. 

C’est en ce sens que nous refusons de voir les pratiques soignantes organisées sous le modèle de l’enquête judiciaire et de la peine. La folie n’est pas en soi un délit ou un crime.

Nous refusons les centres de rétention de 72 heures construits sur le modèle de la garde à vue.

Nous refusons la mise en place d’un juge d’application des soins sur le modèle du juge d’application des peines.

Nous refusons les traitements ambulatoires obligatoires construits sur le modèle de la liberté conditionnelle.

Bref nous refusons de participer à l'organisation « contrôlitaire du soin ».

 

Le Collectif des 39 Contre la Nuit Sécuritaire

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>Toulouse: levée du mouvement de grève dans un hôpital psychiatrique

 

Des personnels infirmiers en psychiatrie de l'hôpital Marchant de Toulouse, qui campaient depuis 66 jours devant leur établissement pour réclamer des créations de postes de soignants, ont levé jeudi leur mouvement après avoir obtenu pour partie satisfaction.

L'Agence régionale de santé (ARS) avait débloqué vendredi une enveloppe exceptionnelle de 423.000 euros, mais les infirmiers grévistes du seul syndicat SUD avaient continué à se relayer pour dormir devant l'hôpital car selon eux "l'affectation des ces ressources n'était pas encore définie selon notre priorité d'augmentation du personnel soignant".

Après une assemblée générale jeudi, les personnels grévistes qui "assuraient la continuité des soins" ont décidé "devant l'affaiblissement de la mobilisation pendant la période des fêtes" de lever leur mouvement, a indiqué Cyril Moulin, infirmier en psychiatrie de SUD-Santé.

"On est contents car la lutte paie. Maintenant on fait reposer les troupes mais on se réserve la possibilité de remonter la tente à la rentrée car nous n'avons aucune certitude quant à l'utilisation de cet argent", a-t-il ajouté.

Une intersyndicale SUD-CGT-FO-CFDT avait décidé le 18 octobre d'installer un campement devant l'entrée de l'hôpital Marchant pour réclamer des créations de postes. Seuls les infirmiers du syndicat SUD avaient par la suite prolongé le mouvement.

Dépêche AFP 23.12.2010, 18h48

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>Faire payer le séminaire de Jean Oury à Saint Anne…

 
 
lettre au directeur de st Anne (conférence Séminaire de Jean Oury)
 

Jean-Michel Abt

Psychiatre

23 rue Jean Jaurès

25300 Pontarlier

 

 

à Mr Jean-Luc Chassaniol

 Directeur du Centre Hospitalier Sainte Anne

Copie à Mr Serge Blisko

Président du Centre Hospitalier, député de Paris

Le 18  décembre 2010

 

 

Monsieur le Directeur,

 

 

Je me rends dans votre établissement depuis des années, même des dizaines d’années, mensuellement pour participer au séminaire du Docteur Jean Oury et j’organise, dans ma région, des rencontres avec de nombreux soignants pour répercuter l’enseignement de Mr Oury, sa connaissance de la clinique des psychoses, et l’approche thérapeutique qu’avec d’autres il a initiée, connue dans de nombreux pays du monde. Tout soignant un tant soit peu au fait de l’histoire de la psychiatrie connaît la place éminente qu’il y occupe, et le Centre Hospitalier Sainte Anne s’honore de l’accueillir pour les séances de séminaire qu’il y dispense généreusement. Aussi je suis stupéfait d’apprendre que le Centre Hospitalier Sainte Anne remet en cause la poursuite de cet enseignement, qui n’a pas de prix, en voulant faire payer l’accueil de ce séminaire où de nombreuses personnes impliquées dans le soin à tous les niveaux (et, pour nombre d’entre elles , pas forcément les mieux payées), viennent à leur frais, sans hésiter à traverser la France pour cela. La question de la gratuité et de la solidarité étant au cœur du processus psychotique (le délire étant justement une parole qui ne peut être partagée), comment une institution psychiatrique pour qui cette question serait forclose pourrait approcher sans imposture le soin aux personnes prises dans ce processus ? 

 

Je suppose qu’il s’agit là d’une initiative qui aura échappé aux personnes qui ont à cœur de préserver la tradition de ce grand établissement. La psychiatrie se perdrait en perdant la mémoire et les murs de Sainte Anne bruissent encore des grandes voix qui ont fait, et continuent de lui donner ses lettres de noblesse. Je ne doute pas, Monsieur le Directeur, que vous puissiez porter attention à la nécessité de préserver la poursuite de ce séminaire dans l’esprit qui est le sien.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de mes respectueuses salutations,

 

Docteur Jean-Michel Abt

 

 

"Je propose que chacune et chacun , qu'il vienne régulièrement, peu, ou pas du tout, mais qui se sent concerné, d'écrire aussi, et de diffuser partout cette proposition d'écrire, de multiples lettres de partout me semblant devoir avoir encore plus d'effet qu'une pétition."

 

J.M Abt

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>Home, où l’homme trouve-t-il sa maison ?

 

Intervention à Grenoble au MC2 le 20 Novembre 2010

 

"La psychiatrie est dans l’errance."

 

 

Presque 10 ans se sont écoulés depuis la parution du fameux  Rapport Piel et Roelandt de juillet 2001 qui  suscita de larges débats au sein de la profession, promettant la mort de l’Asile et permettant aux pouvoirs publics de se réapproprier l’idée du « progrès psychiatrique. »

 

Reprenant à son compte le slogan qui fit les beaux jours de l’antipsychiatrie, l’Etat se fit alors le promoteur d’une nouvelle utopie thérapeutique. (Fermeture des lits et redéploiement, euphémismes)

 

Dans un contexte social et politique en mutation, face à une exigence croissante tant des «  usagers », de l’ensemble des acteurs de la «  santé mentale » que des pouvoirs publics, des enjeux théoriques, politiques, économiques et sociaux furent à l’œuvre pour surdéterminer les propositions concrètes. Fermer l’Asile.

 

Une question sociale est restée en suspens : sommes nous en train d’assister à la fin de la psychiatrie ou à la naissance d’un nouvel ordre psychiatrique ?

 

Le psychiatre serait cantonné dans le champ hyperspécialisé du fonctionnement de l’activité cérébrale et des comportements, prise en charge dans les unités des CHU,  alors que la folie ordinaire serait laissée aux travailleurs sociaux (qui ne savent pas quoi en faire…)

 

An nom de principes généreux de ne pas identifier la personne malade à ses troubles mentaux (un « psychotique » comme un «  diabétique »…) est proposé une division entre : 

 

— La personne sans trouble psychotique (pour le travailleur social) et

— Les troubles psychotiques pour le psychiatre.

 

Cette idéologie sous-entend qu’on peut se débarrasser des troubles mentaux, aboutir à un être sans trouble mental qui s’épanouit dans un «  état complet de bien être physique, psychique et social » !

Or les troubles mentaux existent, de tout temps, demeurent encore et nous nous retrouvons aujourd’hui avec des personnes qui ne sont pas entendues du côté du trouble mental.

 

Les psychiatres ne sont pas pour rien dans cette dérive et commencent, à réaliser que cette dérive n’a peut-être pas que des finalités économiques.

 

La psychiatrie, dans l’errance, a donc a nouveau besoin de l’Asile ! Mais pas de n’importe quel asile. Certainement pas celui qui enferme, isole , abrutit et oublie , mais un lieu d’accueil, d’écoute et de partage organisé par un discours de soins.

 

Un Asile en forme de Home.

 

« Home is where we are going from » nous dit le poète Yeats.

Et ce double mouvement, trouver son Home pour pouvoir ensuite le quitter est tout l’enjeu d’un véritable  travail clinique et thérapeutique.

 

A l’encontre de la psychiatrie actuelle dominante (sans subjectivité, qui impose aux infirmiers d’appliquer  des protocoles, aux patients d’avaler des médicaments pour réduire les symptômes) à l’hôpital de jour de la MGEN, que j’ai l’honneur de diriger sur le plan médical, nous nous sommes positionnés depuis toujours en appui sur la théorie de la Psychothérapie institutionnelle, c'est-à-dire que nous pratiquons une psychiatrie du Sujet, de la responsabilité et de la créativité.

 

Nous affirmons que le symptôme, loin d’être un corps étranger à éliminer par la force, est un savoir, intime, singulier et qui demande à être accueilli pour être lu et déchiffré.

 

Nous accueillons donc les Sujets avec leurs symptômes et nous leur proposons un lieu de rencontres, médiatisé par la parole (de chacun, celle qui engage), la vie collective ( à reprendre avec ses responsabilités, progressivement) et les moyens d’expressions les plus divers ( artistiques, artisanaux, corporels,etc)

 

Parfois nous proposons seulement un lieu pour se poser, à l’abri.

 

Il s’agit  de redonner un lieu d’adresse à celui qui l’a perdu (ou parfois même jamais trouvé).

Ce qui donne à ce lieu ses vertus thérapeutiques repose sur quatre notions importantes :

 

– Ce sont les liens que nous tissons entre nous qui font le lieu. (Et non pas les murs…même si ceux-ci gagnent à être architecturés dans l’idée du soin, de la circulation et de l’accueil)

 

-C’est le discours qui circule dans l’institution, discours de Savoir trou é, non totalitaire, qui permet à chacun d’y trouver sa place, ses liens avec les autres.

 

-L’intérieur et l’extérieur de ce lieu doivent rester nouer, en continuité, et ne pas isoler l’intérieur de l’extérieur. (Ce n’est pas tout cocoon dedans tout hostile dehors) et nous structurons nos activités thérapeutiques avec ces principes.

 

-la créativité, l’inventivité de chacun sont sollicités, favorisés, attendus, cela vaut pour les soignants comme pour les soignés. L’imprévu, l’inattendu, le désir peuvent trouver alors une place, et la jubilation qui les  accompagnent.

 

  1. Demeurent malgré cela bien des difficultés :

 

La clinique des psychoses, dans le transfert, dans la relation médiatisée, peut néanmoins nous placer en face de résistances à toute épreuve, opposant à notre désir ses forces de replis et d’isolement.

 

Un temps long est alors nécessaire pour constituer la confiance et l’abri,  et puis ensuite encore un temps long pour accompagner  vers une possibilité de sortie qui ne soit pas abandon  et de nouage de liens à l’extérieur de l’hôpital.

 

La psychose sociale d’aujourd’hui (individualisme, petite paranoïa quotidienne, performances requises…) ne nous facilite pas la tâche…

 

Je conclurai donc en vous disant ceci : A l’accueil de notre propre folie, de notre propre étrangeté, nous sommes tous invités !

 

Le travail alors, en appui sur un désir profond et fécond nous réservera bien des surprises et peut-être même un Home !


MP Deloche.

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>De la République compassionnelle

Longtemps je me suis couché…en me disant qu’il faudrait bien qu’un jour, je me décide à mettre un terme, un point final, à cette chronique qui m’asservit. Je ne dirai pas qu’elle m’assomme, même si je viens de l’écrire : c’est bien là le piège de l’écriture. Il serait plus juste d’écrire qu’elle me pompe. Vous pouvez  déjà vous douter que j’ai quelques raisons de me trouver de méchante humeur. En fait, je voudrais déroger au style habituel de mon exercice mensuel, mais je ne sais pas comment m’y prendre. C’est  l’indice d’un embarras, le même que j’ai éprouvé en entendant le Président de la République, le 2 décembre dernier , à l’EPS Erasme d’Antony , Hauts-de-Seine, département dont il avait auparavant présidé le Conseil Général.

Il faut  préciser que ma chronique doit être impérativement livrée la dernière semaine du mois précédant la parution du Mensuel et que je ne serai peut-être plus dans le même état d’esprit lorsque vous la lirez. Aujourd’hui, je suis blessé de m’être senti obligé d’écouter ce discours, au milieu de ceux qui avaient été conviés, du fait de leurs responsabilités institutionnelles, à venir entendre de leurs oreilles qualifiées, les propos du Président de la République sur l’hospitalisation psychiatrique.

Pris dans cette nasse, mes collègues et moi-même avons commencé par échanger des regards incrédules, tandis qu’en face de nous, du haut d’une tribune au fond de laquelle on avait pris soin d’aligner une brochette de figurants, un petit homme en costume d’ordonnateur, s’agitait avec force mimiques et un mouvement singulier du bras droit qui l’aidait à scander certaines de ses paroles les plus fortes : c’est un développement saccadé du bras, qu’il étend au fur et à mesure que la phrase se déroule, à la façon de certains professionnels du prétoire, bien que sans doute moins ample que  chez ceux qu’on appelle « ténors du barreau ». Il manifestait sa compassion pour les proches d’un disparu et interpellait la communauté : « J’ai été choqué de ne pas entendre beaucoup de mots pour la famille de la victime ! ». Il faut dire que la victime « avait eu le malheur de croiser le chemin de l’assassin », et que l’assassin en question était « une personne éminemment dangereuse (…) qui avait déjà commis plusieurs agressions très graves… ». L’homme en noir demandait qu’on se mît à sa place : « Je dois répondre à l’interrogation des familles des victimes que je reçois . » Je comprenais pourquoi il semblait si sérieux, si préoccupé : il devait sans doute repartir très vite, dès la fin de sa longue  homélie, pour aller recevoir d’autres familles d’autres victimes. C’est sans doute aussi pourquoi il annonçait, l’air irrité, qu’il allait mettre un terme au laxisme qui avait préludé à ce drame. Cela suffisait ! Continuer la lecture de >De la République compassionnelle

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>Interne de Garde Et Contrainte

 

 

 

Trois portes verrouillées me séparent de la chambre d’isolement, de la chambre d’exclusion. Au sein même de ce lieu, lieu d’accueil de la folie, une frontière sépare les « fous ordinaires » des autres, les fous dits dangereux, ou potentiellement dangereux, ceux qui suscitent la peur parmi les soignants.

 

Dans cette zone de non droit, il suffit parfois de peu pour basculer de l’autre coté de la frontière.

L’organisation des soins prend une allure autoritaire. Un simple refus de traitement peut conduire à l’isolement, voire à la contention si la révolte est trop vive. 

En psychiatrie, la dangerosité supposée se mesure au nombre de portes qui sépare un patient du reste de l’institution. C’est notre échelle de la douleur à nous.

Des bruits de clefs, des portes qui s’ouvrent et se referment aussitôt. Toujours fermer les portes. Moi aussi j’ai des clefs, je suis l’interne de garde, une sorte de gardien de prison…

Dans la chambre d’isolement, dans la chambre d’exclusion, le patient est contenu, le patient est attaché. De la camisole de force à la « contention thérapeutique », seuls les mots ont changé, la violence, elle, reste la même. Une violence qui ne dit plus son nom. Les mots nous mentent. Ils nous donnent l’illusion que nos pratiques ont évolué, que le temps de l’asile est révolu. Des mots pour faire passer la pilule. «Soyez raisonnable » disent les soignants convaincus de la légitimité de leurs pratiques, « lorsque vous serez plus calme nous lèverons la contention. » Il faut entendre : Lorsque les médecins feront leur travail et que vous serez tassé par les neuroleptiques. Lorsque votre corps ne sera plus une menace pour nous, que nous n’aurons plus peur, nous vous détacherons.

Pour l’heure, dans la chambre d’exclusion, les soignants sont inquiets. Le montant du lit brisé sous l’assaut de la rage et du désespoir, menace, par son tranchant, l’intégrité corporelle du patient. Les soignants veulent le déplacer pour le protéger, car en ces lieux, on se soucie de prévenir les blessures corporelles, celles qui laissent des traces visibles. Le corps du patient attaché, ce corps qu’on veut préserver, est aussi ce corps menaçant, qui fait peur. Il ne sera déplacé qu’à condition que je le rendre inerte, inoffensif. C’est le rôle qui m’est assigné.

Le patient sait ce qui l’attend. Comme un condamné avant son exécution il formule un vœu, un dernier vœu, recouvrer sa dignité …enfin, un peu. Il macère dans ses urines depuis des heures, il voudrait juste prendre une douche, se changer.

« Pas question » rétorque l’infirmière armée de sa seringue, « nous verrons ça plus tard ». Elle aurait pu ajouter « si vous êtes sage ». C’est sans appel.

« Il l’a fait exprès pour qu’on le détache » me dira-t-elle plus tard.

Quel cynisme ! 

A-t-on seulement conscience que ce patient, ce malade, ce fou, est un homme ? Qui se soucie en cet instant de ce qu’il peut éprouver, de ces blessures invisibles que nous lui infligeons ?

Je suis au chevet de cet homme, trop près diront certains, je lui parle, j’essaye de le rassurer. Comment pourrais-je l’apaiser alors que je suis moi-même horrifiée par cette scène ! Ma bienveillance à son égard est dérisoire…j’en suis douloureusement consciente.

En cet instant, je me sens écrasée par ce monstre sans âme qu’est devenue la machine institutionnelle.

Désemparée, je cherche du regard de l’aide parmi les soignants, mais en vain. Leurs visages sont fermés, ma détresse, pas plus que celle du patient, n’est entendue. J’éprouve la violence de son isolement. 

Nous sommes encerclés par les renforts. Cette milice toute puissante semble jouir de sa force. Place à l’intimidation…ils sont là pour mater la rébellion.

Le patient est sommé de se soumettre, d’accepter sans résister l’injection qui le rendra, pour un temps inoffensif.

Ses plaintes se muent en sanglots, puis en rage lorsqu’un infirmier qu’il ne connaît pas s’adresse à lui d’un ton condescendant en lui tapotant sur la tête.

Sa révolte est perçue comme une preuve ultime de sa violence, justifiant ainsi le traitement qui lui est réservé.

L’homme finit par se soumettre. Comment aurait-il pu en être autrement. La camisole chimique prendra momentanément le relais de la camisole de force afin que son corps inanimé soit déplacé sans peur. La peur, ce fléau de l’institution.

Combien de jours, combien de semaines cet homme restera-t-il attaché, je l’ignore. Mais pour avoir vécu ça en d’autres lieux, pour avoir vu la nécrose s’emparer de ces corps mortifiés, je sais à quel point l’aveuglement des hommes peut les rendre cruels.

Je suis furieuse qu’on maltraite un homme avec tant d’indifférence. Furieuse d’être le témoin impuissant, mais non moins complice de cette barbarie.

Les infirmiers, surpris par mon indignation et par les larmes que je peine à contenir, m’écoutent avec complaisance, mais ne m’entendent pas. Ils n’entendent pas sa souffrance à travers moi. 

Les murailles défensives qu’ils ont élevées pour se préserver les coupent de leur humanité, sans cela, comment supporteraient-ils d’infliger à un homme un tel traitement ?

« Contention thérapeutique ». Attacher pour soigner, quel paradoxe !! Qui a dit qu’attacher un homme comme un chien enragé pouvait le soulager de sa souffrance ? 

Le plus terrifiant pour moi, c’est que, durant ma courte mais édifiante expérience d’interne en psychiatrie, je n’ai jamais entendu quiconque remettre en question la légitimité de cette pratique. Pourtant, les dérives sont quotidiennes : de la contention préventive à la contention comme châtiment, en passant par la contention comme moyen de maîtriser les patients « turbulents »  dont on n’a pas le temps de s’occuper, qui font désordre dans l’institution.

Nos patients ne sont-ils pas suffisamment malmenés par cette société ?

N’est-on pas censé accueillir leur souffrance quelle que soit la forme qu’elle revêt ? Ne doit-on pas les restaurer dans leur dignité, plutôt que relayer un discours politique et médiatique scandaleux, qui les désigne comme des criminels dangereux ? 

Je refuse d’être un agent au service de la prévention de la dangerosité. Je refuse de voir en chacun de mes patients un criminel potentiel. Et pourtant j’étais là, entourée d’une garde renforcée déployée autour de moi parce qu’on prêtait à cet homme des intentions violentes.

Q’en est-il de la violence que nous lui faisons subir à lui, et à tant d’autres, au nom du principe de précaution ! Aurions nous le monopole de la violence ?

Les passages à l’acte de certains patients ne sont-ils pas le reflet de notre toute puissance, induits par le climat de suspicion et  d’insécurité qui s’est insinué dans nos institutions ?  

La contention préventive est régie par les mêmes principes que la rétention de sûreté. Et en laissant ces principes infiltrer nos pratiques, dans cet espace d’accueil de la différence, nous trahissons l’essence même de nos fonctions.

La transformation de l’institution psychiatrique en univers carcéral, bien qu’elle ait été officialisée il y’a quelques mois, se prépare depuis bien longtemps.

C’est l’aboutissement d’une volonté politique, enfin affichée, qui tend, depuis des années, à instrumentaliser les soins psychiques à des fins normatives et répressives. A faire de nous, soignants, des outils du contrôle social, mis en demeure, par les plus hautes autorités, de réduire la folie au silence.

La protocolisation des soins en psychiatrie, qui tend à se généraliser, est l’une des armes redoutables visant à nous soumettre.

Le protocole tue la pensée. Il nous enferme dans une technicité déshumanisante qui exclut toute dimension subjectale. Plus de place pour la rencontre essentielle  de l’autre, pour l’imprévu, pour la création dans toute sa dimension soignante.

Pas de discussion possible. Un protocole, ça ne se discute pas, ça s’applique ! Le protocole est la matérialisation de la pensée unique, il tue l’esprit libre.

L’institution psychiatrique est en souffrance. Les soignants sont usés par les maltraitances administratives. Ils sont acculés par des tâches bureaucratiques ingrates censées rendre compte de la qualité des soins au détriment même des soins. La réduction des effectifs infirmiers rend impossible l’accomplissement des soins dans toute la dimension transférentielle que cela requière. 

Les temps d’échanges et d’élaboration se réduisent comme peau de chagrin laissant les soignants désemparés dans une institution que la pensée a désertée. Leur isolement et leur détresse croissante renforcent leur sentiment d’insécurité, et par là même, le cercle vicieux des violences institutionnelles. Les valeurs si riches du travail collectif sont abandonnées au profit d’un cloisonnement des tâches et des fonctions, aboutissant aux clivages que l’on connaît dans les équipes.

Le travail à la chaîne remplace la création, dans une institution psychiatrique transformée en usine de traitement des déchets.

A l’aire de la « santé mentale », le sujet est réduit à des dysfonctionnements neurobiologiques, nié dans sa singularité, dans sa complexité. Il est sommé de taire sa souffrance, au risque d’être relégué au rang des incurables, des handicapés comme on les appelle maintenant. Encore une manière sournoise d’inscrire la souffrance dans le corps, sous l’angle de la défaillance.

Quand aux jeunes internes, victimes, pour la plupart, d’une rupture de transmission, soumis au discours dominant réducteur, ils n’ont désormais pour références que le DSM IV et le vidal. Dressés à chasser les symptômes, ils revendiquent fièrement leur statut de « médecins comme les autres », et se retranchent derrière leurs blouses blanches et leurs bureaux en n’ayant pas conscience qu’ils sont eux même un symptôme. Symptôme d’une société déshumanisée qui chasse les spectres en tous genres, et refuse d’admettre qu’elle produit le mal qui la ronge.

N’a-t-on pas entendu des internes en psychiatrie suggérer que des cours de self-défense soient intégrés à notre formation ? « Pour maîtriser nos patients sans leur faire de mal » disaient-ils ! 

On pourrait se munir de bombes lacrymogènes tant qu’on y est, ou de pistolets à décharges électriques…ça ne ferait jamais qu’une décharge de plus !

La réalité dépasse parfois la fiction ! Des murs surmontés de barbelés, des chambres d’isolement «dernier cri », des caméras de surveillance, des bracelets électroniques en guise de lien thérapeutique, c’est ce que l’avenir nous réserve si nous ne réagissons pas. Ne manqueront plus que les sentinelles…mais qui sait…la paranoïa est de rigueur.

Le projet de soins ambulatoires sous contrainte nous réserve également un avenir bien sombre ! Nos patients seront fichés et traqués sans merci, ils devront pointer aux CMP comme des criminels en sursis au risque de se voir dénoncés puis enfermés. La collaboration médico-policière a de beaux jours devant elle ! 

Prêts pour le grand nettoyage ?

Les hommes n’ont-ils toujours rien retenu de l’histoire ? Ont-ils oublié où la soumission et la collaboration pouvaient mener !

Combien de temps encore fermerons nous les yeux sur ces dérives ?

Nous devons mettre un terme à cette escalade, refuser de nous laisser instrumentaliser, refuser la mise à mort des soins psychiques.

Notre richesse réside dans la singularité de nos pratiques, puisons notre force dans la mise en commun de nos expériences. Nous devons recréer du collectif, de l’hétérogène, des espaces d’élaboration pour résister aux consensus qui écrasent la pensée.

Nous avons les moyens et le devoir d’empêcher le pire. La psychiatrie a toujours été, et sera toujours menacée de dérives idéologiques. C’est en questionnant perpétuellement nos pratiques, en redevenant subversifs que nous échapperons à l’enfermement.

Je voulais témoigner de mon expérience au singulier parce que c’est la singularité même qui est menacée par le rouleau compresseur de cette politique normative.

Parce que cette machine infernale menace de broyer sur son passage tous ceux qui s’écarteront de cette norme absurde.

Parce que nos patients, symboles malgré eux de l’insoumission et du hors norme, sont en première ligne face à cette entreprise d’épuration.

Je voudrais témoigner de mon espoir au pluriel, parce que c’est d’une révolte collective que cet espoir est né.

Parce que des voix se sont élevées parmi les soignants pour dénoncer la violence institutionnelle érigée en modèle.

Parce que je suis sortie de cet isolement mortifère, déterminée à me battre aux  cotés de ces hommes et ces femmes pour réinstaurer la parole comme acte fondateur du soin, et de la relation soignant

 

Mounia Terki

Interne en Psychiatrie

 

Texte présenté aussi au Forum de la Nuit Sécuritaire au Colloque Europsy d’octobre 2009.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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>Conversation sous la tente

 

L’autre jour, je suis allée à la tente. Trois-quatre collègues. Jean-Luc qui rangeait, nettoyait les frigos et mettait des étiquettes sur les portes pour indiquer ce qu’ils contenaient. Vincent, virevoltant deci-delà. Paul, attablé, son bonnet sur la tête. J’ai commencé à parler avec Paul. « Ici, c’est un lieu dont tout le monde a besoin. La tente joue comme un révélateur : il nous faut une maison du personnel. Dans cet hôpital, chacun est complètement éclaté. Entre les pavillons, l’extra, l’intra, personne ne se rencontre plus. La tente nous permet de nous retrouver. Et puis, ici, on fait des premiers accueils. Il y a des familles qui viennent nous demander des conseils sur la psychiatrie. Il faut vraiment se poser la question de la continuité de la tente, après. C’est aussi notre position à l’entrée de l’hôpital qui permet tout ce travail.»


Un journaliste arrive. La Dépêche. Il veut faire le portrait d’une infirmière. Pas de chance, il y a surtout des infirmiers et des aides-soignants. Va pour l’infirmier. Il commence à discuter avec Paul, qui remonte aux temps anciens, à ce qu’il appelle « la psychiatrie institutionnelle » et que j’appellerais plus volontiers la psychiatrie asilaire. Les malades qui travaillent, les grands pavillons, les dortoirs, les grandes équipes, les trois-huit sans aucun moment de rencontre inter-équipes (ce que nous appelons « les transmissions »), le pécule indexé sur le timbre-poste et payé par le vaguemestre, l’ordre asilaire de cette époque. Et puis, l’évolution, — la révolution, il faudrait dire — et l’énorme changement que les infirmiers ont accompli dans leur travail avec les malades. Paul ajoutait que pour lui, c’était grâce à un médecin-chef qui impulsait un mouvement d’ouverture qu’il avait travaillé autrement. Et l’on pouvait se former. Et cette formation avait des effets en retour sur l’équipe et les collègues. 


Parce qu’au fond, c’est aussi cela qu’on ressent sous la tente. Cette culture commune de soignants en psychiatrie qui nous infiltre. Ce métier, qu’on a construit avec les patients, grâce à eux autant qu’avec eux. Cette passion du lien, de tout ce qui relie.


Le journaliste de la Dépêche avait oublié son appareil photo. Embêtant pour un portrait. Ah ! mais celui de l’Humanité arrive. Il nous fait poser dehors, devant le feu. Il enverra une photo à son collègue. Très bien. 


Pendant ce temps, Jean-Luc a fait griller la viande sur les braises du feu de palettes et arrive avec un plat rempli. L’interview continue tout en mangeant. Le gars de La Dépêche commence par décliner l’invitation qu’on lui a lancée, « seulement un verre de vin, ça m’ira très bien », puis le temps passant, accepte un morceau de viande et un bout de pain. Le portrait de Paul s’élargit des commentaires des uns et des autres. Vincent aime beaucoup utiliser l’appareil photo de son téléphone portable et a pris Paul sous tous les angles, avec et sans bonnet. On parle aussi du rendez-vous pour manifester le lendemain à l’ARS. André souligne en apparté, que les patients, il faut savoir les laisser tranquilles, qu’aujourd’hui, l’ambiance est plutôt à l’activisme et à la réponse immédiate, médicamenteuse ou autre, alors qu’il faut savoir prendre le temps de les laisser venir, suivre leur rythme, et que c’est une condition absolument nécessaire au travail et à la construction d’une relation authentique, que sinon il y a trop le risque de faire écran. 


Vers une heure, d’autres collègues arrivent. Des jeunes. Du coup, on se met à parler de la formation, de la transmission. « Nous avons appris notre travail au contact des anciens, mais aujourd’hui, il n’y en a pratiquement plus dans les pavillons. J’en veux beaucoup aux collègues qui ont de l’expérience d’être tous partis travailler en dehors de l’hôpital. » Occasion de rappeler au journaliste que l’activité de l’hôpital a lieu pour une bonne part (la moitié ?) à l’extérieur. Et de rappeler à Paul qu’il fut un temps où personne ne voulait aller travailler «en extra », comme on dit. On parle aussi du tutorat mis en place pour pallier à l’insuffisance de la formation psychiatrique actuelle dans les écoles d’infirmières.


 Le journaliste est sur le départ. Passe un psy (psychanalyste, je veux dire). Qui glisse discrètement une liasse de billets en soutien. On lui offre à manger. À l’autre bout de la table, on parle ciment, prise rapide et fers à béton. Il s’en mêle, apporte quelques précisions sur les matériaux. Une collègue félicite ceux qui ont parlé à la radio. C’était vraiment très bien. « Pas de tout repos, il faut être très concentrés » précisent ceux qui y sont allés. On raconte la panne pendant l’émission du groupe électrogène qui fournit l’électricité, vite, aller rajouter de l’essence. « On n’a raté que deux minutes. » Un syndicaliste arrive. Jean-Luc lui parle du compteur de chantier qui doit être installé dans l’après-midi. « J’ai pensé qu’il ne fallait pas que les fils traînent par terre. » « Ah, si tu as besoin, j’ai le camion avec la nacelle et quelques minutes, si je peux faire quelque chose, c’est maintenant.»

 

Quelqu’un d’autre arrive en parlant des tentes que ceux du tramway ont montées à leur terminus. Équipés d’emblée. Et de leur matériel pour tenir. De gros réchauds, etc. « Ce n’est pas une prime en plus qu’ils demandent. Ils luttent pour qu’on ne leur enlève pas une prime à laquelle ils ont droit. » Une collègue revient sur son repos, en profite pour s’arrêter. Je parle avec elle d’une patiente qu’on suit en commun. Elle raconte la vie au pavillon, le manque d’effectifs, les jeunes qui viennent d’arriver, qu’il faut « tutorer » justement et c’est pour ça qu’elle revient, elle me donne aussi des nouvelles d’une collègue commune.  


Je pourrais aussi parler de ce patient qui s’est mis à me raconter des pans entiers de l’histoire de Marchant ; de Véra, qui passe parler d’un projet qui lui tient à cœur et cela ouvre une discussion passionnante et pointue sur le travail ; ou de ces parents, se plaignant d’être mis à l’écart par le médecin qui soigne leur enfant mais ajoutent « l’équipe infirmière du pavillon est formidable ». Avec eux, c’est un vrai entretien de régulation qui a lieu et pourtant, impossible de penser le faire ailleurs que là, dans la nuit et le froid, à côté des palettes qui brûlent. 


C’est tout cela que permet aussi la tente.

 

Difficile de rendre cette vie, la simplicité, l’ordinaire et la chaleur de ces moments, les discussions qui passent du coq à l’âne, où tout est mêlé, de l’histoire de la psychiatrie au bricolage (mais notre métier est presque totalement constitué de cela : de bricolage), les rencontres qui se font, viande, pain et verres qui circulent autour de la table et le sentiment que quelque chose existe là, de précieux, qu’on ne peut pas enlever aux gens. Quelque chose  d’extrêmement important, de vital, d’indispensable. Quelque chose qui concerne la psychiatrie sûrement, mais au-delà d’elle, touche notre manière d’être ensemble dans la société d’aujourd’hui et la possibilité de travailler dans un collectif vivant. Parce que la vie, elle est là, pas dans les protocoles et autres évaluations, encore moins dans le CAC 40 et toutes les économies qu’on veut nous imposer. Non, la vie est là, et les patients en ont besoin, ils ont besoin de la sentir en nous. C’est avec cette vie qu’ils peuvent se reconstruire pour aller mieux. 


Ah ! j’oubliais le principal. Ce qui a mis le feu aux poudres, c’est un système de remplacement généralisé organisé sur tout l’hôpital, intra et extra, pour pallier l’absence chronique des deux tiers du personnel infirmier d’un pavillon. Ce système de remplacement généralisé avait entre autres pour effet de désorganiser le travail et la prise en charge des patients dans tous les services. 


Une autre des revendications emblématiques du mouvement a été un temps le manque de petites cuillères en métal ! et le fait qu’elles étaient systématiquement remplacées par des petites cuillères en plastique. (Mais cette pénurie touche aussi les bols, etc.) De ce côté-là, au moins, la direction a compris et les petites cuillères en métal sont réapparues dans les pavillons. 


Évidemment, la tente, c’est une protestation contre les économies actuelles, la pénurie constante de personnel due à une quarantaine de postes vacants non pourvus sur l’hôpital.  Mais c’est aussi une lutte pour défendre une certaine manière de soigner faite de respect du patient, contre la tendance actuelle d’une psychiatrie exclusivement sécuritaire et contre le retour à l’ordre asilaire, même modernisé par les caméras, les alarmes, les molécules soit-disant d’avenir et le fric pompé par les laboratoires. 


Pas étonnant que ce mouvement soit mené prioritairement par les infirmiers et les aides-soignants. Eux plus que les autres savent jusqu’à quel point le respect et la valeur de leur travail vont de pair avec le respect du patient. Les patients ne s’y trompent pas d’ailleurs : la tente leur a plu d’emblée, elle met un peu d’animation dans leur vie à l’hôpital, mais ils s’arrêtent aussi là pour prendre un café ou parler de la psychiatrie et il est arrivé que certains d’entre eux nous en racontent des bouts d’histoire. 

 

Ce jour-là, on a même parlé de monter des murs de briques sous la tente. Des murs qui resteraient une fois que la tente aurait disparu. Une bonne farce à faire à notre direction. Et tout un symbole. 


Blandine Ponet, Toulouse, décembre 2010.

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>La splendeur perdue des asiles

Article de la revue Books – N°18 – Décembre 2010

Les hôpitaux psychiatriques ne sont pas seulement des lieux de souffrance. Ce sont aussi des refuges où les malades trouvent une reconnaissance, un respect, une communauté. Leur fermeture massive, à partir des années 1960, a souvent aggravé la situation des aliénés. Saisissant aujourd’hui leurs bâtiments à l’abandon, le photographe Christopher Payne montre à quel point les asiles américains étaient des lieux de vie, où la détresse le disputait au grandiose.

L’aile des patients, à l’hôpital de Buffalo. L’asile offrait une vie étriquée, sans doute, mais protégeait les patients des agressions que leur réservait habituellement le monde extérieur.

Dans notre imaginaire, les hôpitaux psychiatriques sont des lieux de cauchemar, synonymes de sordide, de chaos, de détresse et de brutalité. À l’abandon, la plupart affichent désormais porte close. Mais nous continuons de penser avec effroi aux êtres naguère enfermés entre leurs murs. Il est donc tout à fait salutaire d’entendre le témoignage d’une internée, une certaine Anna Agnew, jugée folle en 1878 (époque où ce type de décision était prise par un juge, non par un médecin) et « mise à l’écart » à l’hôpital psychiatrique de l’Indiana. Elle avait fait des tentatives de suicide de plus en plus désespérées et essayé d’empoisonner l’un de ses enfants avec du laudanum.

Lorsque l’institution se referma sur elle, Anna ressentit un profond soulagement. Le soulagement, surtout, de voir sa folie enfin reconnue. « Avant même la fin de ma première semaine à l’asile, écrivit-elle plus tard, j’éprouvais plus de contentement que je n’en avais ressenti jusqu’alors en une année entière. Non que je fusse réconciliée avec la vie, mais mon triste état mental était enfin compris, et j’étais traitée en conséquence. En outre, j’étais entourée de personnes qui connaissaient le même type de malaise et d’égarements, et je m’intéressais de plus en plus à leurs souffrances, avec une compassion croissante. En même temps, j’étais moi aussi traitée comme une aliénée, bienveillance dont on ne m’avait jamais gratifiée auparavant (1). » Continuer la lecture de >La splendeur perdue des asiles

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>La psychiatrie sous surveillance : Débats autour de la Réforme de la loi de 1990

 

 

Paris, le 17 décembre 2010 de 9h à 17h EPS Ste Anne – Amphi CMME – 100 rue de la santé 75014 PARIS


Programme

8H 30 – 9H 00…… Accueil

9 H 00 – 9 H 30 …… Allocutions d’ouverture Monsieur Jean-Luc CHASSANIOL, directeur de l’EPS Ste Anne. Monsieur Serge BLISKO, Député, Président du conseil de surveillance de l’EPS Ste Anne. Dr. François CAROLI, Président d’honneur d’Ancre Psy.

9 H 30 – 10 H 30

Monsieur Robert BADINTER, Ancien ministre de la justice Sénateur des Hauts-de-Seine.

10 H 30 – 10 H 45 … Pause

10H 45 – 12H 30… La judiciarisation de l’hospitalisation sous contrainte Quelles en sont les implications ?

Monsieur Serge PORTELLI, magistrat. Madame Hélène FRANCO, magistrat. Dr. François CAROLI. Mr Joseph Halos, directeur de l’EPSM Lille-Métropole, président de l’ADESM.

12H 30 – 14H 00 .. Déjeuner

14 H 00 – 15 H 30

Dr. Richard RECHTMAN, Directeur de Recherche à l’ E.H.E.S.S., « Réguler le social par la psychiatrie ».

Dr. Michel TRIANTAFYLLOU, Chef du Secteur de Psychiatrie de Nanterre, « Du sanitaire au sécuritaire : les glissements du projet de

réforme de la Loi de 1990 ».

15 H 30 – 17 H 30 Table ronde Mr Patrick COUPECHOUX, Journaliste. Dr. Jean-Luc ROELANDT, Chef de Secteur de Psychiatrie, Directeur du Centre Collaborateur de l’OMS Un élu, un usager.

17H30…………… Conclusion Dr. Marie-Christine CABIÉ, Présidente d’Ancre-psy


Le projet de réforme de la loi de 1990 soulève de nombreuses interrogations dans la population, dans le monde judiciaire et dans le monde psychiatrique. Une évolution sécuritaire se dessine déjà depuis plusieurs années dans les modalités d’application de la loi et sont encore plus prégnants dans le projet de réforme. Cette évolution ne touche pas que les personnes souffrant de troubles psychiques. Elle peut être constatée dans d’autres champs de la société où les libertés individuelles sont mises à mal alors que s’estompe un réel débat démocratique.

Comment protéger les personnes tout en leur offrant les soins dont ils ont besoin ? Comment protéger la société tout en garantissant les libertés individuelles ? Telles sont les difficiles questions auxquelles doit répondre cette réforme.

Les notions de soin (médecins), de privation de libertés (justice) et de contrôle social (administration) restent actuellement mal définies, ce qui est source de confusion entre les rôles, les fonctions et les champs de compétence.

L’objectif de cette journée est de clarifier ces notions à partir des points de vue des professionnels de la justice, de la santé, mais aussi des politiques et des usagers.


Frais d’inscription 90 euros :  Inscriptions auprès du secrétariat du Docteur M. TRIANTAFYLLOU : Mme Chrystelle ALASO chrystelle.alaso@ch-nanterre.fr


Tel : 01 47 69 68 41 – Fax : 01.47.69.72.03 Hôpital Max Fourestier – Service de Psychiatrie 403 Avenue De La République – 92000 Nanterre

Numéro de Formation Continue : 11752696275

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>L’Echec systémique en Sciences de la santé

 

 

A propos d’une « audition publique » de la SAS (Sainte Autorité de Santé) sur la dangerosité des malades mentaux.


Le 10 Décembre 2010 a eu lieu, au sein d’un cénacle d’Experts réunis en conclave, en présence d’un public restreint et trié sur le volet, dans les écuries du Palais Ministériel, une Audition « Publique » (sic !…pour un débat démocratique, relire les discussions des députés et des pairs sur la loi de 1838, période de monarchie constitutionnelle !).


Le thème en répondait à une commande royale quant à l’état de la science en matière de dangerosité des « schizophrènes » (vocable populaire, affectionné par notre monarque, pour exprimer la terreur commune de la folie… A cet égard, la psychiatrie devra un jour intégrer le préjudice causé aux malades par les dérives populistes de ce « diagnostic », dont elle devrait peut-être s’interdire désormais l’usage…).


Afin de « scientiser » l’affaire, on rajouta au fameux « schizophrène dangereux », le « bipôlaire », symbole de réussite des sciences biomédicales et caution de leur tentative d’appropriation-expropriation de la psychiatrie (discipline bio-psycho-sociale).


Le faible résultat de ce procès est à la hauteur de ce qu’on pouvait en attendre…nous verrons prochainement comment la SAS essorera le torchon pour en extraire la quintessence. 


Mais, outre les considérations politiques alarmantes, environnant ce non-évènement, c’est sur le constat d’une faillite obstinée de la pensée scientifique dans le champ clinique que nous voulons attirer l’attention. 

Si la Physique du 20e siècle s’est largement ouverte aux approches holistiques (le « tout » n’est pas réductible à la somme de ses parties) et systémiques (l’interaction entre parties produit des « qualités émergentes » dont l’expression ne peut être déduite de l’analyse des constituants)…


Si la biologie du 21e siècle s’achemine à grand pas vers l’étude systémique du « scénario interactif » du génome humain, afin d’en saisir l’expression ou la répression, selon les caractéristiques de l’histoire du sujet ou de son environnement… Si les sciences économiques se sont totalement approprié les outils systémiques dans la compréhension et le contrôle des fluctuations et des bifurcations du flux des échanges économiques et financiers… Par contre, l’évolution des sciences cliniques du psychisme se singularise par une viscosité névrotique de notre pensée, enlisée dans une conception monadique de l’Esprit. 


Malgré la terrible expérience européenne de l’eugénisme mis en actes génocidaires, cette conception monadique s’aggrave parfois, chez nous, d’aigres relents Moréliens (conception hérédo-dégénérative des troubles mentaux comme « régression philogénétique »), voire Lumbrosien (démasquage de l’individu dangereux, de la « classe dangereuse »).

 

Lorsque ces rémanences européennes se placent sous l’égide de l’expertise anglo-saxonne du « fait statistique », on nommera les conceptions qui en découlent : Monadisme Aggravé (MA). Toute entreprise contribuant à situer la folie, la violence, le désespoir, la solitude, la dangerosité comme symptômes pathognomoniques d’un dérèglement de l’individu (ou d’une classe d’individus) s’inscrit sous l’égide du MA.

 

Cette doctrine confond deux ordres de phénomènes systémiques de niveau différent : des caractéristiques (pathologiques ou non) d’individus ou de groupes d’une part, et des qualités émergentes liées aux interactions de ces individus ou de ces groupes avec leur entourage humain de l’autre.


Folie, Violence, Dangerosité ne sont autres qu’émergentes : issues des interactions circulaires entre un individu (ou un groupe) et son environnement naturel, matériel et humain. C’est dans une « politique du lien » que la psychiatrie s’exerce, pour désamorcer ces délétères effets de systèmes, lorsqu’ils sont associés à des troubles mentaux.


C’est précisément dans ce champ qu’œuvre, en France, depuis cinquante ans, la Psychiatrie de Secteur. 


Le déni massif auquel elle est soumise, de façon répétée. Le refus par la HAS d'en prendre en compte les avancées conceptuelles essentielles et de faire de celles-ci des données scientifiques empiriques, participe à une régression homogène de la pensée occidentale vers un retour aux procès en sorcellerie et à l'inquisition (dont les méthodes se couvraient aussi des atours de l’ "evidence based science").


A quand l'Audition Publique sur la cruauté des arabes, l'avarice des juifs et la paresse des nègres ?


Dr Patrick Chaltiel. Psychiatre d’Exercice Public

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>Maintien en hospitalisation au delà de 15 jours : contraire à la constitution

 Article paru dans Médiapart le 29 Novembre 2010 Par Roland Gori et Fabrice Leroy.

L’article L. 337 du code de la santé publique prévoit qu’au-delà des quinze premiers jours, une hospitalisation sans consentement peut être maintenue pour une durée maximale d’un mois, renouvelable, au vu d’un certificat médical circonstancié indiquant que les conditions de l’hospitalisation sont toujours réunies.

Le conseil constitutionnel vient de déclarer cet article contraire à la constitution (Décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010). Le conseil constitutionnel a en effet estimé qu’il y avait là une méconnaissance de l’article 66 de la constitution, selon lequel la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible. Continuer la lecture de >Maintien en hospitalisation au delà de 15 jours : contraire à la constitution

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>Continuité des soins ou continuité sous contraintes ?

 

A propos du Projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques

et à leurs modalités de prise en charge

 

(Assemblée nationale lundi 4 octobre 2010)

Présentation de la rencontre – débat 

sur l'invitation de Serge BLISKO,  Député de Paris, 

 à l’initiative de Noël MAMÈRE, Député de Gironde, 

et avec Martine BILLARD, Députée de Paris. 

 

Organisée par Le Collectif des 39 Contre la Nuit Sécuritaire

 
– Ouverture et premières interventions –
 

P. Machto : La loi qui est en discussion pose le problème suivant : est-ce que la contrainte peut être confondue avec le soin ? Est-ce qu’il faut revenir à l’avant 1793, c’est-à-dire avant que Pinel et Pussin décident d’enlever les chaînes aux aliénés.

S. Blisko : Cette loi prône l’hospitalisation et les soins sans consentement. Et c’est maintenant qu’il faut agir. Ces questions doivent être popularisées d’autant plus qu’elles font moins l’objet de débats publics que d’autres questions. Et pourtant tout comme la loi sur l’immigration, cette loi remet en causes des libertés fondamentales. S. Blisko se refuse à toute discrimination faite aux Hommes (les personnes souffrant de troubles psychiques, comme les tziganes, etc.). Il appelle à une psychiatrie humaniste.

M. Guyader : Cette loi parle de protocolarisation des pratiques, de dangerosité des patients, d’exclure les personnes qui ont des troubles, et qu’on préfèrerait cacher. Il n’y a donc aucune place à « l’hospitalité pour la folie », à la créativité qui permet à certains de réussir à sortir du tréfonds. C’est une insulte à la culture.

Exclure les professionnels, chercher à se substituer aux praticiens, détruire la continuité des soins en détruisant ce qui la constitue (c’est-à-dire les rapports que les praticiens cherchent à tisser avec leur patients). La formation des psychothérapeutes réduite à 3 ans. Il est nécessaire de rétablir un internat de spécialisation, la psychiatrie de secteur (car sa disparition engendre des disparités régionales), de faire que les études d’infirmiers en psychiatrie soit une spécialité.

Un autre constat : avec cette loi, l’entrée en hôpital est facilitée, mais pas la sortie, ce qui va l’encontre de l’hospitalité. Il y a lieu de revendiquer l’état de droit pour tous (pour les patients) et une éthique du soin.

M. Billard : Il y a nécessité d’une mobilisation en amont. Hélas, elle n’est pas toujours possible car les parlementaires courent après les lois. Leur travail est difficile : d’un jour à l’autre ils ne savent pas sur quelle loi ils vont statuer (= entrave parlementaire). C’est très grave étant donné que le gouvernement souhaite de plus en plus faire passer des lois sécuritaires. M. Billard parle de textes de lois d’émotions, basés sur des fais divers (des lois de la peur). Il est arrivé que le président de l’Assemblée Nationale change l’ordre du jour, le jour même. Le texte de loi qui nous réuni aujourd’hui n’est pas encore inscrit en commission, mais il peut très bien l’être en novembre.

Ce projet de loi est une extension d’autres lois, par exemple la vidéosurveillance. Ce pouvoir rêve d’enfermer des populations gênantes. Il y a un recul du pouvoir de la justice au profit du pouvoir politique. Ce qui sous-entend la possibilité de rétention sans intervention de la justice et donc sans recours pour le malade et/ou sa famille. Quand on relie cela au manque d’effectif dans les hôpitaux, et la pénurie des soins ambulatoires.

Il est nécessaire qu’un débat public soit organisé pour sensibiliser la population, et trouver des solutions ensemble.

L. Brunessaux reprend le constat de M. Billard, le gouvernement essaie de diviser la population. Dans ce projet de loi sont créées deux catégories de patients : les patients les plus difficiles (ceux qui ont purgé une peine et qui ont passé un séjour dans un UMD), qui seraient traités différemment avec cette loi que les autres patients…

P. Machto : La question de la judiciarisation doit être approfondie. Il est nécessaire d’être vigilant, et de bien l’analyser, car elle peut être détournée. M. Guyader : ajoute qu’il ne faut pas de loi.

 

– La Parole est donnée au public –

G. Dana : Le collectif des 39, selon lui, est un observatoire des pratiques. La pratique des soins suppose d’avoir du temps et de pacifier les rapports entre patients et praticiens. Il y a certes des dispositifs à envisager, mais on ne peut pas se précipiter dans le vote d’une telle loi. Un constat : les synthèses, qui sont des réunions permettant de traiter chaque patient au cas par cas, ne sont pas comptabilisées ; et pourtant elles font partie du soin.

S. Klopp : La psychiatrie manque peut-être un peu de volonté politique. 

Le parti communiste demande que soit : 

– redéfini les pratiques de soin ; 

– remis en place, une formation spécialisée ;

– donné des moyens. 

 

Avec cette loi, le fichier ferait son retour, avec l’utilisation du dossier médical informatisé (DMP), où seront consignés les antécédents de passage en UMD, par exemple. Et ceci non plus seulement pour 5 ans, mais à vie. 

Réponse de M. Billard : Le DMP doit rester confidentiel. Nous nous étions fermement battus pour que les médecins du travail n’aient pas accès au DMP.

P. Chemla : Il y a déjà trop de transparence. Nous avions alerté le conseil de l’ordre sur le fait que maintenant avec les dossiers informatisés tout le monde peut avoir accès comme il veut. P. Chemla dit qu’il ne veut pas qu’un juge ou un préfet interviennent dans son travail.

Mr Dubuisson, du GIA (Groupe Information Asiles) : il faut tout de même un contrôle des pratiques de soin. Car si le patient est contraint, ce n’est pas le cas des soignants. Et peut-être que parfois leurs pratiques peuvent être remises en question. C’est pourquoi ce dernier est tout de même pour la mise en place du Juge des Libertés et de la Détention (soit un magistrat indépendant).

 

– Reprise des interventions –

N. Mamère 

 annonce la création à Bègles du Campus Solidaire et le collectif des 39 y est invité le 4 novembre à participer à une soirée – débat autour du film « Un Monde sans fous ? ». Il évoque la tyrannie de l’émotion. Il fait référence à P. Virilio, à la notion de vitesse, à cette « civilisation de l’accélération » : l’émotion d’un côté, l’urgence de l’autre entraîne une dangerosité pour nos libertés.

Le gouvernement est constitué de « braconniers » (qui cherchent à séduire les électeurs du Front National), qui souhaitent une société d’exception. Et en même temps ce projet de loi pose de vraies questions…

F. Chaumon : cette réunion concrétise la volonté d’échanger sur ces questions de manières ouvertes vers l’extérieur. Il y a quelque chose de très grave dans cette affaire : on veut nous faire croire qu’il est nécessaire d’enfermer. Et il y a aussi des praticiens qui adhèrent à cela (un auditeur ajoute même que ceux qui pense autrement sont une minorité). F. Chaumon constate que les services qui comptabilisent de nombreux comportements violents ont eux-mêmes des pratiques violentes. Les services qui enferment beaucoup, sont des services qui sont eux-mêmes fermés… 

Un danger aussi grand que le sécuritaire : la police sanitaire. Idée selon laquelle on peut déterminer ce qui est bien pour autrui. Mais, à partir du moment où l’on veut l’appliquer à un individu en particulier, c’est un problème. Effectivement, comme le disait le président du GIA, on peut remettre en question les choix de traitement de son médecin.

Il revient sur la notion de liberté : il ne faut pas faire de son patient un objet de pouvoir (c’est ce que prônait le courant désaliéniste). La supposé « non-demande » du patient ne dépend-elle pas des soins, de l’offre de soins proposée ? F. Chaumon ajoute que la folie ne se caractérise pas chez le fou par le non-savoir de son mal. Ce n’est pas si simple. Et donc la banalisation et les pensées simplistes (les raccourcis du style : fous = dangereux) sont à bannir. Il y a besoin d’un renouveau dans la culture, d’une promotion de la singularité des pratiques.

Quand un élu se retrouve face à un trouble de l’ordre public, qu’est-ce qu’il fait ? 

Réponse de N. Mamère : effectivement la réponse est au cas par cas, on essaie d’abord de comprendre ce qu’il s’est passé.

 

– Retour au débat avec la salle –

Le projet de loi ne s’intéresse pas aux soins mais seulement à l’enfermement. Il y a une autre question à traiter : quel est l’accès au soin ? Quelquefois le soin sous contrainte est parfois le seul moyen d’avoir accès au soin.

Dans quelle mesure notre exercice de pouvoir garde une éthique ? Et ne tombe pas dans « l’abus de pouvoir » ?

B. Durand : Ce que le gouvernement cherche à obtenir c’est la réduction des troubles au moindre coût possible. Les débats que nous avons ici aujourd’hui, les réflexions lors de nos meetings, doivent être entendus des politiques. Lors d’une précédente réunion dans cette même salle, organisée par le Parti Socialiste, il n’y avait pour parler de la santé mentale, que l’association FondaMental, … et Jean Luc Roelandt ! Jean Luc a fait de très bonnes choses dans son secteur, cependant là il prône les « pairs-aidants » déjà existant au Canada ! Un scandale quant il s’agit de faire d’anciens patients des sortes de super-patients avec une formation, délivrée par qui ? On voit ce qui est proposé avec le décret sur le titre de psychothérapeutes… C’est tout autre chose, l’entraide entre les patients, leur responsabilisation dans une dynamique institutionnelle !

Plusieurs questions à propos de la gauche, du parti socialiste, et de son possible retour au pouvoir.

N. Mamère précise qu’il représente le parti « Les Verts  – Europe écologie », et non le PS. Aussi, il ne peut parler en leur nom. Et, il ajoute que la démocratie directe est bonne, mais la démocratie représentative est importante aussi, surtout sur cette question complexe. D’autre part, il faut informer et éduquer la population sur ces questions. Notre société est malade de la simplification (« travailler pour gagner    plus », etc.)

Il évoque aussi le milieu carcéral, et le fait que bien entendu il y a de nombreuses personnes qui sont incarcérées et dont la place n’est pas dans les prisons…

P. Chemla : Si la gauche revient au pouvoir, est-ce que les logiques normatives (nommées certification, aujourd’hui) vont être abandonnées ? Nous ne sommes plus dans une logique d’objectifs, mais de normes. Les gens se protègent derrière les normes. 

N. Mamère adhère à cette dernière intervention, et ajoute que c’est le cas également dans l’écologie et dans d’autres secteurs. M. Bellahsen prend la question sous l’angle de la formation. On nous pousse à une déresponsabilisation. La formation actuelle va dans le sens de la délégation des tâches, un cloisonnement des professionnels. Il y a un développement de la peur des patients, ce qui entraîne des réactions inadaptées. On se réfugie derrière les sciences, et c’est la médicalisation de la psychiatrie. La question du savoir expertale  (d’experts) : dans notre formation on ne nous explique pas que notre pratique nécessite du temps et de la créativité. On nous propose des cours de sciences humaines, mais ils sont basés uniquement sur la gestion des personnes. Le     «Santémentalisme», prôné par l’association FondaMental, organisme évoqué dans le film « Un monde sans fous ?», se base sur la normalisation dans le but que la santé mentale soit un instrument pour que nous soyons plus compétitif face au reste du monde (objectif européen), ce qui induit un Etat gestionnaire. Pourquoi ne pas mettre en place des collèges locaux de psychiatrie, organisés de manière pluridisciplinaire (réunir des personnes de tous les secteurs : psychiatres, infirmiers, éducateurs,…)

R. Ferreri : D’un côté il y a un sujet universel et de l’autre des personnes qui vont pouvoir jouir bourgeoisement de leurs biens. On ne peut écarter des gens sans que cela nous questionne (est-ce que l’on aurait pu l’éviter ?) « L’espoir des réponses ne doit pas tuer l’espérance». Nous sommes passés dans un monde de la gestion des Hommes, et ce qui échappe aux politiques doit être anéanti.

C’est quoi le lien social ? C’est ce que nous partageons vraiment, le fait qu’il n’y a pas de vérité dernière. Nous ne pouvons pas clore un débat dans le but de l’efficacité. Selon R. Ferreri, la question des sujets est à reprendre, tout comme la valeur d’échange. Dans le combat que nous menons, il est nécessaire de discuter avec tous.

Il faut lutter contre l’évaluation. Lénine disait « Quand à l’intérieur on ne peut rien faire, il faut aller vers l’extérieur ».

 

– Débat avec la salle –

Intervention d’un artiste-citoyen qui se demande si justement le collectif va assez vers la population, et est prêt à s’engager dans des initiatives.

Réponse de L. Brunessaux : en Février un rassemblement va être organisé autour débats, projections de films, expositions, concerts… et sera ouvert à tous. Il est nécessaire de développer des échanges avec les artistes et les citoyens… 

S. Klopp ajoute que des assises régionales (organisées par le Front de Gauche) vont avoir lieu, et il serait intéressant que le collectif des 39 s’en saisisse.

Françoise Attiba : « Quand on voit comment les représentants politiques sont en difficultés eux-mêmes à l’assemblée, on peut se demander si il faut en attendre un vrai soutien ».

P. Machto : on ne peut pas dire que nous ne pouvons pas compter sur eux, on ne peut pas dire ça, le débat d’aujourd’hui ici en témoigne mais il faut absolument approfondir le travail avec eux, transmettre nos analyses et nos propositions. Ne pas laisser la place aux fondaMentalistes de la santé mentale ! 

Il conclue cette rencontre par la lecture de l’Appel du Collectif des 39 aux Préfets et aux grands corps de l’État.

 

 

Notes prises par Adèle AUDUREAU 

Secrétaire des départements Social et Culturel des Ceméa

Relecture et compléments : Paul MACHTO, Psychiatre

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>Les sages placent l’internement sous contrôle judiciaire

http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/actualites/qpc-decisions-du-26-novembre-2010.50738.html

 

http://www.liberation.fr/societe/01012304791-les-sages-placent-l-internement-sous-controle-judiciaire

 

Deux parmi de nombreux articles (voir ci dessus) reprennent la décision du conseil constitutionnel. Si nous en débattions ? Voici quelques propos récent pour ce qui est de M. B et plus ancien de Bonnafé, car cette question ne date pas d’aujourd’hui. A vos claviers .

Quelques réactions rapides en première lecture de la QPC : 

"En mettant la constitution (article 66) comme contradictrice à l’article 3212-7 de la santé publique, le conseil constitutionnel nous  rappelle que toute privation de liberté n’est pas chose normale, et a fortiori en psychiatrie.

Le premier intérêt de ce texte est de rappeler aux équipes de psychiatrie qu’elles ne sont pas au dessus des lois, malgré le fait qu’il y ait une spécificité légale de la contrainte dans cette discipline.

Cette QPC ouvre, à la demande de la requérante et de l’association de patients (GIA) la question de la judiciarisation qui n’est pas un débat tranché au sein du collectif des 39 puisque la judiciarisation, si elle propose d’introduire la psychiatrie dans le droit commun et de  considérer la privation de liberté psychiatrique comme toute autre privation de liberté, risque concrètement d’être en but à la paupérisation et l’engorgement du système judiciaire ainsi que le risque d’une justice et donc d’une contrainte à deux vitesses. Risque enfin de placer la privation de liberté en psychiatrie sur le registre uniquement du judiciaire plutôt que sur le registre clinique.

Ce qui serait intéressant : envisager la même démarche avec les HO et avec la circulaire donnant ordre aux préfets d’être plus que prudent avec les personnes ayant troublés l’ordre public.

Les perspectives ouvertes par cette décision du conseil constitutionnel :

– La déclaration d’inconstitutionnalité prend acte à partir du 1er août 2011. Dans le même temps, la loi actuelle re-visitée par le conseil constitutionnel montre bien que mis à part cet article qui va dans un sens trop contraignant pour les patients, la loi de 1990 est adaptée et ne nécessite pas de réforme, qui plus est dans un sens sécuritaire.

 – Une application sécuritaire de la psychiatrie (qui serait plus du gardiennage qu’un processus actif de soins) peut être remise en cause par les moyens légaux. Ce qui annonce des perspectives politiques intéressantes si l’hypothétique réforme de la loi de 1990 allait dans le sens sécuritaire annoncée par le projet de loi de mars 2010."

Mathieu Bellahsen

 

Voici un petit texte de rappel de bon sens (article 64 exit à remplacer, sinon le reste tient la route)

Pour mémoire, (n’oubliez pas les oubliettes)

"Il n'y à pas d'internements arbitraires, c'est l'internement qui est arbitraire"

voir l'entretien de Bonnafé en 1989: "Légiférer sur les fous"  http://antonin.blog.lemonde.fr/2006/01/14/2006_01_lgifrer_sur_les/

…L’un est l’aspect pénal, avec la mise en question de l’«Article 64». Il se dit là beaucoup de choses qui ont une très grande valeur, contre l’annulation des actes du «fou». Il est bien heureux que se livrent ces «levées de boucliers» contre les positions sur-aliénantes de dé-responsabilisation en chaîne. Mais le fait que ça renvoie à l’immense problématique globale de responsabilité/punissabilité de tous les citoyens reste (je dirai : «par force») plus enseveli encore que le renvoi aux droits de tous les citoyens pour l’« au-delà de la Loi de 38 ». On ne creusera jamais avec assez d’attention la problématique profonde sur «folie et délinquance», mais il n’est pas de bonne méthode de subordonner le débat sur «Loi et folie» à ce registre. On pose mieux la question de fond, celle du statut anthropologique de la folie, en n’enflant pas les mythes du «fou dangereux» et en mettant au premier plan les droits ordinaires des «déments» ou «aliénés», comme on les nommait, à être traités dans la loi commune. Comme les vieux, etc…

L’autre aspect, sur lequel on ne saurait manquer de fermeté, mais où l’important est dans le contexte, est la question de l’internement arbitraire. Le fait est que, dans son traitement ordinaire, elle est surtout utilisée pour empêcher de comprendre que c’est l’internement qui est arbitraire. Le discours commun est envahi de protestations contre le fait que des gens, dont on dit, par exemple très significatif, qu’«ils n’ont rien à se reprocher», soient placés chez les horribles « fous ». En somme, de quoi entretenir chez les bonnes âmes que traiter les «vrais fous» comme on les traite n’a rien de scandaleux. J’ai là, en mémoire, deux révoltes anti-démagogiques passant dans les plus mal-audibles des combats. Comment lutter contre les aberrations répressives de la psychiatrie dans les « pays socialistes » sans dire, en même temps, que protester contre le fait de mettre des «gens bien» chez les fous est aberrant si l’on en profite pour entretenir l’horreur des «vrais fous». Et aussi, comme le cas Camille Claudel en a fourni une occasion récente dans l'histoire, combien il peut être aberrant de parler du sort et de la mort des internés géniaux pendant la guerre en ignorant et faisant ignorer qu’ils furent des victimes comme les autres, les 40 000 «oubliés ».

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>Documentaire sur Public Sénat : questions sur la place du malade mental

Le Quotidien du Médecin 19 11 2010

La chaîne parlementaire Public Sénat propose lundi soir (22 novembre) la première diffusion d’« Un monde sans fous »*, un documentaire riche et militant, qui explique comment le rêve humaniste de désaliéner la santé mentale a engorgé les hôpitaux, jeté les psychotiques dans la rue et désorienté les familles.

CARRIÈRES-SUR-SEINE, rue de l’Égalité. La caméra suit une femme qui part déposer des fleurs dans un drôle d’endroit. C’est un squat où a vécu pendant 26 ans son frère Sulleman. Diagnostiqué schizophrène depuis son adolescence, il est mort à l’âge de 42 ans dans la rue, après avoir erré de foyer en foyer, « incompris par la société », peste sa sœur. Cette tragédie aurait pu être évitée, affirme-t-elle, « si une aide psychologique avait été apportée à sa famille ainsi que des structures adaptées ».

Quelle place notre société réserve-t-elle donc encore aujourd’hui à la maladie mentale ? C’est la question, vaste et complexe à laquelle ce documentaire riche et ample donne quelques bonnes pistes de réflexion.

50 000 lits fermés.

Il y a 50 ans, raconte la voix off, la psychiatrie publique avait progressivement ouvert la porte des asiles, rêvant d’installer le soin psychique au plus près de la vie des patients, hors de l’hôpital. Preuve par l’image : direction Reims, où l’application de ce (beau) principe a fonctionné. Frédéric témoigne comment, grâce aux appartements thérapeutiques puis aux appartements « protégés », il a pu revenir à la vie. On entre également dans les murs du centre médico-psychologique Antonin Artaud. « Ici, toute la population du secteur peut recevoir des soins psychiatriques, même en urgence », explique Christophe Ponsard, infirmier. Bien conscient des limites du dispositif, le Dr Patrick Chemla, psychiatre, explique que « le côté trop chaleureux du Club thérapeutique peut persécuter (les patients), ils peuvent avoir besoin quelquefois d’aller à l’hôpital, dans un lieu très très cadré ». Trop d’ouverture peut tuer l’ouverture, en quelque sorte. Il est bon d’en faire usage avec tact et mesure.

Depuis les années 1970, 50 000 lits ont été fermés en psychiatrie publique, sans que suffisamment de structures alternatives de prise en charge aient vu le jour, rappelle le documentaire. Les hôpitaux publics en déserrance ne gèrent plus qu’un flux tendu de patients en crise. Le film montre aussi que la maladie mentale repose de plus en plus sur l’associatif et les familles, souvent dépassées. « Il faut savoir jongler », déplore la mère d’un malade, quand son fils, en crise, a besoin d’un lit d’hôpital.

Surgit alors l’équation dramatique « Pas de lits + Pas d’hébergement car pas de revenus = à la rue ». « On espère ne pas voir ce qui s’est passé aux États-Unis, à savoir la mort des psychotiques dans la rue », s’inquiète Roland Raboin, infirmier psychiatrique du réseau Souffrances et précarité. On estime en effet que le tiers des SDF souffrent de maladies mentales.

« On a confondu une réforme fondamentale de l’asile avec la destruction de l’asile », résume le psychiatre Hervé Bokobza.

Qui a les clefs ?

Le micro est aussi tendu aux juristes. « Le parcours du fou est relativement bien balisé, explique Serge Portelli, vice-président du TGI de Paris. C’est une sorte d’allers et retours entre la rue, le foyer, ce qu’il reste de l’hôpital psychiatrique, la prison et nous, juges. Nous jouons un rôle assez bien huilé dans le système. » La présidente du syndicat de la magistrature, Emmanuelle Perreux, dénonce, elle, une « justice automatisée ». « On juge un acte » (pas une personne).

Le reportage évoque aussi les méthodes comportementalistes, avec l’exemple de Créteil, où la priorité est donnée à l’efficacité pragmatique pour atténuer le handicap et donc accélérer la réadaptation des patients au monde du travail. Il montre encore un jardin thérapeutique. « Qui a les clefs du hangar ? », comme il dirait « Qui a les clefs de la psychiatrie ? », demande un interne(-jardinier) en psychiatrie, convaincu par cette méthode douce, au long terme et non exclusivement médicale.

Le journaliste Philippe Borel, traverse l’Atlantique et montre l’alliance entre les neurosciences et la cybernétique. Chapitre sciences et recherche. Retour en France. Le Pr Yves Agid, directeur scientifique du tout nouvel ICM (Institut du cerveau et de la moelle épinière) s’enthousiasme de son côté, casque de sécurité vissé sur la tête à l’occasion d’une visite du chantier (du futur institut), sur « le formidable boum de la prise en charge des malades psychiatriques dans les années à venir. J’envie la jeune génération de chercheurs en psychiatrie ».

On ne sait pas trop s’il y a vraiment à envier quelque chose.

AUDREY BUSSIÈRE

Le documentaire « Un monde sans fous ? » sur Mediapart

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>Le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité : faits et interprétations politiques.

François Gonon (directeur de recherche CNRS) et Annie Giroux-Gonon (psychologue, psychanalyste)
Contact: francois.gonon@u-bordeaux2.fr

Le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) est en France un sujet de polémiques. Celles-ci ignorent souvent l’évolution rapide des données et des idées en matière de TDAH dans la littérature internationale. Un article récent(1) fait le point de cette évolution. Notre but ici est de présenter cet article puis d’en tirer quelques conséquences au niveau individuel et social.

TDAH: données récentes des neurosciences et de l’expérience nord-américaine.
En Amérique du Nord, le TDAH représente le trouble psychique le plus fréquemment diagnostiqué chez l’enfant avec une prévalence de 7 à 9 %. La prescription de psychostimulants (amphétamine, ritaline) y touche des populations importantes depuis trois décennies. La neurobiologie est souvent mise en avant pour justifier cette prescription: le TDAH serait dû à un déficit de dopamine (et/ou de noradrénaline) que viendrait corriger ces médicaments. La littérature récente remet en question cette hypothèse déficitaire(2). En l’absence de théorie neurobiologique solide, l’origine biologique du TDAH est souvent affirmée en raison de sa forte héritabilité (75 %). Cette héritabilité est estimée par des études de vrais et faux jumeaux et suggère que des prédispositions génétiques pourraient favoriser l’apparition du TDAH. Cependant, ces études ne font pas la différence entre facteurs génétiques purs et interactions entre gènes et environnement. Selon ce même type d’études, la tuberculose présente aussi une forte héritabilité (80 %). Par conséquent, contrairement à ce que véhicule les médias, « héritable » ne veut pas dire « avoir des causes génétiques ». De nombreux facteurs environnementaux augmentent le risque de TDAH: faible niveau économique et d’éducation des parents, naissance prématurée, mère adolescente, excès de télévision entre 1 et 3 ans. Inversement, si la mère a fait des études supérieures, le risque est diminué. Par conséquent, un renforcement des crèches et des écoles maternelles dans les quartiers les moins favorisés serait sans doute l’une des mesures les plus efficaces pour prévenir le TDAH(1).

Les études récentes confirment que la ritaline (seul médicament autorisé en France) est relativement bien tolérée et améliore l’attention chez les 3/4 des enfants souffrant du TDAH. Cependant, ces enfants présentent à long terme un risque accru de toxicomanie, délinquance et échec scolaire. Les études nord américaines récentes montrent que le traitement par la ritaline n’a aucun effet, en positif comme en négatif, vis-à-vis de ces risques. Par contre les interventions psychologiques et sociales en direction des enfants et de leurs parents diminuent efficacement ces risques ainsi que les troubles souvent associés au TDAH (anxiété, dépression, troubles externalisés). Le ministère de la santé de Grande-Bretagne recommande en première intention un soutien psychologique et éducatif en direction des parents. La prescription de ritaline devrait toujours être associé à ce soutien et être réservée aux enfants les plus en difficulté.

La situation française est très différente des USA puisque les médecins généralistes ne sont pas habilités à poser le diagnostique de TDAH et que le pourcentage d’enfant traité par la ritaline est en moyenne inférieure à 1%. On peut donc supposer que la prescription de ritaline entraîne en France des effets à longs termes plus souvent bénéfiques qu’aux USA, mais cette hypothèse n’a pas encore fait l’objet d’une étude. L’expérience américaine d’un effet nul, en moyenne, du traitement médicamenteux du TDAH vis-à-vis des risques à long terme suggère que si certains enfants ont tiré bénéfice du traitement, d’autres ont vu leur état s’aggraver. Une étude française va dans ce sens(3).
Conséquences face aux difficultés d’un enfant particulier

Les psychanalystes ne s’étonneront pas de deux conclusions issues de l’approche pragmatique anglo-saxonne. Premièrement, les symptômes du TDAH sont plus fréquents dans certaines familles même si cette répétition n’a pas grand-chose à voir avec la génétique. Deuxièmement, le plus efficace pour aider l’enfant en difficulté, c’est de soutenir ses parents. Les méthodes de soutien préconisées aux USA (e.g. méthode Barkley) consistent surtout en conseils éducatifs de bon sens. Un soutien inspiré par la psychanalyse n’est nullement incompatible avec ces conseils, mais il va plus loin car la psychanalyse permet de lever les obstacles inconscients qui empêchent les parents de mettre en pratique ces conseils.

En France, sur le principe, tout le monde est d’accord pour affirmer la nécessité d’associer à la ritaline un soutien aux parents. Malheureusement, en pratique, il est plus facile de prescrire de la ritaline que de mettre en oeuvre ce soutien. La tentation est donc grande de se limiter au médicament. L’expérience américaine montre que, si le soutien aux parents n’est pas possible, le traitement par la ritaline est inefficace et donc, potentiellement nuisible.
Conséquences sociales et politiques

En tant qu’entité diagnostique le TDAH résulte beaucoup plus de l’existence d’un médicament et d’une négociation sociale que des avancées de la psychiatrie biologique. Qu’on y adhère ou non ce diagnostic se généralise en France en même temps que le discours sur l’égalité des chances. La démocratie américaine s’est fondée sur l’égalité des chances à la naissance et la méfiance vis-à-vis du pouvoir de l’état. Comme cette idéologie se heurte à la réalité d’une injustice sociale croissante, la psychiatrie biologique est convoquée pour démontrer que l’échec social des individus résulte de leur handicap neurobiologique. Au nom de l’égalité des chances, la société américaine autorise alors chacun à faire valoir les droits que lui confère son handicap (éducation spécialisée, etc). Le TDAH, conçu comme un désordre neurologique d’origine principalement génétique, est donc une réponse sociale, adaptée à l’idéologie américaine, face aux questions réelles posées par l’injustice sociale vis-à- vis de l’échec scolaire et de la délinquance. Elle conduit logiquement à proposer un traitement précoce et un soutien renforcé en direction des seuls enfants diagnostiqués comme handicapés par le TDAH.

Face à l’échec scolaire et la délinquance, le Danemark et la Suède ont fait des choix radicalement différents(4). Pour eux l’état doit s’efforcer de compenser dès la petite enfance les conséquences de l’inégalité économique et éducative des familles. En conséquence les congés de maternité rémunérés sont longs (alors qu’ils n’existent pas aux USA) et l’accueil de tous les enfants de 1 à 6 ans dans des structures collectives est garanti par l’état quel que soit le niveau de revenu de la famille. La qualité des structures accueillant les enfants de 1 à 3 ans est particulièrement renforcée (un adulte pour 3 enfants). Ce système coûte cher, mais il représente un investissement très profitable à long terme pour la collectivité car il diminue l’échec scolaire (pourcentage d’enfants en dessous du niveau scolaire minimum: Danemark 5 %, France 7 %, USA 18 %)4.

Alors même que les preuves de l’inefficacité de la politique américaine commencent à apparaître dans la littérature spécialisée, le discours sur les causes biologiques du TDAH et sur l’égalité des chances envahit le champ médiatique français. Nous le regrettons et espérons que ces quelques réflexions permettront de clarifier les polémiques françaises autour du TDAH.

1. Gonon, F., Guilé, J. M. & Cohen, D. Le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité: données récentes des neurosciences et de l’expérience nord américaine. Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence sous presse (2010). Cet article peut être demandé à francois.gonon@u-bordeaux2.fr
2. Gonon, F. The dopaminergic hypothesis of attention-deficit/hyperactivity disorder needs re-examining. Trends in Neuroscience 32(1), 2-8 (2009).
3. Combret, R. Les effets de la ritaline sur les plans du comportement et du fonctonnement mental chez l’enfant hyperactif. Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence in press (2010).
4. Esping-Andersen, G. Trois leçons sur l’état providence (Seuil, Paris, 2008).

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>Habiter poétiquement le monde : exposition à Lille du 30/09/10 au 30/10/11

Lille Métropole Musée d’art moderne d’art contemporain et d’art brut

À travers plus de 350 œuvres, l’exposition Habiter poétiquement le monde met en avant la façon dont des artistes, mais aussi des écrivains et des cinéastes, décrivent et interprètent leur présence au monde.
« Telle est la mesure de l’homme. Riche en mérites mais poétiquement toujours, sur terre habite l’homme », écrit le poète Friedrich Hölder lin. Création et quotidien ne sont pas séparés, mais se confondent ; déambulation, errance, disparition, accumulation, performance sont à l’origine de la constitution d’espaces réels et imaginaires ayant la capacité, selon les nécessités qui président à leur création, de s’ouvrir ou de se refermer sur l’extérieur.
Transversale (art contemporain et art brut), constituée de multiples échos et associations entre des œuvres et des documents d’archives issus de contextes très divers sur plus d’un siècle, l’exposition est conçue « en constellation », comme une promenade à travers les différents espaces du musée (salles d’exposition, auditorium, parc, site Internet).

L’exposition rassemble des œuvres qui, pour certaines d’entre elles, sont familières des salles de musée, quoiqu’elles y soient parfois entrées par des portes dérobées, ou qu’elles continuent d’y résister ; d’autres y entrent pour la première fois, et leur rencontre inattendue per met d’interroger les définitions mêmes de l’acte artistique, du geste esthétique, de l’expérience poétique.
Elles relatent des gestes d’archives de soi et du monde, des cartographies et des traces d’expérience, documentent des relations, parfois erratiques voire douloureuses, entre l’individu et son environnement. Elles constituent enfin des formes de performance de la vie même, des dispositifs d’expression, de transmission et de communication, à la fois ouverts vers l’autre et néanmoins constitués en systèmes propres parfois complexes à déchiffrer.

Parcours dans les villes, longue traversée des paysages, marches sans but apparent, nomadisme voulu ou subi : l’artiste comme l’écrivain voyageur prend la mesure du monde, de l’étendue, établit les rapports entre le mot et le dessin, entre le geste et le tracé. L’artiste « essaie le monde », comme écrit Thomas Hirschhorn, et le poème devient un espace où se joue la possibilité de sa propre disparition ou dissolution. Il est tantôt, ou simultanément, construction qui prend forme dans l’espace réel, et trajectoire cursive, sismographie éphémère.

Cette ouverture du réel peut conduire l’artiste à se trouver dans un espace de type interstitiel : être physiquement ici et maintenant, mais traversé et pris dans un temps où passé et futur se confondent. Que le voyage soit physique ou intérieur, la mise en tension ou quelquefois « mise en perte » du réel est transmise ou relatée, comme un journal de voyage. Le quotidien ne se sépare plus de l’œuvre ni du regard. Les frontières entre intime et commun se brouillent dans une mise en doute de ce qui semble communément partagé. « L’habité poétiquement » détourne les gestes quotidiens en apparence les plus évidents, les théâtralise ou révèle leur étrangeté et leur normativité. Il fait appel, comme le dit Pierre Dhainaut, à l’esprit d’enfance, qui permet, sans confort, de vivre le monde comme poème.

Au croisement de l’exposition Habiter poétiquement le monde et des collections permanentes, les visiteurs pourront également découvrir les premières expositions Théma art moderne et art brut : Portraits d’artistes et Les Bâtisseurs de l’imaginaire.

http://www.musee-lam.fr/wp-content/uploads/2010/09/Dossier_habiter-poetiquement-le-monde_web.pdf

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> "Les ombres des anges" : Comédie Musicale au Théâtre d'Orléans

« LA PSYCHIATRIE DOIT ETRE FAITE / DEFAITE… » Oui Roger GENTIS avait raison… Nous suivons à notre façon cet objectif : voyez plutôt ! Faites passer très… largement ! Merci de faire suivre notre message et réservez vite vos places !

« Les ombres des anges » – le texte – vient de sortir aux Éditions de L’Harmattan. Une centaine de personne l’a composé. A commander impérativement !


LODA_bulletin-reservation

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>12 ème édition des rencontres video en santé mentale : 09 et 10 Novembre 2010

MARDI 9 NOVEMBRE (accueil à partir de 9h)

Invitée spéciale Paule Muxel, réalisatrice

Auditorium de la Cité des sciences et de l’Industrie, niveau 0

Ouverture par Tù-tâm Nguyên, responsable de la Cité de la santé Universcience, Jean Vuillermoz, Président du Conseil d’administration de l’Hôpital Maison Blanche, adjoint à la Mairoe de Paris, Nicole Pruniaux, directrice de l’Hôpital Maison Blanche, du Dr Marc Habib, médecin directeur de l’Association L’Elan Retrouvé.

– Le voyage dans la chambre (Sandra Sarfati Paris)
– Fragments d’une psychotique (Sandra Sarfati)
– Petite soeur (Paris Bouffadou)
– Non ( Basse-Terre, Guadeloupe)
– Les poètes de l’espoir (Chartres)
– Un étrange rencard ( Paris – La Folie Régnault)
– Le téléfon ( Paris La Roquette)
– Arsène Lupin ( Paris La Roquette)
– J.H. (Paris La Rochefoucault)
– Les béattitudes ( Freschines)
– G.A.O. (L’arbresle- Lyon)
– Mystère au Père Lachiase ( Paris GEM la Maison de la Vague)
– Mélodie sans retour ( Vienne)
– Le cirque des mots détournés (L’arbresle- Lyon)
– Ton regard me raconte ( Paris rue de Douai)
– Les artistes font du ski ( Dijon)
– Andromède, les héros sont fatigués (Malakoff)
– En diamant bleu de nuit (Malakoff)

MERCREDI 10 NOVEMBRE (accueil à partir de 9h)

Auditorium de la Citédes sciences et de l’Industrie, niveau 0

– Le quai des rêves ( Asnières)
– Affaires de coeur ( Montluel)
– Avis de tempête ( Roanne)
– Le tzigane et le diable ( Paris La Comète)
– Y’ a des z…. ( Montluel)
– L’étalon des tagueurs (Paris La Comète)
– Les petites choses ( Dominique Nehl, Nancy)
– Etas d’âmes ( Montrevel en Bresse)
– Etrange, vous avez dit bizarre ( Paris – Parmentier)

– La BIBLIOTHEQUE VIVANTE par la Maison des Usagers de Sainte Anne)
(de 14h à 16h à la Cité de la santé au niveau -1,de la Cité des sciences et de l’Industrie) Présentation par Aude Caria, responsable de la MDU et Céline Loubières, coordinatrice de la MDU;

Les troubles psychiques : parlons-en ensemble, venez participez à la Biliothèque vivante : des usagers et leurs proches viendront témoigner de leur vécu des troubles psychiques.

– CONCERT : MINNIE PICOUX & FLUCK à 14h

(photos : Maysa de Albuquerque, Daniel Simonnet, Jean-Marc Taëb)

– La tête dans les étoiles ( Bruxelles – le Code))
– Venus ( JC Pellaud – Suisse)
– De Toulouse Buenos Aires ( Toulouse – Radio MicroSillons)
– C’est ton tour ( Charleroi)
– Et moi(s) (Epinay sur Seine)
– Croisière à haut risque ( Arras)
– Mon ami, my friend ( Paris – Les Cariatides)
– Sur les pas de Robespierre ( Arras & Les Cariatides Paris)

Clôture avec par Tù-tâm Nguyên, responsable de la Cité de la santé Universcience, et Paule Muxel, réalisatrice, de documentaires.

les formulaires d’inscription sont téléchargeables à partir du lien suivant :
http://cid-e0027f033fdd856a.office.live.com/browse.aspx/RVSM%20public?uc=2

à renvoyer par mail à danielsimonnet@hotmail.com

Hopital Maison Blanche, service communication
Rencontres vidéo en santé mentale
6/10 rue Pierre Bayle 75020 PARIS

SOURCE : BLOG VIDEOPSY

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>Forum Vol au dessus d'un nid de coucou, Actualité du soin psychique

FORUM « Vol au dessus d’un nid de coucou, Actualité du soin psychique » : Salle de conférence Centre Hospitalier Laborit 370 avenue Jacques Cœur Poitiers

La rediffusion récente de « Vol au dessus d’un nid de coucou «  a été l’occasion de souligner l’inquiétante similitude entre une psychiatrie américaine inhumaine évoquée dans cette œuvre de Milos Forman et celle qui en 2010 se répand sur le territoire français.

Les méthodes thérapeutiques évoquées dans ce film, froides, punitives, culpabilisantes, mécaniques, nous apparaissent être en train de recouvrir celles qui font appel à la sollicitude, l’empathie, l’écoute, en un mot à la prise en compte de la singularité humaine.
A la sortie de ce film en 1976 nous pensions qu’il pouvait en être autrement en France.

Qu’en est-il alors en 2010 dans les établissements médicaux et médicaux-sociaux ?

– Le malade, malgré les aléas de ses symptômes,
est-il toujours une personne inscrite dans la société ?

– L’être humain de par sa maladie, ou son handicap est-il placé hors la loi commune ?

– Le soignant peut-il préserver sa capacité à soigner, à accompagner, à l’heure où sa fonction est dénaturée, et son identité professionnelle désavouée par ce que l’on attend et exige de lui ?

Quelles réflexions mettre en œuvre dans nos pratiques pour garantir des soins humains et aidants ?

Le Collège Régional Poitou-Charentes des Psychologues de la Fonction Publique Hospitalière est une association Loi 1901. Il se veut un lieu de débats ouvert aux psychologues ; un lieu d’échanges et de recherche ouvert à tous les domaines utiles à notre réflexion (scientifique, philosophique, sociologique, juridique, éthique, culturel …..).
Il organise régulièrement des conférences, des forums, des colloques.

Vendredi 19 novembre 2010

9h Accueil

9h45 Ouverture de la journée 
Josette Marteau Château

10h00 Quelle hospitalité pour la folie ?
Patrick Chemla

11h00 Pause

11h15 Parents de personnes hospitalisées, quels vécus ?
Catherine Le Grand-Sébille

12h00 Pause repas

14h00 Créer et maintenir des lieux de narration, une résistance nécessaire à la post- modernité.
Simone Molina

15h00 Pause

15h15 Garantir des soins humains et « hospitaliers »: Table ronde.
Patrick Chemla, Simone Molina, Catherine Le Grand- Sébille,
Muriel Ferrier

16h30 Clôture de la journée
Josette Marteau-Château

Patrick Chemla, psychiatre et psychanalyste il anime l’association « La Criée » à Reims, il est membre du collectif des 39. Il est co-auteur de l’ouvrage collectif Asile publié sous sa direction (Erès), auteur de Expériences de la Folie (Erès).

Catherine Le Grand-Sébille, socio-antropologue, elle est co-auteur de l’étude Parents de grands adolescents et jeunes adultes hospitalisés en psychiatrie. Quels vécus? Quels besoins? Quelles violences? Quels soutiens ?

Simone Molina, psychologue clinicienne et psychanalyste à l’hôpital de Montfavet.

Muriel Ferrier psychologue clinicienne au centre hospitalier de Niort.

Josette Marteau-Château psychologue clinicienne au centre hospitalier Henri Laborit, présidente du Collège Régional.

Références filmiques et documentaires:
Vol au dessus d’un nid de coucou de Milos Forman. Sortie en France 1976
Un monde sans fous ? de Philippe Borrel diffusé sur France 5, le 13 avril 2010.
Le livre d’entretiens complément du film Un monde sans fous ? Publié aux éditions du champ social.

Vous pouvez copier-coller le bon ci-dessous et le renvoyer à :

Maryline Auvinet-Gessé
2 Chemin de Regombert
86340 Nouaillé-Maupertuis

Renseignements :
Josette Marteau-Château
CMPEA, 7 Allée Martin Luther King
86000 Poitiers
Tel. : 05 49 01 40 21

Nom :………………………………………
Prénom :……………………………………
Adresse :……………………………………………………………………………..……
……………………………………………..
Code Postal :………………………….……
Ville :………………………………………
Tél. : …………………..……………………
Courriel:……………………..…………..…
Profession :…………………………………

TARIFS

Adhérent du Collège Régional.. 15 €
Non adhérent :………………. . 40 €
Demandeur d’emploi (attestation
ASSEDIC du mois en cours)…..……. 10€
Étudiant < 26 ans……………… 10€ Ci-joint un chèque de… …… ………..€ à l’ordre du Collège Régional Poitou-Charentes des Psychologues de la FPH. Date : Signature :

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>MC2, Grenoble 20 novembre 2010 : "HOME"

Où l’homme trouve-t-il sa maison ?

samedi 20 novembre :

Journée d’étude autour du spectacle Home

– Rencontre et table ronde Théâtre et psychiatrie
– Projection du film La moindre des choses de Nicolas Philibert

Home. Ils parlent par bribes, de tout et de rien ces personnages dont peu à peu les souvenirs, les associations, les allées et venues et les répliques nous amènent à penser qu’ils sont vraiment intelligents mais déboussolés quand même. On ne sait où ils veulent en venir et il serait bien de se laisser guider dans ce dialogue décousu en n’essayant pas de comprendre trop vite. Mais ils sont là, ils ont trouvé un endroit, un asile, où ils se sentent à l’abri. A l’abri de l’extérieur, d’eux-mêmes ? Et ils nous en disent un peu sur leurs petites défaillances, beaucoup sur les choses que nous avons en commun : la folie, permanente virtualité d’une fêlure, d’une fragilité inhérente à notre condition humaine d’êtres parlants.

Le théâtre s’en origine depuis la tragédie grecque. Les artistes, réalisateurs, comédiens, metteurs en scène, nous rendent plus proches de ces déchirements. Et les différents acteurs de la psychiatrie, participent avec chaque patient à la recherche d’une solution particulière qui corresponde à sa logique. Il saura alors un peu plus ce qui l’agite et un peu mieux où il habite.

Intervenants : Claude Léger, psychiatre des Hôpitaux, responsable du secteur de psychiatrie générale de Levallois-Perret (92) et psychanalyste, membre de l’EPFCL-France > Paul Machto, psychiatre et psychanalyste, membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire > Marie-Philippe Deloche, psychiatre, directrice de l’Hôpital de Jour de la MGEN (Grenoble) > Jean-Claude Exbrayat, psychiatre, responsable du service d’addictologie au Centre Hospitalier Alpes Isère > Anne Meunier, psychanalyste > Marie-Clotilde Aubrier, comédienne, intervenante au Centre Hospitalier Alpes Isère > Nicolas Philibert, cinéaste > Chantal Morel et l’équipe artistique de Home

Programme :
11h-11h30
Introduction : Chantal Morel > Anne Meunier
11h30-13h
Contributions : Claude Léger > Paul Machto > Jean-Claude Exbrayat > Marie-Philippe Deloche
13h-14h Pause
14h-16h30
Projection du film La moindre des choses de Nicolas Philibert, en sa présence

Home

De David Storey
Adaptation française Marguerite Duras
Mise en scène Chantal Morel

Plus d’informations sur les spectacles et les activités de la MC2: sur http://www.mc2grenoble.fr ou au 04 76 00 79 00

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>Appel au monde de l'art et de la culture 

Collectif des 39
contre La Nuit Sécuritaire

« Quelle Hospitalité pour la Folie ? »

« Sans la reconnaissance de la valeur humaine de la folie,
c’est l’homme même qui disparaît. »
François Tosquelles.
 
Nous adressons à la société tout entière la question « quelle hospitalité pour la folie? » quand une future loi, véritable insulte à la culture, s’attaque à l’essence même du lien social, en désignant à la vindicte de tous et en menaçant des personnes plus vulnérables que dangereuses.

Si cet appel s’adresse au monde de l’art et de la culture c’est parce que pour nous la folie, en tant que part indissociable de l’humain, est fait de culture.  
À ce titre, le combat pour une hospitalité pour la folie n’est pas qu’une affaire de spécialiste : elle doit se mener aussi sur le terrain culturel.

Le monde de l’art et de la création culturelle nous semble le mieux placé -n’est-ce pas son rôle?- pour résister à l’attente normative et interroger le monde sur sa part de folie, individuelle ou collective.

Chaque artiste, chaque intellectuel ou acteur culturel, s’engage dans une recherche originale, dans des propositions toujours risquées, des remises en jeu des repères consensuels, à la croisée de l’intime et de l’Histoire. 

Chaque artiste invite l’autre dans cette autre lecture, et en toute liberté.
En tant que soignants, nous pensons devoir toujours avoir en perspective, dans nos pratiques, dans nos institutions, la nécessaire rencontre de la folie et de la culture.

La mise en jeu de l’inventivité, la création, le partage des oeuvres d’art, sont des éléments essentiels dans les accompagnements thérapeutiques auxquelles nous sommes attachés, mettant les traitements médicamenteux à leur juste place et pas comme unique réponse.

Appel  à la culture, comme liant créatif de l’intime et du social… le lieu d’un maillon essentiel, à restaurer dans la réflexion actuelle pour penser l’accueil de l’insensé, pour penser la question de la folie, de la maladie et du sort qu’on lui réserve.

Nous souhaitons avoir votre concours, votre engagement pour préserver cette part énigmatique de l’humain, sa part de folie.

Un projet de loi « sur les modalités de soins psychiatriques » sera discuté cet automne au Parlement : il détourne le terme de « soins » et représente une grave attaque contre les libertés individuelles ; il risque d’altérer profondément la relation entre patients et soignants.

Ce projet de loi instaure des « soins sans consentement », y compris « en ambulatoire », c’est-à-dire en dehors de l’hôpital, au domicile. Il remplace les modalités actuelles d’hospitalisation et d’alternative à l’hospitalisation en promouvant toujours plus de contrôle et de répression.  

Tout un chacun est aujourd’hui concerné par cette réforme. En effet, la notion de « santé mentale » utilisée notamment par les rapports gouvernementaux semble étendre le domaine des troubles psychiques à la simple exacerbation des sentiments, des émotions, aux peurs, à la tristesse, aux énervements, aux angoisses, aux ressentis et vécus douloureux, liés à des situations précises telles que le travail, une rupture, un deuil. De plus, l’évocation du « trouble de l’ordre public », entraînant la mise en place de soins psychiatriques sans consentement, comporte un risque de dérive pour les libertés individuelles. 

Ce texte s’inscrit dans le droit-fil du discours de Nicolas Sarkozy à l’hôpital d’Antony le 2 décembre 2008. Désignées par le Président de la République comme potentiellement criminelles, en tout cas potentiellement dangereuses, toutes les personnes qui présentent des signes peu ordinaires de souffrance psychique, quelle que soit leur intensité, se trouvent en danger de maltraitance. Se saisissant de dramatiques faits-divers, pourtant exceptionnels, le Président a laissé libre cours à son obsession sécuritaire. Cette orientation a déjà donné lieu à plusieurs textes réglementaires qui aggravent les conditions de l’hospitalisation et poussent vers plus d’enfermement, plus d’isolement.

Le projet de loi qui crée les « soins sans consentement » y compris à domicile, est un saut dans l’inconnu. Il représente un risque de dérive particulièrement inquiétante car sont instaurés :
        
– des soins sous la menace d’une hospitalisation forcée en cas d’absence aux consultations ;
        
– des soins réduits à la surveillance d’un traitement médicamenteux, nouvelle camisole chimique 

– des soins où la rencontre, la confiance dans la relation, la patience, la prise en compte de la parole, sont oubliées ou accessoires.

Nous savons bien que c’est la peur qui génère des réactions violentes chez certaines personnes ; or, cette loi va organiser la peur des patients et la peur chez les patients.

Ce texte porte atteinte à  la confiance entre le patient et le soignant : celui-ci représentera en permanence une menace, une surveillance sur la liberté d’aller et venir du patient, car il lui incombera de signaler toute absence aux consultations et aux visites, sous peine de sanctions . Le préfet, saisi par le directeur de l’hôpital, enverra les forces de l’ordre pour contraindre la personne à une hospitalisation. Le malade devenant « un contrevenant », il s’agit donc de nous exclure de notre métier de soignant. 

Cette politique accompagne une dérive, depuis une quinzaine d’années, des pratiques psychiatriques : carence des formations, augmentation des isolements, retour des techniques de contention, primauté des traitements médicamenteux sur l’écoute, la relation, l’accueil des personnes en souffrance psychique. Ce projet de loi, avec la conception des troubles mentaux qu’il implique, va amplifier ces pratiques d’un autre âge.

Un collectif s’est constitué en décembre 2008, en réaction immédiate à ce sinistre discours présidentiel : « Le Collectif des 39 contre La Nuit Sécuritaire ».

Se sont ainsi réunis des professionnels de la psychiatrie qui entendent résister à cette orientation inacceptable, à ces pratiques asilaires et aux nouvelles dérives scientistes.

Dans de nombreuses équipes, dans de nombreux services et secteurs psychiatriques, des artistes, des philosophes apportent leur concours aux professionnels pour mettre en œuvre avec les patients des espaces de création, d’initiatives, d’événements artistiques, joyeux, sérieux, inventifs, troublants, surprenants, en apportant de la vie, du désir là où la vie, le désir ont tendance à s’évanouir.

Des expositions, des créations théâtrales, des événements musicaux, des créations vidéos, des musées d’Art brut, des initiatives radiophoniques et par Internet se sont multipliés, donnant à voir la fécondité des productions originales possibles, enrichissant ainsi des thérapeutiques diversifiées.

Nous devons créer les conditions d’un accueil humain de la douleur morale, du désarroi psychique, des discours énigmatiques et délirants.

La possibilité de penser le soin et la folie est aujourd’hui mise en cause. Nous entendons bien résister à ce glissement vers le pire, et pour cela nous avons besoin de vous.

Nous ne voulons pas d’un tri des êtres humains en fonction de leur valeur utilitaire.
Nous ne voulons pas d’un retour au grand renfermement.
Nous ne voulons pas de l’internement à domicile.

«On juge le degré de civilisation d’une société
 à la manière dont elle traite ses marges, ses fous et ses déviants.»

Lucien Bonnafé
 
Votre signature nous serait d’une aide précieuse. 
SIGNER LA PETITION

LISTE DES ARTISTES SIGNATAIRES

« Qui cache son fou, meurt sans voix.» (Henri Michaux, « L’espace du Dedans »)

Laure Adler, journaliste, écrivain
Agnès B. , styliste, Paris
Jacques Albert-Canque, metteur en scène, Bordeaux
Anne Alvaro, comédienne
Jacques André, réalisateur, metteur en scène, plasticien, Paris
Cécile Andrey, metteur en scène (Vosges), co-fondatrice du festival «La tête ailleurs»
Jan Arons, peintre, Vallabrègues
Nurith Aviv, cinéaste
Claude Attia – comédien, Avignon
Pascal Aubier – cinéaste
Raymond Bellour, directeur de recherche émérite au CNRS
Joseph Beauregard – cinéaste documentariste
Jacqueline Blewanus, peintre, Vallabrègues
Corinne Bondu – formatrice- réalisatrice- productrice
Philippe Borrel, cinéaste – documentariste
Rony Brauman – ancien président de Médecins sans frontière.
Geneviève Brisac, écrivain, éditrice
Françoise Brunel
Claude Buchwald – Metteur en scène
Rodolphe Burger – musicien
Michel Butel, écrivain, journaliste.
Olivier Cadiot – écrivain
Marco Candore, comédien.
Laurent Cantet – cinéaste
Maréva Carassou, comédienne,
Arlette Casas, responsable communication Université Montpellier 2
André Castelli – conseiller général du Vaucluse
Carmen Castillo, cinéaste
Claude Chambard, écrivain, éditeur
Charb, dessinateur, Charlie Hebdo
Guigou Chenevier, Musicien compositeur
Isabelle Chevalier, musicienne
Françoise Clavel, créa- costumes, Paris
Françoise Cloarec – peintre et écrivain
Dominique Conil – écrivain
Michel Contat, chercheur CNRS émérite
Compagnie Les Acidus, comédiens
Patrick Coupechoux, écrivain, journaliste
Christine Dantaux – galériste socialiste – Pernes les Fontaine
Marie Darrieussecq – écrivain
Marcelo De Athayde Lopes, danse thérapeute
Valérie de Saint-Do , Rédactrice en chef de la revue Cassandre/Horschamp
André Debono, peintre (Nîmes)
Christine Deroin – écrivain
Martine Deyres, cinéaste, Besançon
Marcial Di Fonzo Bo, comédien et metteur en scène
Alain Didier-Weill, écrivain, auteur de théâtre
Claire Diterzi, chanteuse et compositrice
Annick Doideau, peintre (Paris)
Catherine Dolto, éditrice
Suzanne Doppelt, écrivain
Patrice Dubosc – cinéaste
Françoise Ducret, Peintre
Jean Pierre Ducret – Président du C.A. du Théâtre de Cavaillon
Denis Dufour, compositeur, Paris
Sophie Ernst, Paris, philosophe
Jean Michel Espitallier, poète
Christine Fabreguettes – artiste plasticienne Vaucluse
Serge Fauchier, peintre (Perpignan)
Stéfano Fogher – musicien, comédien
Patricia Geffroy, Animatrice ateliers d’écriture
Hala Ghosn, comédienne, metteur en scène, Paris
Sylvie Giron – danseuse, chorégraphe
Esther Gonon secrétaire générale de la Scène Nationale de Cavaillon
Jean Michel Gremillet – directeur de la Scène Nationale de Cavaillon
Angele Grimaldi, cinéaste
Jean Louis Guilhaumon – Maire de Marciac- Fondateur du Festival Jazz In Marciac.
Sabina Grüss –sculptrice
Mariette Guéna
Patrick Guivarch, responsable des cinémas UTOPIA d’Avignon
Pierre Helly – metteur en scène
Catherine Herszberg – journaliste, écrivain.
Gérard Haddad écrivain
Charlotte Hess, danseuse, chorégraphe. Animatrice sur Radio libertaire, Paris.
Stéphane Hessel, ambassadeur de France
Olivier Huet
Marie Jaoul de Poncheville, cinéaste, Paris
Jeanne Jourdren, médiatrice culturelle, Auray
Marie José Justamond, directrice artistique, directrice du festival Les Suds, à Arles
Charles Kalt, plasticien (Strasbourg)
Leslie Kaplan – écrivain
Daniel Kupferstein, réalisateur
Danielle Lambert, poète, auteure de proses brèves, Paris
Monique Lauvergnat Maire – adjointe à la Culture 84 Le Thor
Linda Lê – écrivain
Fred Léal, écrivain
Agnès Lévy, peintre
Isabelle Lèvy-Lehmann, photographe, Paris
Jean Pierre Lledo, cinéaste, Paris
Frédéric Loliée, comédienne, metteur en scène
Jean-Daniel Magnin, Secrétaire général du Théâtre du Rond Point
Thibault Maille, compositeur
Clotilde Marceron – musicienne, Cavaillon
Elissa Marchal, artiste peintre
Maud Martin, réalisatrice, Tours
Jacques Martinengo, artiste plasticien, 26- Dieulefit
Ismérie Marzone Lévêque, chanteuse, comédienne, Toulouse
Britta Medus
Daniel Mesguich, comédien, metteur en scène, directeur du Conservatoire d’art dramatique de Paris.
Xavier Moine, artiste plasticien,
Marie José Mondzain, philosophe
Mario Moretti – galériste socialiste – Pernes les Fontaine
Valérie Mréjen, cinéaste
Yves Müller – artiste – photographe
Véronique Nahoum Grappe – anthropologue
Eric Nonn, écrivain
Paul Otchakovski-Laurens, éditeur
Yves Pagés, écrivain et éditeur (Ed. Verticales), Montreuil
Xavier Person, écrivain.
Nicolas Philibert, cinéaste.
Rosie Pinhas-Delpuech, écrivain, directrice de collection, traductrice
Jacques Rancière, philosophe
Claude Régy, metteur en scène
Georgette Revest, artiste peintre écrivain, Marseille
Jean Michel Ribes, auteur, metteur en scène, directeur du Théâtre du Rond-Point,
Christophe Ribet – comédien
Marcel Robelin, peintre (Nîmes)
Daniel Robert, Peintre
Patrice Rollet, co-rédacteur en chef de la revue Trafic
Pierre Rosenstiehl, mathématicien
Dominique Rousseau, auteur illustrateur Bédéiste
Valérie Rouzeau, Poète
Elizabeth Royer, galeriste
Caroline Sagot Duvauroux – peintre et poète
Lydie Salvayre – écrivain
Joshka Schidlow, critique de théâtre
Michèle Sébastia, Comédienne
Christine Seghezzi, réalisatrice
Meriem Serbah – actrice
Nicolas Sers, comédien, Paris
Emmanuele Scorceletti – photographe
Tristan Siegmann, photographe (Paris)
Anne Saussois, peintre (Paris)
Charlotte Szlovak, cinéaste, Paris
Dimitri Tsiapkinis, artiste chorégraphique, Tours
Catherine Vallon, Metteur en scène
Gérard Vallerey, écrivain et traducteur, Toulouse
Didier Vancostenoble, photographe, ancien directeur d’hôpital psychiatrique, 76 Tourvillela chapelle
Agnes Verlet, Ecrivain
Pascal Villaret, auteur, Alés
Elise Vigier, comédienne, metteuse en scène
Vanina Vignal, cinéaste
Véronique Widock, comédienne
Martin Winckler, écrivain
Mâkhi Xénakis, sculpteur
Catherine Zambon – auteure de théâtre et comédienne

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>Nouvelle édition du Campus Solidaire sur le thème « Un monde sans fous »

Prochaine rencontre, le jeudi 4 novembre 2010 à 19h30

Nouvelle édition du Campus Solidaire sur le thème « Un monde sans fous », documentaire de Philippe Borel, avec la participation de Paul Machto, psychiatre et d’autres membres du « collectif des 39, la nuit sécuritaire », collectif en psychiatrie.

Rens. : 05 56 49 95 95 ou http://campussolidaire.blogspot.com

L’objectif du Campus solidaire et de permettre à tous d’accéder à la connaissance. Il propose d’associer le public à des travaux préparatoires (documents, petits films, enquêtes…). Les thématiques sont variées : citoyennté urbaine, psychanalyse et société, globalisation et développement durable, technologies, sciences et envrironnement… Le Campus solidaire est gratuit, ouvert à tous et sans inscription préalable.

► Campus solidaire – Bâtiment 25 rue des Terres Neuves à Bègles – Tramway ligne C arrêt Terres Neuves – Bus 11/24 arrêt Auriac.

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>La Ferme du Vinatier

La Ferme du Vinatier ?

Le service culturel du Centre Hospitalier Le Vinatier est une interface originale reliant l’hôpital à la cité, intégrée à la politique d’établissement dès sa création en 1997 et ouverte à tous les publics.

Les projets 2010-2011

Concert jazz de l’Arfi
« Concert jazz de l’Arfi» ORGANISE DANS LE CADRE DU FESTIVAL ECLATS D’ARFI LE 26 NOVEMBRE 2010 A 20H A LA FERME DU VINATIER De janvier à juin 2011, (…)
Le 26 novembre 2010

Du patient-modèle au patient modèle : portraits de gens
« Du patient-modèle au patient modèle : portraits de gens » Exposition photographique DU 16 SEPTEMBRE AU 17 DECEMBRE 2010 SUR LES GRILLES DU CH LE VIN (…)
Du 16 septembre 2010 au 17 décembre 2010

LE SITE DE LA FERME DU VINATIER

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